Un projet du Programme de Recherches La Bible en ses traditions AISBL
Dirigé par l’École Biblique et Archéologique Française de Jérusalem
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1 Et le premier jour de la semaine, à l'aurore profonde,
Sà l'aurore, alors qu'il faisait encore sombre, elles vinrent au tombeau,
apportant les aromates qu’elles avaient préparés.
Byz S TRet il y avait avec elles d'autres femmes.
2 Elles trouvèrent la pierre roulée de devant le tombeau.
3 Étant entrées, elles ne trouvèrent pas le corps du Seigneur Jésus
Sde Jésus.
4 Et il advint que, comme elles ne savaient qu'en penser,
voici que deux hommes se présentèrent à elles en habit éblouissant.
4 Et il advint que, comme elles étaient consternées par cela,
voici que deux hommes apparurent auprès d'elles en habits resplendissants.
5 Tandis que, saisies de crainte, elles tenaient leur visage baissé vers le sol
Velles baissaient le visage vers la terre, ils leur dirent :
— Pourquoi cherchez-vous le vivant parmi les morts ?
6 Il n’est pas ici, Byz V TR Nesmais il est ressuscité.
Souvenez-vous comment il vous a parlé
quand il était Byz V TR Nesencore en Galilée,
7 disant :
— le Fils de l’homme doit être livré aux mains d’hommes pécheurs et être crucifié
et le troisième jour ressusciter.
8 Et elles se souvinrent de ses paroles.
9 Et, revenues du tombeau,
elles annoncèrent tout cela aux Onze et à tous les
Saux autres.
10 C’étaient la Magdaléenne Marie,
VMarie-Magdeleine, Jeanne
VJoanna, Marie Smère de Jacques
et les autres Vqui étaient avec elles,
qui rapportaient cela aux apôtres.
11 Mais ces paroles leur parurent comme du délire
et ils ne les croyaient pas.
12 Or Pierre,
SSimon, se levant, courut au tombeau
et, en se penchant,
Sregardant [à l'intérieur], il ne voit que les linceuls Byz V S TRposés seuls
et il s’en alla chez lui, s’étonnant
V, s’étonnant en lui-même de ce qui était arrivé.
13 Voici que, le même jour, deux d'entre eux se rendaient dans une ville
située à soixante stades de Jérusalem,
nommée Emmaüs.
14 Et ils causaient entre eux de tout ce qui s'était passé.
15 Et Byz V TR Nesil advint, comme ils s'entretenaient et discutaient Ventre eux,
Jésus lui-même, s’étant approché, Sles rencontra et, faisait route avec eux ;
16 mais leurs yeux étaient retenus, afin qu'ils ne le reconnussent pas.
17 Il leur dit :
— Quelles sont ces paroles que vous échangez en marchant, l'air triste.
17 Il leur dit :
— Quelles sont ces paroles que vous échangez en marchant ?
Et pourquoi êtes-vous tristes ?
17 Il leur dit :
— Quelles sont ces paroles que vous échangez en marchant ?
Et ils s’arrêtèrent, l'air triste.
18 Prenant la parole, l’un Byz V S TRd’eux, nommé Cléophas, lui dit :
— Tu es bien le seul à séjourner à
V Sétranger de Jérusalem
à ne pas savoir ce qui est arrivé ces jours-ci !
19 Et il leur dit : — Quoi ?
et ilsByz S TR Nes lui dirent :
— Ce qui concerne Jésus le Nazaréen,
Nes le Nazarénien,
Byz TR le Nazoréen,
Sde Nazareth qui fut un homme prophète, puissant en œuvre et en parole
S en parole et en œuvre devant Dieu et tout le peuple ;
20 comment aussi nos grands prêtres et nos chefs l’ont livré pour une condamnation à mort
et l’ont crucifié.
21 Nous espérions, nous, que c'était lui qui allait racheter Israël
mais avec tout cela, voilà le troisième jour depuis que ces choses sont arrivées !
21 Nous espérions, nous, que c'était lui qui allait racheter Israël
et cependant, après tout cela, voici déjà le troisième jour que ces choses sont arrivées !
22 Mais il est vrai quelques femmes qui sont des nôtres nous ont stupéfiés.
S'étant rendues de grand matin au tombeau,
22 À la vérité, quelques femmes des nôtres nous ont effrayés :
elles furent avant la lumière au tombeau,
23 et n’ayant pas trouvé son corps, elles vinrent en disant
qu’elles avaient vu des anges, en vision qui disent qu'il est vivant.
24 Certains de ceux qui étaient avec nous
VQuelques-uns des nôtres sont allés au tombeau
et le trouvèrent tel que les femmes l'avaient dit
mais lui, ils ne [l’]ont pas vu.
Vmais lui, ils ne le trouvèrent pas.
25 Et lui leur dit :
— Ô insensés et lents
Slourds de cœur à croire à tout ce qu’ont dit les prophètes !
26 Ne fallait-il pas que le Christ souffrît cela
pour entrer
Ventrer ainsi dans sa gloire ?
27 Et en commençant par Moïse et par tous les prophètes
il leur interpréta
Vinterprétait dans toutes les Écritures ce qui le concernait.
27 Et en commençant par Moïse et par tous les prophètes
il leur interpréta
Vinterprétait dans toutes les Écritures ce qui le concernait.
28 Ils approchèrent du village où ils se rendaient
et lui fit semblant
Vfeignit d'aller plus loin.
29 Mais ils le pressèrent en disant :
— Reste avec nous, car le soir vient et le jour est déjà sur son déclin.
Sle jour décline et s'assombrit.
Et il entra Vpour rester avec eux.
30 Et il advint que, comme il était à table avec eux,
ayant pris
Vil prit le pain, dit la bénédiction
Vle bénit, puis l'ayant rompu
Vle rompit, et il le leur présentait.
31 Et
SImmédiatement leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent
puis il ne leur devint plus visible
Vdisparut à leurs yeux
Sfut emporté.
32 Et ils se dirent l’un à l’autre :
— Notre cœur n’était-il pas brûlant
Spesant en nous
tandis qu'il nous parlait en chemin
et
Byz TRet quand il
Nesquand il nous ouvrait les Écritures ?
33 Et à l’heure même, s'étant levés
Vse levant ils s'en retournèrent à Jérusalem
et ils trouvèrent réunis les Onze et ceux qui étaient avec eux,
34 disant :
— C'est bien vrai ! Le Seigneur est ressuscité et il est apparu à Simon.
35 Et eux racontaient ce qui était arrivé en chemin
et comment il s'était fait connaître d'eux
Vils l'ont reconnu à la fraction du pain.
36 Tandis qu'ils parlaient de cela
Jésus
Neslui se tint au milieu d’eux et leur dit :
— Paix à vous !
36 Or, tandis qu'ils parlent de cela
Jésus se dressa au milieu d'eux et leur dit :
— Paix à vous ! c'est moi, n'ayez pas peur.
37 Mais eux, effrayés
Vtroublés et saisis de peur
Vépouvantés
pensaient voir un esprit.
38 Et il leur dit :
— Pourquoi êtes-vous troublés, et pourquoi des réflexions [inquiètes]
Vces pensées s'élèvent-elles dans vos cœurs
Nesvotre cœur ?
39 Voyez mes mains et mes pieds : car je suis moi-même !
Palpez-moi
VTouchez-moi et voyez : un esprit n’a ni chair ni os, comme vous constatez
Vvoyez que j’ai.
40 Et ayant
Vlorsqu'il eut dit cela, il leur montra ses mains et ses pieds.
41 Mais eux, à cause de la joie, ne croyant pas encore, et étant dans l'étonnement
il leur dit :
— Avez-vous ici quelque chose à manger ?
42 Ils lui offrirent un morceau de poisson grillé
Byz V S TRet un rayon de miel.
43 Et l'ayant pris, il le mangea devant eux.
43 Et lorsqu'il eut mangé devant eux, prenant les restes, il les leur donna.
44 Il leur dit :
— Telles sont mes paroles que je vous ai dites quand j’étais encore avec vous :
Il faut
Vest nécessaire que s'accomplisse tout ce qui a été écrit de moi dans la loi de Moïse et les Prophètes, et les Psaumes.
45 Alors il leur ouvrit l'intelligence pour qu'ils comprissent les Écritures
46 et il leur dit :
— Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait et ressusciterait
Byz TRet ainsi fallait-il que le Christ souffrît et ressuscitât
Set ainsi était-il juste que le Christ souffrît et ressuscitât
Vet ainsi était-il opportun que le Christ souffrît et ressuscitât d'entre les morts le troisième jour,
47 et que serait
Byz V S TRfût proclamé en son nom le repentir pour
Vet la rémission des péchés à toutes les nations
à commencer par Jérusalem.
48 De cela vous êtes témoins.
49 Et Byz S TR Nesvoici que moi j'envoie sur vous la promesse de mon Père.
Quant à vous, demeurez dans la ville Byz S TRde Jérusalem
jusqu’à ce que vous soyez revêtus de puissance d’en haut.
50 Il les emmena [dehors]
V S TR dehors jusque vers Béthanie
et, levant ses mains, il les bénit.
51 Il advint, comme il les bénissait, qu'il se sépara d’eux
et il était emporté au ciel.
52 Et eux, s'étant prosterné devant lui
Vl'ayant adoré, retournèrent à Jérusalem en grande joie.
53 Et ils étaient continuellement dans le temple, louant et bénissant Dieu. VAmen.
VICI FINIT L'ÉVANGILE SELON LUC
29–35 Les pèlerins d'Emmaüs
Cette fresque du couvent San Marco se trouve au-dessus de la porte de l’hôtellerie des pèlerins. L’une des vocations des Dominicains était de les héberger. Le Christ est reçu par deux frères qui, en habit de leur Ordre, lui serrent le poignet et l’épaule : ce contact des mains, cette réalité physique, montre la tangible Présence du Ressuscité. Pour accentuer la profondeur du lien qui se tisse entre les protagonistes, Fra Angelico a donné aux regards une intensité qui manifeste la force de cette Présence et traduit l’au-delà de cette rencontre. Ces visages témoignent du sourire ineffable de la tendresse d’un Dieu d’Amour présent en tout homme. « Ce que vous avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que l’avez fait » : Mystère de l’identification du Seigneur à celui qui est pauvre et sans pouvoir. « Dieu existe, je l’ai rencontré », en mon frère… Cette expérience de Dieu, nous pouvons la vivre à chaque instant de notre vie. Il ne s’agit pas de chercher Dieu en levant les yeux au ciel, mais dans le regard de ses frères. Ces échanges font passer du dedans au dehors, et la foi se déploie en don d’Amour. Recevoir l’autre, c’est la respiration de la foi. Dans ce face à face, le Christ s’abaisse jusqu’à se confier à nous, ainsi peut-on vraiment découvrir Dieu comme une personne. La rencontre interpersonnelle est chemin de Lumière : le Christ Ressuscité marche avec nous, comme avec les disciples d’Emmaüs. Notre cœur n’est-il pas « tout brûlant… » ? Devenir ces pèlerins de l’Espérance pour accueillir toutes vies… (J.-M. N.)
Avec une gourmandise que l'on connaissait ailleurs (Arts visuels Lc 10,38–42), Joachim Beuckeleer prend prétexte de la scène d'auberge pour exhiber les biens de la terre, peut-être en action de grâce — « eucharistie » — à leur Créateur, Jésus et les disciples apparaissant à l'arrière plan, sous l'arche d'entrée.
L'instant de la reconnaissance coïncide avec le moment de la disparition. C’est ce moment qui est représenté. Le Christ est déjà en train d’échapper à leurs regards, il ressemble à une silhouette, à une ombre portée qui se découperait sur le mur derrière lui.
La composition est à la fois violente et paisible. Les deux hommes n’en sont pas au même stade de la reconnaissance. L’homme à genoux au premier plan, presque invisible, avec sa chaise renversée en bas à gauche, s’est déjà jeté aux pieds du Christ. L’autre est encore figé, dans un mouvement de surprise qui fait basculer les coupes sur la table. Il n’ose en croire ses yeux. Dans l’évangile, nous n’avons le nom que de l’un des deux. L’autre, c’est nous. Sur ce tableau, lequel sommes-nous ? Qu’attendons-nous pour nous jeter aux pieds du Christ ?
Les lignes de fuite dirigent le regard vers la table. Ce n’est pas le Christ qui est au centre, mais les coupes.
Et c’est bien une messe que le Christ vient de célébrer : on, retrouve dans le passage de Luc les grandes étapes de la messe : sur le chemin, Jésus les pousse à l’aveu de leur déception, peut-être une forme de liturgie pénitentielle, puis il les enseigne, dévoile la Parole, fait les liens entre Ancien Testament et ce qu’il a accompli : c’est bien ce que fait la messe lors de la liturgie de la parole, avec les lectures et l’homélie du prêtre. Puis il entre avec eux et rompt le pain : c’est la liturgie eucharistique. Enfin, il y a l’envoi en mission implicite (Mc 16,15-20), évoqué par le sac de voyage suspendu au centre du tableau, au-dessus de la tête du pèlerin et de la table : la Bonne Nouvelle invite à se mettre en route, à partir en mission. Aujourd’hui, on les appelle « les pèlerins », mais ils le sont devenus par leur rencontre avec le Christ ! Lorsqu’il les rejoint au départ, ils errent sans but (au mieux) et au pire, ils s’éloignent de Jérusalem pour s’éloigner des possibles persécutions. C’est cette rencontre qui leur donne un but, une destination, une mission, et qui transforme leur errance en pèlerinage. « À l’instant même, ils se levèrent et retournèrent à Jérusalem. » (Lc 24,33) Ils retournent d’où ils viennent (comme Pierre à la fin de sa vie comprend qu’il doit retourner à Rome), à Jérusalem : l’Eucharistie va leur donner la force d’entreprendre le voyage, de vaincre leurs peurs et de retourner dans la ville sainte.
Au fond, la femme qui s’affaire (une servante de l’auberge ?) peut être mise en parallèle, par sa position courbée, avec l’homme du premier plan agenouillé aux pieds du Christ. Cela peut faire penser au passage de Marthe et Marie (Lc 10,38-42). Mais ici la servante est vraiment en train de tout manquer parce qu’elle est affairée, plongée dans ses propres occupations. À supposer qu’elle soit en train de faire la cuisine, elle a renoncé à être nourrie par la seule nourriture qui rassasie véritablement !
L’homme du premier plan se confond quasiment avec la silhouette sombre du Christ : les contours ne permettent pas de les distinguer aisément. Par la communion, il est uni au Christ : le pain s’intègre à son corps et lui-même est introduit dans le Christ. Il fait partie de son corps vivant, qu’est l’Église (liens entre corps ecclésial et corps sacramentel). La communion n’est pas un acte purement individuel : en le recevant nous communions aussi au mystère de l’Eglise. Le geste auquel ils le reconnaissent, c’est la fraction du pain. On rompt le pain pour la partager.
Il y a également une dimension mystique : au « soleil de Satan », préférer les ténèbres du Très-Haut et choisir « cette nuit de la foi aimante qui est surnaturelle et d'autant plus forte que l'acte de foi se pose dans la faiblesse et l'obscurité » (Fabrice
, La foi des démons, 2009).Sans disqualifier l’action qui est, avec la contemplation, une composante de l’Église, la femme occupée est en arrière-plan, alors que l’homme en adoration est au premier plan : toute action tire sa source de la prière, de l’union au Christ. Si l'on oublie de la relier à l’arbre de vie, elle court le risque de se dessécher très vite et de rester sans fruit.
D’habitude, on met en valeur les saints par des vêtements aux couleurs primaires fortes (rouge et bleu en général). Ici, ni rouge, ni bleu, mais des couleurs simples et sobres, surtout des ocres. Simplicité du cadre de l’auberge (une pauvre cloison de planches et un soubassement de plâtre). Ce mur fait d’ailleurs penser au mur de l’atelier de Rembrandt dans lequel il s’est peint la même année : le Christ vient nous rejoindre dans la pauvreté de notre quotidien. Avec son caractère intime (le peu de personnages par rapport à la version de
au Louvre par exemple), le tableau met l’accent sur la simplicité de la rencontre avec le Christ : une petite auberge, deux hommes, une modeste servante au fond qui ne leur prête pas attention... Jésus ressuscité aurait pu trouver un cadre plus spectaculaire pour une de ses premières apparitions ! Mais non. Il se dérange pour ces deux hommes, dont seulement un est nommé. L’autre, c’est chacun de nous, invité à venir rencontrer le Christ dans l’humilité de la messe, à accepter de rentrer dans ce mystère de la présence réelle, incompréhensible pour les sens. Loin des paillettes et d’une clarté univoque, nous devons accepter d’entrer dans l’obscurité des sens : on va à la messe, en sachant qu’on est infiniment dépassé par ce qui va se dérouler sous nos yeux.Rembrandt utilise ici comme souvent le procédé du clair-obscur. C’est le soir qu’a lieu la scène (« déjà le jour baisse »). Il fait nuit. D’où vient la lumière ? Il y a celle d’une lampe ou d’un four au fond. Mais la lumière qui envahit le premier plan n’est pas une lumière naturelle ou artificielle (il n’y pas de lampe ni de fenêtre), mais surnaturelle ! C’est le Christ, lumière du monde ! Cette lumière vient dissiper les ténèbres dans lesquels ils se trouvaient : ténèbres de l’incompréhension (« esprits sans intelligence ») et du désespoir : « tout tristes » : encore sous le choc de la mort de celui qu’ils appelaient leur sauveur, il est là ressuscité devant eux ! C’est la joie de la Bonne Nouvelle qui les envahit. la lumière ne vient cependant pas du Christ dans son corps physique, qui est en contre-jour, mais de derrière lui. Elle vient de la table de l’auberge, devenue autel, des espèces consacrées. Le Christ s’efface, disparaît au profit du pain et du vin. Il est bien présent au milieu d’eux. « Il entra donc pour rester avec eux » (Lc 24,29): cela peut sembler paradoxal puisque cinq minutes plus tard il disparaît à leurs yeux... Mais en fait il reste bel et bien, par la présence réelle dans le pain et le vin consacrés.
Le Christ est en contre-jour. La rencontre avec les pèlerins d’Emmaüs se situe entre la découverte du tombeau vide et l’apparition aux Apôtres réunis. Le Christ est ressuscité, c’est son corps glorieux. Représenter un corps glorieux en peinture... sacré défi ! Regarder Dieu, c’est toujours un risque. Dans l'Ancien Testament, Dieu se cache dans la nuée, parce que sa vue est trop éblouissante pour nous. Il préfère se dévoiler et se laisser adorer dans l’humilité d’un bout de pain et d’un peu de vin.
1–11 Représentations du Ressuscité
Une très vieille homélie anonyme de la vigile de Pâques (pseudo-Épiphane, Homélie pour le Samedi Saint, cité selon
, Dieu et l’homme d’aujourd’hui, 1956) décrit cette descente du Christ aux enfers :« Adam, en tant que premier père et premier créé de tous les hommes, et en tant que premier mortel, lui qui avait été tenu captif plus profondément que tous les autres, et avec le plus grand soin, il entendit le premier le bruit des pas du Seigneur, qui venait vers les prisonniers. Et il reconnut la voix de celui qui cheminait dans la prison, et, s’adressant à tous ceux qui étaient enchaînés avec lui depuis le commencement du monde, il parla : — J’entends les pas de quelqu’un qui vient vers nous ! Et pendant qu’il parlait, le Seigneur entra, tenant les armes victorieuses de la croix. […] Et lui ayant saisi la main, il lui dit : — Tiens-toi debout, toi qui dormais, lève-toi d’entre les morts, et le Christ t’illuminera. Je suis ton Dieu et, à cause de toi, je suis devenu ton Fils. Lèves-toi, toi qui dormais car je ne t’ai pas créé pour que tu séjournes ici enchaîné dans l’enfer. Surgis d’entre les morts, je suis la Vie des morts. Lève-toi, toi l’œuvre de mes mains, toi, mon effigie, qui a été faite à mon image […] Regarde sur mon visage les crachats que j’ai reçus pour toi, afin de te replacer dans l’antique paradis. Regarde sur mes joues la trace des soufflets que j’ai subis pour rétablir en mon image ta beauté détruite. Regarde mes mains qui ont été solidement clouées au bois, à cause de toi, qui autrefois a mal étendu tes mains vers le bois. […] Lève-toi et partons d’ici, de la mort à la vie, des ténèbres à la lumière éternelle. Levez-vous et partons d’ici et allons de la douleur à la joie, des chaînes à la liberté, de la captivité aux délices du paradis, de la terre au ciel. Mon Père céleste attend la brebis perdue, un trône de chérubin est prêt, les porteurs sont debout et attendent, la salle des noces est préparée. Les trésors de tout bien sont ouverts, le royaume des cieux qui existait avant tout les siècles vous attend. »
Pour retrouver une spiritualité moins doloriste, plus authentiquement pascale, de nombreux artistes occidentaux ne s'arrêtent pas à la mise au tombeau de Jésus et ajoutent des stations à la dévotion si populaire du →chemin de croix.
Et voici la station de la Résurrection : Jésus est vivant ! Il est vivant au milieu de cette constellation, de cet univers. De haut en bas, d’un vêtement blanc, de la gloire de cette blancheur ineffable, il bénit la Pologne, tout le peuple. Le Christ s’incorpore au corps de la nation ; de cette force et de ce regard, de cette intensité et de cette puissance. Mais l’artiste va encore poursuivre le commentaire. Et là, il va dépasser les stations traditionnelles d’un chemin de croix. (J.-M. N.)
50s PARALITURGIE Chemin de croix : une station inattendue Dans la volonté contemporaine de refonder les dévotions populaires dans leurs substrats bibliques, et d'éviter l'écueil du dolorisme, le chemin de croix du peintre Jerzy Duda-Gracz (1941–2004) à Jasna Gora→ ajoute l'Ascension à la méditation de la Passion glorieuse du Seigneur.
Jésus termine son séjour terrestre et s’élève au ciel : là où se tient le Christ, soleil levant au centre des cieux et au centre du ciel humain. Il est là représenté de la même façon qu’il était devant Pilate, dans la première station. Dans l’ultime aussi, il ferme les yeux, afin que nous nous souvenions de lui non pas comme d’un juge mais de celui qui délivre et qui fait entrer l’humanité dans la maison du Père, dans cette maison commune ; et cette Ascension se passe où ? Sur la « Montagne claire », « Jasna Gora », du sanctuaire de Notre Dame de Czestochowa. Parce que derrière, c’est le sanctuaire de Notre Dame de Czestochowa. Il y a une multitude de gens, une foule de pèlerins, de ces hommes et de ces femmes qui, au cœur de leur pèlerinage, revivent la Passion de l’espérance, la Passion d’une nation, la Passion de Notre Dame de Czestochowa, Notre Dame de Jasna Gora. La porte du ciel, chemin vers la Jérusalem céleste. Et ce ne sont pas seulement des paroles, mais c’est toute l’histoire d’un peuple et l’histoire en quelque sorte dit cette preuve éprouvée d’une nation tout entière et d’une humanité toute réunie. Car dans cette ville, il y a quelque chose du ciel, et quelque chose de l’offrande de la terre, qui s’y rencontrent. Il y a en ce lieu effectivement une terre de bénédiction, une terre de présence, comme il y a un lieu de vie. Le chemin d’une nation : Lourdes, c’est le chemin avec et au milieu des malades ; ici, c’est l’histoire d’une vie donnée c’est l’histoire d’un peuple tout entier, qui a su vivre, qui a su survivre grâce à la foi ! (J.-M. N.)