La Bible en ses Traditions

Isaïe 53,2–3

M G V
S

Il s’élèvera

GNous l'avons annoncé comme un nourrisson

Vune petite pousse en sa présence

comme le

Gun rejeton d’une

Gdans une terre aride

sans beauté

Gil n’a ni aspect

Vil n’a ni beauté ni éclat et nous l'avons regardé

sans aspect qui nous le rende désirable.

Get il n'avait ni aspect ni beauté.

Vil n'avait pas même d'aspect et nous l'avons désiré.

...

M V
G S

Méprisé, abandonné

Vle dernier des hommes

homme des douleurs et connu de la souffrance

Vconnaissant l'infirmité  

comme quelqu'un devant qui on se voile la face,

Vson visage était comme caché et méprisé

du coup, nous ne l'avons pas calculé.

...

Réception

Tradition juive

1–12 Le serviteur souffrant : la figure du peuple juif La tradition juive voit dans le serviteur décrit par Isaïe le peuple élu. Les rabbins considèrent qu'en traversant l’histoire, le peuple élu devra subir la persécution, il sera laissé comme mort mais sa postérité sera assurée par Dieu.

Cette prophétie est donc à la fois comme :

  • une relecture du passé du peuple élu qui fut déporté à Babylone après la destruction de Jérusalem en 586 av. J.-C.
  • l’annonce faite par Dieu des persécutions que subira le peuple juif. Cette annonce n’est pas dénuée d’espérance puisque, malgré les persécutions, subsiste une promesse de postérité.

À travers cette lecture, les rabbins magnifient la fidélité de Dieu au travers des épreuves. C’est une lecture dite corporative, qui se distingue d’une lecture individuelle.

Arts visuels

1–12 Du Serviteur souffrant au Christ : Isaïe comme cinquième évangéliste ?  

Première Renaissance, école de Mantoue

Les Pères de l'Église perçoivent une ressemblance frappante entre cette description du serviteur souffrant qui voit ses jours prolongés après son passage au sépulcre, et les récits de la souffrance de Jésus, transpercé sur la croix, mis au tombeau et ressuscité.

Andrea Mantegna (ca. 1431-1506), La Lamentation sur le Christ mort, (tempera sur toile, 1470-1474), 66 x 81 cm

Reg. Cron. 352, Pinacothèque de Brera, Milan

 © Domaine public→

Cette Déploration du Christ montre celui-ci mort, allongé, et trois pleureuses, à savoir sa mère, Marie de Nazareth, Marie-Madeleine, et l'apôtre Jean. Le cadrage resserré sur le Christ met en exergue les principaux stigmates de sa Passion.

Illustrateur du 19e s. 

Schnorr von Carolsfeld, Julius, 1794-1872, (gravure sur bois, 1860), Oracles messianiques, h. 35 cm, illustration

in Schnorr von Carolsfeld Julius  et Merz Heinrich (1816-1893), Die Bibel in Bildern. 240 Darstellungen, erfunden und auf Holz gezeichnet [1852-1860], Leipzig : Georg Wigand, 1860

Getty Research Institute, © Public Domain→

L'image concentre la vocation d'Isaïe, la vision de la Madone à l'enfant et celle du Christ avec sa croix victorieuse de Satan en une seule illustration des oracles messianiques et des chants du Serviteur.

Musique

3.50.6 Il était méprisé

18e s.

Georg Friedrich Händel (1685-1759), The Messiah: 'He was Despised' HWV56, 1741

Maureen Forrester

© Licence YouTube standard→, Is 53,3.50,6

Paroles

He was despised and rejected of men, a man of sorrows and acquainted with grief. (Is 53,3) He gave His back to the smiters, and His cheeks to them that plucked off His hair: He hid not His face from shame and spitting. (Is 50,6)

Composition

Le Messie (Messiah, HWV 56) est un oratorio composé en 1741 par Georg Friedrich Händel. C'est une de ses œuvres les plus populaires avec les suites Water Music (Musique sur l'eau) et Music for the Royal Fireworks (Musique pour les feux d'artifice royaux). The Messiah est désormais considéré comme le chef-d'œuvre du genre oratorio. L'œuvre est écrite pour orchestre et chœur, avec cinq solistes (soprano, mezzo-soprano, contralto, ténor et basse), elle comprend une ouverture, une sinfonia pastorale et 51 récitatifs, airs et chœurs.

Propositions de lecture

40,1–55,13 Le « livre de la consolation d’Israël » L'incipit de ce chapitre et le thème des premiers versets inspire le titre souvent donné à cette deuxième partie du livre d'Isaïe : Is 40-55. En contraste avec les oracles pleins de menace d'Is 1-39, c'est la consolation qui est ici annoncée, par le  prophète anonyme de la fin de l'Exil qu'on appelle le « Deuxième Isaïe ».

Texte

Genres littéraires

52,13–53,12 Chants du Serviteur

Identification

C'est à l'exégète luthérien Bernhard Duhm, Das Buch Jesaia (Gottingen: Vandenhoeck & Ruprecht, 1892) que semble due l'identification de quatre fragments isaïens comme « chants du serviteur ». 

Certains y ajoutent le fragment Is 61,1–3 bien que le terme de « serviteur » n'y apparaisse pas.  

Thématique

Un énigmatique « serviteur de YHWH » (עבד יהוה, 'eḇeḏ YHWH) y apparaît, Dieu l'appelle à diriger les nations, mais celles-ci le maltraitent terriblement, avant qu'il ne soit finalement récompensé. 

Réception

Arts visuels

2s un rejeton qui sort d’une terre desséchée Pile ou face ? L'identité du personnage décrit ici est révélée seulement graduellement. L'artiste contemporain a mis ensemble deux dessins pour démontrer la nécessité de l'interprétation, et de la réinterprétation des événements. Iz 53 est composée de deux dessins qui fonctionnent comme avers et revers de la même monnaie.,

Aleksandra Kisiel (1993), Iz 53, (crayon), 100 x 70 cm, "Iz 53" 

© Courtesy Aleksandra Kisiel→, Is 53,2-3

Aleksandra Kisiel (24.11.1993), Iz 53, (crayon), 100 x 70 cm

© Courtesy Aleksandra Kisiel→, Is 53,2-3

Liturgie

2–5 Nous avons vu Répons

« Ecce vidimus »

Traditionnel, Jeudi Saint - 1er Nocturne: Répons Ecce vidimus

(CD, 2005), Dom Jean Claire, chœur des moines de l'abbaye de Solesmes

© Abbaye de Solesmes→Is 53

Résumé magnifique d'Is 53, soulignant avec un rare bonheur le contraste entre, d’une part, le fait de la terrible humiliation du Christ sur la croix et, d’autre part, la réalité vraie, à savoir la substitution de l’innocent aux coupables.

2s PARALITURGIE Adaptation au chemin de croix

CONTEMPLATION Le visage du Messie dans le linge d'une femme

Ces versets des chants du Serviteur souffrant accompagnent nombre de stations du chemin de croix, en particulier ici la sixième. 

Jerzy Duda-Gracz (1941-2004), 6— Une femme pieuse essuie la face de Jésus, (huile sur toile, 2000-2001), 185 x 117 cm

Chemin de croix ex voto de l'artiste, narthex, galerie haute du sanctuaire de l'icône miraculeuse, Sanctuaire de Czestochowa, Jasna Gora (Pologne)

© D.R. Jerzy Duda-Gracz Estate→ ; photo : J.-M. N., Is 53,2-4

« Vera icona », la véritable icône, la véritable image du Seigneur fait homme ; homme de douleurs, homme au milieu des malades. Jésus est entré dans une salle d’hôpital.

La femme que vous voyez, on dirait volontiers que c’est Sainte « Véronique » : Ver(a)icona… sauf que Véronique n’existe pas. Que s’est-il passé sur le chemin ? Les évangiles n’en parlent pas, il n’y a pas de nom. « Vera icona » donnera « Véronique », parce qu’une femme s’est avancée, a tendu un linge et, selon la tradition, ce linge a reçu l’impression du visage, le Christ a imprimé sur ce linge son visage, c’est là cette « vera icona », la véritable icône.

Et voici  comment le peintre va traduire cela. Au cœur du mystère de la charité : il y a des sœurs de la Charité, les fameuses cornettes internationales les désignent bien. Oui, les sœurs hospitalières. La femme a le visage de Mère Teresa de Calcutta. Toutes ces femmes qui accompagnent les malades : bien sûr, les infirmières, avec la coiffure polonaise — certaines portent encore cette coiffe lors de pèlerinages à Lourdes — ; cette vieille femme à droite, qui mange sa soupe ; ce très beau visage qui l’accompagne et qui semble nous regarder. Derrière, un être au visage déformé, de ces êtres en errance, de ces êtres qui souffrent, qui ont mal. Et cette petite fille sur la gauche, qui porte une plaque avec une inscription en polonais : « Guéris-moi, Seigneur ! ». L’impression du Christ, cette femme qui regarde le Christ, ce Christ qui se laisse apaiser, consoler, ce Christ qui verse des larmes de sang… : l’artiste a associé la croix que porte la religieuse avec le Christ qui porte la croix de la vie de la religieuse et de tous ceux qui passent…

L’intelligence de Duda, c’est de faire passer son Christ, le Christ de la Pologne, à travers l’histoire, le quotidien, bien sûr des Polonais, mais de tous ceux et celles qui portent le visage et cette présence auprès des malades. Mais nous voyons effectivement cette Sainte Face dans le linge que l’on lave, suspendu au fond. Ce qui va très loin : le linge qu’il faut laver, de cet homme dont on ne voit pas les yeux, qui porte des lunettes et qui semble mordre la croix. Ce Visage dans ces torchons, dans ces serviettes, ce Visage qui ne s’efface pas au lavage, pourquoi ? Parce que la charité ne s’enlève pas au lavage de l’amour et du don. (J.-M. N.)

Littérature

3 calculé FRANÇAIS BIBLIQUE Le latin emploie le verbe reputare, qui signifie littéralement « calculer » ; même s'il est rare en français, l'usage de ce verbe pour une personne existe bien : cf. cnrtl→ − P. anal., rare. [L'obj. désigne une pers.]

  • Balzac, La Paix du ménage, 1830, « Il [Martial] ne vous aime pas, ma chère, il vous calcule comme s'il s'agissait d'une affaire » (339).

Drapeau de la francophonie→ © Domaine public