La Bible en ses Traditions

Cantique des cantiques 1,17

M V
G S

17 les poutres de nos maisons sont des cèdres

Vde cèdre, nos lambris des

Vde cyprès

17 

Réception

Philosophie

1,1–8,15 Le Cantique comme symbole de la révélation Rosenzweig Stern (p. 235-242) interprète le caractère dialogal du Ct comme une instance de la structure dialogale de la révélation elle-même.  

  • Une première partie, intitulée « création », décrit une relation non personnelle, en 3e pers. et au passé, entre Dieu et le monde.
  • Au cœur de l'ouvrage, Rosenzweig fait de son commentaire du Ct le fil conducteur de la présentation de ce qu'il appelle « La révélation », c'est-à-dire le passage au « tu » et au présent et ainsi à l'avènement d'une relation personnelle entre Dieu et l'homme. Tout le Ct est un dialogue (à l'exception de Ct 8,6) : il ne dit pas que la révélation est dialogale, il le montre en étant lui-même dialogue et étant presque uniquement cela.

Révélation performée : importance du dialogue

La révélation n'est donc pas pour Rosenzweig la communication d'un ensemble d'informations sur Dieu, mais la naissance d'une relation entre Dieu et l'homme. Le Ct est pur dialogue — sans jamais de passage à la 3e pers. — et histoire au présent. Ces deux caractéristiques sont le fondement de la révélation : le dialogue et le présent.

Il ne s'agit donc plus de parler de la relation entre Dieu et l'homme, comme les prophètes qui décrivaient cette relation à l'aide de la métaphore des noces, mais de faire parler cette relation elle-même.

Révélation lyrique : importance de la subjectivité

Le discours du Ct est donc tout entier porté par la subjectivité.

  • Cela se manifeste par l'importance du « je » sous la forme du je-marqué (’ănî en héb.). Le Ct est le texte biblique qui utilise, proportionnellement à sa taille, le plus ce « je », après le livre du Qo (fréquence de 6,03 emplois pour 1000 mots en Ct, et de 6,50 en Qo).
  • Cela se remarque aussi au fait que les premiers mots du Ct expriment une comparaison : « tes amours sont meilleures que le vin » (Ct 1,2b), c'est-à-dire une appréciation subjective et non un simple constat, auquel cas un comparatif n'eût pas été nécessaire.

Dès le début du texte, la focalisation n'est pas celle d'une narration objective mais celle d'une subjectivité : les choses ne sont pas décrites pour elles-mêmes, l'enjeu est d'emblée perspectiviste. 

Critique de la réception moderne du Cantique

Rosenzweig critique les analyses modernes du Ct (à partir des 18e et 19e s.) qui ont cherché à effacer cette dimension dialogale du texte.

  • Il vise d'abord Herder et Goethe, qui ont fait du Ct un chant d'amour purement humain, prisonniers qu'ils étaient du préjugé que ce qui est humain ne peut être divin et que Dieu ne peut pas aimer. Cependant, leur tentative eut au moins le mérite de conserver cet aspect essentiel du Ct : le fait qu'il s'agisse d'un chant lyrique, de l'expression de deux subjectivités.
  • D'autres tentatives ont suivi, plus condamnables parce qu'elles ont réduit le Ct à un simple récit, narration entre plusieurs personnages : un roi, un berger, une paysanne. Dans ce dernier type d'interprétation le cœur du Ct, à savoir son caractère lyrique, est perdu et l'œuvre demeure incompréhensible.

Contexte

Milieux de vie

17 Le cyprès FLORE Cyprès

Cyprès sur le Mont Scopus (Jérusalem)

Photo:  M.R. Fournier (2021) © BEST AISBL

Is 41,19 ; 60,13 ; Si 24,17

Classification

Le cyprès est un conifère. Il existe environ trente espèces de cyprès. L’espèce la plus présente au Moyen-Orient est le cyprès commun (Cupressus Sempervirens) appelé aussi « cyprès d’Italie » ou « cyprès de Provence ».

  • Famille : cupressaceae
  • Genre : cupressus
  • Espèce : sempervirens
Localisation

Cette espèce est originaire d’Asie mineure et s’est répandue autour du bassin méditerranéen et dans le reste du globe. En régions montagneuses il pousse en compagnie du cèdre. (Mt Liban, Mt Hermon) mais, ne résistant pas au grand froid, on ne le trouve pas sur les sommets. Théophraste écrit que l’on trouve le cyprès dans les pays de soleil comme la Crète, la Lycie et Rhodes. (Théophraste Historia plantarum 4,5,1 )

Description
  • De haute taille (jusqu’à 25 m de haut) et massif, le cyprès est très ramifié et a un feuillage en écaille, persistant.
  • On trouve deux formes de cyprès commun : la forme horizontalis aux branches étalées et la forme pyramidalis au port plus élancé, conique qui résiste bien au vent.
  • Son écorce se crevasse avec le temps et dégage une odeur de résine.
  • Ses fleurs donnent naissance à des cônes sphériques, bruns, appelés « noix de cyprès ». 
  • Son bois est imputrescible (Théophraste Historia plantarum 5,4,2).
  • Ses graines sont si petites qu’elles sont à peine visibles (Pline Naturalis historia 17,72).

Illustration botanique de Cupressus sempervirens (1818),P.J.Redouté

dans Traité des arbres et arbustes que l'on cultive en France en pleine terre de Duhamel du Monceau

© Domaine public→

Usage
 Médical
  • Pline Naturalis historia 24,10 présente les feuilles et les fruits du cyprès comme des remèdes contre les morsures de serpents, les coups de soleil, les hernies, les douleurs nerveuses, etc … Les cônes ont des propriétés anti-inflammatoires.
  • Son utilisation en médecine est très ancienne (cf. tablettes cunéiformes sumériennes, Gilgamesh).
Culture matérielle

Autres

  • Il protège les cultures des vents violents.
Symbolique
Tristesse et deuil
  • Le cyprès est l'attribut de Pluton, dieu des enfers.
  • Les nécropoles romaines et grecques étaient ornées de cyprès parce que ces arbres devaient permettre de communiquer avec les régions souterraines de l’Hadès.
  • Les sarcophages des Égyptiens étaient souvent en cyprès.
  • Ovide Metamorphoses 10, raconte que le jeune Cyparisse, ayant tué par accident le cerf que lui avait offert Apollon, en est si peiné qu'il demande à ce dernier la faveur de laisser couler ses larmes pour l'éternité. Apollon le change alors en cyprès, arbre dont la sève s'écoule en forme de larmes.  
  • Virgile Aeneid 6,214-217 parle de « funestes cyprès ».
Éternité, vie éternelle

En raison de ses feuilles persistantes, de son bois réputé imputrescible, de sa longévité (jusqu’à 2000 ans), de son odeur d’encens, le cyprès, « arbre funèbre », devient signe de vie éternelle. 

  •  Dieu lui-même se compare au cyprès (Os 14,9). Ainsi, dans les cimetières, cet arbre au feuillage toujours vert et à la cime élancée vers le ciel, vacillante comme une flamme, rappelle la présence de Dieu et sa promesse de donner la vie éternelle à ceux qui croient. 
  • Origène Homiliae in Canticum canticorum 2,5 voit dans le cyprès l’image des vertus spirituelles, et dans son odeur, celle de la sainteté.
Légendes

Une légende très en vogue à l’époque médiévale, et qui contient de nombreuses variantes, présente le cyprès comme l'un des arbres dont fut tirée la croix du Christ.

  • Actes de Pilate 20 raconte qu’Adam, malade, aurait envoyé son Fils Seth réclamer à l’archange st Michel un peu d’huile de l’arbre de Vie. L’archange le lui refusa en disant qu’Adam ne serait oint de l’huile de la miséricorde que lorsque dans 5500 années, le fils de Dieu viendrait la lui donner.
  • Voragine La légende dorée  (p. 363-372) Selon une autre chronique, Saint Michel aurait donné à Seth un rameau de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, que Seth aurait planté sur la tombe d’Adam et qui donna un arbre splendide duquel fut fait la verge de Moïse, celle d’Aaron, le bois qui adoucit les eaux de Mara, la perche du serpent d’Airain et la croix de Jésus Christ.
  • Cornish Ordinalia parle de 3 graines données par l’ange à Seth qui les plaça dans la bouche d’Adam mort. De là poussèrent trois arbres : un cyprès, un cèdre et un olivier qui n’en formèrent qu’un seul (symbole de la trinité) qui servira finalement à faire la sainte croix. 

17 FLORE Cèdre du Liban

Forêt des cèdres de Dieu au Liban (Bcharré)

Photo : BlingBling10 (août 2007) © CC-BY-SA-3.0→

Nb 24,6 ; Jg 9,15 ; 2S 5,11 ; 1R 6,9.15-16.18.36 ; 7,2.3.7.11.12 ; 9,11 ; 2R 14,9 ; 19,23 ; 1Ch 14,1 ; 17,1 ; 22,3-4 ; 2Ch 1,15 ; 2,7-8 ; 9,27 ; 25,18 ; Esd 3,7 ; Jb 40,17 ; Ps 29,5 ; 80,11 ; 92,13 ; 104,16 ; 148,9 ; Ct 1,17 ; 3,9 ; 5,15 ; 8,9 ; Is 2,13 ; 14,8 ; 37,24 ; 41,19 ; 44,14 ; Jr 22,7.14-15.23. ; Ez 17,3.22-24 ; 27,24 ; 31,3-18 ; Am 2,9 ; M,G—So 2,14 ; Za 11,1-2

Étymologie 

En hébreu, « érez » désigne le cèdre ; puis par extension il désigne tout bois utilisable dans les cérémonies de purification. Ce nom apparait 70 fois dans la Bible. 

Classification

Il existe 4 espèces de cèdres dont le cèdre du Liban. C'est un arbre conifère.

  • Famille : pinaceae
  • Genre : cedrus
  • Espèce : libani
Localisation

Originaire du Moyen-Orient (Liban, Syrie, Turquie). Au Liban les cèdres couvraient autrefois la plus grande partie du Liban mais la déforestation a eu raison de pratiquement l'intégralité des anciennes forêts. Il ne reste que quelques îlots de cèdres dans la région de Bcharré, dans El chouf, à Jaj ou à Tannourine. 

Description
  • Arbre majestueux et massif qui peut atteindre jusqu’à 40 m de haut.
  • De forme pyramidale au début de sa vie, il étend au fil du temps ses branches à l’horizontal, prenant une belle apparence avec sa cime tabulaire.
  • Ses aiguilles persistantes, d’environ 3 cm de long, ont une couleur vert-gris-bleuté, qui varie selon les espèces. Les aiguilles sont rassemblées en rosettes.
  • Les cônes d’environ 10 cm ont une forme ovoïde et un aspect lisse du fait des écailles plaquées.
  • Son bois est odorant.
  • On estime son espérance de vie à 2000 ans.
  • Ce conifère a une bonne résistance au froid et aux fortes chaleurs et pousse généralement sur un sol siliceux, rocailleux en région montagneuse (1000 à 2000 m d’altitude).

Illustration botanique du cèdre du Liban

 dans Traité des arbres et arbrisseaux - Atlas par P. Mouillefert, Paul Klincksieck (éd.), 1892-1898 : Köhler, 1887 © Domaine public

Usage
Médical
  • Le cèdre a des propriétés antiseptiques et cicatrisantes. Ce sont essentiellement ses aiguilles qui sont utilisées à des fins thérapeutiques en infusion ou en usage externe. Le macérat de bourgeon de cèdre soigne les problèmes cutanés.
Culture matérielle
  • Son bois est utilisé pour la confection de charpentes, de coffres, de mobiliers dès l’antiquité car l’odeur du bois de cèdre éloigne les mites, insectes et vers.
  • Le bois de cèdre du Liban fut importé à Jérusalem par Salomon pour permettre la construction du Temple. (2Ch 2,3-10).
  • Dans l'antiquité il est aussi utilisé pour la construction navale et la fabrication de sarcophages.
  • Il semble que des cèdres du Liban étaient plantés dans la cour du Temple (cf. Ps 92,13).
Cultuel
  • Dans les rites religieux, la fumée du cèdre était réputée pour chasser les mauvais esprits.
  • Pline Naturalis historia 13,2 raconte qu’au temps de la guerre de Troie, on n’employait pas encore l’encens dans les sacrifices mais on brûlait des rameaux de cèdre et de citre qui répandaient un relent plutôt qu’une senteur.
  • La sciure de cèdre servait en Égypte à l'embaumement des momies.
Autres
  • Le cèdre est aujourd’hui l’emblème du Liban. 
  • Cet arbre a inspiré des artistes tel que Lamartine : « Choeur des cèdres du Liban ».
Symbolique
Majesté divine, grandeur, gloire, force.
  • Ps 104,16-17 Le cèdre manifeste la grandeur de son créateur.
  • Ez 17,22-23 La parabole présente le cèdre comme le royaume de Dieu.
  • Ps 92,13 Les justes sont comparés au cèdre du Liban.
  • Ez 31,1-9 Pharaon est comparé au cèdre pour sa grandeur.
Orgueil

Par contraste, ceux qui se dressent comme rivaux de Dieu sont aussi comparés au cèdre.

Longévité, éternité

En raison de sa longue vie mais aussi parce que son bois est réputé imputrescible, il est symbole de pérennité, d'éternité et d'incorruptibilité.