La Bible en ses Traditions

Jacques 1,22–27

Byz V TR Nes
S

22 Et devenez

Vsoyez les réalisateurs de la parole et non seulement des auditeurs vous abusant vous-mêmes

22 ...

22 N’écoutez pas seulement, obéissez ! Mt 7,24-27 ; Lc 8,21 ; 1Jn 3,17s ; Rm 2,13

23 parce que si quelqu’un est auditeur de la parole et non [son] réalisateur

il est semblable

Vsera comparé à un homme observant le visage de sa naissance dans un miroir

23 ...

24  il s'est en effet observé lui-même

Vil s'est en effet observé et il est parti

et aussitôt il a oublié quel il était.

24 ...

25 Mais celui qui a porté

Vaura porté son regard dans la loi parfaite, la loi de liberté

Vdans la loi parfaite de liberté et qui est demeuré

Vsera demeuré en elle

étant devenu

Byz TRcelui-ci, étant devenu

Vdevenu non un auditeur oublieux mais le réalisateur de l'œuvre

celui-là sera heureux dans son entreprise.

25 ...

25 La joie du service Jn 13,17

26 Et si quelqu’un parmi vous

V Nesquelqu’un pense être

Vqu'il est pieux

en ne contenant pas sa langue mais en trompant

Vdétournant son coeur, 

vaine est sa religion.

26 ...

26 Tenir sa langue Jc 3,2s

27 La religion pure et sans tache devant le Dieu et Père est celle-ci

visiter les orphelins et les veuves dans leur tribulation ;

se garder soi-même,

Vse garder, sans tache, de ce monde.

27 ...

Réception

Arts visuels

1–27 ici commence l'épître de Jacques Représentations majeures de saint Jacques le Mineur L'auteur de l'épître a été identifié par la tradition avec l'apôtre Jacques le Mineur. En voici quelques images remarquables :

Membre de la famille du Seigneur

Lucas Cranach l'Ancien (1472-1553), La sainte parentèle (technique mixte sur chaux, Wittenberg, 1509), retable, panneau central : 100,4 × 121,1 cm ; volets : 40 × 120 cm ; 1398

Städel Museum, Frankfurt-am-Main (Allemagne) © Domaine public→

Parmi les douze autres apôtres

Giampietrino (1495-1549), Dernière Cène (huile sur toile, ca. 1520 ; d'après Léonard de Vinci [1452-1519], La dernière Cène [1495-1498), 298 cm x 770 cm

Royal Academy of Arts, Londres (Angleterre, Royaume-Uni) © Domaine public→

Cette copie complète a été la principale source de restauration de l'original sur vingt ans (1978-1998). Il comprend plusieurs détails perdus tels que les pieds du Christ, les carafes en verre transparent sur la table et les motifs floraux des tapisseries qui décorent l'intérieur de la pièce. Bartolomeo Sanese mentionne pour la première fois en 1626 qu'il était suspendu à Certosa di Pavia, un monastère situé près de Pavie, en Italie, mais il est peu probable qu'il ait été réalisé pour ce lieu. À une date inconnue, le tiers supérieur de l'image a été coupé et la largeur réduite. Giampietrino aurait collaboré étroitement avec Leonardo lorsqu'il était à Milan. Une très belle copie de cette peinture est exposée à l'abbaye de Tongerlo à Westerlo, près d'Anvers, en Belgique.

Angelo de Rossi (1671-1715), Jacobus Minor (marbre, 1710-1711), 424 cm

nef de Saint-Jean-de-Latran, Rome (Italie) ; photo : Jastrow © CC BY 2.5→

Communion spectaculaire

Niccolò Bambini (1651-1736), Communion de saint Jacques (huile sur toile, 1722-1723), presbytère, mur de droite, centre

église Saint-Eustache-et-ses-Compagnons-martyrs, Venise (Italie) © Domaine public→

Le Ressuscité apparaît à son apôtre et rompt le pain avec lui (cf. le récit de  Jérôme Vir. ill. 2, censé venir de l'évangile des Hébreux).

Colonne de l'Église

Anonymes, Jacques parmi les apôtres (sculpture sur pierre, déb. 13e s.), portail sud

cathédrale de Chartres (France) © D.R. Photo Mary Ann Sullivan→ 

James a en main un bâton.

Évêque et docteur

Paolo Veronese Cagliari (1528-1888), Saint Jacques (huile sur toile, ca. 1578), 200 x 85 cm

Burghley House Collection, Lincolnshire (Angleterre, Royaume-Uni) © A Graduate of Pomona→

Cette représentation de saint Jacques avec ses attributs d'évêque figure sur l'un des volets de l'orgue de l'église San Jacopo à Murano — l'autre portant la figure de saint Augustin.

Hagiographe

Domenikos Theotokópoulos, dit Le Greco (1541-1614), L'apôtre Jacques le Mineur (huile sur toile, 1610-1614), 100 x 80 cm

Museo de El Greco, Tolède (Espagne) © Domaine public→

D'une main Jacques porte le livre symbole de son statut d'auteur inspiré. c'est la seule concesssion à la tradition, car le Greco adapte le sujet à son maniérisme et le dépouille de ses attributs iconographiques traditionnels. 

Orientalisme...

James Tissot (1836-1902), Jacques le Mineur (aquarelle et graphite sur papier vélin gris, 1886-1894), 30,6 x 23,5 cm, 00.159.237

Brooklyn Museum, New York (États-Unis) © Domaine public→

Jacques, à l'image d'un Christ au jardin des oliviers, prie à genoux les bras étendus. Peut-être est-ce une référence à Hégésippe de Jérusalem (110-180) qui rapporte que Jacques passait tellement de temps à genoux qu'il les avait aussi durs que ceux d'un chameau. 

Littérature

23 il sera comparé à un homme observant le visage de sa naissance dans un miroir  La parole comparée au miroir : le « miroir » comme genre littéraire ? Dans ce verset, l'auteur compare celui qui écoute la parole sans la mettre en pratique à un homme qui se regarde dans un miroir.

Miroirs de mots ?

Le lien entre parole (éventuellement parole écrite et consignée dans un livre, d'où elle peut ensuite être proclamée) et miroir dans lequel on peut s'évaluer soi-même, a pu jouer un certain rôle dans la naissance du genre littéraire du speculum, ou « miroir », terme souvent employé dans le titre d'ouvrages d'édification religieuse et morale.

On songe en particulier au « miroirs aux princes », traités médiévaux destinés aux dirigeants pour leur rappeler leurs devoirs moraux et les valeurs chrétiennes qu'ils devaient incarner dans leur conduite personnelle et leur gouvernance. L'image du miroir, dans les deux cas, suggère auto-examen et engagement. Pour Jacques, le croyant doit mettre en œuvre la parole de Dieu ; pour les auteurs des « miroirs aux princes », le dirigeant doit traduire en actes les idéaux de justice, de piété et de vertu.

Les « miroirs aux princes »

Les « miroirs aux princes », apparus à l'époque carolingienne, s'inspirent des rois de l'Ancien Testament (Ézéchias, Josias, David et Salomon) et des empereurs chrétiens tels que Constantin ou Justinien pour offrir aux princes de cette époque des modèles à imiter.  Ils s’inscrivent dans une longue tradition littéraire. 

  • Dès l'Antiquité, des écrits traitent du comportement à adopter en tant que gouvernant, depuis les panégyriques de Sidoine Apollinaire jusqu’au livre V du De Civitate Dei d’Augustin et aux Etymologiae d’Isidore de Séville.
  • À l’époque carolingienne, période de rapprochement entre l'Église et l'État, ce genre de traités à l’intention des chefs laïcs apparaît. C’est le cas du Capitulaire de Herstal adressé à Charlemagne par le clerc Cathwulf ou du Tractatus de Liber de Virtutibus et Vitiis adressé par Alcuin au Comte de Bretagne Wido.
  • Sans remettre en cause la Réforme grégorienne établissant une séparation entre laïcs et religieux, sacerdoce et royauté à la cour capétienne, après la réconciliation des Capétiens avec la papauté la ferveur religieuse entraîne un regain d’intérêt pour la figure royale chrétienne, et c'est dans ce cadre que se diffusent les « mirois aux princes ».

Les plus célèbres Miroirs

Alors virent le jour les Miroirs les plus célèbres :

  • le Speculum Historiale et le Speculum Doctrinale de Vincent de Beauvais,
  • le Livre des vices et des vertus du frère Laurent.
  • Il faut également citer des traités didactico-moraux tels que le De eruditione filiorum regalium pour la reine Marguerite ou encore le De morali principis instructione pour saint Louis.
  • Le plus populaire d’entre eux est sans doute le De Regimine Principium, composé pour Philippe le Bel.

Il ne s'agit pas vraiment d'un genre littéraire, car ces Miroirs forment un ensemble d’œuvres sans unité formelle à proprement parler, mais avec une certaine unité de contenu par leurs prétentions morale, politique, religieuse et historiographique.

Anonyme, Page décorée avec armes de Guillaume de Cambrai, (pigments naturels sur codex imprimé, 15e s.)

dans Vincent de Beauvais, Speculum historiale, f.004, inc. 234, t. I, Bibliothèque Municipale→, Bourges

© CC Initiales →

Etienne Collault (16e s., 1523-1541 attesté), Jean de Salisbury discourant devant une foule, (pigments naturels sur parchemin, ca. 1520-1525),  35 cm x 23,5 cm

dans Jean de Salisbury, Policratique, f.003, n°1145, Bibliothèque Sainte-Geneviève→, Paris

© CC Initiales→