La Bible en ses Traditions

Matthieu 27,9–10

Byz S TR Nes
V

...

Alors s'accomplit ce qui fut dit à travers Jérémie le prophète disant :

— Et ils prirent les trente pièces d'argent, le prix du mis à prix, qu'ont mis à prix des fils d'Israël,

3–10 Mort de Judas Ac 1,18-19 9 Trente sicles d’argent Za 11,12-13

10 ...

10 et ils les ont données pour le champ du potier comme me l'indiqua le Seigneur.

Réception

Tradition chrétienne

9s Ils ont pris les trente pièces d'argent...  Accomplissement des prophéties

  • Irénée de Lyon  Epid. 81 '' Le prophète Jérémie dit encore : 'Et ils ont pris les trente pièces d'argent, prix de Celui qui a été mis à prix, de Celui qu'ont mis à prix les fils d'Israël, et ils les ont données pour le champ du potier, selon que me l'avait commandé le Seigneur' (Mt 27,9s). En effet, Judas, qui était au nombre des disciples du Christ, ayant conclu un pacte avec les Juifs – car il voyait qu'ils voulaient le mettre à mort [...]''

La citation de Jérémie qui est en fait une citation libre de Za 11,11s combiné avec des éléments de Jérémie, est une reproduction du texte de Matthieu abrégé :

  • Tertullien  Marc.  4,40,2  ''... celui qui accomplissait les prophéties. Il est en effet écrit : En échange du fait qu'ils ont vendu le juste (Am 2,6). Car, aussi bien le montant que l'aboutissement du prix payé à Judas, rapporté ensuite par lui dans son repentir, et mis dans l'achat du champ du potier (cf. Mt 27,10), ainsi que le récit en est contenu dans l'évangile de Matthieu (cf. Mt 27,3-8), Jérémie les prophétise : Et ils ont reçu trente pièces d'argent, pour prix de celui qui fut mis à pris [...] et il les ont données pour le champ du potier' (Mt 27,10s; cf. Za 11,12s).''

1–66 La mort de Jésus. Clamans voce magna : inscriptions médiévales.

15e siècle : 

  • Vers 1400 : Allemagne, Lüneburg, Kloster Ebstorf, vitrail : "jhesus pendens in cruce tradidit spiritum" DI 76, n° 27, 87.
  • Vers 1425 : Allemagne, Osnabrück, cathédrale, croix : "clamans voce magna emisit spiritum"  DI 26, n° 36, 45.
  • 4e quart du 15e s. :  Allemagne, Hanovre Musée Auguste Kostner, antependium : "Jhesus clamans voce magna emisit spiritum" DI 76, n° 62, 142.

Arts visuels

1–66 Ecce homo

19e s.

Antonio Ciseri (1821-1891), Ecce homo, (huile sur toile, 1860-1880), 292 x 380 cm

Galleria dell'Arte Moderna, Palazzo Pitti, Florence, © Domaine public→, Jn 19, Mt 27

Le peintre néoclassique représente dans une œuvre presque grandeur nature ce passage de l'Évangile. L'angle est original : nous sommes dans le palais de Pilate. Au premier plan, à droite, la femme de Pilate se détourne tristement : elle a tenté d'empêcher cela en racontant à son mari le rêve qu'elle a eu au sujet de Jésus, mais en vain. Les lignes de fuite, bien que discrètes parce que liées aux architectures de l'arrière plan, attirent le regard vers le point signifiant toute l'intensité dramatique du moment : l'espace situé entre le corps de Jésus et la main de Pilate, cette main qui livre, et qui prétend se laver du crime.

Propositions de lecture

3–10 Juda ischariote Jésus a compté parmi les Douze un certain Judas Iscariote (1) devenu traître (2). Après l’avoir trahi, Judas se repent (3), retourne voir les grands-prêtres qui le méprisent (4) et met fin à ces jours (5). Son geste est ambigu car il va à l’encontre du commandement de Dieu « tu ne tueras pas », tandis que l’enseignement rabbinique condamne très clairement le suicide, mais les livres bibliques présentent pourtant de nombreux exemples de suicide (6). Le développement de sa légende noire (7) n’a pas réussi à éradiquer l’ambiguïté foncière de son geste, ouvert à une réflexion sur sa damnation ou son salut et sur la miséricorde de Dieu (8). Son rapport au judaïsme est tout aussi ambivalent : il est à la fois témoin de l’antijudaïsme pagano-chrétien et de l’antichristianisme juif (9).

1. le nom de Juda

Le nom de Judas, Iscariote, permet de le distinguer de l’autre Judas (Lc 6,16) appartenant aussi au groupe des Douze. En hébreu ’îš qᵉriyyôt signifie « homme de Keriot », village à seize kilomètres au sud d’Hébron aujourd’hui nommé al-Kureitein.

  • Jos 5,25 De même  « ’îš ṭôb » signifiant « les hommes de Tob » (cf. 2S 10,6.8 est translittéré Istôb dans la Septante (Josèphe A.J. vii § 121 Istobos).

Cette hypothèse ferait de Judas le seul disciple non originaire de Galilée.

  • Josèphe B.J. On a proposé le sens alternatif « homme de Jéricho/d’Issachar/de Corées » , « homme de Sychar ».

Ces interprétations géographiques sont les plus admises bien que d’autres explications étymologiques aient pu être données.

A partir de l’hébreu ’îš šeqer ou ’îš šākûr, iscariote serait un terme dépréciatif signifiant « homme de mensonge » ou « homme saoul ».

  • Bek.m*9,7: En prenant l’origine araméenne sqr signifiant « teindre » , on s’est demandé si iscariote ne désignait pas le métier de Judas, teinturier.

On a encore proposé : « trésorier », « roux ».

En partant du latin et du grec, le mot iscarios pourrait aussi être une transcription libre du grec sikarios et du latin sicarius « assassin, bandit » :

  • Giṭ. b* 56a : Judas serait alors assimilé au zélote Abba Siqra, le neveu de Yohanan ben Zakai et chef de la révolte .

2. Le traître

Judas Iscariote est celui des Douze qui livre Jésus. Chez Matthieu, Judas mène presque exclusivement le jeu. Il est à l’initiative d’une négociation et demande à être payé : comme il l’est sur le champ, il cherchera à rendre l’argent mal acquis en signe de repentir, dans une transaction quasi-commerciale.

La mémoire chrétienne primitive attribue à Judas Iscariote la mort ignominieuse dont les Écritures menacent les méchants, particulièrement les faux amis du fils de David. La discrétion de Matthieu dans l’exploitation du topos empêche de réduire l’épisode à un développement de son crû. Le récit semble plutôt être le résultat d’allers et retours entre faits historiques et Ecritures. La mention de l’appartenance de Judas au groupe des douze est d’ailleurs un détail en faveur de la véracité de la parole évangélique transmise par les apôtres :

  • Jean Chrysostome Hom. Matt.80,2 « [Les évangélistes] ne cachent rien de ce qui peut les humilier ; alors qu’ils auraient pu dire simplement qu’il était du nombre des disciples » .

Ce fait montre également que l’élection divine n’est pas une prédestination fatale :

  • Thomas d’Aquin Lect. Matt.ad 26,14 n°2629: « Pourquoi le Seigneur a-t-il voulu choisir un méchant et un traître ? […] Il voulait indiquer qu’il ne condamne ou ne sauve personne en raison de sa prédestination, mais en raison de sa justice présente. De sorte que si quelqu’un était condamné en raison de sa prédestination, on ne le lui imputerait pas. Ainsi était-ce pour la consolation des hommes : en effet, il savait que, dans l’avenir, beaucoup seraient égarés dans leurs choix […]. Une autre raison peut être que personne ne soit blâmé pour le fait qu’il y ait un méchant, puisqu’il y eut un méchant dans le premier collège. » 

Les autres évangélistes s’arrêtent à la trahison de Judas : si Marc ne donne aucune explication quant à ses motivations, Luc (Lc 22,3-4) et Jean (Jn 12,4-6) l’associent à des forces obscures. Matthieu et Jean (Jn 12,6) insistent sur son âpreté au gain.

3. Repentir de Juda

Repenti, Judas aurait pu revenir à la suite de Jésus, comme Pierre. Le terme employé pour désigner son attitude profonde, metameleô (Mt 27,3b), a un sens plus intense que « avoir des remords », même s’il ne va pas jusqu’à désigner une contrition de la volonté aussi profonde que metanoeô « se convertir » . Il réalise qu’il a livré l’innocent à la mort (Mt 27,4). Dégoûté de sa trahison, il désespère de la miséricorde de Dieu, ne croyant pas non plus que Jésus aie le pouvoir de remettre les péchés. Certains commentateurs se sont demandés s’il ne s’était pas repenti justement au bon moment au point d’interpréter son suicide comme une manière d’être aux enfers avant Jésus et ainsi de pouvoir lui demander son pardon:

Au contraire, certains ont affirmé qu’il s’était repenti trop tard :

trop tôt :

Il serait demeuré à un simple remords extérieur, non motivé par la peine de déplaire à Dieu:

4. Juda méprisé par les grands-prêtres

Retournant voir les grands-prêtres, il est très mal accueilli. Les blâmes contre les agents corrupteurs abondent dans la littérature ancienne:

et la loyauté envers son peuple est la plus haute valeur:

C’est pourquoi on se méfie des gens prêts à trahir à leur propre profit :

les traîtres sont haïs:

 même par les membres de leurs famille :

et les gens qui instrumentalisent des traîtres les méprisent souvent:

5. Il met fin à ses jours

La mort de Judas est relatée uniquement dans l’évangile de Matthieu. Le récit qui en parle est insérée dans un contexte narratif la mettant en valeur : il est au centre d’une organisation circulaire typique de Matthieu qui présente:

  • Mt 27,5a les pièces jetées par l’un 
  • Mt 27,6a et ramassées par les autres ,
  • Mt 27,4a la délibération morale de Judas 
  • Mt 27,6b la délibération halakhique des grands prêtres et des anciens 
  • Mt 27,3b et enfin, l’argent rapporté par Judas 
  • Mt 27,7-8 et utilisé par les notables 
  • Mt 27,9-10 en accomplissement de l’Écriture .

Ces versets tranchent par leur sobriété par rapport à la mémoire judéo-chrétienne qui trouve maints détails pittoresques pour décrire la fin des méchants comme:

  • Nb 5,21 l’enflure tenant lieu de châtiment ordalique de la femme infidèle ,
  • 2M 9,7-18 l’attaque par des vers,
  • 2M 13,4-8l e jet du haut d’une tour de cinquante coudées dans un tas de cendres 
  • 2M 15,28-35 la tête, le bras et la langue tranchés puis attachée à la Citadelle pour la première et donnée en pâture aux oiseaux pour la dernière.

Une tradition transmise par Apollinaire de Laodicée conserve deux récits de la mort de Judas. L’un est bref :

  • Apollinaire de Laodicée Fr.136 « Il faut savoir que Judas ne mourut pas de la pendaison, mais survécut, étant tombé avant de s’étouffer, comme le montrent les Actes des Apôtres : « Étant tombé la tête la première, il éclata par le milieu et toutes ses entrailles se répandirent » . »

 Papias, le disciple de l’apôtre Jean, le raconte plus clairement :

  • Papias Fr.« C’est un grand exemple d’impiété que Judas a vécu en ce monde. Car sa chair enfla à un point tel qu’il ne réussit pas à passer là où un chariot passait aisément : écrasé par le chariot, il se vida de ses entrailles. » La version longue amplifie la maladie et la mort en donnant à Judas la mort archétypique du méchant (Ac 12,23) : « Pas même la seule masse de sa tête : en effet, ses paupières, dit-on, gonflèrent au point qu’il ne voyait même plus la lumière, ses yeux ne pouvaient être vus même par la sonde d’un chirurgien, si profondément enfouis étaient-ils dans cette excroissance ; quant à ses parties intimes elles grossirent et devinrent dégoûtantes au-delà de l’indécence, des liquides lui en suppuraient sur le corps tout entier, et des vers à l’excès, que rien ne limitait que leur propre grouillement. Après moult souffrances et châtiments, on dit qu’il finit en son lieu propre, et que ce lieu est resté désert et non bâti du fait de sa puanteur jusqu’à maintenant ; mais même jusqu’à aujourd’hui on peut voir certains passants éviter ce lieu — quand, même, ils ne se bouchent pas le nez de leurs mains. »

Très tôt, on chercha à harmoniser les différentes versions. Dans cette perspective, Ac 1,18 pourrait être une harmonisation de Matthieu et de récits anciens comme ceux de Papias : la corde se casse, Judas éclate et répand ses viscères.

  • Augustin d’Hippone Fel.Une vieille version latine africaine citée par Augustin d’Hippone , selon laquelle Judas « se passa une corde au cou (ollum sibi alligavit) » pourrait être une harmonisation de Matthieu et des Actes.
  • Elle est reprise par Jérôme dans la Vulgate, qui traduit Ac 1,18 « [cet homme] est tombé la tête la première » par suspensus (Mt 27,5 laqueo).
  • Éphrem le Syrien Diat.20,18: Le texte arménien harmonise les Actes et Papias en remplaçant « est tombé la tête la première et a éclaté » par « ayant enflé, il a éclaté ». Les variations et amplifications ne manquent pas .

6. D'autres exemples de suicicide

Dans l’Ancien Testament, malgré le commandement « tu ne tueras pas », le suicide est accepté dans des situations désespérées, pour sauver son honneur ou sa fidélité à la religion:

En certains cas, le suicide semble même une possibilité d’expier ses propres péchés ou ceux d’autrui:

  • 1M 7,16-17 Ainsi l’histoire du grand prêtre Alkime qui se repentit d’avoir condamné beaucoup de justes à mort  et par contrition s’infligea les quatre supplices que son tribunal avait imposés à ses victimes en application du principe d’une vie pour une vie (Cf. Lv 24,17 ; Nb 35,33 ; Dt 19,11-13) : lapidation, feu, pendaison et décapitation.

Quand le suicide exprime une bonne intention ou vient s’ajouter à une bonne action, il constitue une sorte de voie rapide vers le monde futur.

  • Jos 8,29 Ce contexte peut amener à se demander si le suicide de Judas ne serait l’accomplissement de la sentence que le traître se donne à défaut de pouvoir être jugé pour la mise à mort du Roi.
  • Josèphe B.J.iii § 361-382:Josèphe rejette cette possibilité : puisque Dieu a donné à l’homme une âme immortelle, il ne peut pas disposer lui-même de ce bien sans s’opposer au Créateur .

Dans la culture antique contemporaine ce genre de mort est considérée comme une honte :

surtout si c’est un acte de désespoir:

7. La légende noire

Le début de la légende noire sur Judas vient tout droit de l’évangile : Marc, Matthieu, Luc et Jean composent une figure de plus en plus sombre qui s’harmonise mal avec le fait qu’il a été choisi par Jésus et a participé à son ministère public.

Dans le Nouveau Testament Judas est:

En cela, il représente les Juifs ayant le diable pour père (Jn 8,44).

Au Moyen-Age, les légendes ne font que noircir le tableau:

  • Voragine Légende1,315-318 Présenté comme un nouvel Œdipe, l’homme de Scarioth présenté comme le fils de Ruben et Cyborée est destiné à faire le mal, à son insu. Avant sa naissance, Cyborée rêve que son fils détruira la race juive. Pour l’éviter, elle confie le nouveau-né à l’eau dans une caisse. L’enfant accoste sur les rivages de l’île de Scariot où la reine l’adopte et l’éduque avec son fils. Cependant, un jour où il se montre plus méchant que d’habitude, elle lui révèle le mystère de son origine. Enragé, Judas tue son frère de lait et fuit à Jérusalem où il devient l’âme damnée de Pilate. Un jour où celui-ci a envie d’un fruit qu’il aperçoit dans le jardin de Ruben, Judas y fait effraction pour voler le fruit désiré. Son père survient. Judas le tue dans la rixe. Pour étouffer le scandale, Pilate donne la veuve en mariage à Judas. Le couple ne tarde pas à se rendre compte de sa parenté. Désespéré, Judas songe à se tuer, mais Cyborée lui suggère d’aller voir Jésus pour obtenir le pardon. Il se rend donc devant le maître et en devient le disciple .

La littérature colportera longtemps cette légende qui fait remonter sa méchanceté à ses parents : Judas est à la fois le traître et le héros mondain conduit au repentir, à la conversion et à la vocation. Cette légende n’a jamais été canonisée, et Jacques de Voragine prend ses distances avec elle. Mais elle a été très populaire.

8. Reflexion sur la damnation ou le salut de Juda et la misericorde de Dieu

Le personnage de Judas est susceptible de deux interprétations opposées. Son geste permet finalement de rendre grâce à Dieu pour son Messie. Mais il procure aussi la mort de ce messie. Judas dans l’évangile est peut-être un « jaloux », un « zéle » comme Pinhas ou Josué (Jos 22), un pré-zélote ; il croit que Jésus est le roi-messie, le « fils de Dieu », comme tous les rois de Juda, et doit donc être reconnu par l’institution religieuse centrale en Juda : le Temple. En livrant Jésus aux grands-prêtres, ils chercheraient surtout à provoquer une confrontation entre les deux, afin de forcer la reconnaissance formelle de Jésus comme Messie. Les choses tournent mal, pas comme il l’avait prévu. Mais sa faute permet à Pierre de rendre grâce à Dieu pour les décrets de sa providence qui tire un bien infini d’un mal circonstancié (Ac 2,39).

La mort affreuse de Judas rapproche son destin de celui d’Ahitophel qui trahit jadis un premier messie, David, type de son « fils » Jésus messie comme lui (2S 15-17 // Mt 26,14-16.47-56 ; Mc 14,10-11.43-45 ; Lc 22,3-6.47-53) :

  • 2S 15,23 comme David passe le Cédron dans le contexte de cette trahison, Jésus le traverse également (Jn 18,1) ;
  • 2S 15,31 comme David prie pour que Dieu transforme en folie la décision d’Ahitophel, Jésus prie pour que son heure passe (cf.Agonie*).
  • 2S 17,1 // Mt 26,31.34 Alors qu’Ahitophel veut surprendre David de nuit , avec douze mille hommes (2S 17,1 // Mt 26,53), pour le frapper (2S 17,2 ; même verbe pataxô en 2 Règnes 17,2 qu’en Mt 26,31) et faire fuir (2S 17,2 // Mt 26,56) ceux qui sont avec lui (2S 17,2 // Mt 26,18 etc.), l’évangile de Matthieu présente un parallèle strict de ces différentes actions de Judas à l’égard de Jésus dans le récit de la passion.
  • 2S 17,23 Enfin comme Judas, Ahitophel rentre chez lui et s’étrangle ou se pend . 

L’allusion à Ahitophel est d’autant plus claire que le verbe apagchomai n’est employé dans la Septante qu’en 2S 17,23 et Tb 3,10.

9.Son rapport ambivalent au judaïsme

Juda est à la fois témoin de l’antijudaïsme pagano-chrétien et de l’antichristianisme juif .

Le suicide de Judas marque une limite de ce qui est révélé dans l’évangile de la miséricorde divine. Cette limite est infranchissable par aucun raisonnement et suscite une réelle crainte dans le cœur du lecteur ou de l’auditeur croyant : en interdisant de penser que tout le monde est sauvé de toutes façons, cette destinée tragique laisse planer la nécessaire crainte de la damnation.

  • Dante Comédie« Enfer » 34,61-69 La croyance populaire dans la damnation de Judas est illustrée par le nom du dernier cercle de l’enfer dédié aux traîtres à leurs bienfaiteurs (Brutus, Cassius, ...), Judas, le traite de Jésus .

Cependant, certains pères de l’Eglise laissent ouverte la possibilité d’une miséricorde pour Judas à l’image du Bon* Larron repenti et admis au royaume par Jésus (Lc 23,40-43) :

Dans les représentations des Passions, très populaires, Judas est souvent identifié à Satan, sur fond de clichés anti-juifs représentant les Juifs et non les Romains en train de torturer Jésus. Mais tandis que Judas se repent, les autres Juifs vont au bout de leur forfait ! Sont ainsi mis en communication l’antijudaïsme théologique chrétien et l’antisémitisme païen jamais disparu. Rien d’étonnant que nombre de pogroms aient eu lieu dans le contexte de ces Passions. Cependant, les Toledot Yešu procèdent à un renversement des valeurs symétriques à la démonisation chrétienne de Judas : il est le juif fidèle à son peuple et agent des sages d’Israël dans leur opération de renversement de la puissance de Jésus.

L’Evangile de Barnabé, apocryphe du 15ème siècle rédigé par un juif ou par un chrétien devenu musulman a pris ainsi une place centrale dans l’apologétique musulmane selon laquelle Judas a remplacé malgré lui Jésus au moment de la crucifixion et a permis la supercherie de la résurrection :

  • Év. Barn.§ 216 « Judas fit irruption le premier dans la pièce d’où Jésus avait été enlevé et où dormaient les onze. Alors, l’admirable Dieu agit admirablement : Judas devint si semblable à Jésus par son langage et dans son visage que nous crûmes que c’était Jésus. […] Tandis qu’il parlait, la milice entra et on mit la main sur lui car il était en tout semblable à Jésus » .

Judas est donc conduit devant le grand prêtre : on comprend alors mieux le silence qu’il respecte devant l’interrogatoire qu’on lui fait passer. Puis on le fait passer devant le gouverneur.

  • Év. Barn.ib. 217 Judas avoue : « Je suis Judas Iscariote et non pas Jésus. Lui, c’est un magicien. Il m’a transformé ainsi par son artifice » (ib. § 217). Le gouverneur est ébranlé mais ne parvient pas à entamer la détermination des prêtres. Judas finit donc crucifié en criant : « Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné, car le malfaiteur a fui et moi je suis tué à tort ? ». Jésus n’est donc pas mort, et peut tranquillement réapparaître. Il n’a rien d’un fils de Dieu, il n’est pas ressuscité. Tout a été monté par une Église qui trompe.

Contexte

Repères historiques et géographiques

26,1–27,66 Les lieux de la Passion

Parcours de Jésus durant sa Passion, (numérique, Jérusalem : 2022)

M.R. Fournier © BEST AISBL, Mt 26-27 ; Mc 14-15 ; Lc 22-23 ; Jn 18-19

Le lieu du →prétoire, tribunal de Ponce Pilate, est incertain. Deux sites sont possibles : la forteresse Antonia et le Palais d'Hérode le Grand. La tradition situe le prétoire à l'Antonia mais les archéologues, aujourd'hui, le placent plutôt dans le palais d'Hérode le Grand.

Bibliographie
  • Dominique-Marie Cabaret, La topographie de la Jérusalem antique (Cahiers de la Revue Biblique 98), Peeters : 2020.
Toponymie

Esplanade du Temple, Ophel, ville haute, ville basse, palais d’Hérode le Grand, mont Sion, Cénacle, palais hasmonéen, palais de Caïphe, Golgotha, forteresse Antonia, porte dorée, jardin de Gethsémani, mont des Oliviers, colline de Bézétha, théâtre, vallée du Cédron, vallée du Tyropéon, vallée de la Géhenne, via Dolorosa.

Réception

Cinéma

26,1–28,20 La Passion dans Il Vangelo secondo Matteo, chef-d'œuvre de Pier Paolo Pasolini (réal., scén., 1922-1975) Film noir et blanc à petit budget, réalisé par un homosexuel athée marxiste, ce film reste un choc, comparé aux œuvres ultérieures de Pasolini (p. ex. Salò, ou Les 120 journées de Sodome, en 1975). Pasolini s'était dit fasciné par l'éclat littéraire et l'efficacité narrative de l'évangile selon Mt. Son film, dédié au « glorieux Pape Jean XXIII », met en scène tout l’évangile selon Mt, qu’il suit fidèlement, surtout dans les dialogues. Cette fidélité littérale ne l’empêche pas de proposer une représentation très personnelle de la passion de Jésus, où il fait intervenir sa propre mère Susanna Pasolini pour interpréter la Vierge Marie avec une retenue bouleversante (cf. ci-dessous « la figure de Marie »).

Pier Paolo Pasolini, Il Vangelo secondo Matteo, film, 137', Italie-France : Arco film-Lux Compagnie cinématographique, 1964.

Photographie : Tonino Delli Colli ; musique : Jean-Sébastien Bach, Wolfgang Amadeus Mozart, Sergueï Prokofiev, Anton Webern, Père Guido Haazen (Missa Luba), Sometimes I Feel like a Motherless Child (Negro spiritual), chants de l’Armée Rouge ; distribution : Enrique Irazoqui (Jésus), Mario Socrate (Jean-Baptiste), Margherita Caruso/Susanna Pasolini (Marie)

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La représentation est à la fois réaliste, par le décor naturel, et hiératique, par une succession de tableaux qui évoquent la scénographie d’un opéra. La musique joue d’ailleurs un rôle important pour préciser le sens des séquences, comme un commentaire sans paroles. La figure de Jésus est celle d’un prophète imprécateur, au verbe violent, qui entraîne les foules et déchaîne l’hostilité croissante des chefs et des pharisiens. Cette énergie se déploie jusqu’à l’arrestation. Jésus est d’ailleurs filmé souvent seul dans le plan, séparément des disciples. Les traits fins et distingués de l’acteur qui interprète le Christ contrastent avec la beauté brute et rustique des visages des disciples : Jésus est la perfection de l’humanité. Les gros plans nombreux sur ces visages évoquent l'Église comme peuple de Dieu ou le Peuple lui-même. On y voit surtout des hommes de tous âges, des vieilles femmes et des enfants, peu de jeunes femmes.

De plus, la pauvreté formelle adoptée comme langage cinématographique résonne fortement avec les enseignements du Christ : les canons néoréalistes permettent d’insister sur l’humanité de Jésus, rompant avec la vision « héroïcisante » des studios hollywoodiens. L’ambition néoréaliste de mettre à l’honneur les humbles, tout en soulignant le caractère réellement inédit du quotidien, renvoie aussi à la prophétie de Jésus : « Aujourd'hui s'accomplit cette Écriture — à vos oreilles » (Lc 4,21). Ce film fut récompensé, entre autres, par le prix spécial du jury au Festival de Venise et le grand prix de l'Office catholique du cinéma.

La passion

La représentation de la passion à proprement parler occupe 28 min, dans la seconde moitié du film. Dans les choix opérés par le réalisateur, trois caractéristiques influent profondément sur le message délivré par l’œuvre : Pasolini a une intelligence politisée du message évangélique ; il adopte une lecture chronologique et littérale de Mt ; il représente la passion de points de vue majoritairement externes.

  • Pasolini dans ses choix de mise en scène, décrit Jésus comme un tribun, un homme politique animé par un immense désir de justice.

  • Il adopte une narration strictement chronologique, qui suit littéralement le texte de l’évangile, omettant toutefois certains épisodes relatés dans Mt. Cette construction linéaire, si elle confère un caractère de simplicité et de pauvreté au récit de la passion, exprime de manière limitée l’unité profonde dont est tissée la vie du Christ.

  • La caméra adopte le point de vue externe de Pierre jusqu’à son reniement, puis de Judas jusqu’à sa pendaison, enfin de Jean jusqu’à la crucifixion. Il en découle que la majorité des images de la passion est éloignée du cœur de l’action : l’œil de la caméra observe une suite de tableaux à distance respectueuse, sans s’approcher du visage ni du corps du Christ. Hormis la pauvreté formelle adoptée dans cette œuvre, la Passion de Pasolini fait peu entrer dans le caractère stupéfiant de l’amour de Dieu tel qu’il est révélé dans la mort du Christ, car cette représentation laisse le spectateur à l’extérieur de l’humanité du messie et de sa réalité incarnée et personnelle. Pasolini ne montre pas non plus l’événement universel et cosmique (en tant qu’il réalise une conversion, un retournement de la marche du monde) que constitue la passion de Jésus.

Une conséquence de telles options est l’impression d’extériorité qui se dégage de la dernière partie du film : Jésus, après avoir déclamé ses enseignements sur un ton impérieux, souffre sa passion et meurt loin du spectateur. La distance installée par le metteur en scène avec le Christ souffrant occulte largement la violence inexprimable de la passion, qui est le sacrifice d’amour de Dieu pour ses enfants et ses frères, les hommes. Avec le recul, on comprend les raisons pour lesquelles cette œuvre a pu rencontrer un tel succès critique, tant cette représentation de la passion, tout en semblant réaliste, est peu dérangeante.

Jésus

À l’écran, selon un procédé fréquent dans le cinéma italien de l’après-guerre, Jésus est incarné simultanément par un duo d’acteurs, avec l’apparence d’Enrique Irazoqui aux cheveux noirs, aux yeux noirs et sans arcade (juif basque qui, comme les autres interprètes, n'était pas un acteur professionnel) et la voix d’Enrico Maria Salerno. Le décalage entre les images capturées en extérieur d’un interprète non professionnel et la voix puissante enregistrée en studio d’un acteur confirmé peut être vu comme le signe de la double nature du Christ. Ce Jésus éructe les paraboles et prophétise avec une férocité vive, comme un agitateur syndical. Il est nerveux avec ses inquisiteurs et brusque avec ses apôtres. C'est un homme-Dieu pressé d'accomplir sa mission. Plus tôt mort, plus tôt ressuscité.

La perfection formelle du visage d’Irazoqui rappelle les représentations du Greco ; son regard légèrement asymétrique renvoie au mystère que dégagent les portraits du Christ dans l’art russe de l’icône. Fidèle au texte de Mt, Pasolini insiste sur l’union de Jésus au Père en montrant la prière solitaire du Christ avant sa passion, sur le point d’entrer dans Jérusalem. Il montre la souffrance portée par Jésus dans son agonie en empruntant à La Passion de Jeanne d’Arc de Carl Dreyer la douleur béate et muette du visage du condamné : regard hébété, fixité, stupéfaction à l’aube du don total de soi.

Il faut néanmoins admettre que l’acteur principal manque singulièrement d’épaisseur, en particulier dans les scènes de la passion, ce qui peut être imputé au jeune âge d’Irazoqui, qui n’avait que 19 ans (et non 33) lors du tournage.

Colère de Dieu, colère des hommes

Il Vangelo de Pasolini frappe par le souffle d’impatience et de colère impérieuse qui jaillit de la personne du Christ et qui secoue toute l’œuvre. La Bonne Nouvelle présentée ici semble être un principe de vie réagissant à l’injustice sociale répandue dans le monde. Par suite, la justice de Dieu semble primer sur la miséricorde de Dieu, appauvrissant le sens fondamental de la passion. On est loin de la plume déchirante de Péguy qui met les mots suivants dans la bouche du Père décrivant la passion de Jésus :

  • Péguy Porche « Cette aventure par laquelle mon Fils m’a lié les bras. Pour éternellement liant les bras de ma justice, pour éternellement déliant les bras de ma miséricorde » (307).

Chez Pasolini, le cœur de Jésus semble plus vibrant de colère que brisé d’amour. Sa colère et son exigence de justice l’emportent sur sa compassion et sa miséricorde. À la lumière des engagements de Pasolini auprès du Parti communiste italien, on peut s’interroger sur la justesse de cette interprétation : la colère attribuée ici au Christ est-elle la colère de Dieu, ou plutôt la colère du réalisateur projetée sur ce qu’il comprend de la personne du Christ ?

Le mystère de la croix

Pasolini montre sans ambiguïté le don libre que le Christ fait de lui-même dans sa passion : Jésus après l’institution de l’Eucharistie, sourit à ses disciples comme un époux qui connaît la plénitude après l’union nuptiale ; au prétoire, après le couronnement d’épines, il marche librement vers sa croix, son bâton à la main ; au Golgotha, il crie peu lorsqu’il est cloué sur sa croix, contrairement au brigand crucifié à ses côtés.

Toutefois par d’autres aspects non négligeables, Pasolini ne donne pas la pleine mesure du don personnel du Fils de Dieu fait homme. Ainsi la flagellation du Christ est ignorée. De plus, dans l’interprétation que le réalisateur fait de la réquisition de Simon de Cyrène, Jésus, désormais déchargé de sa croix et apparemment en bonne santé, cesse de porter sa croix et marche aux côtés du Cyrénéen qui a endossé son fardeau. Étranger à l’ultime étape de sa vie terrestre, le Christ paraît dès lors désincarné. La lecture que fait Pasolini du texte de Mt, quoique poétique, est un contresens : ici le Verbe de Dieu fait homme pour assumer le péché du monde fait porter son joug par son prochain menacé de mort, alors même qu’il est venu assumer la souffrance et le péché de tous les prochains.

La figure de Marie

Le rôle de Marie lors de la passion du Christ est tenu par Susanna Pasolini, la mère de Pasolini. Elle est une Vierge éplorée de douleur, tordue de souffrance devant le spectacle de son fils supplicié et mis à mort devant elle. Malgré le jeu convaincant de son actrice, le réalisateur butte sur le double écueil du choix de son interprète et de la difficulté à percer le mystère de la nouvelle Ève :

  • En donnant ce rôle clef à sa propre mère, Pasolini fait en quelque sorte le choix d’apparaître lui-même comme le messie crucifié. (Nombreux sont d’ailleurs les critiques que, par certains aspects, la vie du Christ résonne avec la vie du cinéaste.)

  • Pasolini ne communique guère au spectateur les réalités profondes qui font que la souffrance de Marie au pied de la croix dépasse considérablement la peine de Susanna Pasolini, fût-elle en train de contempler son propre fils agonisant : Marie au Calvaire distingue dans la personne de son fils à la fois le fruit de ses entrailles et le Dieu vivant et vrai qui épouse notre humanité pour porter toute souffrance. Étant unie mystiquement au cœur de son fils, elle traverse la mort comme Jésus traverse la mort. Cependant si elle porte « celui qui porte tout », on peut dire aussi que sa force et sa dignité reçues de Dieu surpassent celles de toutes les mères : dans son union mystique au cœur de Dieu, Marie garde intacte sa certitude que Jésus est le Fils de Dieu, et intacte sa confiance dans l’amour tout-puissant et miséricordieux du Père. À ce titre le jeu accablé de Susanna Pasolini, s’il est juste sur un plan strictement humain, ne rend pas pleinement compte de l’amour de Marie marchant au Golgotha avec Jésus.

Antijudaïsme ?

Chez Pasolini, Jésus marche jusqu'à sa mort, à travers la campagne de Matera, dans les Pouilles, près du talon de la botte italienne. La foule le poursuit et le presse ; un cri jaillit "Son sang soit sur nos enfants !" (Mt 27,25). Pasolini, poète avant d'être cinéaste, ne voulut pas censurer le verset d'un texte qu'il voulait honorer ; et, en mettant en scène des Italiens pourchassant les Italiens, il typifie une malédiction moins de race ou de religion que de clan.

L’Église

Une mosaïque de musiques émaille l’œuvre de Pasolini : des extraits des œuvres de Bach, Webern, Mozart, Prokofiev, de la Missa Luba (messe congolaise), de Negro spirituals (déchirant Sometimes I Feel like a Motherless Child) et de chants révolutionnaires russes enrichissent les images de la vie simple du Christ et nous enseignent sur ce qu’est l’Eglise :

  • Ces thèmes récurrents sont une représentation de la multiplicité des demeures dans la maison du Père : l’Église ressemble à une famille et l’Église est universelle ; elle accueille tout homme, comme Dieu ouvre ses bras à tout homme.

  • La répétition de ces musiques variées évoque aussi la prière tournoyante et sans cesse recommencée du psalmiste.

  • Enfin, on peut deviner dans les choix de musique de Pasolini les possibles défigurations du message évangélique. Ainsi, après la résurrection du Christ, l’Église en marche est représentée comme un peuple d’insurgés avec les armes à la main, courant vers un avenir lumineux au son des chœurs de l’Armée Rouge.

Conclusion

Il Vangelo secondo Matteo de Pasolini bénéficie des canons du néoréalisme italien et rompt heureusement, par sa pauvreté formelle, avec la proposition hollywoodienne connue jusque-là. Toutefois, dans une lecture littérale (quoique poétisée et politisée) de l’évangile, le réalisateur semble ne pas adhérer au cœur de la foi chrétienne, qui est que Dieu, fait homme dans la personne de Jésus, a porté le péché de chaque homme et de l’humanité pour que tout homme soit sauvé. C’est pourquoi cette œuvre recèle un certain nombre de limites lorsqu’elle rend compte du message évangélique, et ressemble au récit qu’un reporter extérieur ferait du parcours exceptionnel d’un leader exceptionnel.

La passion dans Il Vangelo secondo Matteo, verset par verset

Après la référence, on donne un bref commentaire, suivi du minutage.

  • Mt 26,1-5 : complot contre Jésus (1:38). 
  • Mt 26,6-13 : la protestation « des disciples » contre l'onction vient de Judas seul ; Marie Madeleine perçoit avec effroi le choix que Judas fait, dans son cœur, de trahir le Christ (1:39-41). 
  • Mt 26,14-16: trahison de Judas (1:41-42).
  • Mt 26,25 : dénonciation de Judas (1:42-43). 
  • Mt 26,26 : la communion au pain (1:43). 
  • Mt 26,27:  lors de la communion au calice, Jésus sourit (contentement de l’époux après avoir consommé ses noces ; 1:43-44).
  • Mt 26,30: le jardin des Oliviers (1:44).
  • Mt 26,38: pendant l’agonie de Jésus, la lumière disparaît ; la pellicule noircit (1:45-49).
  • Mt 26,39: Jésus tombe, mais pas face contre terre (1:45-49).
  • Mt 26,43: en train de dormir En train de dormir : Jésus prie en 2 fois et pas 3 (il ne réveille ses disciples qu’une seule fois, puis les soldats arrivent) (1:45-49).
  • Mt 26,49: un baiser le baiser de Judas Ignoré par Pasolini (1:45-49).
  • Mt 26,51-52: Jésus, par sa parole, empêche que l’oreille du garde soit arrachée par le disciple zélé (1:48-49).
  • Mt 26,55 : l’arrestation de Jésus (1:49).
  • Mt 26,59 : pendant l’interrogatoire au sanhédrin, un point de vue de Pierre, qui déambule, perdu dans les rues de Jérusalem. Jérusalem est montrée comme une ville en ruines (1:50).
  • Mt 26,65 a: déchira ses vêtements l’indignation de Caïphe : Caïphe se déshabille plutôt qu’il ne déchire ses vêtements (1:52).
  • Mt 26,67-68 : les outrages chez le grand prêtre sont suggérés (cohue). Cette scène est montrée de loin, avec le point de vue de Pierre qui est un spectateur éloigné. Pasolini qui insiste tout au long de son œuvre sur la colère du Christ devant l’injustice faite aux hommes par les hommes, édulcore l’injustice faite par les hommes à l’Homme (1:53).
  • Mt 26,70 b: Je ne sais pas ce que tu veux dire le reniement de Pierre : Le coq n’est pas montré ; Pierre est montré perdu sur une rue pavée dévorée de mauvaises herbes (Cf. la parabole). On s’éloigne de Pierre pour rejoindre Judas (1:53-54).
  • Mt 27,4-5 les remords de Judas : Puis point de vue de Judas pour montrer Jésus emmené chez Pilate pour mourir (1:55-57).
  • Mt 27,5 Mort de Judas : Judas se pend nu. Il a tout perdu. Il se retrouve seul dans la création, séparé de Dieu, comme Adam après le péché originel ? (1:57).
  • Ajout de Pasolini : Jean et Marie chez Pilate (1:57-58).
  • Mt 27,1 Devant le gouverneur : Jésus chez Pilate est montré du point de vue de Jean, avec les yeux de Jean (1:58).
  • Mt 27,11 b: le gouverneur l’interrogea l’interrogatoire par Pilate (1:58).
  • Mt 27,24 b: se lava les mains le lavement des mains Pilate prononce les paroles du lavement des mains mais ne se lave pas les mains (1:58).
  • Mt 27,26-27 dans le prétoire la flagellation et les outrages au prétoire Jésus marche librement vers sa mort, un bâton de pèlerin à la main jusqu’à ce que ce dernier soit remplacé par la croix. A part un mouvement de cohue, Jésus n’est pas supplicié (1:59).
  • Mt 27,31 c : ils l’emmenèrent la montée au Calvaire : Marie est cramponnée à Jean. Susana Pasolini est tres convaincante en mère assistant au supplice de son fils ; cependant elle n’est pas n’importe quelle mère. Lorsque son fils meurt, il porte le monde et dans sa compassion qui est une union mystique, un cœur à cœur avec le Fils de Dieu qui aime l’humanité à mourir d’amour pour elle, Marie aussi porte le monde. Elle ne peut dès lors être représentée comme « simplement » éplorée (évaporée).  Les soldats donnent à boire à Jésus pour monter au Calvaire. Marie se bat pour être proche de son fils (1:59).
  • Mt 27,32 a : un Cyrénéen du nom de Simon Simon de Cyrène : Jésus tombe une fois, puis Simon de Cyrène est réquisitionné pour porter (seul). Jésus n’a pas un cheveu décoiffé, pas une égratignure. Rupture entre la promenade dominicale d’un Christ étranger/indifférent/désincarné [ou encore philosophe face] à son fardeau. Ici Jésus sous-traite le problème (2:01).
  • Mt 27,35 a l’ayant crucifié la crucifixion (2:03). L’image s’interrompt pour expliquer, par une parole du Christ, le caractère mystérieux (incompréhensible ?) de la Passion : « Vous verrez mais ne comprendrez pas… »
  • Mt 27,38  deux brigands le bon et le mauvais larron : Visibles mais non identifiés (2:02).
  • Mt 27,45 de la ténèbre sur toute la terre l’obscurcissement à la sixième heure (2:04).
  • Mt 27,48 b : vinaigre la gorgée de vinaigre (2:05).
  • Mt 27,51-53 les signes accompagnant la mort du Christ : Seul le tremblement de terre est représenté. Un groupe de femmes en noir jaillit en courant d’une habitation (2:06).
  • Mt 27,59-60 Ensevelissement de Jésus : Cortège comprenant Marie et Jean. Plusieurs jeunes hommes pieds nus, habillés comme des moines franciscains (sans capuche), portent le corps de Jésus jusqu’à son tombeau (2:07-08).
  • Mt 28,1 vinrent pour voir le sépulcre visite des saintes femmes au tombeau (2:09).
  • Mt 28,2 et voici la résurrection Le visage de Marie s’illumine de gratitude, sans trace de surprise lorsque la pierre roule découvrant le tombeau vide (2:10).
  • Mt 28,16-20 : apparition du Christ ressuscité aux disciples (2:11).

(avec fr. Benoît Ente o.p.)