La Bible en ses Traditions

Ecclésiastique 24,18–22

G
V
S

18   Ø

18  comme le palmier je me suis élevée à Cadès

et comme la roseraie de Jéricho 

18  ... 

19 Venez à moi, vous qui me désirez

et de mes produits rassasiez-vous

19 comme le bel olivier dans les champs

et comme le platane au bord de l'eau sur la place, je me suis élevée ;

19  ...

20 car mon souvenir est plus doux que le miel

et mon héritage, plus qu'un rayon de miel !

20  telle le cinnamome et l'aspalte aromatique j’ai exhalé un parfum

comme une myrrhe de choix j'ai exhalé la suavité d'un parfum

20 ...

21 Ceux qui me mangent auront encore faim

et ceux qui me boivent auront encore soif.

21 et comme le storax, comme le galbanum, comme un onguent et comme un suc

et comme le liban non incisé, j'ai parfumé mon habitation

et comme un baume non mélangé, mon odeur ;

21 ...

22 Celui qui m’obéit n’éprouvera pas la honte

et ceux qui agissent par moi ne pécheront pas.

22 moi, comme un térébinthe j'ai étendu mes rameaux,

rameaux d’honneur et de grâce ;

22 ...

Réception

Philosophie

21 Profondeur de la Sagesse qui échappe toujours au sage

  • Levinas Nations « Voilà, derrière la raison, à logique universelle, la sagesse qui toujours l'écoute, mais aussi l'inquiète, et parfois la renouvelle. Derrière la raison, à logique universelle, la sagesse qui n'a ni méthode ni catégorie arrêtée. Ce n'est pas la sérénité : le sage n'est jamais assez sage. Sagesse comme liberté de la raison, sinon libérée de raison. Elle incombe précisément à l'unicité de celui qui pense, comme si, par-delà toute contingence, son identité, logiquement injustifiable, et indiscernable, de monade, était élue. Sagesse comme intelligence de l'unique et de l'élu. En accord avec l'antique croyance d'Israël en la fonction positive qui revient à l'unicité du je dans la découverte infinie des vérités de la Thora, au point de penser qu'une personne en moins dans le monde signifie une vérité de la Thora en moins, perdue pour toute éternité » (207-208).

Contexte

Milieux de vie

18b la roseraie de Jéricho FLORE Rose de Jéricho Deux espèces pouvant correspondre aux caractéristiques de la rose de Jéricho présentée dans la Bible ont été retenues par les botanistes :

  • le laurier-rose
  • la rose de Phénicie.

Remarque : la plante Anastatica hierochuntica, boule desséchée capable de reverdir et fleurir dès qu’on lui donne de l’eau, et qui est appelée communément « rose de Jéricho » aujourd'hui, n’est pas la rose de Jéricho de la Bible.

Nerium oleander

Photo : Jean Tosti, 2005 © CC-BY-SA-3.0→ 

Rose de Jéricho : G—Si 24,14 ; Rose : G—Est 1,6 ; Sg 2,8 ; G—Si 39,13 ; 50,8

Le laurier-rose

Identification

Nombreux sont les auteurs qui reconnaissent le laurier-rose comme étant la rose de Jéricho :

  • Le laurier-rose se nomme en grec rhodo-dendron, or le mot grec employé en Si 24,14 est phuton rodon  qui signifie « plante à roses ».
  • En G—Si 39,13 cette plante à roses pousse près de l’eau, ce qui correspond mieux au laurier-rose (Cf. Les plantes dans la Bible, guide de la flore en Terre Sainte, Solange et Jean Maillat, p. 235).
Classification
  • Famille : apocynaceae
  • Genre : nerium
  • Espèce : oleander
Localisation

Plante très présente sur le bassin méditerranéen.

Description
  • Hauteur de l’arbuste entre 1 et 6 m.
  • Feuilles vertes foncées au-dessus, pâles en-dessous, longues, fusiformes et persistantes.
  • Fleurs à 5 pétales soudées, de couleurs variées (rouge, rose, jaune, mauve…). Elles sont réunies en corymbes sur la partie terminale des rameaux. La floraison a lieu de juin à septembre.
  • Les fruits sont des gousses contenant des graines.
  • Plante très résistante à la sécheresse (elle pousse dans les régions du Néguev).
  • Toutes les parties de cette plante sont toxiques.
Usage
Médical
  • Cette plante contient un principe actif qui a un effet tonicardiaque. On l'utilise pour traiter l'hyposystolie, la tachycardie, certains cancers et des maladies de peau. 
Usage ornemental 
Histoire

En 1808, lors de la guerre d’Espagne, des soldats de Napoléon, en faisant cuire de la viande en brochettes sur des branches de laurier-rose, ont été intoxiqués.

 Rosa phoenicia

Photo : Eitan F., 2009 © CC-BY-SA-3.0→

La rose de Phénicie 

Identification

La rose de Phénicie (rosa phoenicia) est l'autre espèce retenue par les botanistes pouvant correspondre aux caractéristiques de la rose de Jéricho de la Bible.

Classification
  • Famille : rosaceae
  • Genre : rosa
  • Espèce : phoenicia
Localisation

Originaire du Proche-Orient (Turquie, Syrie, Liban, Israël). Son écosystème est difficile à définir car on la retrouve à la fois dans des zones chaudes et humides et dans des zones montagneuses à hiver rigoureux comme le mont Taurus .

Description
  • Tiges grimpantes ou formant de petits arbustes dans les haies.
  • Feuilles lustrées à 3 ou 5 folioles dentées.
  • Panicules portant plusieurs dizaines de fleurs blanches teintées de rose, à cinq pétales (2 à 5 cm de diamètre).
  • Petits fruits orangés, ellipsoïdes, d’environ 1 cm.

20 FLORE Cinnamome (cannelier de Ceylan)

 Illustration botanique de Cinnamomum verum

 dans  Köhler's Medizinal-PflanzendeFranz Eugen Köhler 1887  © Domaine public 

Ex 30,23 ; Pr 7,17 ; Ct 4,14 ; Ap 18,13

Identification 

Il existe 300 espèces de cinnamomum. L’écorce (intérieure) de cette plante est communément appelée « cannelle ». Ce nom vient de l’hébreu « kaneh » qui donne « canna » en latin, et désignait les végétaux qui ont une tige creuse. Le « kinnamon [qinnnâmôn] » hébreu, dans la Bible, désigne à priori, l’espèce cinnamomum verum,  appelé aussi cinnamomum zeylanicum, c’est à dire « cannelier de Ceylan » ; cette espèce est considérée comme étant la plus appréciée et la plus connue du genre cinnamomum

Dans d'autres passages bibliques (Ex 30,24 ; Ez 27,19) où il est question de cannelle ou casse, il s'agirait plutôt du cinnamomum cassia (cinnamome de Chine)

Classification
  • Famille : lauraceae
  • Genre : cinnamonum
  • Espèce : cinnamomum verum (ou zeylanicum)
Localisation

Originaire du sud-est asiatique. D’après Hérodote Historiae  3,110-111 et  Strabon Geographica  16,4,25, il viendrait d’Arabie ou du pays des sabéens (Strabon Geographica 16,14,19). D’après Pline Naturalis historia 12,86, il viendrait d’Éthiopie. En réalité il s’agirait plutôt de la Malaisie. Cette plante pousse principalement sur les côtes de l’Inde (Strabon Geographica 15,1,22) et sur l’île de Ceylan (Sri-Lanka). Des tentatives de transplantation en Syrie ont dû être faites sans succès car Pline explique que cet arbuste est sans force pour arriver aux régions voisines de la Syrie (Pline Nat. 16,135).

Description
  • L’ arbuste peut s’élever jusqu’à 15 m.
  • Il possède des feuilles vertes, persistantes, luisantes, ovales, à 3 nervures principales.
  • L’écorce, de couleur brun-rougeâtre, est lisse et papyracée. Après avoir été prélevée sur le tronc et les branches puis séchée, elle est enroulée pour être commercialisée sous le nom de cannelle.
  • Les fleurs de couleur blanchâtre possèdent 3 sépales, 3 pétales et 12 étamines.
  • Les fruits sont des baies pourpres d’environ 1 cm de diamètre.
Usage
Médical et cosmétique
  • Cette plante est  utilisée pour ses vertus thérapeutiques et médicinales.
  • Comme huile parfumée : l'huile de cinnamome est obtenue à partir des fruits mûrs ou en trempant de petits morceaux d'écorce brisés dans de l'eau de mer et en les distillant. Pline affirme aussi que l’on fait de l’huile avec la racine de cinnamome (Pline Nat.15,30). On l'utilisait pour parfumer les appartements et les lits de repos (Pr 7,17). 
Alimentation
  • On l’utilise en cuisine pour ses vertus aromatiques ; pour parfumer le vin (Pline Nat., 14, 107).
Cultuel
  • Cette substance aromatique est l’un des principaux composants de l’huile sainte du Temple, huile qui servait à la consécration des prêtres et des objets de culte du Temple.

 Bâtons, poudre et fleurs de cannelle de Ceylan

Photo : Simon A. Eugster (2015) © CC-BY-SA-3.0→

Histoire
  • La cannelle est commercialisée depuis des siècles : par l’archéologie nous savons qu’elle était déjà commercialisée au 11e s. av. J.-C. puisque des traces de cannelle ont été retrouvées dans des flacons phéniciens de cette époque sur la côte israélienne près de Haïfa. C’est par l’intermédiaire des phéniciens et de l’Arabie (royaume de Saba) que le Moyen-Orient a eu connaissance très tôt, de cette épice.
  • Elle était vendue très cher : Pline parle de 1000 deniers la livre (Pline Nat.12,95).
  • Sans doute pour en augmenter encore le prix, des fables au sujet de sa provenance étaient contées : « Quant au cinnamome, les Arabes le récoltent d’une façon plus étonnante encore. Où il naît, quelle est la terre qui le nourrit, on ne sait le dire, à cela près que certains, dont l’opinion n’est pas sans vraisemblance, prétendent qu’il pousse au pays où Dionysos fut élevé. Ce sont, dit-on, des oiseaux de grande taille qui apportent ces copeaux que, d’un nom appris des Phéniciens, nous appelons cinnamome ; ils les apportent pour la confection de leur nid, qu’ils attachent en les formant de boue contre des falaises escarpées où l’homme ne peut aucunement accéder. En face de cette situation, voici donc l’artifice dont usent, dit-on, les Arabes : ils découpent en morceaux aussi gros que possible les membres des bœufs, ânes et autre bêtes de somme qui viennent à périr, les transportent dans la région des falaises, les déposent à proximité des nids, et se retirent à l’écart ; les oiseaux descendent aussitôt et remontent les quartiers de chair sur leurs nids, qui, ne pouvant en supporter le poids, se rompent et tombent à terre ; eux surviennent et recueillent ainsi le cinnamome ; et le cinnamome, qu’ils recueillent, arrive de là dans les autres pays. » (Hérodote Historiae 3,110-11)
  • D’après Pline Nat.,12,94 c’est l’empereur Vespasien Auguste qui le premier a consacré dans les temples du Capitole et de la Paix des couronnes d’or incrustées de cinnamome.
Symbolique
réflexion, vigilance, pureté
  • Grégoire de Nysse Homiliae in Canticum canticorum,  9,11, ayant entendu dire que le cinnamome avait des propriétés purificatrices et rafraichissantes, rapproche cette plante du fruit produit dans l'âme des personnes réfléchies, car la réflexion éteint les passions des personnes « brûlant de désir ou bouillant de colère » et « conserve sa parole pure ». 

20 myrrhe FLORE Arbre à myrrhe (basalmier)

Illustration botanique de Commiphora myrrha (arbre à myrrhe ou basalmier) de Müller (1833-1887) 

  Köhler's Medizinal-Pflanzen Franz Eugen Köhler, 1887 © Domaine public→

Ex 30,23 ; Ex 30,23 ; M, G – Est 2,12 ; Ps 45,9 ; Pr 7,17 ; Ct 1,13 ; 3,6 ; 4,6.14 ; 5,1.5.13 ;  M – Si 24,15 ; Mt 2,11 ; Mc 15,23 ; Jn 19,39 ; Ap 18,13 

Identification

La myrrhe est « môr » en hébreu et « smurna » en grec. Le mot « muron » en grec qui généralement est traduit par « huile parfumée » ( Ex 30,25 ; 1Ch 9,30 ; 2Ch 16,14 ; Jdt 10,3 ; Ps 132,2 ; Pr 27,9 ; Ct 1,3-4 ; Ct 4,14 ; Am 6,6 ; Is 39,2 ; Ez 27,17 ; Mt 26,7.12 ; Mc 14,3-5 ; Lc 7,37-38.46 ; Lc 23,56 ; Jn 11,2 ; 12,3.5.) est traduit par « myrrhe» en Ap 18,13. Il s'agirait probalement d'une huile à base de myrrhe et d'autres aromates (cf. Ct 4,14).

Classification
  • Famille : burseraceae
  • Genre : commiphora
  • Espèce : myrrha
Localisation

Originaire d’Afrique de l’Est (Éthiopie, Somalie) et du sud de l’Arabie (Yémen, Oman).

Description
  • Arbuste de 3 à 5 m de haut aux branches noueuses et anguleuses dotées d’épines.
  • Ses petites feuilles ovales vertes sont caduques et aromatiques.
  • Ses fleurs blanches ou rouges-orangées apparaissent en été.
  • De ses nœuds suinte, sous forme de larmes jaunes, une résine aromatique que l’on appelle « myrrhe » ; ce nom vient de l’akkadien murru qui signifie « amère ».
Usages
Médical et cosmétique
  • En médecine, dès l’Antiquité, la myrrhe était réputée pour apaiser la douleur et pour son action anti-inflammatoire. Les Grecs utilisaient la myrrhe pour nettoyer les plaies des soldats. Elle était utilisée en gargarisme pour éviter les inflammations de la bouche.
  • Jérôme Commentariorum in Matthaeum 27,48  t.26, col.212  affirme que le breuvage donné à Jésus sur la croix, un vin mêlé de myrrhe (Mc 15,23), avait pour but d’alléger les douleurs du crucifié.
  • En huile, elle servait pour la toilette des femmes (Est 2,12).
Cultuel
  • Parfum pour l’embaumement (Hérodote Historiae 2,86 ), elle est employée en Égypte mais aussi chez les Juifs (cf. Jn 19,39).
  • Elle est brûlée comme encens dans les temples.
  • La myrrhe entrait dans la composition de l’onction sainte (Ex 30,23). Aujourd’hui elle entre dans la composition du saint-chrême.
Histoire
  • Selon les archives royales assyriennes, au 9e siècle av. J.-C., la myrrhe venue d’Arabie par caravane était vendue dans des villes sur les bords de l’Euphrate.
  • Hérodote Historiae 7,181 rapporte que Pythès, membre de l’armée navale de Xerxès, tombé à demi-mort entre les mains des Perses, fut soigné avec de la myrrhe. 

 Myrrhe

Photo : Leo_65 / 319 Bilder de Pixabay (2014) © Domaine public

Symbolique
Souffrance

En raison de son goût amer et de son efficacité pour soigner et apaiser les blessures, la myrrhe évoque la souffrance.

Mort

Parce qu’elle sert à l’embaumement, elle est associée à la mort.

Humanité

Les deux précédents symboles manifestant la vulnérabilité de la nature humaine, la myrrhe devient aussi symbole d’humanité.

Royauté

Ce parfum précieux était généralement réservé à l’embaumement des rois.

Amour

Comme l’amour, la myrrhe dégage un parfum envoûtant et puissant. (Ps 45,9 et Ct 1,13)

Le prénom de Marie « Mariam » ou « Myriam » signifie « mer de myrrhe » ou « mer d'amertume».