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YHWH (significations et fonctions)

Les quatre consonnes yod he waw he forment le « tétragramme », YHWH, qui est le nom ultime et propre de Dieu dans les Écritures (Gn 2,4 ; 4,26, cf. Dt 6,2-8. Plusieurs traductions en ont été proposées :

  • « Il souffle », « Il détruit », « Il désire ».
  • « Il est », ou encore au sens causatif « Il fait être » — autrement dit : « Il crée » (cf. Sg 13,1 qui oppose « celui qui est » à la création entière, semblant présupposer une création ex nihilo).
  • « L'Éternel ». L’épisode du buisson ardent présente en effet un jeu de mots sur la racine hyh « être, advenir, devenir », 'ehyeh ašer ’ehyeh : « je serai qui je serai » ou « je suis qui je suis », pour enter la substance même de l’alliance sur Dieu même : « je serai (ehyeh) avec toi » (Ex 3,12-15).  Cependant, l’interprétation du nom basée sur les variations données par Ex 3 décrivant l’existence divine passée, présente, future à égal degré ne peut être adoptée comme traduction systématique au fil des Écritures (cf. p. ex. Os 1,9 ; Dt 32,39 ; Is 41,4 ; 43,10).

La révélation de YHWH au buisson ardent

Le nom YHWH est lié particulièrement à la sortie d’Égypte marquée par la manifestation à Moïse devant le buisson ardent qui fait l’usage le plus développé du nom (Ex 3). 

Deux grandes lignes d'interprétations

En contexte, le Nom signifie que Dieu sera toujours présent à Israël :

  • « Je vous prendrai pour moi comme peuple et je serai pour vous comme Dieu, et vous saurez que c’est moi YHWH votre Dieu qui vous ai soustraits à la corvée d’Égypte » (Ex 6,7) —  formule maintes fois reprise en Jer et Ez.

Hors contexte, pris comme le nom propre de Dieu, le tétragramme a donné lieu à deux grands types d’interprétations

(1) Interprétation existentielle, ironique, minimaliste

Elle se fonde sur le texte massorétique et son interprétation grammaticale obvie de la forme inaccomplie.

  • La traduction littérale du Nom en Ex 3,14 est une tautologie : « Je suis qui je suis ».  S’y rattachent les →recensions d'Aquila et Théodotion, qui traduisent :  esomai hos esomai.

Elle prévaut dans le judaïsme traditionnel, qui pense que Dieu lui-même ne donne pas son nom, ineffable, et se dévoile en se voilant : on ne prononce pas Son Nom. La forme paronomastique aurait aussi une connotation d’indétermination (cf. Ex 4,13 : « envoie qui tu enverras » ; Ex 16,23 ; 1S 23,13 ; 2R 8,1, etc.), et donc de réticence divine à donner son nom (cf. Gn 32,30 : « Pourquoi me demandes-tu mon nom ? » ; Jg 13,18). Cette révélation est marquée d’une ironie profondément pédagogique. Le « nom » est tout ensemble cataphatique et apophatique, à la fois une réponse positive (Dieu accepte de se dire) et un refus de répondre (il se voile en se dévoilant). Il oblige à un déplacement de l’interlocuteur du monde des idées à celui des actes et de la réalité concrète, du sémantique ou du déictique, au pragmatique.

(2) Interprétation métaphysique, maximaliste

L’autre, plus métaphysique, reflétée dans le texte de la Septante, lit ici une proposition de type « sujet-copule-prédicat » :

  • Egô eimi ho Ôn (« Je suis l’Être / l’Étant »).  

Elle entend dans la formule l’affirmation que YHWH est le dieu qu’Israël doit reconnaître comme réellement existant (De Vaux), et voit dans l'épisode du buisson ardent le dévoilement de l’Être par excellence. Justifier cela en philologie hébraïque n'est pas simple. Pour ce faire, il faut :

  • attribuer exceptionnellement à la forme inaccomplie un sens accompli, voyant dans cette forme le résultat de l’effort du scribe pour interpréter l'antique nom de YHWH par la forme verbale hébraïque la plus proche possible, bien que celle-ci n’exprime plus l’aspect accompli de l’ancienne forme de parfait-présent yaqtul d’où viendrait le nom YHWH — ’ehyèh se traduit alors : « je suis » ;
  • interpréter la paronomase non comme indétermination ironique, mais comme totalisation ou intensification : comme dans Ex 33,19 « Je fais grâce à qui je fais grâce » ou Ez 12,25 : « je dirai la parole que je dirai… et elle s’accomplira ») ;
  • identifier la première personne du singulier de la proposition relative (’ašer ’ehyèh) comme une attraction du relatif par son antécédent, retrouver dans la proposition relative l’équivalent habituel d’un participe, et traduire correctement : « je suis l’existant » ;
  • voir dans l’ensemble de la phrase un équivalent de :  ’ani + participe présent (« Je suis YHWH », cf. Ex 6,2.6ss ; Ex 20,2 ; Gn 28,13 ; Os 12,10 ; 13,4 : « Je suis YHWH ton Dieu depuis le pays d’Égypte » ; Deutéro-Isaïe et Ez passim) — le choix des formes conjuguées paronomastiques se justifiant par le désir de faire un jeu de mot pour expliquer le Nom.

En réalité, comme le montre, dans l'œuvre de Thomas d'Aquin, l'articulation de la morale, de la mystique et de la « métaphysique de l'Exode » fondée sur Ex 3,14 (Gilson), ces deux grandes lignes d'interprétation ne se contredisent pas et se rejoignent au plus profond de l'expérience et de la pensée de ceux qui méditent le Nom...

Hypothèses sur l’origine et l’histoire

Un Dieu adopté par les Israélites ?
  • En dehors des Écritures, le nom d’Israël apparaît pour la première fois sur les stèles égyptiennes de Mérenptah et peut-être même sur la statue-piédestal de Ramsès II (13e s. av. J.-C.) : le nom contient le lexème théophorique « El » et non pas YHWH : il s’agit d’un peuple dont le dieu se nomme El ou Ilu comme à Ougarit.
  • On trouve le nom YHWH pour la première fois sur la stèle de Mesha (840 av. J.-C.), qui se réfère au Dieu israélite YHWH. Celui-ci est devenu le nom du Dieu national d’Israël semblable à ceux des dieux des autres peuples, par exemple Kemosch pour les Moabites (Jg 11,24).

→Bible et Archéologie XII : Stèles.

Un dieu d’origine sudiste ?
  • Selon ce qui est relayé par le texte, YHWH serait originaire des régions désertique du sud d’Israël : Séir ou Edom (Dt 33,2 ; Jg 5,4s et son // Ps 68,8s) ; Teman (cf. Gn 36, Jr 47,7.20 ; Am 1,11s) : Ha 3,3.
  • Sur le plan épigraphique, les inscriptions « YHWH de Teman » sur le plâtre de la forteresse du royaume de Juda à Kuntillet ‘Ajrud, au Nord-Est du Sinaï (ca 795-730/20 av. J.-C. selon Finkelstein et Piasetsky) signalent qu’au 8e s. YHWH était adoré comme une divinité du Sud ; l’invocation à « YHWH de Shomron » et à son Ashera au même endroit atteste peut-être de la vénération de YHWH comme Dieu du Sud par des voyageurs samaritains ou israélites. De même 1R 12,28 évoque « les dieux (sans doute un pluriel de dérision du scribe judéen rapportant cette histoire israélite) qui t’ont fait monter de la terre d’Égypte » : depuis le 8e s. YHWH est vénéré en Israël.
  • Des inscriptions sur des stèles de l’époque de Ramsès II ou d'Aménophis III évoquent les nomades Shasu qui adoreraient le dieu YAHW, et résideraient en Edom, vers Séir (fouilles de Jabal Hamrat Fidan par Thomas Levy, 2004). Comme on ne trouve aucune motivation évidente à la connexion madianite de Moïse, il est raisonnable de voir en Ex 18 la trace d’une tradition historique : YHWH semble être le Dieu du clan de Jéthro, le beau-père de Moïse qui le lui aurait emprunté.
 YHWH adopté par Israël puis par Juda ?
  • Il a peut-être existé une tradition exodale sans la figure de Moïse. Ex 20,2 ; Dt 5,6 ; Dt 26,5-9 (parfois appelé « Credo historique ») présentent YHWH comme l’auteur de l’exode, sans que Moïse soit mentionné (cf. Am 2,10 ; Ps 76,7 ; 77,10 ; 78,12s.43-51 ; 111,4 ; 114,3-6 ; 135,8s ; 136,10.15) ; Moïse est très peu présent en dehors de l’histoire deutéronomiste (continuée dans Chr, Esd, Ne, et les reprises de Is 63,11s ; Mi 6,4 ; Jr 15,1 ; Ml 3,22 ; Dn 9,11.13 au sujet de la loi ou de la fonction d’intercesseur assumée par Moïse). Os 12 est le premier témoin de l’exode comme mémoire nationale : très péjoratif pour le cycle de Jacob (devenu cananéen fourbe : Os 12,4.8 ; révolté contre dieu : Os 12,4s) Jacob est lié à El ou Elohim tandis que YHWH se présente comme Dieu originaire d’Égypte.
  • La légende exodale semble être parvenue en Juda après 722 av. J.-C., et la figure de Moïse s’y être particulièrement établie à l’époque néo-assyrienne. Le récit de la naissance et de l’enfance de Moïse ressemble trop aux légendes de l’enfance de Sargon, fondateur de l’Empire assyrien, élaborées sous Sargon II, pour ne pas en être inspiré : les récits de Moïse comme personnage royal et prophétique auraient donc été mis en forme à la cour de Josias (622-609 av. J.-C.) pour faire pièce à l’idéologie royale néo-assyrienne. Au patriarche réduit en esclavage pour une simple femme (Os 12,13s) va être opposé le prophète de YHWH guidant et gardant son peuple. La relation entre Dieu et son peuple n’est pas de l’ordre de la généalogie, avec un patriarche originaire, elle naît d’une rencontre, médiatisée par un prophète.
  • Le récit de la vocation de Moïse et de la révélation de YHWH en Ex 3-4 est encadré par l’arrivée et le départ de Moïse à la « montagne de Dieu » ainsi que par deux mentions de Jéthro, beau-père de Moïse (Ex 3,1 ; 4,18) ; comme Ex 4,19, est un doublet « maladroit » d’Ex 4,18 qui s’emboiterait parfaitement avec Ex 2,23, on considère depuis Wellhausen l’ensemble de ce récit comme une insertion deutéronomiste du 6e s., bien mise en valeur par la suture exhibée par le scribe responsable. Dans ce récit, avant d’en venir à la tautologie fondamentale « Je suis qui Je suis », Dieu se révèle d’abord comme « Dieu de ton père », avec une apposition bizarre « Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac et Dieu de Jacob » — bizarrerie grammaticale qui suggère que les patriarches n’étaient pas nommés au départ (de fait, à Ougarit, les dieux des pères n’ont pas forcément de nom propre : cf. ’ilu ’ibi), et n’ont été introduits que dans un second temps, sans doute par les scribes responsables de la grande harmonisation des romans nationaux rivaux d’Israël et de Juda, à partir de l’Exil.

LE TÉTRAGRAMME YHWH : Verbaliser et prononcer le nom ?

Attestation de sa prononciation

Les quatre lettres formant le Tétragramme sont imprononçables sans vocalisation. Il a donc été vocalisé afin d’être prononcé.

Dieu lui même s’attarde sur ce nom devant Moïse en prescrivant de le répéter (Ex 3,12-15) ; le livre de Ruth (Rt 2,4) laisse entendre que le nom est d’usage courant. En effet, le nom de Dieu doit être sanctifié (Is 29,23 ; Ez 20,9 ; 14,22 ; 36,22 ; Mt 6,9) et glorifié (Jn 12,28 ; 13,31 ; 17,6-26) ; il peut également être profané (Lv 18,21 ; 19,12 ; 20,3 ; Am 2,7) ou blasphémé (Lv 24,16 ; Rm 2,24 ; 1Tm 6,1 ; Jc 2,7). Pour la réalisation de certains rites puissants, tels les exorcismes, le Nom devait être prononcé : sans l’invocation explicite du nom de YHWH, les démons ne partiraient pas.

Il faut donc insister sur le « en vain » dans l’interdit énoncé par Ex 20,7 : on ne doit pas prononcer le nom en vain. Il vise moins le fait de prononcer/profaner le Nom que le parjure. Le serment fait sous le nom de Dieu (par invocation de son nom) rend la promesse incorruptible, sous peine d’insulter le nom de Dieu, et c’est sans doute ce type de pratique que cible l’interdiction.

Hypothèses pour une prononciation restituée

La prononciation originelle du nom signifié par le Tétragramme est incertaine, mais on peut faire une approximation. La construction de noms propres à partir de la racine abrégée du nom divin (noms théophores) montre que la population connaît la verbalisation de YHWH :

  • Yeho- ou Yo- (Yehoshoua pour Josué, Yoram pour Joram) ;
  • sous une autre forme, Yahou, Yaho ou Yaw (Yeremyahou pour Jérémie) ;
  • À d’autres fins, la forme Ya(h) se rencontre également dans le texte biblique (Ex 15,2 ; Ps 68,5.19) pour des textes poétiques et laudatifs : Alléluia=Louez Yah, ou Louez YHWH (Ps 104,35).
  • 4Q120, fragment grec du Lévitique (Lv 26,2-16) présente la forme iaô, pour translittérer le trigramme hébraïque YHW.

Yahweh ou Yahvé sont les reconstitutions les plus communément admises. « Jéhovah » provient d’un placage approximatif des voyelles du Qeré Adonaï (hatef patakh, pris comme shewa puis patakh puis qameç) et des consonnes du Ketiv YHWH. Cette vocalisation curieuse a été popularisée en particulier dans les traductions anglaises de William Tyndale, de la King James Version ou de la Bible de Genève.

La réticence traditionnelle à prononcer le nom divin

La tradition assure cependant que ce nom ne pouvait être prononcé hors de l’enceinte du Temple, en dehors on disait Adonaï (Maimonide Mishneh Torah  14,10 (sur les prières et bénédictions) ; cf. b. Kiddushin 71a). Le Nom ne serait donc plus prononcé depuis la disparition du Saint des saints.

Il semble que l’évitement du nom soit un processus engagé antérieurement. La tradition juive a cessé peu à peu de le prononcer en lecture publique (sans doute au moment de la période perse) en prenant le détour du titre : Adonaï (Mon Seigneur) ou Elohim (Dieu/x). Cette pratique juive consistant à remplacer ce Nom par une désignation (en particulier : là où le Ketiv YHWH apparaît, lire le Qeré : SeigneurAdonaï ou Kurios ; mais aussi remplacer « Dieu » par « ciel » ou « cieux » dans des expression comme « royaume de Dieu ») pour la lecture du texte hébreu dans la synagogue se retrouve dans la Septante mais aussi dans de Nouveau Testament (Ac 2,21 ; Rm 10,13) ou dans les targums avec la substitution de Hadavar (la parole) pour le nom divin.

Continuant une tendance pieuse d’évitement du Nom, dans le judaïsme contemporain, beaucoup évitent non seulement le tétragramme, mais même ses substituts traditionnels. Ils disent : Hašem : Le nom (cf. Lv 24,11). Ces deux termes sont utilisés dans la conversation courante.

Position ecclésiastique et usage dans La Bible en ses traditions
  • Vatican Piété, à propos les traductions liturgiques :  le nom du Dieu tout-puissant exprimé par le tétragramme hébreu et rendu en latin par le mot Dominus doit être rendu dans les langues vernaculaires par un mot de sens équivalent.
  • Congrégation vaticane pour le Culte divin Lettre  aux Conférences épiscopales du monde entier (29 juin 2008), rappelle qu’on ne doit pas appeler Dieu « Yaweh » et que ce nom doit être effacé dans la liturgie. Le tétragramme YHWH a toujours été tenu pour imprononçable, afin d’exprimer l’infinie grandeur et majesté de Dieu, et a toujours été remplacé, dans la lecture de l’Écriture sainte, par un autre nom: en hébreu Adonaï, en grec Kyrios, en latin Dominus, qui tous signifient Seigneur. Éviter de prononcer le tétragramme du nom de Dieu, de la part de l’Église, a donc des motifs propres : rester fidèle à la tradition de l’Église, qui est, depuis le début, que le tétragramme sacré n’a jamais été prononcé dans le contexte du christianisme, ni traduit dans aucune des langues dans lesquelles la Bible a été traduite.

Dans la mesure où la philologie historique nous assure que le Nom fut bel et bien prononcé dans l'Antiquité, nous ne plaquons pas sur notre traduction du texte de M l'usage pieux et liturgique de Kurios ou Dominus et préférons conserver au tétragramme simplement translittéré YHWH toute son énigme. Nous traduisons les équivalents donnés en G (Kurios/Seigneur, le plus souvent, parfois Theos/Dieu) et en V (souvent Dominus/Seigneur, mais parfois simplement il ou qui, par souci latin d'élégance, en les formattant en petites capitales et en les « taggant » « Nom divin », pour que le lecteur sache immédiatement que le Nom mystérieux gît dans l'Ur-text.

LE TÉTRAGRAMME YHWH en signe efficace, ou : le nom de Dieu comme un artefact.

Le processus d’invocation de la présence divine en oralisant son nom vaut également pour le signe écrit : si le nom est sacré, le signe qui y renvoie le devient automatiquement. Aussi, le tétragramme est nettement distingué dans le texte, le plus souvent écrit en caractères paléo-hébreux, isolé du texte qui l’entoure, ou écrit en lettres carrées. Jusque dans la littérature juive en grec, le tétragramme reste écrit soit en paléo-hébreu, soit en hébreu carré. Toujours pour isoler les caractères et les rendre plus signifiant encore, ceux-ci peuvent être tracés avec une encre de couleur différente, par exemple pour certains manuscrits de Qumrân (11Q22).

La combinaison des quatre caractères devient un signe autonome et puissant, ce signe devenant lui même une forme signifiante. Composer cette forme devient un acte rituel, et le tétragramme en premier lieu (et les nomina sacra plus généralement) contraint le scribe à des règles strictes. Celui-ci doit se préparer au tracé des lettres ; une fois le tracé commencé, il ne peut être interrompu, sous aucun prétexte ; en cas d’erreur, aucun repentir n’est possible. Le nom de Dieu ne peut être effacé, Il doit être entouré pour être désacralisé et le support, devenu inutilisable, entreposé dans la gueniza (remise de la synagogue).

Les textes usés devenus impropres à la lecture publique pour cause d’usure ne peuvent être jetés ni détruits car en plus de la parole divine y sont inscrits les noms de Dieu. Il sont alors également entreposés dans la gueniza.

Le nom inscrit sur son support en fait donc un artefact sacré. Les tephillins (les phylactères), petits coffrets contenant de petits rouleaux des Écritures que certains juifs (rabbiniques) fixent avec des lanières de cuir sur leur front et leur bras au moment de prier (Ex 13,9 ; Dt 6,8 ; 11,18), sont un exemple éloquent de ce processus. Le texte devient un artefact de haute valeur sacrée qu’il convient de porter au plus près de sa chair, comme pour réaliser littéralement l’essence de l’alliance par le nom divin énoncée près du buisson à Moïse (Ex 3,12 : « Je serai avec toi »).

Il est à noter que les scribes chrétiens antiques prolongèrent ce type d'usages : 

  • Origène semble suggérer que le Nom divin était écrit en vieux caractères hébraïques dans les meilleurs manuscrits de la Septante (Migne, PG 12 1104 [B]).
  • JérômeProl. galeatus ; Ep. 25 à Marcellus rapporte que du fait de cet usage, certains lecteurs non avertis lisaient le Nom YHWH en hébreu comme des majuscules grecques ΠΙΠΙ (Pi Iota Pi Iota), incorrectement, de gauche à droite :  « Pipi » !

HISTOIRE DE LA RÉCEPTION

Présent sur de nombreuses œuvres→ liturgiques chrétiennes (en particulier dans les gloires, au sommet de retables baroques), le tétragramme n'en finit pas d'inspirer les artistes, comme en témoigne une œuvre récente de Eli Petel Might this thing be?→ [Pourrait-ce être ?], Perles et fil, 2007, Dvir Gallery, Tel Aviv, Israel.