La Bible en ses Traditions

Psaumes 10,12–15 ; 44,23–27

M V
G S

12  — Lève-toi, YHWH

VSeigneur Dieu, élève la main !

Vque ta main se lève !

N’oublie pas les affligés

Vpauvres !

12 ...

13  Pourquoi le méchant

VÀ cause de quoi l'impie méprise-t-il

Va-t-il irrité Dieu ?

disant

VC'est qu'il a dit dans son cœur : — Tu ne punis pas ?

V—  Il ne fait pas d'enquête !

13  ...

M
G S
V

14  Tu vois 

car tu regardes la peine et la souffrance

pour prendre en main leur cause.

À toi s'abandonnent le malheureux :  

à l’orphelin tu viens en aide.

14  ...

14 Tu veilles, maintenant que tu considères la peine et la douleur,

à le faire déférer entre tes mains 

(c'est à toi qu'a été abandonné le pauvre

de l’orphelin tu étais le défenseur) :

M V
G S

15  casse le bras de l'impie

Vdu pécheur et du méchant, 

tu chercheras

Von aura beau chercher son impiété

Vpéché,

  et tu ne la trouveras

Von ne le trouvera plus !

15  ... 

M
G S
V

44,23 Mais c’est à cause de toi qu’on nous égorge tout le jour

qu’on nous regarde comme des brebis d'abattoir.

23 ...

23 Lève-toi ! Pourquoi dors-tu Seigneur ?

Lève-toi ÷et ne nous rejette pas jusqu'à la fin !

44,24 Éveille-toi ! Pourquoi dors-tu, Seigneur ?

Réveille-toi, et ne nous rejette pas pour toujours.

24 ...

24 Pourquoi détournes-tu la face ?

Oublies-tu notre indigence et notre tribulation ?

44,25 Pourquoi caches-tu ta face

oublies-tu notre misère et notre oppression ?

25 ...

25 Puisque notre âme est humiliée dans la poussière,

notre ventre agglutiné à la terre,

44,26 Car notre âme est effondrée dans la poussière

notre ventre colle à la terre.

26 ...

26  Lève-toi, aide-nous

et nous rachète, à cause de ton nom ! 

44,27 Lève-toi pour nous secourir, délivre-nous à cause de ta bonté !

27 ...

27  

Réception

Liturgie

44,23–26.2 Éveille-toi Introït

« Exsurge »

Traditionnel, Introït - Exurge

Chœur des moines de l’abbaye Sainte-Madeleine du Barroux

© Abbaye du Barroux→, Ps 44,23-26.2

Arts visuels

10,1–18 Un type du méchant prospère : le pâtre Gygès

Huile sur bois de Lombardie, 16e s.

Anonyme, L'anneau de Gygès, (Huile sur bois, ca. 1500-1550), 89 x 89 cm

Œuvre de l'école Ferrari, Vénétie, Lombardie, Musée Dorotheum

Domaine public © Wikicommons→

Gygès est un personnage évoqué dans la République de Platon. Il est un pâtre de Lydie faisant la découverte d'un anneau magique dont la propriété principale est de rendre invisible. Il retire cet anneau des flancs d'un cheval d'airain, et du doigt d'un géant à l'état de squelette, reposant dans le ventre de la bête. Gygès est alors doté d'un pouvoir extrême, le plus terrible sans doute d'après Platon : celui de commettre le mal en toute impunité. Cette idée correspond, à quelques nuances près, aux accents douloureux du psalmiste qui exprime son incompréhension devant la prospérité des méchants.

44,10–27 Le peuple juif livré au massacre, et l'apparente inaction de Dieu : les artistes et la Shoah

Autoportraits, 20e s.

Felix Nussbaum (1904-1944), Autoportrait, (huile sur panneau, ca. 1940)

maison Felix Nussbaum, Osnabrück, Allemagne, Domaine public © Wikimedia commons→

Felix Nussbaum fut formé au temps de la « Nouvelle Objectivité » et au contact des avant-gardes européennes – la peinture métaphysique italienne, le surréalisme international. En 1933, lorsque Hitler accède au pouvoir, il est mis au ban de l’académie des Beaux-Arts de Berlin et forcé à l’exil. Après l’Italie, la Suisse et la France, il se réfugie à Ostende, en Belgique. Interné en 1940 au camp de Saint-Cyprien, dans le sud de la France, après la défaite belge, il s’évade et retourne à Bruxelles, où il demeure caché, avec son épouse Felka Platek, une artiste juive polonaise. Ils furent finalement déportés à Auschwitz, le 31 juillet 1944. Prenant pour maîtres le Douanier Rousseau, Van Gogh, Beckmann, Ensor, Chirico, il est aussi influencé dans son goût pour l’autoportrait et ses allégories de la Mort par les maîtres anciens flamands et allemands. Sa peinture porte toute une réflexion existentialiste sur la condition du juif pourchassé.

Felix Nussbaum (1904-1944), Autoportrait avec le passeport juif, (ca. 1940)

maison Felix Nussbaum, Osnabrück, Allemagne, Domaine public © Wikimedia commons→

20e s.

Charlotte Salomon (1917-1943), La nuit de cristal, (gouache sur papier, ca. 1940-1942), 25 x 32,5 cm

Jewish Historical Museum, Amsterdam, Pays-Bas, Domaine public © Wikimedia commons→

Charlotte Salomon, née à Berlin dans une famille juive aisée, dut affronter l’antisémitisme à l’école et à l’Académie des arts de la capitale, ainsi que le suicide de sa mère en 1926 et de sa grand-mère en 1940. Internée avec son grand-père au camp de Gurs, ils en sont libérés quelques mois plus tard en raison du mauvais état de santé du grand-père et parviennent à regagner la Côte d'Azur, où elle se marie. En 1943, le couple est arrêté, transféré à Drancy puis acheminé vers Auschwitz. Le 10 octobre, immédiatement à son arrivée, Charlotte, enceinte de cinq mois, fut envoyée dans les chambres à gaz. Son mari mourut à son tour le 1er janvier suivant. La peinture fut d’abord pour elle un moyen de lutter contre le désespoir. De la fin 1940 à la mi-1942, elle se consacre à son œuvre autobiographique Leben? oder Theater? (Est-ce la vie ou du théâtre ?). En 18 mois, elle peint environ 1 325 gouaches ou aquarelles, dont 800 environ sont terminées, à partir des trois seules couleurs primaires : rouge, jaune et bleu.

Liturgie

10,14.1s C’est à vous, Seigneur - Graduel

« Tibi Domine »

Traditionnel, Graduel - Tibi Domine

Chœur des moines de l’abbaye Sainte-Madeleine du Barroux

© Abbaye du Barroux→, Ps 10,14.1s

Comparaison des versions

44,23 V—IUXTA HEBR.

  • Lève-toi, pourquoi dors-tu Seigneur ? | réveille-toi, pourquoi nous rejettes-tu pour toujours ?

44,24 V—IUXTA HEBR.

  • pourquoi caches-tu ta face | oublies-tu nos afflictions et nos angoisses ?

44,25 V—IUXTA HEBR.

  • Car notre âme fut courbée dans la poussière | notre ventre a adhéré à la terre

44,26 V—IUXTA HEBR.

  • Lève-toi, viens à notre secours | et rachète-nous à cause de ta miséricorde.

10,14 V—IUXTA HEBR.

  • Tu vois car tu regardes la peine et la douleur violente pour prendre en main leur cause | À toi s'abandonnent tes braves : à l’orphelin tu viens en aide.

Texte

Critique textuelle

9,1–10,18 M | G-V Disposition du texte et numérotation des psaumes La tradition hébraïque (M), dont on suit ici la numérotation, a séparé les Ps 9 et Ps 10 qui ne formaient à l'origine qu'un seul poème (ainsi que G et V l'ont maintenu ) :

  • Une même voix, celle d'un porte-parole des « →pauvres », décrit dans un hymne (= M—Ps 9), puis implore dans une prière (= M—Ps 10) l'avènement du jugement divin sur les impies ;
  • le Ps semble avoir été à l'origine  « alphabétique », c'est-à-dire qu'en prenant la première lettre de chaque vers (ailleurs : de chaque strophe), on retrouve tout l'alphabet hébraïque ; ainsi : Ps 9-10 ; 25 ; 34 ; 37 ; 111 ; 112 ; 119 ; 145 ; Lm 1-4 ; Na 1,2-8 ; M—Si 51,13-29.  

Dans le texte finalement inclus dans la Bible, qui semble abîmé, plusieurs lettres n'ont pas de strophe qui leur corresponde.

 © CC-BY-SA-4.0