La Bible en ses Traditions

Daniel 14,1–42

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G
V

...

Et le roi Astyage fut réuni à ses pères

et Cyrus le Perse reçut son royaume.

÷ Et Daniel était un convive du roi et il était honoré plus que tous ses amis.

...

Et Daniel était un compagnion du roi et il était plus honoré que tous ses amis.

÷ Il y avait aussi chez les Babyloniens une idole du nom de Bel, pour laquelle on dépensait chaque jour douze artabes de fleur de farine et quarante brebis

et six amphores de vin.

...

Il y avait chez les Babyloniens une idole du nom de Bel

et chaque jour étaient dépensées pour elle douze artabes de fleur de farine et quarante brebis

et six amphores de vin.

÷ Le roi aussi la vénérait et il allait chaque jour l’adorer 

mais Daniel adorait son Dieu

et le roi lui dit : — Pourquoi n'adores-tu pas Bel ?

...

Et le roi la vénérait et il allait chaque jour l'adorer

mais Daniel adorait son Dieu.

÷ Et répondant il lui dit :

— Parce que je ne vénère pas des idoles faites de main d’homme mais le Dieu vivant

qui a créé le ciel et la terre et a pouvoir sur toute chair.

...

Et le roi lui dit : — Pourquoi n'adores-tu pas Bel?

Et il dit : — Parce que je vénère pas des idoles faites de main d'homme mais le Dieu vivant

qui a créé le ciel et la terre et qui a puissance sur toute chair.

÷ Et le roi lui dit :

— Bel ne te semble-t-il pas être un dieu vivant ?

Ne vois-tu pas tout ce qu’il mange et boit chaque jour ?

...

Et le roi lui dit :

— Bel ne te semble-t-il pas être un dieu vivant ?

Ne vois-tu pas tout ce qu'il mange et boit chaque jour ?

÷ Et Daniel dit en riant : — Ô roi, ne te trompe pas, car ce n'est que de l'argile au-dedans et de l'airain au-dehors, et il n'a jamais mangé.

...

Et Daniel dit en riant : — Ne t'égare pas ô roi

car au-dedans il est de boue et au-dehors d'airain et il n'a jamais mangé ni bu.

÷ Et le roi irrité appela ses prêtres et leur dit :

— Si vous ne me dites pas qui est celui qui mange ces nourritures, vous mourrez !

...

Et le roi irrité appela ses prêtres et leur dit :

— Si vous ne me dites pas qui est celui qui dévore cette nourriture, vous mourrez

mais si vous montrez que c'est Bel qui les dévore

Daniel mourra parce qu'il a blasphémé contre Bel.

÷ Mais si vous montrez que c’est Bel qui les mange

Daniel mourra parce qu’il a blasphémé contre Bel.

Et Daniel dit au roi : — Qu'il soit fait selon ta parole.

...

Et Daniel dit au roi : — Qu'il soit fait selon ta parole.

Et il y avait soixante-dix prêtres de Bel sans les femmes et les enfants.

÷ Et il y avait soixante-dix prêtres de Bel, sans compter leurs femmes et leurs enfants.

Et le roi vint avec Daniel au temple de Bel.

10 ...

10 Et le roi alla avec Daniel à la maison de Bel.

10 ÷ Et les prêtres de Bel dirent : 

— Voici que nous sortons dehors

et toi, ô roi, mets les aliments et mélange le vin, ferme la porte et scelle-la de ton anneau.

11 ...

11 Et les prêtres de Bel dirent :

— Voici que nous sortons dehors

et toi, ô roi, pose les aliments et mets le vin après l'avoir mélangé et ferme la porte et scelle-la de ton anneau.

Et quand tu viendras au matin si tu ne trouves pas que tout a été mangé par Bel, nous mourrons ou bien Daniel qui a menti contre nous.

11 ÷ Et quand tu entreras au matin, si tu ne trouves pas que tout a été mangé par Bel, nous mourrons ou bien Daniel qui a menti contre nous.

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12 ÷ Ils étaient méprisants parce qu'ils avaient fait sous la table une entrée secrète

par laquelle ils s'introduisaient toujours et ils dévoraient le tout.

12 ...

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13  

 Et lorsqu’ils furent sortis le roi mit les aliments devant Bel.

 ÷ Et il arriva donc lorsqu’ils furent sortis que le roi mit les aliments devant Bel.

Daniel commanda à ses serviteurs d’apporter de la cendre et il la passa au crible par tout le temple devant le roi

et étant sortis, ils fermèrent la porte, la scellant de l’anneau du roi et s’en allèrent.

14 ...

14 Et Daniel commanda à ses serviteurs d'apporter de la cendre et de la passer au crible par tout le temple devant le roi seul

et ils sortirent et fermèrent la porte

et ils la scellèrent avec l'anneau du roi et ils s'en allèrent.

14 ÷ Or les prêtres entrèrent pendant la nuit selon leur coutume

avec leurs femmes et leurs fils et ils mangèrent et burent tout.

15 ...

15 Les prêtres vinrent pendant la nuit selon leur coutume

avec leurs femmes et leurs enfants et ils dévorèrent et burent tout.

15 ÷ Le roi se leva au point du jour et Daniel avec lui.

16 ...

16 Et le roi se leva tôt le matin et Daniel avec lui.

16 ÷ Et le roi dit : — Les sceaux sont-ils intacts Daniel ? Celui-ci répondit : — Intacts, ô roi.

17 ...

17 Et le roi dit : — Les sceaux sont-ils intacts Daniel ?

Et il dit : — Intacts, ô roi.

17 ÷ Et aussitôt qu’ils eurent ouvert la porte, le roi regarda la table et s’écria d'une voix forte :

— Tu es grand ô Bel et il n’y a en toi aucune tromperie !

18 ...

18 Et au moment d'ouvrir les portes, le roi ayant regardé la table cria d'une voix forte :

— Tu es grand ô Bel et il n'y a en toi aucune tromperie.

18 ÷ Et Daniel rit et retint le roi afin qu’il n'avançât pas avant

et il dit : — Voici le sol, remarque de qui sont ces traces.

19 ...

19 Et Daniel rit et l'empêcha d'entrer à l'intérieur

et il dit : — Vois le sol et reconnais de qui sont ces traces.

19 ÷ Et le roi dit : — Je vois des traces d’hommes et de femmes et d’enfants.

Et le roi en colère

20 ...

20 Et le roi dit : — Je vois les traces d'hommes et de femmes et d'enfants.

20 ÷ saisit alors les prêtres et leurs femmes et leurs enfants

et ils lui montrèrent les petites portes secrètes

par lesquelles ils entraient et consommaient ce qui était sur la table.

21 ...

21 Et le roi en colère saisit alors les prêtres ainsi que leurs femmes et leurs enfants

et ils lui montrèrent les portes secrètes

par lesquelles ils entraient et consommaient ce qui était sur la table.

21 ÷ Et le roi les tua donc et livra Bel au pouvoir de Daniel

qui le détruisit ainsi que son temple.

22 ...

22 Et le roi les tua et livra Bel à Daniel

et il le détruisit ainsi que son temple.

22 ÷ Et il y avait un grand dragon dans ce lieu et les Babyloniens le vénéraient.

23 ...

23 Et il y avait un grand dragon et les Babyloniens le vénéraient.

23 ÷ Et le roi dit à Daniel : — Voici que maintenant tu ne peux pas dire que celui-ci n'est pas un dieu vivant ? Adore-le donc.

24 ...

24 Et le roi dit à Daniel : — Tu ne peux pas dire que celui-ci n'est pas un dieu vivant. Adore-le donc.

24 ÷ Et Daniel dit : — J’adore le Seigneur mon Dieu parce que lui est le Dieu vivant.

25 ...

25 Et Daniel dit : — J'adore le Seigneur mon Dieu parce que c'est lui le Dieu vivant.

Mais toi, ô roi, donne-moi la permission et je tuerai le dragon sans glaive ni bâton.

25 ÷ Mais toi, ô roi, donne-moi le pouvoir et je tuerai le dragon sans glaive ni bâton

et le roi dit : — Je te le donne.

26 ...

26 Et le roi dit : — Je te la donne.

26 ÷ Daniel prit donc de la poix et de la graisse et des poils

et les fit cuire ensemble et en fit des masses

et il les jeta dans la gueule du dragon et le dragon creva.

Et il dit : — Voilà ce que vous vénériez.

27 ...

27 Et Daniel prit de la poix et de la graisse et des poils

et il fit bouillir le tout ensemble et en fit des gâteaux

et il les mit dans la gueule du dragon et les ayant mangés le dragon creva.

Et il dit : — Voyez ce que vous vénériez.

27 ÷ Et lorsque les Babyloniens l’apprirent, ils furent extrêmement indignés et s'étant rassemblés contre le roi ils dirent :

— Le roi est devenu juif 

il a détruit Bel, tué le dragon et massacré les prêtres.

28 ...

28 Et lorsque les Babyloniens l'apprirent, ils furent extrêmement indignés et ils se rassemblèrent contre le roi et ils dirent :

— Le roi est devenu juif.

Il a détruit Bel et a tué le Dragon et égorgé les prêtres.

28 ÷ Et alors qu'ils étaient venus vers le roi ils dirent : 

— Livre-nous Daniel sinon nous te tuerons, toi et ta maison.

29 ...

29 Et alors qu'ils étaient venus vers le roi ils dirent :

— Livre-nous Daniel sinon nous te tuerons toi et ta maison.

29 ÷ Le roi vit donc qu’ils se jetaient sur lui avec violence 

et poussé par la nécessité il leur livra Daniel.

30 ...

30 Et le roi vit qu'ils le pressaient beaucoup

et contraint il leur livra Daniel.

30 ÷ Et ils le jetèrent dans la fosse aux lions et il y demeura six jours.

31 ...

31 Ils le jetèrent dans la fosse aux lions et il y fut six jours.

31 ÷ Dans la fosse il y avait sept lions et on leur donnait chaque jour deux corps et deux brebis 

mais alors on ne les leur donna pas afin qu’ils dévorassent Daniel.

32 ...

32 Dans la fosse il y avait sept lions et on leur donnait chaque jour deux corps et deux brebis.

Mais alors on ne les leur donna pas afin qu'ils dévorent Daniel.

32 ÷ Mais le prophète Habaquq était en Judée 

et il avait cuisiné un bouillon et émietté du pain dans un pot

et il allait au champ pour fournir ses moissonneurs.

33 ...

33  Or le prophète Ambakoum était en Judée 

et il avait fait cuire une bouillie et émietté des pains dans un vase

et il allait au champ pour les apporter à ses moissonneurs. 

33 ÷ Et l’ange du Seigneur dit à Habaquq : 

— Porte le repas que tu tiens à Babylone pour Daniel qui est dans la fosse aux lions.

34 ...

34  Et l’ange du Seigneur dit à Habaquq : 

— Porte le repas que tu tiens à Babylone pour Daniel dans la fosse aux lions.  

34 Et Habaquq dit : — Seigneur je n’ai jamais vu Babylone et je ne connais pas la fosse.

35 ...

35 Et Habaquq dit : — Seigneur je n’ai jamais vu Babylone et je ne connais pas la fosse. 

35 ÷ Alors l’ange le prit par le haut de la tête et le porta par les cheveux de sa tête

et le mit à Babylone au-dessus de la fosse dans l'impétuosité de son esprit.

36 ...

36  Alors l’ange le prit par le haut de la tête et le porta par les cheveux de sa tête

et le mit à Babylone au-dessus de la fosse dans l'impétuosité de son esprit. 

36 ÷ Et Habaquq cria en disant :

— Daniel prends le repas que Dieu t’envoie.

37 ...

37  Et Habaquq cria en disant :

— Daniel Daniel prends le repas que Dieu t’envoie.  

37 ÷ Et Daniel dit : — Tu t'es en effet souvenu de moi, ô Dieu, et tu n'as pas abandonné ceux qui t'aiment.

38 ...

38 Et Daniel dit : — Tu t'es en effet souvenu de moi ô Dieu et tu n'as pas abandonné ceux qui t'aiment.

38 ÷ Et se levant Daniel mangea.

Et l’ange du Seigneur remit aussitôt Habaquq en son lieu.

39 ...

39  Et se levant Daniel mangea.

Et l’ange du Seigneur remit aussitôt Habaquq en son lieu. 

39 ÷ Et le septième jour le roi vint donc pour pleurer Daniel

et il vint vers la fosse et regarda

et voici que Daniel était assis.

40 ...

40 Et le septième jour le roi vint pleurer Daniel

et il vint vers la fosse et regarda

et voici que Daniel était assis.

40 ÷ Et le roi cria d'une voix forte disant :

— Tu es grand Seigneur Dieu de Daniel !

et il le fit sortir.

41 ...

41 Et criant d'une voix forte il dit : 

— Tu es grand Seigneur Dieu de Daniel et il n'y en a pas d'autre que toi.

41 ÷ Puis il envoya dedans tous ceux qui avaient été la cause de sa perte

et ils furent dévorés en un instant sous ses yeux.

ICI FINIT LE LIVRE DU PROPHÈTE DANIEL

42 ...

42 Puis il le fit sortir

et ceux qui avaient été la cause de sa perte il les jeta dans la fosse

et ils furent dévorés en un instant devant lui.

42 

Texte

Critique textuelle

42 Ajout dans la Vulgate post-tridentine Dans la tradition latine, la version Sixto-Clementine ajoute ici un verset 42 : 

Alors le roi dit :

— Que tous les habitants de la terre entière craignent le Dieu de Daniel

car c’est lui le Sauveur qui fait des signes et des prodiges sur la terre

lui qui a délivré Daniel de la fosse aux lions !

Frontispice de la bible Polyglotte d’Alcalà (1514-1517), (gravure sur bois) © Domaine public→

Voici la traduction du décryptage allégorique imprimé au-dessus de ce frontispice, un écu à quinze carreaux surmontés de la croix et du chapeau cardinalice: « Les quinze carrés de cet écu te mettent en face les quinze jours que passèrent ensemble à Jérusalem saint Pierre qui prêchait aux juifs ou à ceux de la synagogue et saint Paul, apôtre des nations. Le chiffre 7 et en conséquence les 7 carrés de couleur de cet écu signifient la loi antique ou Ancien Testament; le chiffre 8 ou les huit carrés d'autre couleur signifient la loi de grâce ou le Nouveau Testament. Le nombre 15 ou les quinze carrés les contiennent tous. »

Réception

Arts visuels

1–27 Deux représentations de Daniel devant l'idole Bel L'épisode de Daniel et les prètres de Bel a suscité l'intérêt des plus grands artistes

17e s.

Rembrandt Harmenszoon van Rijn dit Rembrandt (1606-1669), Daniel et Cyrus devant l'idole Bel, (huile sur panneau, 1633), 23,5 x 30,2 cm,

Musée J. Paul Gett, Los Angeles CA (États-Unis) © Domaine public→

Daniel, en retrait dans l'ombre, dévoile peu à peu au roi Cyrus sa crédulité. Voit-on là le premier passage, où le roi, montrant les récipients vides de son sceptre, demande à Daniel : « Bel ne te semble-t-il pas être un dieu vivant ? Ne vois-tu pas tout ce qu’il mange et boit chaque jour ? » (Dn 14,5) ou bien le retour dans le temple après la nuit qui est ici représenté ? La signature de Rembrandt, comme tracée dans la cendre déposée sur le sol sous la table d'offrandes pour exposer la tromperie des prêtres de Bel, et le visage effrayé de ces derniers à l’arrière-plan laissent supposer qu’il s’agit plutôt de la fin de l’épisode.

19e s.

Gustave Doré (1832-1883), Daniel confond les prêtres de Bel (gravure sur bois, 1866)

in → Bible de Tours © Domaine public→

Au centre de la gravure, surplombant ses adversaires, Daniel dénonce l'idole Bel. Son regard orienté vers le haut indique qu'il s'adresse à une autorité, vraisemblablement le roi. Ses mains dirigées vers Bel évoquent le moment où Daniel dit au souverain que son idole est incapable de manger, qu'elle n'est faite que d'argile et d'airain. Gustave Doré a probablement représenté l'instant où, après que Daniel ait dénoncé la tromperie, le roi prend la parole et s'exclame : « — Si vous ne me dites pas qui est celui qui mange ces nourritures, vous mourrez ! ». En arrière-plan, des prêtres inquiets pointent du doigt Bel, tandis que d'autres, en second plan, dénoncent Daniel. Au premier plan, certains prêtres sont abattus. Peut-être se doutent-ils de leur funeste destin. 

36 Le secours de Daniel par Habaquq illustré au fil des siècles Motif récurrent dans la littérature spéculaire et biblique, cet épisode biblique a fait l'objet d'un grand nombre d'illustrations.

12e s. 

Anonyme (Espagne du nord), Daniel dans la fosse aux lions secouru par Habaquq (encres et pigments sur parchemin, 1197), 24 cm x 16,5 cm,

dans la Bible de Pampelune, f. 140v, n°0108, Bibliothèque Municipale→ Amiens,

© CC Initiales→

C'est sobrement et sans artifice que Daniel et Habaquq sont représentés ici. On peut y voir Daniel assis, vêtu d'une robe verte, la main levée, il est représenté en posture de prière ou de supplication. Serein malgré la présence menaçante de lions à droite, il regarde le prophète Habaquq qui lui apporte de la nourriture dans un panier. Autre détail important : la présence de l'ange en haut à gauche de la miniature. En effet, cet ange symbolise l'intervention divine qui guide le prophète jusqu'à Daniel. 

13e s. 

Anonyme (Angleterre), Habaquq transportant des vivres pour Daniel, (encres et pigments sur parchemin, 13e s.), 22,7 cm x 15,5 cm,

dans Bible, f. 204, n°0009 (0006), Bibliothèque Municipale→ Angers,

© CC Initiales→

Cette miniature en marge représente Habaquq transportant des vivres pour Daniel. Il est suspendu par un cheveu à la main de Dieu, sortant des nuées. Ce dessin contraste avec les autres illustrations, car il ne dépeint pas un ange, mais seulement une main sortant des nuées.

15e s. 

Anonyme (France du sud-est), Daniel dans la fosse aux lions secouru par Habaquq (encres et pigments sur parchemin, ca. 1470-1480), 40,8 cm x 28 cm,

dans Speculum humanae salvationis, f. 029, n°0089, Bibliothèque Municipale→ Marseille,

© CC Initiales→

Au 15ᵉ siècle, la représentation de Daniel dans la fosse aux lions évolue. À la légende en marge de la miniature s'ajoutent les phylactères qui donnent voix aux personnages. Ici, l'ange prononce les mots suivants : «Daniel sume prandium quod mittit tibi diis» soit «Daniel, prends le repas qui t'est envoyé par Dieu». Celle-ci est une variante du verset 36 selon la Vulgate où Habaquq s'exclame : « Daniel prends le repas que Dieu t'envoie » (Danihel tolle prandium quod misit tibi Deus). Cela rappelle également que les hommes du Moyen Âge lisaient la Bible dans des manuscrits d'une grande diversité. 

Anonyme (France du sud-est), Daniel dans la fosse aux lions secouru par Habaquq (encres et pigments sur papier, 1482),

Julien Macho (trad.), Mirouer de la redempcion de l'umain lignage, f. 436, Inc. 1043, Bibliothèque Municipale→ Lyon,

© CC Initiales→

Accompagnée de la légende suivante : « Comment l'ange de notre Seigneur repait Daniel par Habaquq en la fosse aux lions  au VIe et XIIIIe chapitre de Daniel», cette miniature représente le prophète Daniel en prière. Les paumes des mains côte à côte, Daniel se tient assis dans la fosse. Au second plan, on aperçoit l'ange qui tient le prophète Habaquq par les cheveux. L'index pointé en direction de la fosse, il indique à Habaquq l'endroit où il doit se rendre.

16e s. 

Anonyme (France du nord), Daniel dans la fosse aux lions secouru par Habaquq, (encres et pigments naturels sur parchemin, 16e s.), 366 mm x 250 mm,

dans la Bible, Bibliothèque Municipale→ Valenciennes,

© CC Initiales→

Celle-ci est sans doute l'une des miniatures les plus travaillées, tant par ses couleurs que par ses traits réalistes. En effet, l'ange, vêtu d'une robe jaune et doté d'ailes roses dorées, tient Habaquq dans ses mains. Ce dernier porte un chaudron dans la main droite et un panier dans la main gauche. Il est vêtu d'une bure grise. De son côté, Daniel est représenté dans ce qui ressemble davantage à un puits qu'à une fosse. Il est accompagné de deux lions blasés, désintéressés, aussi contraints que Daniel de se trouver là. À droite, le roi Cyrus et ses émissaires assistent à la scène.

18 Représentation de Cyrus et Daniel devant le temple de Bel

14e s.

Anonyme, Cyrus et Daniel devant le temple de Bel (encres et pigments naturels sur parchemin, ca. 1330), 45,5 cm x 32 cm,

dans Petrus Comestor et Guiart des Moulins (trad.) Bible historiale, f. 219v, n°0022, Bibliothèque Sainte-Geneviève→ Paris,

© CC Initiales→

Précédé du titre en moyen français : « Ici commence l'histoire de Bel et du dragon par Daniel », cette miniature illustre le moment où Daniel expose la supercherie des prêtres de Bel. 

21 Représentation de Daniel détruisant l'idole de Bel et le dragon

14e s.

Anonyme, Daniel détruisant l'idole de Bel - Daniel empoisonnant le dragon sacré des Babyloniens, (encres et pigments naturels sur parchemin, ca. 1340 - 1350), 39,5 cm x 27,2 cm,

dans Petrus Comestor et Guiart des Moulins (trad.), Bible historiale, f. 251v, H 049, BU Médecine→ Montpellier,

© CC Initiales→

Le roi désavoué, les prêtres condamnés, Bel est désormais entre les mains du prophète Daniel. Le piedestal vide, la tête renversée, l'idole s'apprête à retourner d'où elle vient, des tréfonds de la terre, des enfers mêmes. À droite, Daniel tue le dragon des Babyloniens lui jetant dans la gueule une mixture de poix, de graisse et de poils.

26 Variations médiévales sur Daniel tuant le dragon Cette scène maintes fois représentée dans l'iconographie médiévale, apparaît aussi bien dans les bibles elles-mêmes que dans la littérature des « miroirs ».

12e s : Le dragon façon puzzle 

Anonyme (Espagne du nord), Daniel empoisonnant le dragon sacré des Babyloniens devant Cyrus (encres et pigments sur parchemin, 1197), 24 cm x 16,5 cm,

dans la Bible de Pampelune, f. 139v, n°0108, Bibliothèque Municipale→ Amiens,

© CC Initiales→

C'est morcelé, en pièces, que le dragon est présenté dans cette Bible en images. Il n'est pas empoisonné, mais bel et bien découpé en morceaux. Dans la vignette supérieure, on aperçoit Daniel, un bâton de marche à la main, écouter le roi.

Les deux cases sont encadrées par deux inscriptions qui reprennent les versets Dn 14,26-27 de la Vulgate en latin médiéval abrégé : « Tulit [ergo] daniel pice[m] [et] adipe[m] [et] pilof [et] cox[it] parit[er] fec[it]q[ue] maffas» et « [et] dedit i[n] of drachom [et] dirupt[us] e[st] dracho [et] dix[it] ecce que colebaf.».

15e s. : Quand le diable s'invite

Voici une gravure colorée, précédée d'une légende, écrite en français moyen : « Comment Daniel detruit Bel et le dragon au quatorzième chapitre de Daniel. »

Anonyme, Daniel empoisonnant le dragon sacré des Babyloniens (encres et pigments sur papier, 1482), 

dans Julien Macho (trad.) Mirouer de la redempcion de l'umain lignage, f. 370v, Inc. 1043, Bibliothèque Municipale→, Lyon

© CC Initiales→

 Revêtu d'une tunique rouge bordeaux et d'une ceinture, ce Daniel du Bas Moyen Âge s'empresse de jeter dans la gueule du dragon une masse en forme de pierre.

Un indice typologique

En arrière-plan, le prophète semble s'être procuré les ingrédients chez le diable. Serait-ce une licence artistique ?

Dans cette miniature, comme dans les paragraphes qui l'encadrent, un rapprochement est fait entre Daniel empoisonnant le dragon et le diable qui tente Jésus en Mt 4,1-11. En effet, le diable à l'arrière-plan qui concocte la mixture est le même qui a tenté le Christ. Ce parallèle est attesté par la description du jeûne de Jésus qui flanque cette image : 

  • « Le diable voyant que Jésus-Christ ayant faim et voulant tester s'il était dieu le tempta par le péché de gloutonnerie et lui dit : Si tu es le fils de Dieu, dis que ces pierres soient transformées en pain. Jésus répondit : L'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toutes les paroles qui procèdent de la bouche de Dieu. Ainsi, Dieu vainquit le diable au péché de gloutonnerie, lequel mystère nous a été figuré par Daniel au temps de Nabuchodonosor en son dieu Bel qui adorait et au dragon aussi. »

Le diable représente le lien qui unit Daniel et Jésus : le premier met à mort les idoles gloutonnes, tandis que le second congédie la tentation par la faim : « Daniel qui détruit les dieux gloutons signifie Jésus-Christ qui confondit le diable qui le tenta de gloutonnerie ». 

La typologie biblique était fréquente au Moyen Âge en général et dans la littérature du miroir en particulier. On retrouve ce même rapprochement dans le Speculum humanae salvationis tchèque.

Anonyme, Daniel et Bel - Daniel empoisonnant le dragon sacré des Babyloniens, (encres et pigments naturels sur parchemin, ca. 1420), 30,9 cm x 21,6 cm,

dans Speculum humanae salvationis, f. 015v, n°III.B.10, Knihovna Národního muzea→ Prague,

© CC Initiales→

5 Ne vois-tu pas tout ce qu’il mange et boit chaque jour ? Bel, l'idole tournée en ridicule

15e s.

Anonyme (France du sud-est), Daniel, Bel et le dragon sacré des Babyloniens (encres et pigments sur parchemin, ca.1470-1480), 40,8 cm x 28 cm,

dans Speculum humanae salvationis, f. 013v, n°0089, Bibliothèque Municipale→ Marseille,

© CC Initiales→

 Cette miniature est tirée du Miroir du salut humain, un traité théologique qui reprend le principe de la typologie biblique, c'est-à-dire la confrontation de scènes de l'Ancien et du Nouveau Testament. En effet, celle-ci jouxte la tentation de Jésus dans le désert.

Elle représente le prophète Daniel accompagné de Bel et du dragon. Ce qui saute aux yeux, c'est la représentation caricaturale de l'idole. Bel apparaît en culotte, doté d'un corps grand mais frêle, tenant dans la main gauche une coupelle et dans la main droite un cuissot. Cette image contraste avec l'image que le roi de Perse se fait de lui. Cette représentation est d'autant plus surprenante qu'elle donne à une statue d'airain et d'argile l'apparence anthropomorphe. 

À droite, le prophète Daniel se distingue avec son chapeau en forme conique et ses larges rebords. Ce type de couvre-chef est souvent associé aux figures d'alchimistes, de sages ou de magiciens dans l'art médiéval. Il ressemble également à la coiffe juive médiévale.