La Bible en ses Traditions

Josué 1,2

M S G
V
JS

— Moïse mon serviteur est mort.

M SEt maintenant Gdonc lève-toi, traverse ce

Gle Jourdain, toi et tout ce peuple vers le pays que moi je leur donne M Saux fils d'Israël :

— Moïse mon esclave est mort.

Lève-toi et traverse ce Jourdain, toi et tout le peuple avec toi, vers la terre que moi, je donnerai aux fils d'Israël :

— Moïse mon serviteur est mort.

Et maintenant lève-toi, traverse ce Jourdain, toi et tous les fils d’Israël vers le pays que moi je leur donne.

Texte biblique

2a Moïse mon serviteur est mort lecture actualisante

  • Origène Hom. Jesu Nave 2,1 « Si tu vois Jérusalem détruite, l’autel abandonné de telle sorte que tu ne voie nulle part ni sacrifices, ni victimes, ni libations, ni prêtres, ni pontifes, ni liturgie des lévites ; quand tu verras la fin de tout cela, dis donc que Moïse, le serviteur de Dieu, est mort. » Cela signifie aussi la mort de la Loi (ibid. 1,3).
  • Procope de Gaza Com. Jos. : La mort de Moïse et le passage du Jourdain doivent se comprendre comme le dépassement du régime vétérotestamentaire.

Contexte

Repères historiques et géographiques

2b Jourdain Potamologie Le fleuve surgit de trois sources au pied de l’Hermon. Dans la Bible, il est toujours précédé de l’article (hayyardēn) sauf en Jb 40,23 et Ps 42,7. En raison du dénivelé abrupt parcouru par ce fleuve, certains ont voulu rattacher son nom au verbe yrd « couler (descendre) torrentiellement » (Jos 3,13.16). L’expression hayyardēn hazzê (Jos 1,2.11 ; 4,22) doit se comprendre comme « le Jourdain que vous voyez là » ; cf. Nb 26,3.63 « le Jourdain de Jéricho ».

Réception

Comparaison des versions

2b.3.11b donnerai + livrerai + donnera — (V) Temps futurs Les futurs en V accentuent davantage la promesse.

Intertextualité biblique

1.2a serviteur de Dieu Dans le NT, les termes « serviteur » et « esclave » s’appliquent autant à Jésus (Mt 12,18 ; Mc 10,43-45 ; Ac 3,13.26 ; 4,27.30) qu’à ses disciples (Jn 12,26 ; Ac 26,16 ; Ga 1,10 ; Col 4,12 ; 2P 1,1 ; Ap 1,1). →Serviteurs et esclaves chez Paul

Texte

Procédés littéraires

2a serviteur (G) Analogie entre Moïse et Josué G : ho therapôn indique un service libre et honorable tant pour Moïse (Nb 12,7 ; Jos 1,2 ; 8,31.33) que pour Josué (Ex 33,11). Intertextualité biblique Jos 1,1.2a

2b peuple Répétition M : ‘ām est le mot le plus utilisé dans Josué pour identifier les destinataires des promesses de Dieu.

Genres littéraires

1,1–24,33 Épopée sacrée Josué se présente comme une 'épopée sacrée', forme classique de narration des événements dans l’Antiquité. Leur déroulement y est guidé par une série d’interventions directes de Dieu, qui conduit le héros et son peuple (Procédés littéraires Jos 1,1–9), plus ou moins obéissants (Procédés littéraires Jos 1,10–18) et fixe son destin. La présence divine occupe une place toute spéciale dans la narration des hauts faits de la campagne militaire.

Réception

Comparaison des versions

2b Jourdain M : Yardēn | JS : Yrdn | G : Iordanês | V : Iordanes | S : Ywrdnn

Texte

Procédés littéraires

1–9 Motif narratif de l'ordre divin Ce discours de Dieu constitue le texte liminaire de toute l'épopée qui va suivre : Genres littéraires Jos 1,1–24,33.

2b fils d’Israël Expression figée Désignation tribale à l’origine (Gn 32,33 ; 42,5 ; Ex 3,15 ; Nb 32,17 ; Jg 6,2 ; 1S 7,6 ; Mi 5,2).

Réception

Littérature

1–18

  • Rainer Maria Rilke (1875-1926) a composé en 1906 le poème Josuas Landtag.

Arts visuels

1–18

  • Des mosaïques de la basilique de Sainte-Marie-Majeure à Rome du 4e s. représentent un cycle d’épisodes empruntés au livre de Josué.
  • Donatello (1386-1466) a sculpté dans le campanile de Florence une statue de Josué et des scènes de sa vie.

Propositions de lecture

1–18 Ouverture d'une épopée sacrée

Thèmes

Dieu promet à Israël des frontières qui surprennent par leur étendue (v.4 ; Repères historiques et géographiques Jos 1,4). L’évocation des limites de ce territoire à l’orée d’une étape historique nouvelle crée un effet narratif puissant : le lecteur est invité à découvrir la surabondance du don de Dieu à son peuple. Le don de la terre semble incommensurable, une sorte de jardin d’Éden qu’on ne parviendra jamais à posséder complètement et qui gardera toujours la dimension d’une promesse.

Structure

Le ch. est composé de deux sections.

  • Les v.1-9 présentent le discours de Dieu à Josué. Ils introduisent les trois thèmes fondamentaux de tout le livre : l’occupation du territoire (ch.1-12), sa distribution entre les tribus (ch.13-22) et l’obéissance à la Loi (ch.23-24).
  • Les v.10-18 relatent les premiers pas des Israélites aux ordres de Josué, manifestant ainsi la réalisation immédiate des plans divins. Cette seconde section comprend un ordre de Josué aux officiers (v.10-11) et un discours aux tribus transjordaniennes que vient compléter leur réponse (v.12-18).

Narration

Cinq actants interviennent à tour de rôle dans cette péricope.

  • Les quatre premiers sont des êtres concrets : le Seigneur, Moïse, Josué et les tribus de la Transjordanie.
  • L’homme rebelle, en revanche, est un actant virtuel.

Une bonne partie du ch. reprend ce qui a été dit dans Dt 1,38 ; 3,21-28 ; 31,1-8.14.23 ; 34,9. Moïse constitue la référence et la garantie qui vient du passé. À présent, les tribus vont obéir à Josué (v.17a). Pour l’avenir, les enfants d’Israël, qui se disent prêts à punir le rebelle (v.18a), attendent de Josué qu’il leur montre la présence du Seigneur avec lui (v.17b). Les v.7-8 introduisent deux thèmes principaux :

  • l’observance de la Loi (seulement au v.8), en tant que condition du succès de la campagne ;
  • l’unité d’Israël, qui ne dépend pas de la géographie mais de la fidélité puisque tous partagent le même destin. Tant que les habitants de la Cisjordanie ne jouiront pas du repos sur leur terre, ceux de la Transjordanie ne pourront pas non plus en profiter ni posséder définitivement leur territoire.

Réception néotestamentaire

Mt 5,5 reprend ce motif dans la béatitude que Jésus — dont Josué est le type (Tradition chrétienne Jos 1,1) — annonce aux doux, dans la ligne du Ps 37,11 (Tradition chrétienne Jos 1,3). Au-delà de son emplacement exact, c’est la sainteté qui devient ici la qualité essentielle de la terre : le royaume de Dieu. Dans la vie des  disciples, l’héritage ou la possession du royaume constitue l’une des aspirations les plus importantes, selon la prédication chrétienne primitive (cf. Mt 25,34 ; 1Co 6,9 ; 15,50 ; Ga 5,21 ; Ep 5,5). →Terre promise 

Liturgie

1–9 Liturgie juive : sabbat 54, entre le début de l’année et la fête des Tentes on lit :

  • Dt 33,1-34,12, ultime pārāšâ (« section ») de la Tora, qui commence par les mots « Et voici la bénédiction » (Dt 33,1, Vèzot HaBerakha, qui donne ce nom au sabbat 54). 
  • Jos 1,1-17 est la hafṭārâ (« conclusion ») de ce sabbat.

Musique

1–18

  • Sur un livret de Thomas Morell (Joshua: A Sacred Drama, 1748), Georg Friedrich Händel (1685-1759) a produit en Angleterre un oratorio sur Josué.

Intertextualité biblique

2a mon serviteur Titulature biblique M : ‘ebed : titre de personnes auxquelles on reconnaît une relation spéciale avec Dieu, qui sont élues pour mener à bien ses desseins et qui y restent fidèles (Nb 14,24 ; 2S 3,18 ; 1R 11,13 ; 14,8 ; Is 42,1 ; 44,1-2 ; 49,3 ; Jb 1,8 ; 2,3).

Tradition chrétienne

2a Moïse mon serviteur est mort La fin de l'époque AT

  • Origène Hom. Jesu Nave 2,1 « Si tu vois Jérusalem détruite, l’autel abandonné de telle sorte que tu ne voies nulle part ni sacrifices, ni victimes, ni libations, ni prêtres, ni pontifes, ni liturgie des lévites ; quand tu verras la fin de tout cela, dis donc que Moïse, le serviteur de Dieu, est mort. » Cela signifie aussi la mort de la Loi (ibid. 1,3).
  • Procope de Gaza Comm. Jos. : La mort de Moïse et le passage du Jourdain doivent se comprendre comme le dépassement du régime vétérotestamentaire.

2b lève-toi traverse ce Jourdain Entrée en Terre promise grâce à Josué-Jésus

  • Augustin d’Hippone Civ. 16,43,2 : Les promesses faites à Abraham ne devaient pas s’accomplir sous la Loi, mais au moment de l’incarnation du Christ. Tout cela est préfiguré dans le fait que ce n’est pas Moïse qui introduisit le peuple dans la Terre promise mais Jésus, fils de Navê.
  • Ambroise de Milan Exp. Luc. 5,94-95 « Dans l’Exode, la Loi a prophétisé la grâce du baptême par la nuée et la mer ; elle a annoncé par l’agneau le repas spirituel ; elle a montré dans la roche la source éternelle ; dans le Lévitique, elle a révélé la rémission des péchés ; dans les Psaumes, elle a annoncé le royaume des cieux ; dans Josué, fils de Nûn, elle a déclaré manifestement la Terre promise. Tout cela est cohérent avec le témoignage de Jean ».
  • Procope de Gaza Comm. Jos. : Les païens atteignent les réalités spirituelles parce que c’est Jésus qui les conduit à la paix.