La Bible en ses Traditions

Psaumes 95,11

M
G S
V

11 Aussi je jurai dans ma colère :

— Ils n’entreront pas dans mon repos.

11 ...

11 et ceux-là n'ont pas connu mes voies

si bien que je jurai, en ma colère :

— ... si jamais ils pénétraient dans mon repos !

7–11 = He 3,7-11 11 Refus de l’accès à la terre promise, repos du peuple de Dieu Nb 14,30.34; Dt 12,9 Sion, repos de YHWH Ps 132,8.14

Réception

Intertextualité biblique

11b repos THÈME Le repos du septième jour ? Dans He 3,7-8 (jusqu'à He 4,9), le repos est interprété au sens spirituel : ce sera le sabbat définitif. Procédés littéraires Ps 95,11b

Littérature

11c si jamais ils pénétraient  (V) FRANÇAIS BIBLIQUE Comment rendre un sémitisme à l'école des tradcteurs antiques ? Plusieurs phrases hébraïques commençant par im  (= si) sous-entendent à la fois l'imprécation (« malheur à moi si... ») et le serment (« je jure que...  »). C'est le cas ici : 

  • ǎšer-nišbba'ttî b’appî ’im-yebō ’ûn’êl-menûḥātî. Littéralement : « [c'est pour ça] que j'ai juré dans ma colère : s'ils entreront dans mon repos »

Pour comprendre la phrase avec im / si, il faut expliciter l'intention au niveau de l'énonciation qui reste implicite en hébreu, et donc supposer quelque chose comme : « — Malheur à moi s'ils entrent un jour dans mon repos ! »

  • Vigouroux « Dans les formules du serment, les Hébreux employaient la particule "si", quand ils juraient qu'ils ne feraient pas une chose, et ils ajoutaient la négation, lorsqu'ils juraient qu'ils la feraient. Cette manière de s'exprimer vient de ce qu'ils omettaient, par euphémisme, l'imprécation, qui suit les jurements ; par exemple : "— Je veux qu'il m'arrive tel mal, tel malheur, si etc." » (4,229).

Dans le génie de leurs langues respectives, la Septante et la Vulgate reflètent au plus près les accents d’imprécation transmis par l’original :

  • ὡς ὤμοσα ἐν τῇ ὀργῇ μου | Εἰ εἰσελεύσονται εἰς τὴν κατάπαυσίν μου
  • ut iuravi in ira mea si intrabunt in requiem meam       

Plutôt que de simplifier à l'extrême en ne rendant que le sens, comme dans les traductions modernes (Histoire des traductions Ps 95,11), on imite ici la résignation de saint Jérôme à la traduction latine traditionnelle de la Septante, qui elle-même imitait le plus littéralement possible l'hébreu (cf. Comparaison des versions Ps 95,11), en transposant la menace contenue dans la formulation hébraïque. Cf. Christophe Rico, Le traducteur de Bethléem. Le génie interprétatif de saint Jérôme à l’aune de la linguistique, (Lectio divina), Paris : Cerf, 2016.

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Comparaison des versions

11 V—IUXTA HEBR. | V— IUXTA LXX En révisant le psautier latin selon la Septante, Jérôme a conservé l'hébraïsme, en modifiant seulement la conjugaison du verbe :

  • VL: Si introierint in requiem meam.
  • V—IUXTA LXX : si intrabunt in requiem meam. →V—Sixto-Clementine s'en tient à ce toilettage. 

En traduisant pour lui-même à partir de l'hébreu, qui utilise ici une tournure condensant imprécation et serment (Littérature Ps 95,11c), saint Jérôme ne retient pas la solution qui le précédait. Il simplifie la syntaxe calquée sur l'hébreu via le grec par la version latine précédente :  

  • et iuravi in furore meo ut non introirent in requiem meam [et ils ne connaissent pas mes voies | et j'ai juré dans ma colère qu'ils n'entreraient pas dans mon repos].

Frontispice de la bible Polyglotte d’Alcalà→ (1514-1517), (gravure sur bois) © Domaine public