La Bible en ses Traditions

Apocalypse 1,1–20

Byz V TR Nes
S

VICI COMMENCE L'APOCALYPSE DE L'APÔTRE JEAN

Révélation

VApocalypse de Jésus Christ

VJésus-Christ que Dieu lui a donnée pour montrer à ses esclaves

les choses qui doivent arriver bientôt

et qu’il a signifiées en envoyant par son ange à son serviteur Jean

...

Byz TR Nes
V
S

qui a attesté le verbe de Dieu

et le témoignage de Jésus Christ :

tout ce qu’il a vu.

qui a rendu un témoignage au verbe de Dieu

et un témoignage à Jésus-Christ : tout ce qu'il a vu.

...

Byz V TR Nes
S

Heureux celui qui lit et ceux qui entendent les paroles de la prophétie et qui gardent les choses qui y sont écrites

car le temps est proche !

...

Jean aux sept Églises qui sont en Asie :

— Grâce et paix vous soient données de la part de ByzDieu celui qui est, qui était et qui vient

et de la part des sept esprits qui sont devant

Vsous le regard de son trône

...

Byz TR Nes
V
S

et de la part de Jésus Christ, le témoin fidèle, le premier né des morts et le chef des rois de la terre

à celui qui nous aime et nous a libérés de nos péchés dans son sang

et de la part de Jésus-Christ qui est le témoin fidèle, le premier né des morts et le chef des rois de la terre

qui nous a aimés et nous a lavés de nos péchés dans son sang

...

Byz V TR Nes
S

et a fait de nous un royaume, des prêtres pour Dieu son Père :

à lui, la gloire et le pouvoir pour les siècles des siècles ! Amen.

...

Voici, il vient avec les nuées et le verra tout œil, et ceux qui l’ont transpercé

et toutes les tribus de la terre se frapperont la poitrine à cause de

Vlamenteront sur lui.

Oui. Amen.

...

7a ceux qui l’ont transpercé Za 12,10 ; Mt 24,30 ; Jn 19,37 Voici, il vient Ap 2,16 ; 3,11 ; 22,7.12.20 il vient avec les nuées Dn 7,13 ; Mt 26,64 ; Mc 13,26 ; Lc 21,27 7b lamenteront Za 12,10-12 ; Mt 24,30 7c Oui Ap 14,13 ; 16,7 ; 22,20 7b toutes les tribus de la terre Gn 12,3 ; 28,14 ; Mt 24,30
Byz Nes
V TR
S

— Moi, je suis l’Alpha et l’O(méga),

dit le Seigneur Dieu, celui qui est et qui était et qui vient, le tout puissant.

— Moi, je suis A et ω commencement

Vprincipe et fin

dit le Seigneur VDieu qui est et qui était et qui vient, le tout puissant.

— Moi, je suis l’alaf et le taw

dit le Seigneur Dieu, celui qui est, et qui était et qui vient, le maître de tout. 

Byz V TR Nes
S

Moi Jean votre frère

et qui ai part avec vous à la tribulation, au royaume et à l'endurance en Jésus

j’étais dans l’île appelée « Patmos »

à cause de la parole

Vdu verbe de Dieu et du témoignage de Jésus.

...

10 Je fus [ravi] en esprit le jour du Seigneur

et j’entendis derrière moi une voix forte comme une trompette

10 ...

Byz V S Nes
TR

11 disant :

— Ce que tu vois, écris-le dans un livre

et envoie-le aux sept Églises

à Éphèse, à Smyrne

VZmyrna

à Pergame, à Thyatire

à Sardes, à Philadelphie

et à Laodicée. 

11 disant :

— Je suis l'α et l'ω, le premier et le dernier

et ce que tu vois, écris-le dans un livre

et envoie-le aux sept Églises

qui sont en Asie :

à Ephèse, à Smyrne

à Pergame, à Thyatire

à Sardes, à Philadelphie

et à Laodicée. 

Byz V S TR Nes

12 Alors je me retournai pour voir quelle était la voix qui me parlait

et quand je me fus retourné, je vis sept chandeliers d’or

13 et au milieu des

Byz V TRdes sept chandeliers, quelqu’un de semblable à un fils d’homme :

VFils d’homme :

il était vêtu d’une longue robe, portait à la hauteur des seins une ceinture d’or

14 mais sa tête et ses cheveux étaient blancs comme de la laine blanche, comme de la neige

et ses yeux étaient comme une flamme de feu

Byz V TR
S
Nes

15 ses pieds étaient semblables à de l'airain qu'on aurait embrasé dans une fournaise

et sa voix était comme la voix des grandes eaux ;

15 ...

15 ses pieds étaient semblables à de l'airain dans une fournaise ardente

et sa voix était comme la voix des grandes eaux ;

Byz V TR Nes
S

16 il tenait dans la main droite sept étoiles

de sa bouche sortait un glaive aigu, à deux tranchants

et son visage était comme le soleil lorsqu’il brille dans sa force ...

16 ...

Byz V S TR Nes

17 Quand je le vis, je tombai à ses pieds comme mort

et il posa sur moi sa main droite en disant :

— N'aie pas peur

je suis le premier et le dernier

18 et le Vivant et j’ai été mort et voici, je suis vivant aux siècles des siècles

Byz TRaux siècles des siècles, amen 

je tiens les clefs de la mort et de l’enfer.

TRl'enfer et de la mort.  

19 Écris Byz V S Nesdonc les choses que tu as vues et celles qui sont et celles qui doivent arriver ensuite

20 le mystère des sept étoiles que tu as vues dans ma main droite

et les sept chandeliers d’or :

les sept étoiles sont les anges des sept Églises

et les sept chandeliers sont les sept Églises.

Réception

Cinéma

1,1–22,21 Allusions à l'Apocalypse

  • Ingmar Bergman, Det sjunde inseglet [« le septième sceau »] (1957).
  • Vincente Minnelli, The Four Horsemen of the Apocalypse (1961).
  • Andrei Tarkovski, Offret [« le sacrifice »] (1985).
  • Peter Jackson, The Lord of the Rings (en particulier le 3e film, 2003).

Musique

4ss Message de paix de l'Apocalypse

20e s.

Bertold Hummel (1925-2002), Friedensbotschaft der Apokalypse, 1991

Monteverdichor Würzburg

© Licence YouTube standard→, Ap 1,4ss

8 Je suis l'Alpha et l'Oméga

19e s.

Sir John Stainer (1840-1901, mus.), Rev. Sparrow-Simpson (texte), I Am Alpha and Omega, 1878

Robert Webb (dir.), Sheffield Chamber Choir   

© Licence YouTube standard→, Ap 1,8

Paroles

"I am Alpha and Omega; the beginning and the ending", Saith the Lord. "The Almighty, who was and is and is to come." Holy, holy, holy, Lord God of hosts; Heaven and earth are full of thy glory; Glory be to Thee, O Lord most high; Amen."

« Je suis l'Alpha et l'Oméga, le début et la fin, dit le Seigneur, le Tout-Puissant, qui est, qui était et qui vient.  Saint, saint, saint, le Seigneur Dieu des armées ; le ciel et la terre sont remplis de ta gloire ; gloire à toi, ô Dieu très haut ; amen. »

Le compositeur

L'anglais John Stainer, organiste et compositeur, écrivit en particulier l'oratorio The Crucifixion pour ténor, basse, chœur et orgue, sur un texte du révérend Sparrow-Simpson. Il fut également actif dans l'enseignement, en devenant professeur de musique à l'université d'Oxford en 1889, et fut pionnier dans la recherche sur la musique ancienne, en particulier sur les productions de Guillaume Dufay.

12–17 Vision méditée dans la musique populaire

Musique country alternative

16 Horsepower (texte David Eugene Edwards, Jean-Yves Tola), "Golden Rope", (CD album Low Estate, piste 12, CD, A&M (prod. John Parish), 1997.

David Eugene Edwards – Vocals, Banjo, Guitar, Hurdy-gurdy, Concertina ; Jeffrey-Paul Norlander – Back-up Vocals, Fiddle, Cello, Organ ; Jean-Yves Tola – Drums, Percussion, Piano ; Pascal Humbert – Bass guitar, Bass fiddle, Guitar ; John Parish – Additional Percussion, Organ, Guitar, Xylophone ; Steve Taylor – Guitar on "Phyllis Ruth", enregistrés aux Dockside Studios, Lafayette, Louisiana.

© Licence YouTube standard, paroles © Warner/Chappell Music, Inc.

Paroles

Fire is the color of my true love's hair — Near to the father sits his golden chair — By prayer and petition to the king on his left — Light is the burden that I bear — O so enchanting are these — Lovely chains that bind you — 'Neath their deadly weight — The Lord's eye did find you — With fear and tremblin' — Before the one with your wounds — Your eyes as empty as my savior tomb — Warm is the breath of his Holy Spirit — He who has ears to hear let 'm hear it — Torn were the hands of the worthy lamb — May you know his name and fear it — There you are hangin' by the golden rope — There you lie no hope.

Du feu, voilà la couleur des cheveux de mon bien-aimé. Près du Père se tient son trône doré, à force de prières et de demandes au roi à sa gauche. Je porte le fardeau de la lumière. Ô qu'elles sont enchanteresses ces jolies chaînes qui te lient. Sous leur poids de mort, l'œil du Seigneur t'a finalement trouvé, affolé et tremblant, devant celui qui porte tes blessures, tes yeux aussi vides que le tombeau de mon Sauveur. Le souffle de son Saint Esprit réchauffe. Celui qui a des oreilles pour entendre, qu'il entende. Les mains du digne agneau furent déchirées. Puisses-tu connaître son nom et le craindre. Te voilà pendu à la corde d'or — là tu gis sans espoir. 

10 Visions prophétiques

20e s.

Jean Langlais (1907-1991), III. Visions prophétiques (Cinq Méditations sur l'Apocalypse), 1973

Bruno Mathieu

© Licence YouTube standard→, Ap 1,10.9,11.10,1ss

Composition

Le troisième mouvement de cette composition pour orgue s'ouvre avec une mélodie de trompette (Ap 1,10). Il évoque ensuite la vision horrifique de l'Apocalypse (Ap 9,11) par un thème jouant sur la discordance. Aveugle dès l'âge de deux ans, Jean Langlais fit des études à l'Institut national des jeunes aveugles de Paris. Il y apprend le violon, le piano, l'écriture, l'orgue. Il reçoit en 1930 le premier prix do'orgue puis il se perfectionne dans l'art de l'improvisation grégorienne. Il fut organiste titulaire de l'orgue de Notre-Dame-de-la-Croix de Ménilmontant, puis de celui de Saint-Pierre-de-Montrouge à Paris pendant dix ans, et enfin de 1945 à 1987 à la basilique Sainte-Clothilde de Paris. Improvisateur réputé, il fut aussi un compositeur prolifique. Si la musique d'orgue et la musique liturgique constituent la part la plus importante de son catalogue, il se consacra aussi à la musique instrumentale et vocale profane. Il donna notamment 300 récitals aux États-Unis entre 1952 et 1981. Né près de Rennes, Jean Langlais s'inspire souvent du légendaire celtique et de la musique bretonne. 

Liturgie

6 ; 5,12 Digne est l'Agneau - Introït

« Dignus est Agnus »

Traditionnel, Introït - Dignus est Agnus

Chœur des moines de l’abbaye Sainte-Madeleine du Barroux

© Abbaye du Barroux→, Ap 1,6.5,12 Ps 71,2

Introït chanté pour la fête du Christ-Roi.

Arts visuels

1s Apocalypse ... et Jugement dernier Le thème du Jugement dernier, par sa dimension spectaculaire et eschatologique, est de nature à frapper l'imagination des artistes et des fidèles. Il est pour cette raison souvent représenté sur les tympans, les fresques ou les retables des églises. Il se réfère non pas à l'entièreté du livre de l'Apocalypse, mais plus spécifiquement aux chapitres 20 et 21. D'autres passages néo-testamentaires sont décisifs pour le caractériser. Par exemple, dans l'évangile selon saint Matthieu (Mt 25,31-46), Jésus donne une description directe (sans parabole) de la future venue du « Fils de l'homme » qui « siègera » et « séparera » les nations comme le « berger sépare les brebis des boucs ». C'est un passage non moins fondamental que l'Apocalypse pour les représentations ci-dessous, dans lesquelles la séparation et la différenciation de l'espace entre les damnés et les élus sont très marquées et saisissantes.

12e s.

AnonymeLe Jugement dernier

tympan, cathédrale Saint-Lazare d'Autun (France) © Domaine public→

AnonymeLe Jugement dernier (tympan)

abbatiale Sainte-Foy de Conques (France) © Domaine public→

AnonymePortail du Jugement dernier (tympan, façade occidentale)

cathédrale Saint-Étienne de Bourges (France) © Domaine public→

14e s.

AnonymeLe Jugement dernier (fresque, pilier gauche sous le buffet d'orgues)

cathédrale Sainte-Cécile d'Albi (France) © Domaine public→

15e s. 

Fra Angelico (ca. 1395-1455), Le Jugement dernier (tempera sur bois, ca. 1431), 105 × 210 cm

musée San Marco, Florence (Italie) © Domaine public→

Rogier Van der Weyden (ca. 1400-1464), Polyptyque du Jugement dernier (peinture à l'huile sur bois, 1443-1452), 220 × 548 cm

Hospices de Beaune (France) © Domaine public→

15e et 16e s. italiens

Luca Signorelli (1441-1523), La Fin du monde (fresque, 1499-1502)

chapelle San Brizio (transept droit), cathédrale d'Orvieto (Italie) © Domaine public→

Luca Signorelli (1441-1523), La Résurrection de la chair (fresque, 1499-1502)

chapelle San Brizio (transept droit), cathédrale d'Orvieto (Italie) © Domaine public→

Luca Signorelli (1441-1523), Les Damnés et les Élus (fresque, 1499-1502)

chapelle San Brizio (transept droit), cathédrale d'Orvieto (Italie) © Domaine public→

Luca Signorelli (1441-1523), Les Damnés à l'Enfer (fresque, 1499-1502)

chapelle San Brizio, (transept droit), cathédrale d'Orvieto (Italie) © Domaine public→

Luca Signorelli (1441-1523), Les Élus au Paradis (fresque, 1499-1502)

chapelle San Brizio (transept droit), cathédrale d'Orvieto (Italie) © Domaine public→

Michel-Ange (1475-1564), Le Jugement dernier  (fresque, 1536-1541), 1370 × 1220 cm, mur de l'autel

chapelle Sixtine (Cité du Vatican) © Domaine public→

15e et 16e s. flamands

Jérôme Bosch (ca. 1450-1516), Le Jugement dernier (huile sur panneau de bois, ca. 1482-1516), 163,7 × 247 cm

Académie des Beaux-Arts de Vienne (Autriche) © Domaine public→

9 j'étais dans l'île La possibilité d'une île ... L'île est un observatoire privilégié. Montagne dans la mer, Patmos déploie tout le symbolisme de l’île. Espace séparé, l'île favorise le recueillement. C’est joliment montré par les imagiers médiévaux qui prennent soin de représenter tout le contour de l’île où Jean reçoit sa révélation.

Frères Limbourg (ca. 1402-1416), Saint Jean sur l'île de Patmos (tempera sur parchemin de veau, ca. 1411-1416), 29 x 21 cm (Très Riches Heures du duc de Berry) — Ms.65, f.17

Musée de Condé (Chantilly, France) © Domaine public→

11 ; 12,1 ; 15,1 ; 19,13 — Ce que tu vois, écris-le dans un livre + je vis dans le ciel un autre signe + son nom est « Verbe de Dieu » ... Contempler et transmettre le contemplé

Voir les symboles

Hans Memling (ca. 1433-1494), Jean l’Évangéliste à Patmos et les visions de l’Apocalypse (huile sur panneau de bois, ca. 1479), 172 x 79 cm, volet droit d'un retable d’autel (Tryptique des noces mystiques de sainte Catherine d’Alexandrie)

Vieil hôpital Saint-Jean, Bruges, Memlingmuseum (Belgique) © Domaine public→

À Patmos, Jean compose un étourdissant concentré de symboles bibliques. Il tire sa scénographie de la littérature juive, depuis ses adaptations de cosmogonies archaïques jusqu'à l’épopée nationale reconstruite en temps d’Exil et aux attentes messianiques déçues au temps du retour…

Mais il la tire tout autant du lieu où il se trouve. Les scribes juifs, à partir du 5e s. av. J.-C., ont affirmé toujours plus fortement la souveraine domination de leur Dieu comme Dieu unique et transcendant et son ultraproximité comme créateur de tout à partir de rien. Au premier siècle de notre ère, le 1 Hén. (43,4) établit une correspondance entre les deux et dans l’énigmatique Asc. Is. (7,10) ce qui advient au firmament des cieux advient aussi sur la terre. Pour le juif qu’est Jean de Patmos, parce qu'elle est pensée et parlée par le Créateur avant même que l’homme ne lui prête ses mots, la nature est gorgée de signification qu’il appartient au poète et au prophète de découvrir.

Sur la formidable composition de Memling, on repère facilement la liturgie céleste (Ap 1,12-16 ) autour de l'Agneau (Ap 15,1-4) ; la vision de la Femme (Ap 12,1-17), les quatre cavaliers dans l'ordre...

Le Verbe à Patmos

Nicolas Poussin (1594-1665), Paysage avec saint Jean à Patmos (huile sur toile, Rome, 1640), 100,3 x 136,4 cm, en diptyque avec le Paysage avec saint Matthieu et l'ange

Art Institute, Chicago (États-Unis) © Domaine public→

Sur l’une des toiles de son célèbre diptyque de 1640, l’amoureux de l’art antique que fut Nicolas Poussin place avec raison saint Jean — écritoire en main — face à un piédestal de section cruciforme, au cœur d’un paysage avec mer, montagne et vestiges antiques intacts, en un contraste subtil avec le Paysage avec saint Matthieu et l'ange, où les eaux d'un Jourdain symbolique semblent aussi séparer l'évangéliste du Temple grandement ruiné à l'arrière-plan. 

Poussin a génialement compris le rapport intime qui lie les écrits de l’évangéliste du Logos incarné et l'inscription de ce même Logos dans le cosmos de Patmos où il séjournait...

14 blancs comme de la laine blanche Blanc au carré Comment ne pas penser, devant tant de blancheur, si éblouissante même pour les traducteurs anciens de la prophétie qui inspire ici le voyant de l'Apocalypse (Comparaison des versions Dn 7,9), à un célèbre tableau ? 

Kasimir Malevitch (1879-1935), Composition suprématiste : carré blanc sur fond blanc (huile sur toile, 1918), 79,4 × 79,4 cm 

Museum of Modern Art, New York (États-Unis) © Domaine public→ 

Premier monochrome de la peinture contemporaine, le tableau de Malevitch est aussi l'un des plus célèbres. Malevitch a utilisé deux pigments blancs différents, le carré en blanc froid se détache sur le fond en blanc chaud.

Une expérience psycho-spirituelle ?

Le « suprématisme » artistique affirme la suprématie du sentiment pur dans l’équivalent visuel de la forme pure, dégagée de toute signification rationnelle ou irrationnelle. L’idéal recherché est un tableau ne renvoyant à aucune autre réalité que la sienne propre. L’artiste limite son lexique à des formes épousant la bidimensionnalité du médium. Le carré (forme préférée de Malevitch en tant que « scientifique » et non naturelle, basique, universelle), le cercle et la croix sont récurrents. Malevitch affirme vouloir capter une dimension qui fusionne et transcende le temps et l'espace, un univers infini en blanc, dans laquelle les formes évoluent librement : au spectateur de visualiser les formes, leurs positions multiples dans toutes les dimensions de l’œuvre.

Une expérience « sublime » ?

L’étymologie et le sens de l’adjectif latin sublimis demeurent énigmatiques. On peut le dériver de sub + limis/us ou limen.

  • Sub ne désigne pas seulement en latin un rapport d'infériorité, de voisinage ou de soumission : il marque un déplacement vers le haut et est rattaché à « super », comme en grec « hupo » [ὑπό] à « huper » [ὑπέρ].
  • Limis (ou limus), « oblique, de travers ». L’adjectif qualifie le regard indirect et porté à la dérobée (tel celui de l'Athéna qui louche), ou bien un mouvement d'élévation non orthogonal au sol.
  • Limen, « limite, seuil ». Festus : le « sublime » vient du seuil supérieur, parce qu'il est au-dessus de nous. Serait ainsi désignée une expérience de dépassement « par en dessous », un moment et « surliminal » et subliminal, à la fois en-deçà et au-delà d’un seuil donné.

En faisant faire à l’Occidental l’expérience de la différence entre blanc et blanc, Malevitch invite à un moment sublime : tout en restant dans le blanc, on dépasse le blanc.

16 de sa bouche sortait un glaive Tranchante tapisserie La célèbre Tapisserie de l'Apocalypse d'Angers fut commandée vers 1375 par le duc Louis Ier d’Anjou.  

Nicolas Bataille (1330-1405), Tapisserie d'Angers (tenture de laine, 1373-1387 ; détail : Le Christ au glaive)

Château d'Angers (France) © Domaine public→

La tapisserie représente de façon extrêmement littérale le texte de l'Apocalypse sur une centaine de mètres de long. Tout y est : le Fils de l'Homme est ici représenté sur fond des sept chandeliers, les cheveux blancs, vêtu d'une longue robe, les pieds et le visage rougeoyants. Il porte dans sa bouche le glaive à deux tranchants, symbole de la Parole de Dieu, et sa main droite tendue vers Jean prostré à ses pieds tient les sept étoiles évoquant les sept anges.

17ss Quand je le vis + Écris donc les choses que tu as vues ... Enluminer : voir et écrire

8e s. 

Les Beatus sont des manuscrits ibériques des 10e, 11e et 12e s., plus ou moins abondamment enluminés, où sont copiés notamment les Commentaires de l'Apocalypse rédigés au 8e s. par le moine Beatus de Liébana. Le Beatus de Ferdinand et de Sancha appelé aussi Beatus de Facundus, fut écrit et peint vers 1047.

Ce manuscrit contient 114 miniatures d'influence mozarabe. Elles illustrent un commentaire de l'Apocalypse de saint Jean écrit par Beatus de Liébana au 8e s. Les miniatures sont inspirées d'autres manuscrits antérieurs du 10e s. comme le Beatus de Valladolid ou le Beatus de Morgan. Elles reproduisent notamment les mêmes bandes de couleur de fond. Cependant, leur style plus délicat et élégant dénote peut-être une influence romane à laquelle a sans doute été sensible Ferdinand Ier

Beatus de Liébana (ca. 730-798), Commentaire sur l'Apocalypse (ca. 784, manuscrit, Latin 8878, folio 31v)

Bibliothèque Nationale de France, Paris (France) © Domaine Public→

De nombreux objets de la vision sont ici représentés, notamment les sept étoiles et les sept chandeliers d'or (avant les lettres aux « sept Églises », que symbolisent ici sept autels, chacun au-dessous du nom de leur Église correspondante). Mais on voit aussi la « ceinture d'or à la hauteur des seins » et les « clefs de la mort et de l'enfer » sur le personnage central. Figurent les personnages suivants : l'« ange » du premier verset, ainsi que le duo formé par Jean et ce « quelqu'un semblable à un Fils d'homme », aux pieds duquel Jean tombe et qui pose sa main droite sur lui. Ce personnage mystérieux est représenté en train de trôner : ce n'est pas présent dans le texte, mais cela permet d'illustrer l'autorité du personnage. À l'inverse, ses caractéristiques physiques spectaculaires décrites en détail dans le texte (blancheur des cheveux, yeux « comme une flamme de feu », pieds « semblables à de l'airain qu'on aurait embrasé », « glaive » sortant de la bouche et visage « comme le soleil ») ne sont pas représentées. Elles sont en effet à la limite du représentable. Les omettre permet par ailleurs d'humaniser ce personnage surnaturel et de le faire ressembler à Jésus en son humanité, identifiable sans erreur possible grâce à son auréole crucifère.

Texte

Procédés littéraires

1.9 de Jésus Christ ÉNONCIATION emboîtée : ambiguïté du génitif objectif et subjectif  L'ambiguïté du génitif en Ap 1,1.2.9  Grammaire désigne Jésus Christ

  • à la fois comme auteur et origine de la révélation qui débute dans ce verset, en quelque sorte son locuteur principal ;
  • et comme le personnage dont parle le texte.

Par la proclamation d'Ap, c'est Jésus Christ lui-même qui adresse à l'auditeur/lecteur une parole sur lui-même. On retrouve ici quelque chose de la structure d'énonciation en bande de Möbius qui caractérise les évangiles en tant que vecteurs de l'Évangile. Pour leur lecteur actuel, Jésus y est, sans plus solution de continuité entre les deux qu'il n'y en a entre l'intérieur et l'extérieur de l'anneau de Möbius, à la fois 

  • « contenu » dans l'énonciation de l'écrivain inspiré (en tant que personnage dans un récit) 
  • et « contenant » de cette énonciation même puisque c'est lui qui, par sa propre activité d'enseignement, a donné et autorisé la parole de ceux qui parlent de lui.

BojanV03, 3D Rendering of a Mobius Strip, (Image numérique, 2015)

© CC-BY-SA-4.0→,

En topologie, la « bande (ou ruban ou boucle) de Möbius » est une surface compacte dont le bord est homéomorphe à un cercle : il ne possède qu'une seule face, contrairement à un ruban classique qui en possède deux. Il a été décrit indépendamment en 1858 par les mathématiciens August Ferdinand Möbius (1790-1868) et Johann Benedict Listing (1808-1882), et baptisé du nom du premier en raison du mémoire qu’il présenta à son sujet à l'Académie des sciences à Paris. La bande de Möbius se visualise aisément, il suffit de tordre d'un demi-tour une bande de papier, puis de collant les deux extrémités : la forme qui en résulte est « sans fin », n'ayant ni intérieur ni extérieur. Elle fascine de nombreux graveurs (Escher), peintres, sculpteurs et plasticiens modernes et contemporains.

  • En 2012, Alice Pilastre a mis au jour Mobius Gymnopedy→, boîte à musique dans laquelle le ruban métallique de la partition a une forme de ruban de Mobius. Ce ruban contient les premières notes de la première des Gymnopédies d'Erik Satie. Quand on fait défiler la bande, on entend ces notes, puis les mêmes avec une inversion de hauteur.
  • Dans la culture populaire, depuis le premier « jour de la Terre » en 1970, elle est un symbole de l’éternité et même… du recyclage, sous forme d'un ruban vert formant flèches à trois demi-tours, signifiant qu'un produit peut être recyclé, ou a été fabriqué à partir de matériaux recyclés.