La Bible en ses Traditions

Jacques 5,13

Byz V TR Nes
S

13 Quelqu’un parmi vous souffre

Vs'attriste-t-il ? qu’il prie.

Quelqu'un est-il de bonne humeur ? qu’il chante.

13 Si quelqu’un parmi vous est dans l'affliction, qu’il prie.

Et si quelqu'un est joyeux, qu’il chante.

Texte

Procédés littéraires

13 Antithèse Les deux premières questions établissent une antithèse entre la souffrance et la sérénité intérieures. Loin de porter sur un contraste entre la tristesse et la gaîté, comme on le croit souvent, la phrase évoque plutôt l’opposition entre le chagrin et l’apaisement intérieurs, états d’âme induisant chacun une manifestation différente de la prière.

Réception

Comparaison des versions

13a souffre : Gr | V : s'attriste | S : est dans l'affection V rend kakopathei par tristatur (un verbe évoquant l’affliction ou le découragement ; cf. S : b’wlçn’) et précise ainsi le type de la souffrance.

Texte

Vocabulaire

13b est-il de bonne humeur Connotations Le verbe euthumeô renvoie, en grec koinè, à la notion de courage, d’assurance et de calme intérieur (cf. Ac 27,22 « Je vous invite à avoir bon courage [euthumein] »). Le verbe connote la capacité de faire face calmement, sans plainte. Cf. Plutarque Tranq. an. = Mor. 465E-477F, et la traduction de V : aequo animo est (litt. : « avoir l’esprit égal », d’où « être serein/confiant »).

13b qu'il chante Sens général en contexte religieux

  • Le verbe grec psallô peut avoir le sens général de « jouer de la musique » (p. ex. G-1R = 1S 16,16 « jouer [psallein] de la lyre »), le plus souvent dans un contexte de louange à Dieu (Ps 98,5 = G-97,5 « Jouez pour le Seigneur sur la harpe »). Le verbe psallô se trouve également en Rm 15,9 ; Ep 5,19. Paul associe le verbe à l'idée de la prière (1Co 14,15).
  • Le sens plus technique de psallô « chanter des psaumes » est probablement un développement plus tardif (cf. Const. ap. 8,13,16-8,14,1).

Procédés littéraires

13–18 Isotopie de la prière Si tous les versets de ce passage parlent de la prière, les mots employés ne sont pas pour autant de simples synonymes.

  • Le substantif euchê (« prière », v.15a) et le verbe correspondant euchomai (« prier », v.16b) constituent des termes génériques.
  • La prière de demande est désignée par proseuchomai (v.13a.14b.17b.18a) et proseuchê (v.17b).
  • Plus concret, le substantif deêsis (v.16c) représente une supplication ou une demande particulière.
  • Quant à psallô (« chanter un cantique », v.13b), il s’applique à la prière hymnique, notamment dans le cadre de la liturgie.

13s Exposition rhétorique du cas La lettre a souvent recours aux interrogations.

  • Ici, la succession rapide de trois questions et réponses évoque la fraîcheur d’un échange oral (même construction en Jc 3,13).

Cependant, ces v. peuvent également être traduits :

  • comme des affirmations (« Celui parmi vous qui », etc. ) ; 
  • comme des clauses conditionnelles (« Si quelqu’un parmi vous ») ; cf. S.

Réception

Liturgie

13–20 Lectionnaire quotidien romain Jc 5,13-20 est lu en même temps que Ps 141,1-3.8 et Mc 10,13-16 pour le samedi de la 7e semaine du Temps ordinaire. Dans ce contexte, le texte de Jc 5,19-20 souligne la responsabilité mutuelle des membres de l’Église, et le lien entre péché, repentir et salut final. Le Ps 141 (sur la prière) et le passage de Mc (Jésus bénissant les enfants) développent le propos de l’épître de Jacques sur la prière confiante adressée à Dieu.

Propositions de lecture

13–18 Le trait commun aux v.13-18 est la prière, avec insistance sur les cas du malade et du pécheur, puis v.16-18, sur la puissance de celui qui prie bien.

Du petit traité sur la prière dans l'épreuve à l'institution d'un sacrement

La prière

Cette péricope a pour thème central la prière. Après avoir prévenu le lecteur qu'il devait présenter à Dieu sa pétition avec foi, sans éprouver de doute (Jc 1,5-8) ni demander à Dieu ce qui pourrait causer sa perte (Jc 4,2-3), Jc fournit dans cette péricope des exemples de la prière correcte et efficace (Procédés littéraires Jc 5,13–18).

La parole juste

Ayant mis ses lecteurs sérieusement en garde contre la parole incorrecte (p. ex. Jc 5,9.12), Jc donne ici des exemples de la parole juste : soit dans la prière, soit dans les chants.

La maladie et la guérison

Le texte présente un point de vue global sur la maladie et la guérison étroitement associées : d'une part, la maladie physique et la maladie spirituelle (c.-à-d. le péché) ; d'autre part la guérison physique et le pardon des péchés. Le passage établit aussi un lien étroit entre deux autres dimensions : le geste rituel compris comme source de guérison (spirituelle et physique) en cette vie, et la saisie de l'onction et de la prière en tant que préparation à la guérison finale dans la vie éternelle lors de la résurrection. Cet accent reflète donc le thème de l’intégrité que développe le reste de l’épître.

Le sacrement de l’onction des malades

La tradition catholique a développé la richesse du sens de ce passage, allant parfois jusqu'à y trouver l'institution du sacrement de l’onction des malades (Théologie Jc 5,14s). Au cours de l’histoire, la tradition a déployé les différents aspects de l'intégrité abîmée et à restaurer dont traite l’épître de Jacques :

  • guérison spirituelle (Origène ; Jean Chrysostome ; le concile de Trente) ;
  • guérison physique (Césaire d'Arles ; Vatican II, qui rappelle la dimension intégrale de la guérison) ;
  • perspective eschatologique (insistance de la tradition sur la préparation à la vie éternelle qu’offrent les derniers sacrements). Tradition chrétienne Jc 5,14s