Un projet du Programme de Recherches La Bible en ses traditions AISBL
Dirigé par l’École Biblique et Archéologique Française de Jérusalem
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21 Et ils contraignent
Vréquisitionnèrent un passant, un certain Simon le Cyrénéen, qui revenait de la campagne,
le père d’Alexandre et de Rufus,
afin de porter sa croix.
21 PARALITURGIE Chemin de croix : cinquième (et sixième) station
Les deux stations sont sur le même panneau sur le bas-côté gauche de la nef. Au bord du chemin, un homme et une femme viennent soulager Jésus. « Le Sauveur est debout, il n’en peut plus. Alors Simon de Cyrène, homme rude et bon, apparaît, l’entraîne, lui et sa Croix » (Bourgeois). L’artiste semble avoir prêté son propre visage à Simon de Cyrène (Ritter). Dans ce pays où il a traversé la guerre des tranchées et la perte de son fils de 17 ans, Desvallières a pris et prend encore sa part aux souffrances du Christ. Le docteur Vallon a visité l’atelier du peintre en 1931 et y a vu trois stations du futur Chemin de Croix d’Alsace dont celle-ci : « Ce fut alors seulement, que, convenablement préparé je me suis autorisé à contempler sur les ascétiques cimaises, blanchies à la chaux, les grandes toiles du Chemin de Croix de Georges [sic] Desvallières [...] Desvallières porte la Croix. Avec elle, il est tombé autant de fois que Jésus et il lui a suffi d’interroger sa propre douleur pour nous raconter (en quels termes poignants !) l’écrasement d’un homme par l’inhumain fardeau. Il a trébuché sur les pierres roulantes des chemins du Golgotha. Pendant que la charité du Cyrénéen le remplaçait, un instant, sous la Croix, il s’est étiré, comme Jésus, et la douleur de ses reins lui a arraché un sourd gémissement. Avec le Christ, il a gravi le Calvaire [...] » (Vallon). Plus loin après l’arche devant la ville de Jérusalem illuminée par un rayon de soleil, dans le prolongement, la sixième station représente alors une femme, Véronique, sous les traits de la maîtresse de maison qui accueille alors le peintre à Ruelisheim. Avec une compassion émouvante, elle essuie délicatement le visage de Jésus, « sa sueur et son sang. Pour trouver une foi de la qualité de celle-ci, il faudrait remonter le cours des âges, s’enfoncer, à tâtons, dans la nuit médiévale » (idem).
Le visage du Christ de douleur s’imprime lumineux, sur le voile de Véronique qui s’est avancée à travers les lances ennemies menaçantes sur le fond noir du ciel. La femme, qui vient d’accomplir son geste bienveillant, ferme les yeux devant la vision du supplice et renverse son visage en arrière. Cette grande scène rectangulaire invite le fidèle au recueillement et au courage : comme Véronique, il doit braver les dangers. Cette station se trouve « sous les fresques de Marguerite Hanin et de Melle Roisin qui célèbrent, à travers la figure de saint Bernard ou le Concordat de Worms, “ l’Église [qui] étend ses bienfaits à toute l’Europe ” » (Rinuy).
Jésus en son chemin passe par des espaces nouveaux, dans des villages, et ici un jour de mariage. Un mariage à la polonaise : tout à fait au fond, on voit une église, un couple de jeunes mariés : Il passe dans la vie, Il passe aussi dans la joie. Simon de Cyrène est issu du peuple. Il a une moustache, il a les cheveux blancs. Il y a des gens qui travaillent. Il y a même un violon, un violoniste qui joue ! Mais, pour quelques instants, la fête semble s’arrêter ; parce qu’il n’y a peut-être pas d’amour sans Passion, il n’y a pas de vie sans la réalité de ceux qui œuvrent, de cet homme au fond sur la gauche avec un béret, de cette petite fête de village, parmi les paysans qui sont endimanchés. Il y a en cette croix le bouquet de la mariée, et devant, tout à fait devant, au pied de Simon de Cyrène, une bouteille vide et un verre. Et à droite, il y a du pain, ce pain jeté à terre, ce pain Corps du Christ, ce sac de blé, de farine : le pain de la fraction, le pain du sacrifice, ce Pain qui avance, ce Pain de Vie qui au levain de la foi va donner la Vie. (J.-M. N.)