La Bible en ses Traditions

Josué 1,4a

Contexte

Repères historiques et géographiques

4a Euphrate M : Pᵉrāt équivaut à G : Euphratês. En général, il s’agit du fleuve Euphrate (2R 23,29 ; 24,7 ; 1Ch 5,9 ; 18,3 ; 2Ch 35,20 ; Jr 46,2.10 ; 51,63 ; Intertextualité biblique Jos 1,4a). Cependant, dans Jr 13,4-7 et dans quelques commentaires rabbiniques sur Gn 15,18 et Dt 1,7, on fait probablement référence au wadi Fara, situé au sud des ruines de Tell Fara à dix kilomètres au nord-est de Jérusalem. Dans la plaine de Jéricho, ce ruisseau est nommé wadi Qilt. Littérature péritestamentaire Jos 1,4a

4b la grande mer La mer Méditerranée Dans les chroniques assyriennes, c’est « la grande mer qui se trouve à l’ouest », par opposition à celle de l’est, l’océan Indien. On trouve de même les expressions « mer ultime » ou « mer extrême » (Dt 11,24 ; 34,2 ; Jl 2,20 ; Za 14,8), « mer des Philistins » (Ex 23,31), « mer de Jaffa » (2Ch 2,15 ; Esd 3,7). Références en marge Jos 1,4b

Texte

Critique textuelle

4a et ce Liban Glose ? Glose manifestant l’intérêt de revendiquer le Liban comme partie intégrante de la Terre promise ? Cf. Dt 3,25 ; Jos 9,1 ; 11,17 ; 12,7 ; 13,5.

Réception

Tradition juive

4a au grand fleuve Grandeur à cause d'Israël

  • Gen. Rab. 16,2 (sur Gn 15,18) « [Le fleuve] s’appelle grand plutôt parce qu’il pénètre dans le pays d’Israël que parce qu’il représente le dernier des quatre fleuves du jardin d’Éden. »
  • Sifre Deut. 6 (sur Dt 1,7) : La grandeur du fleuve et sa force proviennent de sa proximité avec le pays d’Israël.

Repères historiques et géographiques Jos 1,4a

Comparaison des versions

4a ce : M SJ S | G V : le L'expression « ce Liban » ne semble pas avoir de sens dans le contexte du récit puisque cela ferait référence à un territoire visible pour celui qui parle et pour ceux qui écoutent. Selon le récit, les deux interlocuteurs se trouvent à l’est du Jourdain. Critique textuelle Jos 1,4a

Intertextualité biblique

4a le Liban Métaphore Dans l’AT, le Liban est surtout associé à la nature : il fait l’objet de métaphores (Littérature péritestamentaire Jos 1,4a) qui expriment des motifs mythologiques (Jg 9,15 ; Ez 31,3.15-16) ou des contenus théologiques (Ps 104,16 ; Is 2,13 ; 10,34 ; 60,13 ; Za 10,10). Repères historiques et géographiques Jos 1,4a

Texte

Genres littéraires

1,1–24,33 Épopée sacrée Josué se présente comme une 'épopée sacrée', forme classique de narration des événements dans l’Antiquité. Leur déroulement y est guidé par une série d’interventions directes de Dieu, qui conduit le héros et son peuple (Procédés littéraires Jos 1,1–9), plus ou moins obéissants (Procédés littéraires Jos 1,10–18) et fixe son destin. La présence divine occupe une place toute spéciale dans la narration des hauts faits de la campagne militaire.

Réception

Comparaison des versions

4a Liban M : Lᵉbānôn | JS : Lbnwn | G : Antilibanon | V : Libanus | S : Lbnn

4a l'Euphrate M : Pᵉrāt | JS : Prt | G : Euphratês | V : Eufraten | S : Prt

Texte

Procédés littéraires

1–9 Motif narratif de l'ordre divin Ce discours de Dieu constitue le texte liminaire de toute l'épopée qui va suivre : Genres littéraires Jos 1,1–24,33.

Contexte

Repères historiques et géographiques

4a Liban Orographie L’étymologie la plus citée pour le Liban s’appuie sur la racine lbn « blanc », d’où la signification possible de « montagnes blanches » (Jr 18,14). Le nom apparaît très souvent dans l’AT (p. ex. Dt 11,24 ; Jos 1,4 ; 12,7 ; Jg 9,15 ; 1R 5,13.20 ; Ps 72,16 ; 104,16 ; Ct 3,9 ; Is 10,34 ; Jr 18,14) et désigne généralement la montagne occidentale qui marque la limite du nord d’Israël. Peu de textes la considèrent comme faisant partie du pays (Critique textuelle Jos 1,4a). Certains textes ougaritiques, ainsi que le Ps 29,6, distinguent le Liban du Siryôn (śiryōn), qui est probablement l’Anti-Liban de G-v.4a (Jdt 1,7). Ce dernier comprendrait vers l’est la vallée de la Beqa‘ jusqu’à l’Hermon. Le Liban est tenu pour une source importante d’approvisionnement en bois (Ez 27,5) et en minéraux, et comme un pays planté de vignes (Os 14,8), aussi dans les sources assyriennes et babyloniennes.

Réception

Littérature

1–18

  • Rainer Maria Rilke (1875-1926) a composé en 1906 le poème Josuas Landtag.

Arts visuels

1–18

  • Des mosaïques de la basilique de Sainte-Marie-Majeure à Rome du 4e s. représentent un cycle d’épisodes empruntés au livre de Josué.
  • Donatello (1386-1466) a sculpté dans le campanile de Florence une statue de Josué et des scènes de sa vie.

Propositions de lecture

1–18 Ouverture d'une épopée sacrée

Thèmes

Dieu promet à Israël des frontières qui surprennent par leur étendue (v.4 ; Repères historiques et géographiques Jos 1,4). L’évocation des limites de ce territoire à l’orée d’une étape historique nouvelle crée un effet narratif puissant : le lecteur est invité à découvrir la surabondance du don de Dieu à son peuple. Le don de la terre semble incommensurable, une sorte de jardin d’Éden qu’on ne parviendra jamais à posséder complètement et qui gardera toujours la dimension d’une promesse.

Structure

Le ch. est composé de deux sections.

  • Les v.1-9 présentent le discours de Dieu à Josué. Ils introduisent les trois thèmes fondamentaux de tout le livre : l’occupation du territoire (ch.1-12), sa distribution entre les tribus (ch.13-22) et l’obéissance à la Loi (ch.23-24).
  • Les v.10-18 relatent les premiers pas des Israélites aux ordres de Josué, manifestant ainsi la réalisation immédiate des plans divins. Cette seconde section comprend un ordre de Josué aux officiers (v.10-11) et un discours aux tribus transjordaniennes que vient compléter leur réponse (v.12-18).

Narration

Cinq actants interviennent à tour de rôle dans cette péricope.

  • Les quatre premiers sont des êtres concrets : le Seigneur, Moïse, Josué et les tribus de la Transjordanie.
  • L’homme rebelle, en revanche, est un actant virtuel.

Une bonne partie du ch. reprend ce qui a été dit dans Dt 1,38 ; 3,21-28 ; 31,1-8.14.23 ; 34,9. Moïse constitue la référence et la garantie qui vient du passé. À présent, les tribus vont obéir à Josué (v.17a). Pour l’avenir, les enfants d’Israël, qui se disent prêts à punir le rebelle (v.18a), attendent de Josué qu’il leur montre la présence du Seigneur avec lui (v.17b). Les v.7-8 introduisent deux thèmes principaux :

  • l’observance de la Loi (seulement au v.8), en tant que condition du succès de la campagne ;
  • l’unité d’Israël, qui ne dépend pas de la géographie mais de la fidélité puisque tous partagent le même destin. Tant que les habitants de la Cisjordanie ne jouiront pas du repos sur leur terre, ceux de la Transjordanie ne pourront pas non plus en profiter ni posséder définitivement leur territoire.

Réception néotestamentaire

Mt 5,5 reprend ce motif dans la béatitude que Jésus — dont Josué est le type (Tradition chrétienne Jos 1,1) — annonce aux doux, dans la ligne du Ps 37,11 (Tradition chrétienne Jos 1,3). Au-delà de son emplacement exact, c’est la sainteté qui devient ici la qualité essentielle de la terre : le royaume de Dieu. Dans la vie des  disciples, l’héritage ou la possession du royaume constitue l’une des aspirations les plus importantes, selon la prédication chrétienne primitive (cf. Mt 25,34 ; 1Co 6,9 ; 15,50 ; Ga 5,21 ; Ep 5,5). →Terre promise 

Liturgie

1–9 Liturgie juive : sabbat 54, entre le début de l’année et la fête des Tentes on lit :

  • Dt 33,1-34,12, ultime pārāšâ (« section ») de la Tora, qui commence par les mots « Et voici la bénédiction » (Dt 33,1, Vèzot HaBerakha, qui donne ce nom au sabbat 54). 
  • Jos 1,1-17 est la hafṭārâ (« conclusion ») de ce sabbat.

Musique

1–18

  • Sur un livret de Thomas Morell (Joshua: A Sacred Drama, 1748), Georg Friedrich Händel (1685-1759) a produit en Angleterre un oratorio sur Josué.

Contexte

Repères historiques et géographiques

4b tout le pays des Hittites Chorographie Au second millénaire, l’expression semble désigner la zone nord de l’intérieur de la Syrie mais, à l’époque des derniers rois assyriens et dans les inscriptions néo-babyloniennes (8e-6e s. av. J.-C.), Hatti finit par renvoyer à l’ensemble de la Syrie : tout le territoire depuis l’Euphrate jusqu’à la frontière égyptienne. Dans la chronique du roi chaldéen Nabuchodonosor II (ca. 598 av. J.-C.), Hatti est la Syrie-Palestine, depuis Karkemish jusqu’à la frontière égyptienne, comprenant Hama, Ashkelon et Jérusalem (cf. Jos 3,10). Textes anciens Jos 1,4b

Textes anciens

4b tout le pays des Hittites Exemples de mentions des Hittites dans les sources assyriennes

  • Campagne de Téglath-phalasar I (1114-1076 av. J.-C.) « Téglath-phalasar, le roi légitime, roi du monde, roi d’Assyrie, roi des quatre limites (de la terre) […]. Sous le commandement de mon seigneur Assur je fus constitué conquérant par-delà le fleuve Zab jusqu’à la mer supérieure qui (se trouve vers) l’ouest. […] Et (ensuite) sur le chemin du retour (vers Assur) j’ai soumis tout le pays de Grand-Hatti à un tribut de […] talents [de…] et de poutres de cèdre » (trad. à partir de ANET 274-275).
  • Campagne de Assurnasirpal II (883-859 av. J.-C.) « Je suis parti du pays de Bit-Adini et j’ai traversé l’Euphrate au plus haut de la crue avec des (radeaux de) peaux de chèvre. Je suis avancé vers Karkemish. (Là) j’ai reçu de lui-(même) le tribut de Sangara, le roi des Hittites » (trad. à partir de ANET 275).

Repères historiques et géographiques Jos 1,4b

Réception

Littérature péritestamentaire

4a Liban L'emploi métaphorique du nom Liban n’apparaît pas seulement dans la Bible (Intertextualité biblique Jos 1,4a) :

  • pour 1QpHab 12,3 « le Liban est le Conseil de la communauté » ;
  • pour 4QpNah 1-2,7 « le Liban et la fleur du Liban (Na 1,4) sont [la congrégation de ceux qui cherchent des choses vaines] ».
  • Cf. 4Q163 (4QpIsac) 23,10 et 1QHa 2,15.32, qui font probablement allusion aux pharisiens.

Tradition juive Jos 1,4a

Tradition juive

4a Liban Emplois métaphoriques du toponyme

= le Temple

Les targums traduisent « le Liban » en Dt 3,25 par :

  • « le sanctuaire » (Tg. Onq.) et « ce beau lieu sacré » (Tg. Neof.) ;
  • « Là où maintenant vous construisez la ville de Jérusalem ainsi que la montagne du Liban où habitera la Présence Divine » (Tg. Ps.-J.).

= le mont Sion

  • Tg. Ct. 7,5 associe « la tour du Liban » à la citadelle de Sion.

= les nations païennes

  • Tg. Is. 2,13 traduit « les cèdres du Liban » par « les rois des gentils ».

Littérature péritestamentaire Jos 1,4a

Tradition chrétienne

4a l'Anti-Liban (G)

= l'Église

= le territoire de Manassé

Intertextualité biblique

4a au grand fleuve, le fleuve l'Euphrate Frontière promise Même formule en Gn 15,19 et Dt 1,7. Dans les trois cas, l’expression apparaît dans le cadre de la promesse divine du don de la terre. En Dn 10,4, le « grand fleuve » est le Tigre. En Is 7,20 et Is 8,7, « le fleuve » pourrait être le Tigre, puisqu’il se rapporte aux Assyriens et à leur invasion. Repères historiques et géographiques Jos 1,4a