La Bible en ses Traditions

Luc 23,34–46

Byz V S TR Nes

34 Jésus disait :

— Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font.

Et, se partageant ses vêtements, ils jetèrent les sortsSsur eux.

35 Et le peuple se tenait là, regardant.

Les chefs aussi se moquaient Vavec eux en disant :

— Il en a sauvé d'autres :

qu’il se sauve lui-même

s’il est, lui, le Christ de Dieu, l’Élu

S, l’Élu de Dieu !

36 Les soldats aussi l'insultaient

s'approchant, ils lui offraient du vinaigre

37 en disant : 

— Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même

Vsauve-toi 

Byz V TR
S
Nes

38  Il y avait aussi une inscription au-dessus de lui en caractères grecs, latins et hébreux :

« Celui-ci est le roi des Juifs. »

38  Il y avait aussi une inscription au-dessus de lui en grec, en romain et en hébreu : Celui-ci est le roi des Juifs. 

38  Il y avait aussi une inscription au-dessus de lui :

 Le roi des Juifs [est] celui-ci.

Byz V S TR Nes

39 L’un des malfaiteurs

Vvoleurs suspendus

Vqui étaient pendus Savec lui en croix

blasphémait contre lui, disant :

— N’es-tu pas

Byz V S TR— Si tu es le Christ ? Sauve-toi toi-même, et nous aussi !

Byz S TR Nes
V

40 Mais, prenant la parole et le réprimandant, l’autre déclarait :

— Tu ne crains même pas Dieu

alors que tu es sous la même condamnation !

40 Mais l'autre, prenant la parole, le reprenait, disant : 

— Tu ne crains pas Dieu

alors que tu es sous la même condamnation ! 

Byz V S TR Nes

41 Pour nous, c’est justice ;

car nous recevons ce que nos actes méritent,

mais lui n’a rien fait de mal.

42 Et il disait Byz V S TRà Jésus :

— Jésus, souviens-toi

V— Seigneur, souviens-toi

Byz S TR— Souviens-toi de moiByz S TRSeigneur,

quand tu viendras dans ton royaume.

43  Et il

VEt Jésus

SJésus  lui dit :

— Amen, je te le dis :

Aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le paradis.

44 C'était Nesdéjà environ la sixième heure

et survint une ténèbre

Vsurvinrent des ténèbres  sur toute la terre jusqu’à la neuvième heure,

Byz V S TR
Nes

45 et le soleil fut obscurci,

et le voile du sanctuaire

Vtemple fut déchiré par le milieu.

45 et le soleil s’éclipsa,

et le voile du sanctuaire fut déchiré par le milieu.

Byz V S TR Nes

46 Et criant d’une voix forte, Jésus dit :

— Père, entre tes mains je confie mon esprit.

Ayant dit cela, il expira.

Réception

Liturgie

46 CHANT GRÉGORIEN Répons Tenebrae

 TEXTE assemblage évangélique de la mort de Jésus

  • OHS 220-221, 5e répons des vigiles du vendredi saint (7e mode) : Tenebrae factae sunt, dum crucifixissent Iesum Iudaei ; et circa horam nonam exclamavit Iesus voce magna : "Deus meus, ut quid me dereliquisti" ? Et inclinato capite, emisit spiritum. V/ Exclamans Iesus voce magna, ait : "Pater, in manus tuas commendo spiritum meum" (« Il y eut des ténèbres pendant que les juifs crucifiaient Jésus ; et vers la neuvième heure Jésus s’exclama d’une voix forte "Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné" ? Et la tête inclinée, il rendit l’esprit. V/ Jésus s’écriant d’une voix forte, dit "Père, dans tes mains je remets mon esprit" »).
  • Le texte de l'office romain actuel ajoute ensuite les versets de Jn 19,34, que des versions anciennes plaçaient entre Mt 27,49 et Mt 27,50 : Critique textuelle Mt 27,49s.

MUSIQUE

 Traditionnel, Répons "Tenebrae" (Vendredi saint, Office des Ténèbres, 2° Nocturne) 

Dom Jean Claire dir., choeur des moines de l'Abbaye de Solesme, Golgotha (CD, 2005), © Abbaye de Solesmes→ ; Mt 27,45-46

Ce célèbre répons, simple récit de la mort de Jésus pris dans l’Évangile, est un pur chef-d’œuvre musical où s’expriment, avec force et simplicité, l’angoisse du cri vers Dieu et la paix confiante du dernier instant. C’est un triptyque dramatique : deux récitatifs très ornés encadrent le cri angoissé du Seigneur.

(1) Le 1er chante simplement le fait de l’enténèbrement de l’univers ; puis sa mélodie monte (et circa horam nonam), se charge de neumes, de la lourde répétition mélodique de voce magna : quelque chose se prépare !

(2) Coupure nette : attaque brusque à la sixte supérieure à Deus meus (intervalle assez rare), montée à la quarte, ce qui fait un intervalle presque direct de neuvième. Cri — ineffable douleur morale du Seigneur se sentant abandonné de tous, même de son Père dont il est pourtant le Verbe inséparable ! — La voix ne s’appesantit pas sur ce porrectus, bondit au sol aigu à atteindre aussi doucement que possible. Puis elle en appelle douloureusement au Père : ut quid me dereliquisti, d’un accent si chaud, si aimant qui se pose sur le si, donnant l’impression de quelque chose qui ne finit pas. Silence.

(3) Le récit reprend. Attaque sur le fa, par un triton direct, pianissimo, accusant le changement de modalité. La courbe mélodique de et inclinato capite imite le mouvement de la tête qui doucement s’incline. Grande montée douce sur emisit spiritum, et retombée de quinte sur la tonique. 

38 PARALITURGIE Reliques de la passion : le titulus de Pilate PARALITURGIE Les reliques de la passion→

Titulus Crucis, relique (gravure sur bois de noisetier, 25 x 14 x 2,6 cm, 1er s.-11e s. ?)

Exposée depuis 1492 dans la basilique Sainte-Croix-de-Jérusalem, Rome © D.R.→ 

Histoire

Depuis 1492, date de sa découverte lors de restaurations dans la basilique Sainte-Croix-de-Jérusalem à Rome (cachée dans une brique marquée TITVLVS CRVCIS), et 1496, date à laquelle le pape Alexandre VI le déclara authentique, on vénère à Rome une tablette de bois de noisetier portant une inscription, comme l’écriteau même placé sur la croix de Jésus. Part du trésor rassemblé par l’impératrice Hélène dans la chapelle de sa demeure devenue la basilique, elle y aurait été cachée vers 455 pour la protéger des invasions wisigothiques.

Caractéristiques

La tablette mesure 25 cm sur 14 cm ; son épaisseur est de 2,6 cm ; elle pèse 687 g et fut attaquée par divers parasites. Une des faces est grossièrement gravée de lettres sur trois lignes : sur la première, des caractères hébraïques très abîmés ; sur la deuxième et sur la troisième, des mots grecs et latins.

Étude scientifique

Plusieurs paléographes et épigraphistes concluent à une certaine authenticité.

  • Les écritures sont datables entre le 1er et le 4e s. ap. J.-C. ;
  • l’araméen de la première ligne peut être reconstitué comme Yšw nṣr m m = Yešû naçarâ malkékōm (« Jésus le Nazaréen, votre roi ») ;
  • les inscriptions diffèrent de toutes les versions évangéliques : NAZARENYS B et US NAZARENUS RE ne correspond à aucun évangile (notamment pas à Jn 19,19, le plus explicite), comme on aurait pu s’y attendre s’il s’agissait d’une forgerie ;
  • le grec et le latin sont écrits de droite à gauche, comme l’araméen. Cela peut correspondre à l'origine du soldat-scribe grossier de l'écriteau (les soldats des troupes auxiliaires étaient recrutés dans les Provinces, vraisemblablement en Syrie, pour la Palestine : Armée romaine au 1ersiècle→. Sémites, ceux qui savaient écrire le faisaient de droite à gauche). 

Cf. Rigato Maria-Luisa, Il titolo della croce di Gesù. Confronto tra i vangeli e la tavoletta-reliquia della basilica Eleniana a Roma (Tesi Gregoriana. Serie teologia 100), Rome : Editrice Pontificia Università Gregoriana, 2005. 

Historicité

Cet objet est-il un morceau de l'écriteau authentique du Christ ? La datation au carbone 14 donne le 11e s. comme période probable (cf. Bella Francesco et Azzi Carlo, « 14C Dating of the 'Titulus Crucis' », Radiocarbon 44 [2002] 685-689). Si la tablette n’est pas originelle, c’est peut-être une réplique scrupuleuse d'un fragment du titulus originel.

Titulus Crucis (essai de reconstitution) © D.R.→ 

Elle constituerait ainsi le premier témoignage écrit sur Jésus.

Musique

34–46 Les sept paroles du Christ en croix

21e s.

« The Seven Last Words op.36 »

Kris Oelbrandt, OCSO (1972-), The Seven Last Words op. 36, 2015

Jenny Spanoghe (alto)

© Kris Oelbrandt→, Lc 23,34-46 Jn 19,26-30 Mt 27,46

Composition

La solitude de Jésus sur la croix est traduite dans l'effectif de cette composition: un violon (ou alto) non-accompagné, abandonné par tout le monde, sans contact avec la terre. La pièce suit les sept dernières paroles à travers sept miniatures. Un "motif de croix" reconnaissable sert comme ponctuation entre les paroles: un accord très court et fort (verticalité) suivi d'une longue seconde soutenue douce (horizontalité).

  • I. (00:00 - 00:40)

La première parole (Lc 23,34: "Père, pardonne-leur ...") est un jeu très virtuose, diabolique, on dirait fou, dépeignant ceux qui "ne savent pas ce qu’ils font."

  • II. (00:40 - 02:12)

Dans la deuxième (Lc 23,43: "... aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis.") deux voix chantent librement et paisiblement ensemble.

  • III. (02:12 - 03:50)

La jonction de la Mère et du disciple (Jn 19,26-27: troisième parole) se traduit en une valse noble, intime, pleine d'une joie intérieure.

  • IV. (03:50 - 05:19)

Apogée et centre pivot des sept paroles, la quatrième parole "Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné?" (voir aussi Mc 15,34 et Ps 22,2) est mis en musique en glissandi répétés de dissonants criants dans le suraigu.

  • V. (05:19 - 07:20)

"J'ai soif" (Jn 19,28: cinquième parole) est évoqué par des sons expérimentaux, imitant des gémissements et des souffles secs.

  • VI. (07:20 - 08:01)

"Tout est accompli" (Jn 19,30: sixième parole) est reflété par seulement quelques harmoniques, ne donnant que les contours d'une mélodie presque évaporée. 

  • VII. (08:01 - 10:05)

La septième parole (Lc 23,46:  "Père, entre tes mains je remets mon esprit." - voir aussi Ps 31,6) est une mélodie sereine, dépassionnée.

« Septem verba Christi op.38 »

Kris Oelbrandt, OCSO (1972-), Septem Verba Christi op. 38, 2015

Abdij Maria Toevlucht

© Kris Oelbrandt→, Lc 23,34-46 Jn 19,26-30 Mt 27,46

Composition

Motets en latin sur les sept dernières paroles du Christ en croix. Contrairement aux «The Seven Last Words» qui sont très atonaux et expressionnistes, les «Septem verba Christi» sont dans un langage néo-modal.

  • I. (00:00 - 01:12)

La première parole (Lc 23,34: "Père, pardonne-leur ..."; "Pater, dimitte illis ...") se concentre sur la proclamation tranquille, paisible du texte.

  • II. (01:12 - 02:00)

La deuxième (Lc 23,43: "... aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis."; "... Hodie mecum eris in Paradiso") est plus mélismatique, évoquant l'atmosphère céleste.

  • III. (02:00 - 03:06)

La jonction de la Mère et du disciple (Jn 19,26-27: troisième parole) devient évident avec des mélismes à deux voix, un fleuve tranquille de deux mélodies qui coulent ensemble.

  • IV (03:06 - 03:59)

La quatrième parole "Deus meus, ut quid dereliquisti me?" (voir aussi Mc 15,34 et Ps 22,2) est le centre pivot des sept paroles. C'est pourquoi elle est traitée de manière spéciale, c'est-à-dire dans un langage plus atonal, donnant expression aux mots dramatiques de Jésus. Les dynamiques sont également plutôt dans le forte, tandis que les autres se situent dans les dynamiques douces.

  • V. (03:59 - 05:00)

"J'ai soif" (Jn 19,28: cinquième parole) n'est en latin qu'un seul mot: sitio. Des quintes ouvertes et une pédale sur "si" (à la fois la syllabe et la note musicale) créent une atmosphère de désert.

  • VI. (05:00 - 05:59)

"Tout est accompli", "consummatum est" (Jn 19,30: sixième parole) est une longue séquence d'harmonies qui glissent de manière chromatique en bas.

  • VII. (05:59 - 07:42)

La septième parole (Lc 23,46:  "Père, entre tes mains je remets mon esprit."; "Pater, in manus tuas comendo spiritum meum." - voir aussi Ps 31,6) reprend la musique de la première parole, les deux commencant par l'acclamation "Pater".

Partition→

Liturgie

44–48 PARALITURGIE Chemin de croix : douzième station

CONTEMPLATION Jésus et les ténèbres autour de la croix jusqu'à la fin du monde

Jerzy Duda-Gracz (1941-2004), 12 — Jésus meurt sur la croix, entouré de trente saints polonais, (huile sur toile, 2000-2001), 185 x 234 cm

Chemin de croix ex voto de l'artiste, narthex, galerie haute du sanctuaire de l'icône miraculeuse, Sanctuaire de Czestochowa, Jasna Gora (Pologne)

© D.R. Jerzy Duda-Gracz Estate→ ; photo : J.-M. N., Mt 27,45-50 ; Mc 15,33-39 ; Lc 23,44-48 ; Jn 19,25-30

Jésus meurt sur la croix : il est étendu sur la croix, et il est étendu sur la Pologne ; sur toute l’histoire de la Pologne. Ce qui va des premiers martyrs jusqu’à Jean-Paul II. L’artiste meurt en 2004 ; Jean-Paul II est mort en 2005. Et lorsqu’on voit Jean-Paul II au pied de la croix, ce n’est pas simplement un portrait de Jean-Paul II, c’est le portrait de l’Eglise ; et la multitude de croix, ce foisonnement de croix au fond, manifeste que tous ceux qui sont saints et tous ceux qui sont baptisés portent la croix. Et toujours Marie au pied de la croix : l’icône de Notre Dame de Czestochowa. Il y a une intelligence de cette présence, de cette vie et de ce Christ dont le sang coule toujours sur ce peuple ; et ce peuple a aussi, avec d’autres, versé son sang pour la patrie. C’est donc effectivement le Golgotha de Jasna Gora, le Golgotha du sanctuaire de la Pologne. Comme disait Jean-Paul II, Jasna Gora, le sanctuaire, c’est le lieu de la liberté des Polonais. Tout est mêlé, associé : on voit Saint Venceslas, on voit la multitude des saints et des saintes, des ermites, des pasteurs, des prêtres, des fidèles qui sont là, tout le peuple est en marche parce qu’une nation n’existe qu’à travers et que par son histoire. Et Marie dans sa fidélité associe cette présence, où l’Emmanuel qu’elle porte, cet enfant Jésus, prouve sa révélation dans la croix. (J.-M. N.)

34 PARALITURGIE Chemin de croix : (neuvième et) dixième station

Peinture française du 20e s.

George Desvallières (1861-1950), Neuvième et dixième stations : La troisième chute et Le dépouillement du Christ (huile sur toile marouflée, 1931), 150 x 360 cm

église Sainte-Barbe→, Wittenheim 

© P. Lemaitre

Les deux stations réunies couvrent une partie du bas-côté droit de la nef. Le Christ tombe, sur le globe terrestre, pour le monde entier, puis est dépouillé de ses vêtements par un bourreau. « De l’affaissement universel, seul, émerge le bourreau - bêtise et bassesse - la foule ! Il vient de dépouiller Jésus. Son ricanement insulte à la nudité minable de ce corps que blêmit et raidit une mort anticipée, acceptée. [...] En vérité, le peintre qui a équarri cette forme douloureuse a souffert, en son âme et sa chair. Il a souffert en peignant la Face effrayante et si douce, brouillée par la douleur, où s’enfoncent, à grands trous d’ombre, la bouche et les yeux. Il s’est substitué au Christ et il a prévu toutes les calamités, tous les maux qui allaient frapper l’homme. Car, dans un pieu, planté au premier plan de son Dépouillement de Jésus, j’ai salué une vieille connaissance, le piquet de réseau. Son obliquité, due sans doute à quelque éclatement voisin et l’enroulement d’une liane précisaient la ressemblance. J’ai interrogé l’artiste. Ainsi l’avait-il voulu. L’étroite et cruelle ressemblance du fil de fer barbelé et de l’épine était apparue, impérieusement, au commandant Desvallières, un jour que, dans une tranchée de première ligne, il ramassa cinquante centimètres de fil de fer barbelé, tressés en couronne. Il a connu, soudain, que ce symbole de la férocité humaine pouvait au front du Christ remplacer l’épine. Ceci l’a persuadé de ne pas séparer le meurtre de son Dieu du souvenir de l’affreuse tuerie. À propos de celui-là, il a évoqué celle-ci. Ce piquet, Jésus le prévoit et il ajoute à sa misère. » (Vallon) Oui, le peintre place, au premier plan à droite, le piquet de réseau de fil de fer barbelé des champs de bataille, façon de rappeler les souffrances des poilus, associées à la souffrance du Christ. Le large déploiement sur la gauche du grand manteau rouge, rappel de la pourpre impériale, sur lequel le corps blanc de Jésus se démarque, symbolise, malgré le ricanement du bourreau, la dignité du Seigneur dans l’épreuve.

George Desvallières (1861-1950), Neuvième station : Jésus tombe pour la troisième fois (huile sur toile marouflée, 1935), 125 x 250 cm

église du Saint-Esprit→, Paris 12e arrdt.

© P. Lemaitre

Cette troisième chute du Christ lui semble fatale : Il est tombé face contre terre, et la Croix, bascule en avant, écrasant ses deux bras. Au loin, sur la gauche, la silhouette de la Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre, symbole pour l’artiste croyant de la compassion du Christ à toutes les misères humaines, apparaît devant un coucher de soleil qui illumine tout le fond de la toile. Au-dessus, la grande fresque lumineuse d’André Meriel-Bussy représente quatre grands témoins chrétiens, sainte Jeanne d’Arc et saint Michel encadrés par sainte Catherine d’Alexandrie et sainte Marguerite. Une variante de cette scène, CR 2331, a été peinte par Desvallières où le décor à l’arrière-plan est foisonnant de détails. Cette autre version a été acquise dès l’origine par le musée du Luxembourg.

Peinture polonaise du 21e s.

CONTEMPLATION

Jerzy Duda-Gracz (1941-2004), 10 — Jésus est dépouillé de ses vêtements, (huile sur toile, 2000-2001), 185 x 117 cm

Chemin de croix ex voto de l'artiste, narthex, galerie haute du sanctuaire de l'icône miraculeuse, Sanctuaire de Czestochowa, Jasna Gora (Pologne)

© D.R. Jerzy Duda-Gracz Estate→ ; photo : J.-M. N. , Ph 2,5-11 ; Mt 27,35-36 ; Mc 15,24 ; Lc 23,34 ; Jn 19,23-24

Une station absolument remarquable, qui remet dans un sens véritable l’adoration du Saint Sacrement : Jésus est dépouillé de ses vêtements, totalement. Le corps du Christ est associé au dépouillement total, de toute vie. Le Christ, lorsqu’il a été crucifié, était totalement nu. C’est la pudeur qui l’a fait représenter à travers les âges, avec ce qu’on appelle le perizonium, le pagne. Mais tous ceux qui étaient crucifiés étaient totalement nus. Il n’était pas question de pudeur. Cette nudité veut dire qu’il porte toutes les nudités des hommes, il porte toute la réalité de notre humanité. S’il est corps, il est corps dénudé, c’est-à-dire il est corps enfanté, il est corps de Dieu : un corps qui se présente à nous. Et le rapport entre l’hostie, le corps blanc, de cet ostensoir doré, ce qui est vénéré à travers le Corps du Christ, c’est sa Passion et le don de sa vie. De ce corps qui fut bafoué, au coeur de cette Fête-Dieu représentée sous le dais, l’artiste a associé à la fois la Passion et le Corps glorieux. Le Corps de Lumière, ce rayonnement qui préfigure déjà la résurrection, le soleil du petit matin du corps nu enseveli dans le tombeau. C’est le corps dénudé où s’accomplit l’enfantement de toute l’humanité ; c’est le corps dénudé du Christ. Comme le disait le cardinal Wojtyla devant le pape Paul VI lors de la retraite de 1976, « le Corps du Christ révèle la souffrance, il nous met face à nos douleurs et à nos souffrances pour participer pleinement et totalement à sa résurrection ». Effectivement, Jésus passe dans les processions de la Pologne, au milieu de ces bannières, pour qu’on n’oublie pas Celui qui a donné sa vie. (J.-M. N.)

Musique

43 Aujourd'hui tu seras avec moi L'espérance au cœur du memento mori de Jean-Sébastien Bach : son Actus Tragicus (BWV 106) Cette parole joue un rôle-clé dans la cantate de Jean-Sébastien Bach nommée Actus Tragicus (BWV 106). Presque à la fin de cet étonnant memento mori, composé à Mühlhausen entre septembre 1707 et juin 1708, alors qu'il était âgé d'à peine vingt-deux ans, la promesse de Jésus résonne comme une promesse de bonheur ultime.

Johann Sebastian Bach (1685-1750), Cantate Gottes Zeit..., dite 'Actus Tragicus' - BWV 106,  1707-1708,

Enregistré le 16 mai 2015, Oostkerk, Middelburg, Pays-Bas .  Jos Van Veldhoven dir. ; Netherlands Bach Society : Dorothee Mields, soprano ; Alex Potter, alto ; Charles Daniels, tenor ; Tobias Berndt, basse) — Plus d'informations sur BWV 106 et cette production ici→ 

© Licence YouTube standard, Gn 2,17 ; Is 38,1 ; Lc 2,29-32 ; Lc 23,43 ; Ap 22,20

Sommaire (Texte et traduction complets de la cantate ici→)

0:00 Sonatine — 2:42 Gottes Zeit ist die allerbeste Zeit (Chœur) — 4:49 Ach, Herr, Lehre uns bedenken (Arioso) — 7:06 Bestelle dein Haus (Aria) — 8:11 Es ist der alte Bund (Chœur et arioso) — 12:00 In deine Hände (Aria) — 14:19 Heute wirst du mit mir im Paradies sein (Arioso) — 17:55 Glorie, Lob, Ehr und Herrlichkeit (Chœur).

Un memento mori vétéro- et néo-testamentaire

Elle comprend deux parties : la première envisage la mort du point de vue de l'Ancien Testament ; la seconde, du point de vue du Nouveau. La séparation de l'ancienne et de la nouvelle alliance détermine la structure symétrique de la cantate.

  • La première partie expose l'ancienne alliance (Es ist der Alte Bund) : la mort est inévitable, l'Homme doit mourir (Mensch, du mußt sterben), au temps choisi par Dieu (zur rechten Zeit, wenn er will). L'Homme doit s'y préparer. C'est ici que la sentence d'Is 38,1 résonne avec force, comme expression caractéristique de l'antique conception de la mort : « — Mets en ordre ta maison car tu vas mourir et tu ne vivras pas » (Bestelle dein Haus, denn du wirst sterben und nicht lebendig bleiben). Cette première partie s'achève sur un appel au Messie, pris en Ap 22,20 : « — Oui, viens, Seigneur Jésus, viens ! » (Ja, komm, Herr Jesu, komm !).
  • La seconde partie expose la « nouvelle alliance ». L'exemple de la mort du Christ en croix  « — Je remets mon esprit entre tes mains » (In deine Hände befehl ich meinen Geist) - est offerte à l'homme sauvé (Du hast mich erlöset). Désormais, la mort de l'homme mène à sa résurrection au Paradis : « — Aujourd'hui tu seras avec moi dans le Paradis » (Heute wirst du mit mir in Paradies sein Lc 23,43). Ainsi envisagée en Jésus-Christ, la mort peut être acceptée avec paix et joie et l'homme peut faire siennes les paroles du vieillard Siméon : « — Dans la paix et dans la joie je m'en vais » (Mit Fried und Freud ich fahr dahin Lc 2,29-32).