La Bible en ses Traditions

Cantique des cantiques 7,11

M
G S
V

11 Je suis à mon bien-aimé et c'est vers moi qu'il porte ses désirs.

11 

11 (moi je suis à mon préféré et vers moi, son retournement)

11 || Gn 3,16

Réception

Philosophie

1,1–8,15 Le Cantique comme symbole de la révélation Rosenzweig Stern (p. 235-242) interprète le caractère dialogal du Ct comme une instance de la structure dialogale de la révélation elle-même.  

  • Une première partie, intitulée « création », décrit une relation non personnelle, en 3e pers. et au passé, entre Dieu et le monde.
  • Au cœur de l'ouvrage, Rosenzweig fait de son commentaire du Ct le fil conducteur de la présentation de ce qu'il appelle « La révélation », c'est-à-dire le passage au « tu » et au présent et ainsi à l'avènement d'une relation personnelle entre Dieu et l'homme. Tout le Ct est un dialogue (à l'exception de Ct 8,6) : il ne dit pas que la révélation est dialogale, il le montre en étant lui-même dialogue et étant presque uniquement cela.

Révélation performée : importance du dialogue

La révélation n'est donc pas pour Rosenzweig la communication d'un ensemble d'informations sur Dieu, mais la naissance d'une relation entre Dieu et l'homme. Le Ct est pur dialogue — sans jamais de passage à la 3e pers. — et histoire au présent. Ces deux caractéristiques sont le fondement de la révélation : le dialogue et le présent.

Il ne s'agit donc plus de parler de la relation entre Dieu et l'homme, comme les prophètes qui décrivaient cette relation à l'aide de la métaphore des noces, mais de faire parler cette relation elle-même.

Révélation lyrique : importance de la subjectivité

Le discours du Ct est donc tout entier porté par la subjectivité.

  • Cela se manifeste par l'importance du « je » sous la forme du je-marqué (’ănî en héb.). Le Ct est le texte biblique qui utilise, proportionnellement à sa taille, le plus ce « je », après le livre du Qo (fréquence de 6,03 emplois pour 1000 mots en Ct, et de 6,50 en Qo).
  • Cela se remarque aussi au fait que les premiers mots du Ct expriment une comparaison : « tes amours sont meilleures que le vin » (Ct 1,2b), c'est-à-dire une appréciation subjective et non un simple constat, auquel cas un comparatif n'eût pas été nécessaire.

Dès le début du texte, la focalisation n'est pas celle d'une narration objective mais celle d'une subjectivité : les choses ne sont pas décrites pour elles-mêmes, l'enjeu est d'emblée perspectiviste. 

Critique de la réception moderne du Cantique

Rosenzweig critique les analyses modernes du Ct (à partir des 18e et 19e s.) qui ont cherché à effacer cette dimension dialogale du texte.

  • Il vise d'abord Herder et Goethe, qui ont fait du Ct un chant d'amour purement humain, prisonniers qu'ils étaient du préjugé que ce qui est humain ne peut être divin et que Dieu ne peut pas aimer. Cependant, leur tentative eut au moins le mérite de conserver cet aspect essentiel du Ct : le fait qu'il s'agisse d'un chant lyrique, de l'expression de deux subjectivités.
  • D'autres tentatives ont suivi, plus condamnables parce qu'elles ont réduit le Ct à un simple récit, narration entre plusieurs personnages : un roi, un berger, une paysanne. Dans ce dernier type d'interprétation le cœur du Ct, à savoir son caractère lyrique, est perdu et l'œuvre demeure incompréhensible.

Musique

4–12 Que tu es belle

15e s.

John Dunstable (1390-1453), Quam pulchra es

Trio Triumvirum

© Licence YouTube standard→, Ct 7,4-12

Paroles

Quam pulchra es et quam decora carissima in deliciis (Ct 7,6) / Statura tua assimilata est palmæ, et ubera tua botris (Ct 7,7) / Caput tuum ut carmelus… (Ct 7,5) / Collum tuum sicut turris eburnea… (Ct7,4) / Veni dilecte mi; egrediamur in agrum… (Ct 7,11) …et videamus… si flores fructus parturiunt, si floruerunt mala punica. Ibi dabo tibi ubera mea. (Ct 7,12)

Compositeur

John Dunstable (né vers 1390, mort le 24 décembre 1453 à Londres) est un compositeur (principalement de musique vocale sacrée), mathématicien et astronome anglais, dont les innovations harmoniques ont exercé une influence profonde sur certains compositeurs du début de la Renaissance. Parmi les compositions de Dunstable qui nous sont parvenues, on trouve des exemples de tous les principaux types et styles de polyphonies qui existaient de son temps : des motets isorythmiques, des sections de l’ordinaire de la messe, des chants profanes et divers textes liturgiques mis en musique à trois voix.

Arts visuels

1–16 Le Cantique des cantiques

19e s.

Gustave Moreau (1826-1898), Le Cantique des cantiques (huile sur toile, 1853), 300 x 319 cm

conservé au Musée des beaux-arts de Dijon (France) © Domaine public→

Liturgie

11 Je suis à mon préféré

Alleluia "Ego dilecto meo"

Alleluia - Ego dilecto meo

Chœur des moines de l’abbaye Sainte-Madeleine du Barroux

© Abbaye du Barroux→, Ct 7,11

Musique

2,10–13 ; 6,10ss ; 7,10ss Cantique des Cantiques

20e s.

Ivan Moody (1964-), Canticum Canticorum I, 1987

David Fallis (dir.), Quire Cleveland

© Licence YouTube standard→, Ct 2,10-13.6,2.11

Composition

Ivan Moody est un compositeur britannique contemporain. Ses œuvres montrent les influences de l'est du chant liturgique et de l'Église orthodoxe, dont il est membre et archiprêtre (Patriarcat Œcuménique de Constantinople). Son Canticum Canticorum I, écrit pour le Hilliard Ensemble, est créé en 1987 et obtient un énorme succès. Cette pièce reste l'œuvre la plus fréquemment jouée de son répertoire. Elle est constituée de trois mouvements : « Surge propera amica mea » (Lève-toi, hâte-toi, mon amie), « Descendi in hortum meum » (Je suis descendu dans mon jardin) et « Ego dilecti meo » (Je suis à mon bien-aimé).

4–12 O quam pulchra

17e s.

Claudio Monteverdi (1567-1643), O Quam Pulchra SV 317, 1625

Jordi Savall, Montserrat Figueras

© Licence YouTube Standard→, Sg 4,1-20