La Bible en ses Traditions

Philippiens 1,7–11

Byz V TR Nes
S

De même il est juste pour moi de penser cela au sujet de vous tous

parce que je vous porte dans mon cœur, vous, qui dans mes liens

ainsi que Byz V Nesdans la défense et l'affermissement de l’Évangile,

êtes tous associés à ma grâce.

Vjoie.

De même il est juste pour moi de penser au sujet de vous tous

parce que dans mon cœur vous êtes établis vous qui, dans mes liens

ainsi que dans ma défense de la vérité de l’Évangile,

êtes associés à ma grâce.

 

Byz V S TR Nes

Car Dieu m’est témoin

comme je languis après vous tous dans les entrailles du Christ Jésus !

Voici donc ce que je demande dans ma prière :

que votre amour

Vcharité surabonde toujours plus en connaissance

Vscience et en toute espèce d'acuité

Stout discernement spirituel 

10 pour mettre à l'épreuve les choses qui diffèrent

Vapprécier ce qui est le meilleur

afin d’être purs et irréprochables pour le jour du Christ

11 comblés des fruits

V Nesdu fruit de la justice par Jésus Christ

VJésus-Christ pour la gloire et la louange de Dieu.

11 fruits Ph 1,22 ; Mt 21,34 ; Jn 15,2-8.16 ; Rm 1,13 ; 6,22 ; Ga 5,22 ; He 12,11 ; Jc 3,17-18

Texte

Vocabulaire

10a pour apprécier ce qui est le meilleur (V)  ut probetis potiora, en Rm 2,18, on trouve une expression semblable : probas utiliora « tu discernes ce qui est plus utile ». Fillion commente : « c'est-à-dire ce qui est meilleur, plus parfait. Le grec peut signifier aussi : les choses qui diffèrent, ou la différence qui existe entre le bien et le mal, ce que Dieu ordonne et ce qu'il défend. » (Fillion, 8,31) ; « Capables de distinguer le vrai du faux, le bien du mal et de pratiquer toujours ce qui est juste et droit [...] » (Fillion 8,372).

  •  « À la suite de la Vulgate (ut probetis potiora, l'Ambrosiaster a traduit : ut probetis quae sunt utilia), certains commentateurs entendent que le chrétien choisit les choses qui sont excellentes, qui l'emportent, le plus parfait (Bengel, Estius, Meyer, J. B. Lighfoot, Ch. Bruston [...]). » (2,239, note 2). 

10b purs (G) eilikrinês Hapax paulinien Eilê splendor solis, krinô, ad splendorem solis probatus, purus, candidus, nullo vitio corruptus. (Zerwick Analysis philologica). Eilikrinês est un hapax paulinien. Dans le NT, il se trouve seulement en 2P 3,1. Paul utilise le nom eilikrineia en 1Co 5,8 ; 2Co 1,12.2,17 (cf. Zorell Lexicon ; Spicq 1959, 2,241).

11 fruit Sens religieux et moral de « fruit » 

fréquent dans la Bible :

11 fruit de justice Locution paléo-testamentaire Cf. Is 32,17 ; Am 6,12 ; Pr 11,30 ; He 12,11 ; Jc 3,18.

Propositions de lecture

9ss Une prière transformée en exhortation

Le rôle de l'agapê dans la vie chrétienne

  • Spicq 1959 « Conformément à l'usage, saint Paul associe, dans le prologue de sa lettre, action de grâces et prière, et sa demande du v.9 ne paraît pas originale ; c'est une reprise de 1Th 3,12 [...]. Toutefois, la finale du verset et les précisions des v.10-11 apportent un complément d'une extrême importance sur le rôle de la charité dans la vie chrétienne. Ces trois versets (9-11) sont les plus denses et les plus précis du NT sur l'influence de l'agapê au point de vue intellectuel et moral, en ce monde ou en l'autre » (2,234).
La croissance de la charité entraîne une connaissance profonde de Dieu et une sensibilité affinée
  • Spicq 1985 Puisque seul Dieu illumine « les yeux du coeur pour faire voir » (Ep 1,18 ; cf. Ph 3,15, etc.), il faut donc prier pour obtenir « cette grâce, qui est d'une part appelée à grandir sans cesse et d'autre part liée à la charité : plus l'amour s'accroîtra et plus la connaissance (Vocabulaire Ph 1,9b) sera profonde et la sensibilité plus affinée (Vocabulaire Ph 1,9b) : ''Ce pour quoi je prie, c'est afin que votre amour de charité abonde encore de plus en plus en connaissance et en toute perception morale (ou clairvoyance), pour que — discernant le meilleur — vous soyez purs et irréprochables pour le jour du Christ'' (Ph 1,9s). Dans cette prière, qui est aussi une exhortation, l'accent est sur le verbe ''abonder'' (Vocabulaire Ph 1,9b) qui évoque un jaillissement croissant de grâces. On évoquera d'abord une connaissance exacte de Dieu révélé en Jésus-Christ, par opposition à l'ignorance païenne ou à l'aveuglement des Juifs (Rm 1,28.10,2 ; Col 1,10.2,2), puis une connaissance pratique impliquant un renouvellement de la vie morale (Rm 3,20 ; Ep 1,17 ; Col 1,9), enfin et surtout une réflexion de plus en plus poussée ou mieux un amour attentif et fidèle, car rien ne donne d'intuition et de pénétration à l'intelligence comme l'amour, notamment cette agapê qui est ''amour de la vérité'' (2Th 2,10), mais surtout est l'amour dont Dieu s'aime lui-même et qui nous aime, et qu'il verse dans nos coeurs (Rm 5,5). Comment ne serait-il pas apte à saisir la volonté de Dieu, ce qui lui est agréable, et tout porté à l'accomplir ? L'amour est essentiellement complaisance, se plaire en quelqu'un ; ici il est lucide, il rend intelligent, il ''sent'' (Vocabulaire Ph 1,9b) ce qu'il faut faire ou éviter, afin d'être toujours d'accord avec le Seigneur et s'ajuster à ses vouloirs « (149).

9b charité (G) Agapê dans l'éthique chrétienne

Il s'agit de la participation à l'amour de Dieu

Spicq 1959 « L'agapê dont il s'agit n'est déterminée par aucun complément d'objet. On aurait donc tort de préciser qu'il s'agit d'amour envers Dieu ou le prochain. L'Apôtre comprend la charité comme une grandeur autonome, exprimant la vie chrétienne elle-même en ce qu'elle a d'essentiel (cf. 1Co 13), et spécialement comme source d'énergie et de rayonnement dans la vie morale et religieuse. Lorsque saint Paul parle de charité, il évoque moins ses objets que sa source, il pense d'abord à la charité qui vient de Dieu et du Christ, et qui nous ''étreint'' (2Co 5,14). Dans un contexte de prière, cette nuance est certaine. L'Apôtre demande à Dieu de communiquer une participation toujours plus abondante de son amour aux Philippiens. 

L'accroissement de cette participation à l'amour divin entraîne une connaissance profonde de Dieu et un affinement du sens moral

On savait déjà par Ep 3,17-19, que l'agapê parvenue à un certain degré de croissance donne de la pénétration à l'intelligence ou qu'elle exerce une activité spéculative, elle illumine les yeux du coeur (Ep 1,17s). C'est cette pensée que saint Paul reprend ici, en l'accentuant avec une vigueur exceptionnelle. Si la charité des Philippiens doit grandir, c'est dans un sens très déterminé, en epignôsei kai pasêᵢ aisthêsei. Selon la construction perisseuein en (Rm 15,13 ; 2Co 8,7), en effet, c'est l'amour lui-même qui s'épanche ou s'exerce dans le domaine de la connaissance (Vocabulaire Ph 1,9b). N'est-il pas agapê tês alêtheias (2Th 2,10) ? » (2,235). « À cette connaissance, saint Paul ajoute l'affinement du sens moral » (Vocabulaire Ph 1,9b). On conçoit qu'une telle perception soit affinée par l'agapê. Seul un amour total et exclusif ''sent'' ce qui peut plaire ou déplaire, à l'être aimée : seule l'agapê, issue de Dieu, peut révéler comment correspondre en tout à la volonté de Dieu » (2,237s).

Au v. suivant on comprend que la charité exerce l'office de discernement, d'appréciation et de choix (Vocabulaire Ph 1,10a).

  • Spicq 1959  « La charité exerce son rôle d'appréciation et de choix par l'intermédiaire de l'epignôsis et de l'aisthêsis, « mais saint Paul déclare que c'est l'amour qui enrichit le chrétien de meilleures lumières sur Dieu et avive sa sensibilité religieuse et morale. C'est une grande étape franchie dans l'élaboration de l'éthique de la nouvelle Alliance, toute entière fondée sur l'agapê envers Dieu et le prochain. Objectivement, la Loi et les prophètes dépendaient de ce double précepte. Il est désormais acquis que le chrétien, non seulement s'ajuste à cette exigence de l'amour — sa seule règle, alêtheuontes en agapêᵢ (Ep 4,15) — mais qu'il se décide subjectivement à agir et se conduit pratiquement sous la lumière et la motion de la charité. C'est l'agapê qui inspire, commande ses facultés morales, à telle enseigne qu'elle lui fournit les critères du bien et du mal » (2,238s).

10a pour mettre à l'épreuve ce qui diffèrent (G) Expression énigmatique

  • Spicq 1959 Cette sentence eis to dokimazein humas ta diapheronta, dépend de hina perisseuêᵢ : « Si l'accroissement de la charité rend la connaissance de Dieu et du Christ plus pénétrante, et le sens moral plus délicat et plus aigu, c'est pour aboutir littéralement ''à mettre à l'épreuve les choses qui diffèrent''. L'expression est énigmatique parce que dokimazein aussi bien que ta diapheronta ont des acceptions très variées ; mais pour un disciple de saint Paul, elle évoque une notion morale majeure et précise » (2,238).

10b purs et irréprochables Expression redondante à valeur de superlatif

  • Spicq 1959 « Le chrétien est sans tache (Vocabulaire Ph 1,10b), ni reproche (Vocabulaire Ph 1,10b) dès lors qu'il a agi par amour de Dieu et du prochain. Il n'y a de vertu que celle que l'agapê suscite et anime­. La double notation eilikrinês-aproskopos peut être considérée comme évoquant l'aspect positif et négatif de la perfection morale, mais plutôt comme une expression redondante, ayant valeur de superlatif : absolument irréprochable et marchant droit » (2,241).

10b pour le jour du Christ Perspective eschatologique

  • Spicq 1959 « Cette innocence parfaite est requise et prend toute sa valeur en fonction de la perspective : eis hêmeran Christou, c'est-à-dire de la comparution devant le tribunal du Christ (cf. Ph 1,6.2,16 ; Ep 4,30 ; 2Tm 1,12). La formule hina... eis accentue fortement la perspective eschatologique qui domine la croissance de la charité (Vocabulaire Ph 1,9b). Celle-ci joue son rôle de discernement moral durant la vie terrestre ; c'est à elle qu'il appartient d'établir une hiérarchie des valeurs, d'apprécier et de retenir comme sa propriété ce qui va dans le sens de l'amour de Dieu et du prochain. Moyennant quoi, le chrétien vit en vrai disciple du Sauveur ; sa conduite est en harmonie avec sa foi. Il en résulte qu'il n'a rien à redouter au jugement final (1Jn 4,18 ; Jude 24s). Grâce à l'aisthêsis (Vocabulaire Ph 1,9b) de la charité, irréprochable, il ne sera pas condamné. C'est l'agapê qui sauve ! » (2,242).

11 comblés du fruit de justice La fécondité de la charité débordante ne se limite pas à une garantie d'innocence, d'immunité (Propositions de lecture Ph 1,10b). Le v.11 confirme que l'expression « purs et irréprochables » ne s'entend pas dans une acception purement négative. Il ajoute que la vie morale inspirée par l'agapê produit une plénitude de biens, l'authentique perfection.

  • Spicq 1959 « Celle-ci est exprimée par la locution paléo-testamentaire : ''un fruit de justice'' (Vocabulaire Ph 1,11). Il s'agit de ces bonnes oeuvres et vertus issues de la rectitude intérieure, de cette intention d'amour qui donne valeur à tout. Ce fruit qui est la vie chrétienne elle-même, est surabondant et définitivement acquis » (2,242).

11 fruit de justice par Jésus Christ

Tout le bien que nous faisons est par le Christ

  • Spicq 1959 « [...] le Pharisien converti ne peut écrire ''justice'' →Dikaiosunê au sens d'oeuvre de l'homme valable devant Dieu, sans faire la correction chrétienne et prévenir une méprise : Ce fruit, c'est le Christ qui le fait mûrir et lui donne sa qualité. Ce n'est qu'en Lui qu'on peut obtenir une plénitude surnaturelle (Col 2,10) » (2,242).

Vocabulaire

9b acuité Hapax NT Gr : aisthêsei, litt. « perception » ; la capacité à percevoir et estimer une situation précise, le tact. Cf. G-Pr 5,2 ; 14,7 ; 15,7.

Cet hapax néotestamentaire « s'emploie dans l'usage profane soit de l'acte de sentir (sensation), soit de la faculté (sensibilité) ; au sens 1er de perception sensible, il passe à celui de discernement moral, perception spirituelle, que le livre des Proverbes a consacré dans la langue biblique (aisthêsis, 22 fois dans Pr, sur 27 dans l'AT. Cf. les vêtements du grand prêtre confectionnés par des tailleurs habiles, qui ont un pneuma aisthêseôs (Ex 28,3)) [...] » (Spicq 1959, 2,237).

  • Spicq 1985 « Le mot aisthêsis, que l'on traduit parfois ''tact affiné'' s'entend aussi bien de la sensation que de l'intelligence, mais accentue ici la nuance morale de la connaissance susdite (cf. He 5,14), elle saisit la qualité des choses ; ce serait le ''sens moral'' qui incline, oriente vers la décision pratique pour bien agir. Elle est le privilège des justes (Pr 11,9), des sages (Pr 10,14), des prudents (Pr 14,6), des avisés (Pr 12,23), inhérente à une réflexion judicieuse. Or l'agapê affine singulièrement cette faculté psychologique et morale, cette sensibilité religieuse » (149, note 29). 
  • Spicq 1959 « Le livre des Proverbes est précisément écrit pour en instruire les coeurs droits (Pr 1,4) qui se signalent par cette prudence avisée et circonspecte, ho agapôn paideian agapaᵢ aisthêsin (Pr 1,21). En liaison avec l'epignôsis, l'aisthêsis serait donc le sens moral, une conscience lucide et délicate qui réagit d'instinct dans le sens de la volonté de Dieu » (2,235).

9b connaissance spirituelle Le substantif epignôsis signifie « connaissance » spirituelle : capacité à reconnaître le bien, à discerner. C’est un fruit de l’action de l’Esprit dans le croyant. V traduit par scientianotitia, cognitio, agnitio, etc.

Une connaissance profonde des choses divines

Vocabulaire Rm 1,28a ; 3,20b ; 10,2b ; Vocabulaire Rm 10,2b ; Vocabulaire Ep 1,17b ; cf. Vocabulaire Ep 4,13a

  • Spicq 1959 « epignôsis, sans article et sans complément, peut avoir plusieurs significations. À coup sûr, il vise d'abord l'objet de la foi, le contenu de l'Évangile (Ep 1,17 ; 1Tm 2,4.4,3 ; Tt 1,1 ; 2Tm 3,7 ; He 10,26 ; cf. Rm 1,28.10,2) : La charité connaît, analyse et réalise toutes les richesses, du salut, et d'abord le Christ et son amour infini (Ep 1,17s.3,17s.4,13 ; Col 2,2. Le sens ''d'expérience, réalisation'' est bien attesté dans Rm 3,20). Mais c'est dire que cette connaissance est aussi celle de la volonté divine, comme le suggèrent eis to dokimazein du v.10 (cf. Rm 2,18.12,2) et surtout Col 1,9s, tên epignôsin tou thelêmatos autou (cf. Phm 6 ; Ep 5,17 : Comprenez (suniete) quelle est la volonté du Seigneur ; Ep 5,10 : discernant ce qui lui est agréable). Ainsi le progrès de la charité se déploie dans une activité contemplative, pénétrant toujours plus avant dans l'intelligence du mystère divin, et dans une perception mieux éclairée des desseins et de la volonté de Dieu. Ces deux objets ne sont pas dissociables, car la charité qui saisit plus clairement la transcendance de Dieu et l'infini de son amour, comprend beaucoup mieux ses exigences de sainteté et de charité réciproque. Il s'agit en définitive, de la connaissance religieuse et vivante propre à l'homme nouveau : endusamenoi ton neon ton anakainoumenon eis epignôsin (Col 3,10). Grandir dans la charité, c'est parvenir à l'état adulte, et être en mesure d'exercer cette intelligence dont le baptisé a été doté » (2,235s).

9b abonde (G) Perisseuein : Verbe au présent progressif ou « surabonde ». Le verbe grec perisseuein signifie : être dans l'abondance, exceller, surabonder, surpasser, cf.Vocabulaire 2Co 1,5ab ; Vocabulaire 2Co 8,7ad ; Vocabulaire 2Co 2,4c.

  • Spicq 1959 « Le verbe perisseuein, aimé de l'Apôtre (Ph 1,26.4,12.18 ; cf. Rm 3,7), s'emploie de toutes les grâces accordées par Dieu et de la perfection chrétienne sous quelque aspect que ce soit (1Th 4,1.10 ; Rm 5,15 ; 1Co 14,12 ; 2Co 3,9.8,7), mais d'abord de l'agapê (1Th 3,12 ; [...]) qui, plus que toute autre vertu, semble faite pour grandir. Si, de fait, elle est participation de l'amour même de Dieu, on conçoit qu'il ne peut y avoir de limite à sa croissance, et que le chrétien doive aspirer à s'enrichir de plus en plus de ce don ; d'où le verbe au présent progressif. Il ne s'agit même pas de plénitude à proprement parler, mais de dépassement. Si le verbe perisseuô ne signifie pas ce progrès au-delà de toute mesure, l'accumulation des termes eti mallon kai mallon dit bien cet excès : ''toujours encore plus'' (cf. 1Th 4,9-10). On n'aime jamais assez ; ou plutôt, jamais on n'est assez réceptif de ce don. C'est Dieu seul qui infuse la charité et l'accroît ; voilà pourquoi l'augment de la charité est l'objet privilégié de la prière chrétienne » (2,234s).

9b toute acuité Signification de la précision « toute » 

  • Spicq 1959 « La précision pasêᵢ fait allusion à ces détails de la vie ou à ces actions en apparence indifférentes, sur lesquels la ''connaissance'' ne donne aucune règle précise, mais où le coeur aimant sent d'instinct le choix à faire » (2,238, note 1).

10a pour mettre à l'épreuve  (G) Dokimazein  Spicq 1959 « Si le verbe dokimazô, en effet, a le sens de prouver (2Co 8,8), (Vocabulaire 2Co 8,8b) et d'approuver (Rm 14,22), (Vocabulaire Rm 14,22c), il a d'abord celui d'examiner, se livrer à une enquête ou faire une épreuve, en vue d'apprécier et de juger, et finalement retenir ce qui est valable.

La dokimasia est l'examen ou l'épreuve par lequel on vérifie la qualité d'une monnaie ou les aptitudes d'un candidat à une charge.

On est donc en droit de voir dans dokimazein la délibération et le jugement propres à la vertu de prudence. L'intérêt de ce texte est d'attribuer à l'agapê cet office de discernement, d'appréciation et de choix » (2,238). 

10a les choses qui diffèrent (G) ta diapheronta 

Le sens du participe présent neutre diapheronta 

  • Spicq 1959 « À la vérité, les 4 sens de diapherô sont attestés dans le NT : être distinct, différent (1Co 15,41 ; Ga 4,1), l'emporter, surpasser (Mt 6,26.12,12), se répandre (Mc 11,16 ; Ac 13,49), il importe (Ga 2,6). Il n'est pas facile de choisir ; mais le participe présent neutre diapheronta est un terme courant de la philosophie grecque et hellénistique, et ''discerner les différences'' — au plan moral — ne peut être qu'apprécier les valeurs respectives, choisir entre le bien et le mal. C'est bien l'activité que l'on pouvait attendre de l'aisthêsis et de sa dokimasia : Le chrétien soumet ses actions ou ses ''affaires'' à un examen critique, approuve celles qui sont bonnes, et qu'il importe de réaliser, rejette les autres » (2,239).

10b irréprochables (G) Aproskopos

  • Spicq 1959 « La valeur négative de aproskopos ''qui ne fait point de faux pas'' s'estompe au bénéfice de l'idée sous-entendue : La vie morale est une marche, peripatein en agapêᵢ (Ep 5,2) ; or la route peut cacher des pièges ; le manque d'attention et de précaution peut occasionner des chutes, en hodôᵢ aproskopôᵢ (Si 32,21). Le Siracide exhortait à ne rien faire sans avoir délibéré (aneu boulês, v.19). Il est probable que l'Apôtre se réfère à cette prudence qui est celle de l'aisthêsis, examinant et éprouvant toutes les conjonctures de l'action » (2,241).

11 comblés ou : remplis

Grammaire

11 fruit de justice Justice est génitif d'auteur 

  • Spicq 1959 « dikaiosunês n'est pas un génitif d'apposition ou de qualité, ayant valeur d'adjectif : le fruit qui consiste dans la justice, mais le fruit que la justice produit, Ga 5,22 ; Ep 5,9 » (2,242, note 5).

Propositions de lecture

7a de vous tous (G) huper | (V) pro Huper = peri (cf. Zerwick Analysis philologica ; Zerwick Gr. Bibl. 96 (69) p. 31s). Pro en latin postclassique signifie aussi « au sujet de » (cf. Blaise Dict.).

Vocabulaire

5.7d communion + êtes associés (G) koinôniaᵢ + sugkoinônous

Famille de mots structurant la lettre

Voc. de Paul « Il semble que ce soit l'emploi de cette famille de mots [le verbe koinôneô, le substantif koinônia et d'adjectif koinônos, formé à partir de koinos « commun »] dans les Philippiens qui en éclaire le mieux le sens ; en effet, les 6 emplois de koinônia et de ses composés structurent la lettre : Ph 1,5.7.4,14-15 encadrant Ph 2,1 et Ph 3,10. Or le 1er emploi désigne clairement une ''part active prise à'' l'annonce de l'évangile. Elle est explicitée par une participation des Philippiens aux épreuves de l'apôtre (Ph 1,7 et Ph 4,14), qui s'est concrétisée en une aide financière (Ph 4,15). Si Paul accepte des Philippiens seuls cette forme de koinônia, c'est qu'elle est le signe de la part qu'ils prennent à sa ''grâce'' d'évangélisateur, dans la défense et l'affermissement de l'évangile (Ph 1,7). En quoi consiste donc cette ''grâce de l'apôtre ? Elle passe par la ''conformation'' de sa propre vie à celle du Christ et par la participation à ses souffrances (Ph 3,10) dans l'attente de la résurrection ; la koinônia aux souffrances du Christ, c'est ce mouvement de don de soi et d'humiliation jusqu'à la mort sur la croix qui fut celui du Christ. À la suite de l'apôtre, c'est toute la communauté qui est appelée à conformer son ''corps d'humiliation'' pour devenir ''corps de gloire''. Se conformer au mouvement du Christ, c'est vivre en lui, en une unité où chacun reconnaît l'autre comme supérieur à soi ; c'est participer à l'Esprit (koinônia Pneumatos, Ph 2,1) qui donne à chacun des charismes différents.

Référence pour la compréhension des autres emplois pauliniens 

On comprend mieux alors, à la fois les emplois de Rm 12,13 (Vocabulaire Rm 12,13a) et Rm 15,26 (Vocabulaire Rm 15,26b.27b), visant la collecte, celui de Ga 2,9 où le signe des ''mains de communion'' fonde l'unité des évangélisateurs, et les expressions ramassées de 1Co 1,9 Vocabulaire 1Co 1,9 et surtout 1Co 10,16-17, où il s'agit de participer [sacramentellement au corps et au sang du Christ] pour vivre réellement de sa vie. Peut-être rejoint-on ainsi Ac 2,42 ? La koinônia, part prise à l'Esprit, fait de la vie de la communauté comme de celle de l'apôtre, un évangile vivant » (Roselyne Dupont-Roc, Communion, Avoir part (koinônia, koinônos), 16). Cf. →Communion, koinônia.

Réception

Arts visuels

1–30 Bénédiction

Johann Christoph Weigel (1654-1725), L'Épître de saint Paul aux Philippiens (gravure, 1695)

in Der Heiligen Apostel Geschichte und Episteln, letzlichen auch Die Hohe Offenbahrung S. Joannis : Nach anleitung Heyl. Schrifft in Bildnussen vorgestellt, éd. : Augsburg

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À terre, les chaînes de saint Paul, prisonnier pour l'évangile. Dans le ciel, la bénédiction de la croix du Christ, qui rappelle les adresses pleines de souhaits de grâces de saint Paul à ses destinaires.