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PARABOLE, allégorie, allégorisme, allégorèse

Le symbole étant la voie privilégiée de l’expression des réalités qui dépassent les catégories de la sensibilité ou de l’intelligence humaine, les écrivains bibliques ont recours à toutes sortes de genres et de procédés symboliques pour transmettre la Parole transcendante.

La parabole

La littérature ancienne biblique et juive offre quelques exemples de paraboles :

Du point de vue rhétorique

Une parabole est un lieu constitué par deux ou plusieurs figures élémentaires. Ces figures sont à la fois de type macrostructural (symbole, personnification, allocution, prosopopée, allégorie) et microstructural (comparaison, métaphore, métonymie).

Du point de vue thématique

La parabole se présente souvent comme le récit oral d’une succession d’états, de relations ou d’actions qui offrent une description indirecte sous forme de comparaison ou visent à produire chez l’auditeur un état spirituel déterminé.

Du point de vue pragmatique

La parabole, qui est généralement placée dans la bouche d’une autorité, représente un acte verbal constitutif de valeurs qui visent des effets réels : il s’agit de rendre l’auditeur conscient de sa situation ou de l’intégrer, par la structure argumentative même du récit, à un comportement qui corresponde dans le monde à l’ordre spirituel dessiné dans le récit.

On peut en rapprocher l’apologue, l’anecdote et l’exemple (lequel en principe n’est pas imaginaire). Toutes ces formes littéraires constituent des récits qui illustrent une certaine vérité. On peut également la comparer au mythe (récit symbolique instituant un équilibre de valeurs spirituelles ou sociales qui encadrent l’existence) et plus généralement aux procédés de l’art du māšāl. Toutes ces formes constituent des espèces du symbole.

L’allégorie

L'allégorie représente une forme de comparaison littéraire dans laquelle le comparé est appliqué à un comparant, élément par élément. Ce type de comparaison aboutit parfois à une personnification, ce qui la distingue de la simple métaphore filée. Parfois, le thème de la comparaison reste explicite. Souvent, le contexte suffit à l’indiquer. Il peut également rester inapparent, donnant à la comparaison l’allure d’une énigme. L’allégorie toutefois n’est pas nécessairement une figure obscure (Quintilien Inst. 8,6,44-59).

La parabole est donc un genre littéraire conventionnel tandis que l’allégorie représente un procédé littéraire susceptible de colorer diverses formes, dont la parabole.

Parabole et allégorie dans les évangiles synoptiques

Fonctions des paraboles de Jésus

Dans les évangiles synoptiques, les discours en paraboles constituent une bonne part de l’activité d’enseignement de Jésus (Mc 4,11).

  • Les paraboles construisent une sorte de discours de la méthode, de méta-discours, une énigme que certains comprendront et d’autres non (cf. Mc 4,13 « vous ne saisissez pas cette parabole ? Et comment comprendrez-vous… »).
  • Elles interviennent dans des discours polémiques (Mc 12) pour situer la mission de Jésus dans l’histoire d’Israël, au plus fort de la controverse avec les partis juifs officiels.
  • Elles remplissent parfois une simple fonction assertive : comme un cul-de-lampe en imprimerie, la parabole du figuier est une sorte de sceau mis aux paroles qui précèdent (Mc 13,28-29).
  • Dans d’autres cas, les paraboles exercent une fonction introductive au récit qui suit, celui de la Passion, par exemple : il ne s’agit plus seulement d’être attentif à un enseignement, mais de veiller dans l’attente de la fin des temps. Le procédé permet à Jésus de donner un enseignement profond (sur les mystères) ou vigoureux (sur la nécessité de la conversion).

Selon les évangélistes, l’usage des paraboles est donc lié à une intention de révélation et d’obscurcissement, qui se rapporte aux mystères du royaume. Destiné à exprimer les réalités accessibles aux sens, le langage ordinaire ne saurait suffire à l’expression des mystères. Les figures rhétoriques combinées dans les paraboles lui permettent pourtant de suggérer des significations nouvelles.

Jésus complété par les évangélistes ?

Le style des paraboles est très différent d’un évangile à l’autre. Les paraboles de Luc sont les moins allégoriques et, pour cette raison, ont parfois été considérées dans le passé comme plus authentiques. Cependant, comme tout locuteur humain, Jésus a pu faire un usage inventif de formes ou procédés littéraires variés pour enseigner en paraboles tantôt énigmatiques, tantôt allégoriques, tantôt réalistes. « Que celui qui a des oreilles entende ! » (Mt 11,15 ; 13,9.43).

Deux autres faits invitent à ne pas soumettre les paraboles à une exigence démesurée de réalisme : l’encadrement par l’Écriture de l’expression parabolique et l’intention didactique qui les anime. Dans ces conditions, les incohérences logiques et les hyperboles ne sauraient toutes résulter de reprises postérieures. Ces mêmes éléments invitent à envisager une réception diverse des paraboles, du temps même de Jésus. Les disciples peuvent à l’occasion avoir retenu et transmis le récit sans encore en saisir le sens profond, et parfois, au contraire, avoir bien compris leur sens, ce qui suppose un don de l’Esprit, mais aussi la présence dans leur cœur d’une caisse de résonance, celle de l’Écriture qui structure la mémoire.