voici, un ange du Seigneur apparut en songe à Joseph, disant :
— Lève-toi, prends l’enfant et sa mère
et fuis en Égypte
et reste là-bas jusqu’à ce que je te dise
car il arrivera qu'Hérode cherchera l’enfant pour le faire périr
Vperdre.
14 Lui,
SJoseph, s'étant levé, prit avec lui l'enfant et sa mère de nuit et se retira en Égypte.
15 Et il fut là-bas jusqu’à la mort d’Hérode
afin que fût accomplie la parole dite
Vaccompli ce qui avait été dit par le Seigneur à travers le prophète, disant :
« D'Égypte j'ai appelé mon fils. »
Contexte
Repères historiques et géographiques
1–23Bethléem (Voir Repères historiques et géographiques 1S 16,4). ou Éphrath, Éphrata. Une ville qui appartenait à la tribu de Juda (1Ch 2,51) , située à 10 kilomètres au sud de Jérusalem. Le roi David et Jésus y sont nés.
Le parvis de la basilique de la Nativité, dans son état ancien, avec les gros pavés. Le monument byzantin est à l’arrière-plan : la façade orientale, les contreforts ajoutés après-coup et les entrées dans le monument rétrécies en trois moments. À droite, le couvent arménien.
Récit biblique
Rachel mourut en mettant au monde Benjamin sur la route de Béthel, à Bethléem. Son mari Jacob l'enterra sur place (Gn 35,16-19).
Élimélek et Noémi, les beaux-parents de Ruth, étaient de Bethléem avant qu'ils ne s'installent à Moab (Rt 1,2). Après la mort de son mari et de ses fils, Noémi y revint avec Ruth, qui finit par épouser Booz, un parent d'Élimélek (Rt 4,13). Leur fils, nommé Obed, est le grand-père de David (Rt 4,22).
Suivant l'ordre de Dieu, Samuel oignit David à Bethléem (1S 16,13).
Après l'attaque de David contre les Philistins, ceux-ci se retirèrent à Bethléem. Trois des soldats de David se frayèrent un passage à travers le camp des Philistins pour ramener de l'eau du puits de la porte de Bethléem (2S 23,14-15).
La ville appartenait à la tribu de Juda (1Ch 2,51).
Roboam, le petit-fils de David, fortifia la ville (2Ch 11,6).
Le prophète Michée déclara que le futur souverain d'Israël sortirait de Bethléem (Mi 5,1).
123 habitants de Bethléem furent répertoriés parmi ceux qui rentrèrent de l'Exil au 4e s. av. J.-C. (Esd 2,21) et retrouvèrent leur ancienne maison.
La famille de Joseph était de Bethléem (Lc 2,4) et Jésus y est né (Mt 2,1-8 ;Jn 7,42).
À la fin du 7e s. ap. J.-C., on montrait aux pèlerins un rocher situé à l'extérieur des murs de la ville. On disait alors que l'eau du premier bain de Jésus y avait été versée et qu'il été rempli d'eau depuis (→Adamnan Loc. sanct. v.256).
La tradition chrétienne byzantine localisa le tombeau de diverses figures bibliques à Bethléem. →Eusèbe de Césarée Onom. 15v, s. 'Bethleem' écrit que les tombeaux d'Isaïe et de David étaient visibles dans la ville ;→Pèl. Bordeaux a également vu les tombeaux du prophète Ézéchiel, Asaph, Job et Salomon à Bethléem. →Égérie Itin. L1 écrit que les tombeaux des rois de Juda étaient situés dans une vallée de Bethléem. Au cours du 6e s. ap. J.-C., →Pèl. Piacenza V178 précise que les tombes de David et de Salomon étaient situées dans la banlieue de Bethléem, non loin du centre-ville. Il mentionne également une basilique dédiée à saint David. À l'époque d'Adamnan, l'église se trouvait toujours sur l'emplacement supposé de la tombe de David (→Adamnan Loc. sanct. 4,1). La tradition chrétienne, en plaçant la tombe de David à Bethléem, entra en concurrence avec la tradition juive qui la situe à Jérusalem.
Ps.-Épiphane le Moine (→Enarr. Syr. 11) rapporte que la maison familiale du roi David était visible à gauche de l'église de la Nativité.
La tradition byzantine a également localisé les tombeaux des Saints Innocents à Bethléem (→LAR 55 ;→Pèl. Piacenza V178).
Jérôme rapporta qu'il avait enterré sainte Paula à côté de la grotte (→Jérôme Ep. 108) ; sa propre tombe fut identifiée à proximité et montrée aux pèlerins ultérieurs (→Pèl. Piacenza v178).
Autres sources écrites
Bethléem était appelée Bit-Lahmi au 14e s. av. J.-C., par le roi de Jérusalem qui écrivit à son suzerain égyptien pour demander de l'aide et des archers. Ses habitants étaient entrés en rébellion contre son autorité (→Lettres d'Amarna 290).
Une inscription de 1169, toujours visible dans le transept nord, indique que l'église a été rénovée par les efforts combinés des Francs et des Byzantins.
Histoire du site d'après des historiens anciens, les sources chrétiennes et talmudiques
Après avoir réprimé la révolte de Bar Kochba en 135 ap. J.-C., l'empereur Hadrien expulsa les Juifs de Judée, y compris de la région de Bethléem (→Tertullien Jud. 13,3 ;→Lam. Rab. 1,15).
Entre les règnes d'Hadrien et de Constantin, le site était un lieu cultuel dédié à Tammuz / Adonis (→Jérôme Ep. 58).
En 384, Jérôme s'établit à Bethléem puis fut rejoint deux ans plus tard par Paula et sa fille Eustochium. Ensemble, ils transformèrent Bethléem en un centre monastique majeur (→Jérôme Ep. 108).
L'impératrice Eudocia fit construire un palais à Bethléem (→Vita Bars. 121).
Selon Eutychius d'Alexandrie (→Jauhar 17,3), après le soulèvement samaritain de 529 ap. J.-C., l'empereur Justinien voulait que l'église soit reconstruite dans un style magnifique. Cependant, insatisfait et déçu des choix faits par l'architecte, il le fit exécuter. L'église de la Nativité a traversé les âges, même si elle a été modifiée et agrandie au fil des siècles.
Selon une lettre synodale envoyée après le concile de Jérusalem de 836, les Perses épargnèrent l'église en 614 car les mages représentés sur les mosaïques de la façade portaient le sarrau de prêtres zoroastriens (→Bayet 1879, 77).
Eutychius d'Alexandrie (→Jauhar 18, « Le califat d'Omar » 7) écrit que le calife Omar avait visité l'église et avait prié à l'intérieur du transept sud orienté vers La Mecque. Il publia un document officiel autorisant les musulmans à y prier mais leur interdisant de modifier quoi que ce soit à l'intérieur de l'église. Eutychius poursuit en affirmant que les musulmans contrevinrent, plus tard, à l'édit d'Omar, en détruisant les mosaïques et en transformant l'ensemble du transept en mosquée.
L'historien du 13e s., Yāqūt al-Hamawī (Mu‘ğam al-buldān 779 ; voir →Le Strange 1890, 300) rapporte également que le calife Omar avait épargné l'église mais en avait transformé le transept sud en mosquée. Il ne mentionne aucun document officiel réglementant l'utilisation du bâtiment.
Bethléem fut l'une des premières villes conquises par les croisés en 1099 (→Guillaume de Tyr Hist. 8,24). Le clergé occidental y établit un nouveau monastère : il s'installa dans la partie nord de l'église, tandis que le clergé local se plaça dans la partie sud. L'église fut érigée en cathédrale et les deux premiers rois de Jérusalem y furent couronnés.
Sources archéologiques
L'église actuelle de la Nativité est le résultat de 1700 années de modifications successives depuis l'époque de Constantin.
L'église constantinienne était une basilique carrée dotée de quatre rangées de neuf colonnes. La basilique était divisée en une nef avec deux nefs de chaque côté, toutes pavées de mosaïques. À l'extrémité orientale de la basilique, une structure octogonale a été construite sur la grotte de la Nativité. Deux chambres rectangulaires reliaient l'octogone à l'église principale ; elles étaient également pavées de mosaïques. À l'intérieur de l'octogone se trouvait une structure octogonale plus petite qui fermait l'ouverture de la grotte et avait un sol en mosaïque élaboré.
Au cours du 6e s. ap. J.-C., une tentative de remplacement de l'octogone par un bâtiment arrondi échoua et une triple abside en trèfle fut érigée à la place. L'ensemble du bâtiment a été modifié : il a gagné en longueur, la nef a été élargie, l'atrium a été étendu à l'ouest, un narthex a été ajouté et l'église a été fortifiée. Deux entrées de la grotte ont été faites sur les côtés nord et sud de l'abside et équipées de portes en bronze.
Le narthex de la basilique de la Nativité. Au centre droit, une des belles colonnes monolithes byzantines ; juste derrière elle, sur sa droite, l’escalier de la sortie de la grotte de la Nativité, sous le chœur des Grecs. À gauche, au premier plan, un autel latéral arménien.
L'église a été rénovée par les croisés, qui ont bloqué les deux entrées latérales et réduit la taille de la principale. Une porte en bois fut sculptée. L'église était richement décorée de peintures et de mosaïques. Elles représentent des scènes du Nouveau Testament, la généalogie de Jésus selon les évangiles de Matthieu et de Luc, des anges, les décisions des sept conseils œcuméniques et des six conseils provinciaux qui ont été reconnues par les Églises orientale et méridionale. Des représentations de saints décoraient les parties supérieures des piliers.
La grotte de la Nativité
Bien que les évangiles ne mentionnent pas le fait que Jésus soit né dans une grotte, cette tradition s'est répandue très tôt, probablement parce qu'il y a effectivement des grottes dans la région de Bethléem. Les premières déclarations concernant la grotte de la Nativité se trouvent dans les écrits de →Justin le Martyr Dial. 78,5 ainsi que dans le →Protév. Jc. 18,1 du 2e s. av. J.-C. Plus tard, elles furent reprises par →Origène Cels. 1,51, →Jérôme Ep. 58 et →Jérôme Ep. 108, V316, 84. Cette grotte est accessible à partir de l'église de la Nativité. Elle est reliée à plusieurs autres grottes que la tradition identifie à l'étude de Jérôme, ainsi qu'à son tombeau. Il est dit que sainte Paule et sainte Eustochium y sont également enterrées.
À l’intérieur de la basilique, dans la crypte, l’emplacement de la grotte de la Nativité. Ce cliché original montre deux policiers municipaux du mandat britannique montant la garde devant l’autel sous lequel se trouve la célèbre étoile en argent, lieu traditionnel de la naissance de Jésus, et objet de la vénération liturgique des trois communautés chrétiennes y ayant un droit d’accès : Grecs, Arméniens et Catholiques.
Réception
Cinéma
1,18–2,19Histoire de la Nativité Une intense poésie se dégage de ce film d'animation russe.
Le film Noël du réalisateur et artiste Mikhail Aldashin cherche à faire toucher au miracle de la naissance du Sauveur parmi les hommes. L'intrigue respecte le texte canonique, en y ajoutant bien des traits naïfs et émouvants tirés des récits apocryphes. Mikhail Aldashin est l'un des principaux réalisateurs du studio Pilot. Ses films ont remporté le succès dans de nombreux pays, dans divers festivals internationaux. Le film Noël, tourné en 1997 la même année, a reçu le prix de la meilleure réalisation et la première place dans une classification professionnelle au Festival panrusse d'animation de Tarus ; au Golden Fish International Film Festival à Moscou et de nombreuses autres récompenses.
La scène de l’appel des trois mages endormis dans le même lit et tirés de leur sommeil par un petit ange qui les touche du doigt vient directement d’un chapiteau du 12e s. de la cathédrale Saint-Lazare d’Autun, sculpté par maître Gislebertus : Arts visuels Mt 2,1s
Arts visuels
13La fuite en Égypte selon la Biblia Pauperum Cette planche marque le début d'un deuxième volet. Les planches A à D formaient un premier groupe couvrant l'Annonciation jusqu'à la première souffrance du Christ. Les planches E à H formeront un deuxième groupe, délimité par la fuite en Égypte et le retour d'Égypte. La deuxième souffrance du Christ se distingue de la circoncision dans la mesure où le danger est représenté. Alors que dans la Présentation de Jésus au Temple, seul la nudité de Samuel laissait entrevoir la circoncision (Arts visuels Lc 2,22–39), le danger est ici manifeste. Que ce soit à travers Ésaü et son arc (signe distinctif qui réapparaît dans la Planche K : Arts visuels Lc 2,4), l'âne en mouvement ou les fantassins qui pourchassent David, cette planche est marquée par le danger et la fuite.
Registre supérieur
Lectures
à g. On lit dans la Genèse, au chapitre 27, que lorsque Rébecca, la mère d'Esaü et Jacob, apprit qu'il pourrait arriver d'un moment à l'autre que Jacob soit tué, elle fit partir son fils Jacob de son pays vers un pays étranger afin qu'il échappe au meurtre. Ce qui figurait bien la fuite du Christ au pays d'Égypte quand Hérode le chercha alors qu'il venait de naître, pour le faire mettre à mort (Gn 27).
à dr. On lit au premier livre des Rois, au chapitre 19, que le roi Saül envoya des gardes pour rechercher David afin de le tuer. Mais la femme de David, du nom de Mikal, le fit descendre par une fenêtre à l'aide d'une corde et c'est ainsi qu'il échappa à ceux qui le recherchaient. Le roi Saül signifie Hérode qui rechercha le Christ pour le faire mettre à mort lorsque Joseph l'emmena avec Marie en Égypte et c'est ainsi qu'il échappa aux mains [de ceux] qui le recherchaient (1S 19).
Prophètes
à g. Isaïe : « Voici que le Seigneur entrera dans l'Égypte et les idoles seront ébranlées » (Is 19,1).
à dr. David : « Voici que je me suis éloigné en fuyant et je suis demeuré dans la solitude » (Ps 55,8).
Distique droit : « David, grâce à Mikal | évita les pièges de Saül contre lui ».
Prophètes inférieurs
à g. Jérémie : « J'ai laissé ma maison et abandonné mon habitation » (Jr 12,7).
à dr. Osée: « Ils iront chercher le Seigneur et ils ne le trouveront pas » (Os 5,6).
Commentaire de La fuite en Égypte selon la Biblia Pauperum
Enchassé entre la fuite de Jacob et l'évasion de David, la fuite en Égypte fait partie des épreuves que Joseph, Marie et Jésus doivent endurer. Les agresseurs, absents de la scène centrale, sont présents dans les images latérales.
Détails remarquables :
Sur l'image de droite, les troupes de Saül se massent à l'entrée d'une forteresse, tandis que le roi David, assuré par sa femme Mikal, s'enfuit en rappel. On le reconnaît grâce à sa tenue et son chapeau, identiques à ceux qu'il porte en tant que prophète sur la partie supérieure droite de la planche. Chaque prophète a en effet une tenue et un chapeau qui lui sont propres, ce qui lui confère une identité propre. Si l'on prend le cas de David, on le voit porter ce même chapeau dans l'image gauche de la planche H lors de son retour après la mort de Saül, mais aussi lors de sa bataille avec Goliath dans l'image gauche de la planche •H•. De plus, à chaque fois qu'il apparaît en tant que prophète, il porte ce même chapeau.
La figure du bâton est reprise dans les images de gauche et du centre dans un effet de miroir. Tous deux portent leur frêle bagage constitué en tout et pour tout d'une modeste pièce de tissu. Cette figure n'est pas sans rappeler le bâton qui accompagna Moïse lors de l'exode, à la sortie d'Égypte.
Dans une visée typologique, ces deux images ont en commun le désert comme paysage. La continuité du relief en arrière-plan les place sous un même décor.
On note une différence majeure entre l'image centrale et les deux images latérales : si, dans l'Ancien Testament, la fuite impliquait une séparation (Jacob quittant père et mère et David s'éloignant de Mikal), elle se place sous le signe de l'union dans le Nouveau Testament.