La Bible en ses Traditions

Ézéchiel 2,6–3,15

M V
G S

Toi, fils d’homme, ne va donc pas les craindre

et ne crains pas

Vni redouter leurs paroles

Vdiscours

parce que des chardons et des épines

Vdes incrédules et des subversifs sont avec toi et c'est avec des scorpions que tu habites : 

leurs paroles, ne les crains pas et leurs visages, ne t'en effraie pas 

car ils sont

Vcar c’est une maison de rébellion !

Vexaspérante ! 

...

M G V
S

Et tu

VTu leur diras donc mes paroles

s'ils écoutent

Gs'ils écoutent ou s'ils sont terrifiés

V(s'ils viennent à écouter et à se taire, parce que ce sont des rebelles

Vdes provocateurs)

Gune maison exaspérante.

...

M V
G S

Mais toi, fils d’homme, écoute ce que je te dis, quoi que ce soit, 

et ne sois pas rebelle

Vm'exaspère pas comme [cette] maison de rébellion

Vqui est exaspérante :

ouvre la bouche et mange ce que je te donne, quoi que ce soit.

...

M G
S
V

Et je vis et voici qu’une main était tendue vers moi et voici qu’en elle il y avait un rouleau de livre.

...

Et je vis... et voici, une main fut envoyée vers moi dans laquelle se trouvait un livre enroulé

et elle le déploya devant moi 

(il était écrit au-dedans et au-dehors) : 

y étaient écrits lamentations, incantation et malédictions.

10 il le déroula devant moi

et il était écrit en dedans et en dehors 

et ce qui y était écrit était des lamentations, un soupir et des plaintes.

10 ...

10  

M V
G S

3,1 Et il me dit : — Fils d’homme, ce que tu trouveras

Vce que tu trouves, quoi que ce soit, mange-le !

Mange ce rouleau et vite, va parler aux fils d’Israël !

...

3,2 J’ouvris la bouche et il me nourrit de ce rouleau.

...

3,3 Et il me dit : — Fils d’homme, ton ventre mangera et tes entrailles seront remplies

de ce rouleau que moi, je te donne. 

Et je le mangeai, et il devint dans ma bouche doux comme le miel.

...

3,4 Et il me dit : — Fils d’homme, va vite trouver la maison d’Israël, et tu leur diras mes paroles ;

...

3,5 car ce n’est pas vers un peuple au parler obscur et à la langue inconnue que tu es envoyé, mais vers la maison d’Israël !

...

3,6 ni vers des peuples nombreux au parler obscur et à la langue inconnue

dont tu ne pourrais pas comprendre les paroles 

(mais qui, si c'était vers eux que tu avais été envoyé, t'écouteraient) !

...

3,7 Mais la maison d’Israël refusera de t’écouter puisqu’ils refusent de m’écouter ;

et surtout, toute la maison d’Israël a le front insolent et le cœur endurci...

...

3,8 Voici, j’ai rendu ta face plus dure

Vpuissante que leurs faces

et ton front plus dur que leurs fronts ;

...

3,9 comme un diamant plus dur que le roc

V, comme une pierre dure, j'ai rendu ta face :

ne les crains pas et ne redoute pas leur face, puisqu'ils sont

Vpuisque c’est une maison de rébellion.

Vexaspérante. 

...

3,10 Et il me dit : — Fils d’homme, toutes les paroles que je te dirai,

Vdis, 

saisis-les dans ton cœur et écoute-les de tes oreilles !

10 ...

3,11 Va vite, rends-toi en exil vers les enfants de ton peuple

tu leur parleras et tu leur diras :

— Voici ce que dit le Seigneur YHWH

VDieu, s'ils viennent à écouter et à se taire.

11 ...

3,12 Et l'esprit m'enleva et j’entendis derrière moi le bruit d'un grand ébranlement :

— Bénie soit la gloire de YHWH

Vdu Seigneur depuis son lieu ! 

12 ...

3,13 le bruit des ailes des créatures qui battaient l’une contre l’autre,

le bruit des roues à leurs côtés

Vqui suivaient les créatures et le bruit d’un grand ébranlement

13 ...

3,14 et puis l’esprit me souleva et m'enleva ;

je m’en allai, plein d'amertume, dans l'indignation de mon esprit

et la main de YHWH

Vdu Seigneur était sur

Ven effet avec moi, dure

V pour me réconforter...

14 ...

3,15 Et j’arrivai en exil, à Tel Aviv

Và un tas de fruits nouveaux,

vers ceux qui habitaient près du

Vle long du fleuve Chobar

VCobar

et là où

Vje m'assis là où ils demeuraient

Vétaient assis 

et j'y demeurai sept jours désolé au milieu d’eux.

15 ...

Réception

Musique

3,15 Lamentation au bord du fleuve La désolation des exilés se fait entendre dans le célébrissime « chœur des esclaves » de Giuseppe Verdi, Nabucco qui évoque la détresse des juifs dans le chœur de la troisième partie, le Va, pensiero des Hébreux auxquels s'identifiait la population milanaise alors sous occupation autrichienne. Cet air célébrissime est tiré du troisième acte : sur les bords de l'Euphrate, les Hébreux, vaincus et prisonniers, se rappellent avec nostalgie et douleur leur chère patrie perdue.

Giuseppe Verdi (1813-1901) Nabucco, Va pensiero, ou « Chœur des esclaves », Livret : Temistocle Solera, opéra en quatre actes tiré d'Auguste Anicet-Bourgeois et de Francis Cornu, Nabuchodonosor, drame (1836), Scala de Milan, 1842

Riccardo Muti dir., Chœur et orchestre de l'Opéra, Théâtre Costanzi, Rome (Italie), juillet 2013

© Licence Youtube standard, Ps 137 (136) ; Ez 3,15 ; Lm 3,48 ; 5,14 ; Is 24,8 ; Jr 25,10

Paroles 
  • "Va', pensiero, sull'ali dorate; — Va, ti posa sui clivi, sui colli, — ove olezzano tepide e molli — l'aure dolci del suolo natal! — Del Giordano le rive saluta, — di Sionne le torri atterrate… — Oh mia Patria sì bella e perduta! — O membranza sì cara e fatal! — Arpa d'or dei fatidici vati, — perché muta dal salice pendi? —— Le memorie nel petto raccendi, — ci favella del tempo che fu! —  O simile di Solima ai fati, — traggi un suono di crudo lamento; — o t'ispiri il Signore un concento — che ne infonda al patire virtù!"
  • "Va, pensée, sur tes ailes dorées, — Va te poser sur les versants, sur les collines, Où embaume, tiède et suave, — L'air doux de la terre natale ! — Salue les rives du Jourdain, — Les tours renversées de Sion. — O, ma patrie, si belle et perdue ! O souvenir, si cher et funeste ! — Harpe d'or des prophètes du destin, — Pourquoi, pends-tu, muette, aux branches du saule ? — Ravive les souvenirs gravés dans nos coeurs,— Parle-nous du temps passé ! — Rappelle-nous le sort de Solime — Dans une complainte aux tristes accents, — Laisse le Seigneur t'inspirer une harmonie — Qui nous donne la force d'endurer nos souffrances !"

Texte

Procédés littéraires

2,6 des incrédules et des subversifs sont avec toi (V) INCULTURATION Allusion à la littérature classique ? Le fier grammaticus disciple de Donat qu’est Jérôme, semble ne pas résister au plaisir de nouer des liens entre le texte qu’il compose par sa traduction, et des passages de la grande littérature latine. L’elocutio (choix des mots) de Ez 2,6 semble ici faire écho à l’historien Tacite et son œuvre les Annales :

  • Le texte massorétique propose : סָרָבִים וְסַלּוֹנִים אוֹתָךְ
  • Jérôme traduit : « des incrédules et des subversifs sont avec toi (increduli et subversores sunt tecum)
  • On trouve chez Tacite : « Alors Pompée, consul pour la troisième fois, fut choisi pour réformer les mœurs et ses remèdes furent pires que ne l’étaient les fautes : à la fois auteur et destructeur de ses propres lois (legum suarum auctor idem ac subversor), il perdit par les armes ce qu’il voulait soutenir par les armes. (Tacite Ann.  III, 28)

Dans son Commentaire sur Ézéchiel, Jérôme précise ce qu'il entend par « subversores » : « Ils feront cela parce qu'ils sont incrédules et méprisent les commandements de Dieu. » (Hoc autem facient, quia increduli sunt et Dei imperia contemnentes) (Jérôme Comm. Ez.). Le sens de « mépriser » (contemnere) doit être compris non pas comme la négligence ou le dédain des commandements, mais comme leur renversement, voire leur destruction. C'est dans ce sens très précis que Tacite l'emploie également, lorsqu'il rappelle que Pompée détruisait les décrets qu'il avait lui-même édictés. Cette façon de s’exprimer n’est pas habituelle. Nous pouvons donc supposer que Jérôme a repris le mot de Tacite.

Anonyme, Femme tenant des instruments d'écriture (tablette de cire et stylet), (fresque, 1er s. apr. J.-C.), diam. 37,5 cm

Villa di Giulia Felice, Pompéi, Italie, Musée archéologique national de Naples, photo : Carole Raddato © CC-BY-SA-2.0→

 Parfois identifiée comme la célèbre poétesse Sapho, cette femme portant, songeuse, son stylet à ses lèvres — comme en quête du juste mot à écrire sur sa tablette de cire—, n'est-elle pas un beau symbole de la quête d'inspiration des auteurs antiques ?