×

VERSIONS

Plutôt qu’un texte unique comme les Bibles ordinaires, La Bible en ses Traditions entend refléter la diversité des traditions textuelles, spécialement celles que portent des communautés vivantes.

DIVERSITÉ ET UNITÉ DES ÉCRITURES

Les Écritures, même dans leurs canons chrétiens, sont plurielles :

  • constituées de deux testaments,
  • connaissant un canon bref en hébreu et un long en grec,
  • transmise en diverses éditions et en textes variés,
  • elles sont finalement traduite dans toutes les →langues.
Le désir d’unifier l’Écriture ou : les versions traditionnelles

Le principe d’unité de toute l’Écriture a toujours déterminé une tendance à disposer d’un texte de référence, qui puisse être considéré comme autorisé et authentique.

  • Le judaïsme rabbinique reconnaît pour seule authentique la version du texte massorétique (TM ou M)
  • Toutes les →polyglottes que l’on connaît tendent à faire référence à la bible hébraïque comme instance critique.
  • L’Église grecque a retenu la Septante (LXX ou G)
  •  L’Église latine la Vulgate (V)
  • L'Église syriaque la Peshitta (S)
Les versions traditionnelles sont elles-mêmes des textes de synthèse

Leur mérite vient de ce qu’elles reflètent, en une seule langue et un seul texte, la pluralité et la richesse des textes bibliques traditionnels et autorisés. Par exemple :

  • La LXX de l’Église grecque incorpore des éléments hexaplaires et lucianiques, correspondant au TM.
  • La Vulgate de saint Jérôme se base sur l’hébreu pré-massorétique, mais sans rompre, avec la VL (=reflet de la vieille LXX) ; assez vite les deutérocanoniques marginalisés par saint Jérôme furent réintroduits sur la base de la LXX.

Ainsi tous les textes faisant autorité sont des textes de synthèse qui incorporent une longue tradition textuelle.

LES CHOIX DE "LA BIBLE EN SES TRADITIONS"

Nous ne visons pas le même but que la critique textuelle classique – établir la forme la plus pure, la plus primitive du texte grec – tout en reconnaissant bien sûr l’apport indispensable de cette science. Les choix que nous faisons ne sont pas motivés par des critères de critique textuelle, mais par des critères de cohérence herméneutique. Comme l’indique le titre de notre entreprise, « la Bible en ses Traditions », on privilégie les formes textuelles attestées dans les principales traditions ecclésiales vivantes. Nous intéressent les textes réellement utilisés et commentés par les liturgies, les exégètes et les prédicateurs dans les Églises de tradition grecque, latine et orientale, au fil des siècles. Dans cette perspective, on retiendra les grandes traditions textuelles qui suivent :

Nouveau Testament
  • Premièrement, le texte byzantin ou majoritaire (Byz). C’est le texte traditionnel du christianisme byzantin sous toutes ses formes avant et après le Schisme entre Rome et Constantinople. Ce choix ne reflète pas une option de critique textuelle ou de théologie (nous ne pensons pas du tout que, texte majoritaire dans les manuscrits grecs, il serait le plus proche du texte primitif ou le véritable texte inspiré du Nouveau Testament), mais le choix d’une cohérence herméneutique globale du texte et de l’annotation.
  • Ensuite le texte usuel, celui du Novum Testamentum Graece de Nestle-Aland, 28e édition (Nes). Il permet de mettre en perspective historique et critique les quatre autres textes. Quant aux variantes perceptibles dans une traduction, les différences entre Nes et Byz, consistent bien souvent en omissions de la part de Nes.
  • Le Textus receptus (TR). Dérivé du premier texte imprimé du Nouveau Testament en grec (Erasme, 1516), c’est le Nouveau Testament de l’Humanisme, du moins en Europe du Nord, et de la Réforme. Son importance traditionnelle est capitale : c’est celui que Luther a traduit et c’est celui que reflète la King James Bible (Authorized Version). Les notes Traditions chrétiennes ou Théologies ne permettent évidemment pas d’en faire l’économie, si nous voulons développer la tradition œcuménique de La Bible de Jérusalem.
  • La Vulgate (V). Elle est ici moins le témoin des textes grecs qu’elle traduit, ou un reflet de leurs interprétations anciennes (en effet elle indique souvent le sens du grec koinè), que le texte latin traditionnel, celui du christianisme occidental jusqu’au 16eme siècle et pour l’Église catholique jusqu’à nos jours.
  • La Peshitta (S). Elle non plus, n’apparaît pas d’abord en tant que témoin du grec ni même de son éventuelle Vorlage araméenne, mais comme le texte syriaque traditionnel, c’est-à-dire le Nouveau Testament du christianisme oriental.
Ancien Testament
  • On traduira cinq textes principaux : le texte massorétique (M) – texte hébreu (et éventuellement araméen) du judaïsme rabbinique, la Septante (G), la Vulgate (V), la Peshitta (S) et pour les livres concernés le Pentateuque samaritain et la version samaritaine de Josué (début des Chroniques II).
  • Le plus souvent, on traduira le texte massorétique, et l’on fera apparaître les variantes significatives des quatre autres.
  • Là où le grec est le seul texte disponible (pour les livres deutérocanoniques, certaines parties de Jérémie, de Daniel et d’Esther), c’est lui qui serait à traduire.
  • Là où l’hébreu et le grec diffèrent beaucoup sur une grande échelle, l’un et l’autre seront intégralement traduits, en colonnes parallèles ; le Psautier sera traduit entièrement de l’hébreu et du grec, avec les variantes apparentées à l’un et à l’autre.
  • Là où Rahlfs imprime deux colonnes (Jos, Dn, etc.), on les reproduira.
  • Là où d’autres versions traditionnelles disponibles sont irréductibles à l’hébreu ou au grec (par exemple au début de Siracide 51), on proposera autant de colonnes que nécessaire.
  • Pour certains livres ou parties de livres deutérocanoniques, une solution particulière sera à trouver.

QUELLES ÉDITIONS POUR CES VERSIONS ?

Texte massorétique :
  • La Biblia Hebraica Quinta pour les livres déjà parus ;
  • La Biblia Hebraica Stuttgartensia, 5e édition, pour les autres livres.
Septante :
  • L’édition de Göttingen pour les livres déjà parus ;
  • L’édition de Rahlfs pour les autres livres ;

Peshitta :

  • The Old Testament in Syriac according to the Peshitta version by The Peshitta Institute (Leiden).
Pentateuque samaritain :
  • August von Gall (éd.), Der hebräische Pentateuch der Samaritaner, Giessen, 1914-1918 ;
  • Luis-F. Girón Blanc (éd.), Pentateuco Hebreo-Samaritano : Genesis, Madrid, 1976 ;
  • Tal et M. Florentin, The Pentateuch. The Samaritant and the Massoretic Version, Tel Aviv, Haim Rubin Tel Aviv University Press, 2010

Le texte byzantin, la Vulgate et la Peshitta, ont subi de multiples recensions ; aussi leurs éditions imprimées n’ont-elles pas fait l’économie d’une étude critique. La solution la plus rigoureuse du point de vue herméneutique serait sans doute de traduire les éditions diplomatiques de manuscrits représentatifs de ces traditions. Pour des raisons pratiques, nous traduirons cependant des éditions existantes, en étant bien conscients du fait que la Vulgate de Stuttgart, par exemple, n’est rien de plus qu’une édition fiable du texte latin d’après Jérôme. Bien sûr, en plus du texte byzantin, de la Vulgate et de la Peshitta, il existe d’autres témoins grecs, latins ou syriaques (ou même dans d’autres langues anciennes) ayant une réelle importance traditionnelle. Nous allons y revenir.

Texte byzantin ou majoritaire :
  • Zane C. Hodges and Arthur L. Farstad, The Greek New Testament According to the Majority Text, Nashville, Thomas Nelson, 1982/1985 
  • William G. Pierpont and Maurice A. Robinson, The New Testament in the Original Greek According to the Byzantine/Majority Text, Atlanta, Original Word Publishers, 1991/1995.

Le texte est presque identique dans les deux éditions et correspond largement au texte byzantin majoritaire (Byz) cité dans l’apparat critique du Greek New Testament édité par les United Bible Societies.

 Vulgate :
  • Biblia sacra iuxta vulgatam versionem, 4e édition par R. Weber et R. Gryson, Stuttgart, Deutsche Bibelgesellschaft, 1994.
Textus receptus :
  • La 3e édition du Nouveau Testament gréco-latin d’Erasme a été récemment reproduite par Tigran Aivazian (Londres, 2007 ; www.bibles.org.uk) 
  • le même éditeur dispose également de l’édition de 1550 du Textus receptus par Robert Estienne.
Peshitta :

on ne la considère plus seulement comme un témoin du texte grec, mais comme un texte important, ayant son propre poids – elle passe ainsi des notes au corps de texte lui-même. L’apparat critique de Nestle-Aland n’y suffira donc pas, puisqu’il ne cite les versions (syriaques ou autres) que là où elles permettent d’accréditer des manuscrits grecs.

  • J. Pinkerton et R. Kilgour The New Testament in Syriac (The British and Foreign Bible Society), Londres, 1920 (pour les évangiles, le texte est celui de Ph. Pusey et G.H. Gwilliam, Tetraevangelium Sanctum iuxta simplicem Syrorum versionem, Oxford, 1901).

ET PLUS ENCORE ...

Pour d'autres versions syriaques, également latines, coptes, etc., voir l'Introduction dans Nes. Beaucoup de ces textes et versions sont disponibles sur des supports électroniques. Ces textes principaux ne contiennent pas nécessairement toutes les lectures pertinentes du point de vue des traditions : les variantes coptes, vieilles latines, vieilles syriaques, celles des manuscrits grecs ne relevant pas du type majoritaire, ou encore celles que l’on peut tirer des œuvres des Pères de l’Église. Sur la version électronique de La Bible en ses Traditions, bien entendu, elles pourront être rendues disponibles ; pour l’édition imprimée on les ajoutera en note Critique textuelle . L’apparat critique de la 28ème  édition de Nestle-Aland peut ici ouvrir des pistes, mais on devra consulter aussi des spécialistes de ces domaines.

On traduira toutes les variantes significatives, c’est-à-dire celles qui portent sur le sens du texte. On ignorera donc les variantes qui reflèteraient seulement la grammaire ou la syntaxe de la langue dans laquelle le texte grec a été traduit, sans altérer sa portée. Inversement, on ne se limitera pas aux leçons qui appuient des variantes grecques :

  • par exemple, là où la Vulgate traduit eis doxan par in gloria, nous n’aurons pas à rechercher de manuscrit grec lisant en doxêi ; on y verra plutôt une interprétation latine de l’expression en grec koinè, et on la traduira comme telle.
  • La Peshitta donne régulièrement des variantes dépourvues de lien avec un texte grec, mais relevant de l’interprétation homilétique : elles doivent être traduites.
  • Cas extrême, illustrant bien la nature et les principes de La Bible en ses Traditions, le texte présentera le fameux « comma johannique » (1Jn 5,7b ). Ce demi-verset se trouve seulement en quelques témoins grecs et surtout latins, mais il a été repris dans la Vulgate clémentine et dans le Textus receptus, d’où il passe dans la Bible de Luther et dans la King James version.