La Bible en ses Traditions

Matthieu 28,9

Byz S TR Nes
V

... 

Et voici : Jésus les rencontra disant : — Salut !    

Et elles s'approchèrent, tinrent ses pieds et l'adorèrent. 

Texte

Genres littéraires

1–20 La mort et résurrection dans la mythologie comparée La mort et résurrection de Jésus pourraient évoquer des parallèles avec la thème du Dieu qui meurt dans les mythologies païennes (Osiris, Tammuz, Adonis, Atys, Dionysos). v. →Mythe et évangiles

Réception

Tradition chrétienne

1s.9 Or sur le tard du sabbat, alors que la journée commençait à poindre ... Sur l'absence d'une manifestation éclatante de la résurrection,  Origène Cels.  2,63  avait répondu que Jésus est apparu selon le mérite de la foule des croyants (cf. 1Co 15,3.5-8) et des disciples en progrès et de plus,  Origène Cels.  2,65 souligne : 'même aux apôtres  eux-mêmes et aux disciples, il n'était pas sans cesse présent et sans cesse visible, parce qu'ils étaient incapables de soutenir sa contemplation sans relâche. Sa divinité était plus resplendissante après qu'il eut mené à terme l'oeuvre de l'Économie' :

  • Origène  Cels.  2,70   ''Car plus haut se trouve écrite la réponse à l'objection : Est-ce que, de son vivant, alors que personne ne le croyait, il prêchait à tous sans mesure, et, quand il aurait affermi la foi par sa résurrection d'entre les morts, ne se laissa-t-il voir en cachette qu'à une seule femmelette et aux membres de sa confrérie ? Ce n'est pas vrai : il n'est pas apparu seulement à une femmelette, car il est écrit dans l'Évangile de Matthieu : Or sur le tard du sabbat, alors que la journée commençait à poindre vers le premier jour de la semaine, Marie de Magdala et l'autre Marie vinrent pour voir le sépulcre. et voici qu'un grand tremplement de terre survint, car un ange du Seigneur descendu du ciel, s'étant approché roula la pierre (Mt 28,1s). Et peu après, Matthieu ajoute : Et voici que Jésus vint à leur rencontre  — évidemment, les Marie déjà nommées —, en disant : Réjouissez-vous ! S'étant approchées elles lui saisirent les pieds et l'adorèrent (Mt 28,9).''

9 Et voici que Jésus vint à leur rencontre disant : je vous salue. Et ecce Jesus occurrit illis, dicens  : Avete : inscription médiévale.

12e siècle :

  • Vers 1155 : Angleterre, Londres, British Library, Add. Ms. 17738, Bible de Floreffe, fol. 79v° : "Avete" (et les 3 Marie)

Musique

1–20 De la résurrection du Christ à celle du chrétien

Dans la musique populaire (Folk indie, rock alternatif, pop baroque, Electronica)

Sufjan Stevens, " He Woke Me Up Again", Album Seven Swans, piste 10, CD, Sounds Familyre (prod. Daniel Smith), 2004

Sufjan Stevens – composition and performance ; Laura Normandin – calligraphy ; Rafter Roberts – mastering ; Andrew Smith – drums ; Daniel Smith – vocals, bass guitar, and production at his home studio and the New Jerusalem Rec Room in Clarksboro, New Jersey ; David Smith – drums ; Megan Smith – vocals ; Marzuki Stevens – artwork,

© Licence YouTube standard © D.R. Sufjan Stevens

Paroles

He was, he was in the churchyard — My father was in the first part — He came, he came to my bedroom — But I was asleep —— And he woke me up again to say... —— Halle, halle, hallelujah — Holy, holy is the sound — And I hope, I hope you are tired out — And I know, I know there is joy endowed —— But I was asleep — And he woke me up again — And he woke me up again to say... —— Hold on, hold on to your old ways — Or put off, put off every old face — And I know, I know you are changed out — And I hope, I hope you're arranged out —— But I'm still asleep — And you woke me up again — And I'm still asleep — But you woke me up to be holy.

Il était, il était dans le cimetière — Mon père était dans la première partie — Il est venu, il est venu dans ma chambre — Mais j'étais endormi — Il m'a réveillé pour dire : — Halle Halle Halleluiah — Saint Saint est le son — Et j'espère, j'espère que vous êtes fatigué — Et je sais, je sais qu'il y a de la joie à recevoir — Mais j'étais endormi — Et il m'a encore réveillé— Et il m'a encore réveillé pour dire — Accrochez-vous à vos anciennes habitudes — Ou repousser chaque vieux visage — Et je sais, je sais que tu as changé — J'espère, j'espère que ça va mieux — Mais je suis encore endormi — Et tu m'as encore réveillé — Et je suis encore endormi — Mais tu m'as réveillé pour être saint. 

Contexte

Textes anciens

27,64–28,20 Apparition et apothéose de Romulus

  • Tite-Live 1,16,6-7 « Romulus, père de notre ville, est descendu soudain du ciel, ce matin, au point du jour, et s’est offert à mes yeux ; et, comme je me tenais devant lui, plein de crainte et de respect, et lui demandais instamment la faveur de le regarder en face : ‘Va’, m’a-t-il dit, ‘et annonce aux Romains que la volonté du ciel est de faire de ma Rome la capitale du monde. Qu’ils pratiquent donc l’art militaire. Qu’ils sachent et qu’ils apprennent à leurs enfants que nulle puissance humaine ne peut résister aux armes romaines’. »

Quelques décennies plus tard, le récit d'apparition post-mortem du fondateur de Rome, relevant de la biographie « archéologique » au sens hérodotien du terme, non de l'historiographie, est amplifié, et assigné à un temoin oculaire autorisé :

  • Plutarque Rom. 28 « Pendant le tumulte que cet incident fit naître, un des premiers patriciens, généralement estimé pour sa vertu, qui avait suivi Romulus d’Albe à Rome, et avait joui de la confiance et de la familiarité de ce prince, Julius Proculus, s’avança au milieu de la place publique ; et là, en présence de tout le peuple, il jura, par ce qu’il y avait de plus sacré, qu’en revenant de l’assemblée Romulus lui avait apparu plus grand et plus beau qu’il ne l’avait jamais vu, et couvert d’armes plus brillantes que le feu ; qu’à cette vue, saisi d’étonnement, il lui avait dit : "— Ah ! prince, que vous avons-nous fait ? et pourquoi nous avez-vous quittés, en nous exposant aux accusations les plus graves et les plus injustes, en laissant toute la ville privée d’un père et plongée dans un deuil inexprimable ?" Que Romulus lui avait répondu : "— Les dieux veulent, Proculus, qu’après avoir vécu si longtemps avec les hommes, quoique fils d’un dieu, après avoir bâti une ville qui surpassera toutes les autres en puissance et en gloire, je retourne au ciel d’où je suis descendu. Adieu ; allez dire aux Romains qu’en pratiquant la tempérance, en exerçant leur courage, ils s’élèveront au plus haut point de la puissance humaine. Pour moi, sous le nom de Quirinus, je serai votre dieu tutélaire." Le caractère de Proculus, et le serment qu’il avait fait, firent ajouter foi à son témoignage. D’ailleurs l’assemblée, par une sorte d’inspiration divine, fut saisie d’un tel enthousiasme, que personne ne pensa à le contredire, et que, renonçant à leurs soupçons, ils se mirent tous à invoquer et à adorer Quirinus » (trad. Ricard).

Propositions de lecture

1–10 La Résurrection du Christ : comment ça « le troisième jour » ? Pourquoi dit-on que Jésus ressuscite « le troisième jour » après sa mort ? Comment est calculé ce décompte temporel ? Que dit le texte biblique même ?

Procédés littéraires Mt 28,1a 

Précision temporelle sur le décompte des jours dans la Bible

L’évangile de Matthieu annonce que les femmes se rendent au tombeau « le soir du sabbat ». Pourquoi attendent-elles ce moment-là ? Précisons un peu :

  • Jésus a été crucifié dans la journée du vendredi. Il a vite fallu lui trouver une sépulture avant la tombée de la nuit. En effet, le jour de grand repos du sabbat commence le vendredi au coucher du soleil et se termine le samedi au coucher du soleil. Dans l’Orient ancien, la journée ne commençait pas à minuit mais au coucher du soleil.

On a donc enseveli Jésus en toute hâte dans l’après-midi du vendredi, parce que pendant le sabbat, il était hors de question de toucher un mort sous peine de ne pouvoir célébrer le sabbat pour cause d'impureté.

Voilà pourquoi les femmes attendent « le soir du sabbat » pour retourner au tombeau. En comptant à partir du jour de la crucifixion, on est donc au début d’une nouvelle journée, le troisième jour.

Autrement dit, on reformule pour mieux comprendre
  • 1er jour : Jésus meurt et est enseveli dans la journée du vendredi avant que ne commence le sabbat.‍
  • 2ème jour : Le sabbat commence le vendredi soir et dure jusqu’à la tombée du soleil le samedi. Les femmes ne peuvent pas se rendre au tombeau.‍
  • 3ème jour : Les femmes viennent au tombeau dès le soir du sabbat, le samedi soir pour vénérer le tombeau.

Vous trouvez ça clair ? Alors vous n'avez pas bien lu !

Une fin de phrase qui remet tout en question

Le résumé chronologique qu'on vient de vous faire est bien clair et pratique mais le problème, c’est qu’il se fonde seulement sur la première partie de la phrase : « le soir du sabbat »... et qu’on oublie la fin de la phrase, qui complique tout.

Déjà comme ça, c'est difficile : « Le soir du sabbat alors que [ça] luisait vers le premier [jour] de la semaine »

Mais en plus, en grec, on lit, très littéralement : « Le soir du sabbat alors que [ça] luisait vers le premier [jour] du sabbat »

Une drôle de répétition

On est d’accord, en français, « le soir du sabbat alors que [ça] luisait vers le premier [jour] du sabbat », ça ne veut rien dire et c’est même assez moche. C’est comme si on disait « le dimanche soir alors que le dimanche matin allait commencer ». C’est sans doute pour cette raison que la majorité des traductions françaises « grand public » de cette phrase la simplifient, pour lui rendre une cohérence chronologique :

  • « Après le jour du sabbat, comme le premier jour de la semaine commençait à poindre, Marie de Magdala et l'autre Marie vinrent visiter le sépulcre. » (Traduction de la Bible de Jérusalem)
  • « Après le sabbat, à l’heure où commençait à poindre le premier jour de la semaine » (Traduction liturgique)

Cette traduction simplifiée est possible, car il se trouve que le mot grec « sabbatôn » peut signifier « sabbat » ou « semaine », mais c'est bien le même mot qui est répété au début et à la fin de ce verset.

Si c'est bizarrement dit, c'est qu'il y a quelque chose à interpréter
Une signe pour creuser et chercher le sens de cette signification

Si le texte biblique nous donne une phrase aussi obscure en apparence, c’est peut-être qu’il y a un mystère à creuser : soit le texte biblique est débile, soit il est prodigieux. On est d'accord, il est pro-di-gieux.

Délibérément, l’Évangile intensifie l'obscurité sur ce point pour forcer notre intelligence à chercher le sens. Après avoir donné une mention chronologique claire (le soir du sabbat), le texte brouille les repères temporels.

Par-delà le temps chronométrique : l'éternité divine

Ce brouillage signale un mystère divin : il inaugure une nouvelle temporalité à l'intérieur de nos journées.

  • La résurrection est dans le temps (le soir du sabbat)
  • mais elle est déjà hors du temps : avec elle commence l’éternité.

Et justement, le sabbat est le jour où Dieu lui-même s'est reposé ! Et pour l'humanité, jour de la joie de la communion, temps consacré à Dieu.

Si la résurrection a lieu le soir du sabbat alors que le sabbat va commencer, cela veut dire qu’elle nous fait entrer dans un temps circulaire qui n’a pas de fin : celui du grand Repos de Dieu lui-même. C'est comme si, dès que le dimanche prenait fin, il recommençait aussitôt (avouez que c’est alléchant !). C’est l’avènement du jour sans déclin, de la lumière qui ne s’éteint jamais.

Réception

Arts visuels

1–20 La Résurrection est-elle représentable visuellement ?   La résurrection, qui n’est guère matière à récit (Genres littéraires Mt 28,1–20), et dont l’appréhension repose sur la foi aux dires de témoins, eux-mêmes « prouvés » par les Écritures (→Résurrection, Écritures et parole de Jésus), est encore moins matière à représentation visuelle. Avant les grandes « machines » qui remplissent notre mémoire  avec des images représentant les apparitions du Christ ressuscité, quand ce n'est pas le Christ en train de ressusciter (!), les artistes se sont posé la question de la représentation de l’Irreprésentable.

Antiquité

L’on n’est guère étonné que les évocations visuelles du Ressuscité aient commencé par la reprise de symbolismes conventionnels de victoire (Arts visuels Mt 28,6b).

Moyen-Âge

De l'irreprésentabilité de la résurrection, les plasticiens anciens eurent la profonde conviction, surtout lorsqu'ils travaillèrent au service de la liturgie. La description d’une de leurs plus belles réussites, vaut bien tous les discours théoriques :

Nicola Pisano (1225?-1284 ?), ambon, détail : Nativité et Adoration des Mages (sculpture en ronde-bosse sur marbre, traces de polychromie, 1257-1260), H. 4,65 m

Baptistère, Pise © CC BY-SA 3.0

Son innovante base hexagonale est posée sur une colonne centrale (à la base sculptée de trois atlantes) et six colonnes latérales (à chapiteaux représentant les vertus de charité, force, humilité et foi, ainsi que les hérauts du jugement saint Jean Baptiste et l’archange Michelet) qui abritent des arceaux trilobés à écoinçons sculptés représentant des prophètes et des évangélistes. Sur le monument hexagonal, cinq panneaux en bas-relief représentent les scènes principales de la vie du Christ, du point de vue de l’humain sur le point d’être baptisé : nativité, adoration des mages, présentation au Temple, crucifixion et même, bien sûr, le Jugement dernier ; à l’exception de la résurrection.

Nicola Pisano (1225?-1284 ?), ambon, détail : Nativité et Adoration des Mages (sculpture en ronde-bosse sur marbre, traces de polychromie, 1257-1260), H. 4,65 m

Baptistère, Pise

© CC BY-SA 3.0

C’est que le sixième côté de l’ambon est ouvert pour donner accès à la plateforme d’où le ministre peut, depuis l’aigle-pupitre à la charnière de la crucifixion et du Jugement dernier, proclamer l’Écriture — comme si l’annonce de la Parole était la seule « présentation » possible de la résurrection, l’expérience même, avec le baptême qu’on est en train de célébrer, de la rencontre avec le Ressuscité (→Phénoménologie des rencontres avec le Ressuscité; Théologie Mt 28,17 Voir, adorer ou douter).

Renaissance

Un concentré d'Écritures

Le maître lissier (sans doute flamand) auteurs des célèbres tapisseries de la Chaise-Dieu (France), donne à voir plusieurs des témoignages de rencontres du Ressuscité  depuis la visitation de la Cité sainte jusqu'aux disciples d'Emmaüs, en passant par l'apparition à Madeleine, autour du Christ ressuscitant, sur sa composition sur la Résurrection.

Anonyme, Tapisserie de la Résurrection (tapisserie, 1501-1518), chœur

Abbatiale Saint-Robert de la Chaise-Dieu→, Auvergne

© CC BY-SA 3.0→

19e siècle

Gustave Doré peignit la scène de la résurrection quelques jours avant sa mort.

Gustave Doré (1832-1883), La Vallée de larmes, (huile sur toile, 1883), 4,13 x 6,27m

Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris 

© Wikicommons→

Jésus Christ est proclamé Dieu fait homme. Il s’est laissé condamner et tuer sur la croix. Mourant dans son humanité, il descend jusqu’aux enfers où l’homme était enfermé depuis le péché d'Adam et Ève. La résurrection du Christ est pour les croyants cette espérance folle : la mort est vaincue par la Vie, puisque Dieu libère la création des enfers.

20siècle

Le mystère glorieux

George Desvallières (1861-1950), La Résurrection, (Huile sur toile marouflée et fresque, 1931), 368 x 485 cm

Chapelle Saint-Yves, Paris 14e 

©D.R. SEBERT→,  Mt 28,1-8; Mc 16,1-8; Lc 24,1-12; Jn 20,1-2

Sur le mur droit de la chapelle, Desvallières représente le mystère glorieux, la Résurrection, dans un grand panneau faisant face à celui de la Nativité, complété par la suite de trois vitraux. Les mêmes rayons de lumière descendent du vitrail central du Cœur du Christ et irradient du tombeau vide dans une représentation proche de de la Résurrection réalisée par Desvallières pour la chapelle de Saint-Privat (CR 1653). La scène est fixée à l’instant où le flamboiement du tombeau vide saisit les femmes recueillies dans la prière. L’évènement mystérieux prend place dans un jardin fleuri et luxuriant, Paradis retrouvé, où l’annonce de l’ange est accueillie dans un tourbillon de grâce. Sous cette scène biblique, l’artiste proclame l’ultime étape du salut : « IL EST RESSUSCITÉ. »

Les trois vitraux délivrent le même message : « PAR MOI – VOUS VIENNENT – LUMIÈRE ET VIE. » Ces verrières, comme celles du mur gauche, sont réalisées en 1933, après celles de Marguerite Huré pour le chœur. On ignore le nom du verrier et leurs dessins ne suivent pas les esquisses du maître qui reprenaient en fait les rayonnements et les nuées des décors (CR 2115).

Mystère glorieux du Christ sortant triomphant du tombeau

George Desvallières (1861-1950), Résurrection, (Huile sur toile, 1942), 900 x 350 cm

Cathédrale Notre-Dame de l’Assomption et Saint-Vaast (dépôt du CNAP, Paris), Arras

© Succession Desvallières→,  Mt 28,1-8; Mc 16,1-8; Lc 24,1-12; Jn 20,1-2

À la suite du panneau de la nativité achevé à l’automne 1941, Desvallières continue la décoration entreprise pour la cathédrale d’Arras avec le panneau de droite où il représente un mystère glorieux du Christ sortant triomphant du tombeau. Le 25 octobre 1941, George écrit à sa fille France dans le Limousin : « […] Pour ma part, j’ai attaqué ma seconde grande toile très humblement, très tranquillement m’en remettant à la volonté du bon Dieu pour sa réussite ou non réussite. » Il traverse chaque jour la Seine pour se rendre dans son atelier non chauffé de Saint-Fargeau. Marguerite raconte à sa fille le 6 novembre les conditions dans lesquelles il travaille : « Papa exécute son deuxième panneau de 9 m, de l’autre côté de l’eau et il a oublié tout à l’heure la paire de chaussettes de laine qui lui sert de gants ».

Elle ajoute le 16 novembre « Papa est tellement acharné à sa grande toile afin de la terminer comme la première en deux mois qu’il vaudrait mieux pour lui ne pas s’absenter. » Et pourtant il fait quand même ses expéditions à Paris entre temps, puisqu’elle signale le 22 : « Papa est parti ce matin à 7 h 1/2 par une nuit étoilée pour son Institut, l’École des Beaux- Arts, ses 2 ateliers. » Le jour de Noël, George avoue à sa fille « Le bon Dieu me donne la force et la joie pour À la suite du panneau de la Nativité achevé à l’automne 1941, Desvallières continue la décoration entreprise pour la cathédrale d’Arras avec le panneau de droite où il représente un mystère glorieux du Christ sortant triomphant du tombeau. Le 25 octobre 1941, George écrit à sa fille France dans traverser tous les jours la Seine, pour travailler à ma Résurrection au milieu de toutes les fleurs du printemps. »

Le tableau prend forme. Le Christ ressuscité au cœur rayonnant de lumière domine le trou noir du tombeau qu’il a quitté et dans un merveilleux paysage de renaissance de végétation, il brandit le drapeau de la victoire sur la mort. La nature luxuriante qui environne le Christ libéré de son suaire illumine ce mystère glorieux. Le 23 mars 1942, l’artiste écrit au directeur général des Beaux- Arts : « Cher Monsieur Poli, Voudrez- vous dire à M. Hautecoeur que mon second panneau de l’église d’Arras est terminé aussi, c’est la “Résurrection”. Vous avez pu voir la “Nativité” au dernier Salon d’Automne. […] Ma toile est malheureusement ici à Seine-Port. Étant donné les dimensions, je n’ai pu la peindre que par terre comme les décorateurs de théâtre, les murs de mon atelier n’ayant pas les 9 mètres de hauteur voulus. » (Arch. Nat. Lettre manuscrite de G. Desvallières, F. 21/6/1737.) Desvallières expose les deux grands panneaux imaginés pour la cathédrale d’Arras au Salon d’automne 1942.

Tradition chrétienne

1–20 Pâques avec Jean Chrysostome Premiers et derniers, recevez le salaire ! Riches et pauvres, chantez en chœur tous ensemble ! Les vigilants comme les nonchalants, honorez ce jour ! Vous qui avez jeûné, et vous qui ne l'avez point fait, réjouissez-vous aujourd'hui ! La table est prête, mangez-en tous ! Le veau gras est servi, que nul ne s'en retourne à jeun ! Jouissez tous du banquet de la foi ! Que nul ne déplore sa pauvreté car le Royaume est apparu pour tous. Que nul ne se lamente sur ses fautes, car le pardon s'est levé du tombeau. Que nul ne craigne la mort, car la mort du Sauveur nous a libérés. Il a détruit la mort, celui qu'elle avait étreint. Il a dépouillé l'enfer, celui qui est descendu aux enfers. Il l'a rempli d'amertume, pour avoir goûté de sa chair. Isaïe l'avait prédit en disant : — L'enfer fut rempli d'amertume lorsqu'il t'a rencontré rempli d'amertume, car il a été joué bouleversé, car il fut mis à mort ; bouleversé, car il fut anéanti. Consterné, car il saisit un corps et trouva un Dieu. Il prit de la terre et rencontra le ciel. Il saisit ce qu'il voyait, et tomba sur celui qu'il ne voyait pas. Ô mort, où est ton aiguillon ? Enfer, où est ta victoire?

Le Christ est ressuscité et tu as été terrassé. Le Christ est ressuscité et les anges sont dans la joie. Le Christ est ressuscité et voici que règne la vie. Le Christ est ressuscité, et plus un mort au tombeau, car le Christ est ressuscité des morts, prémices de ceux qui se sont endormis. A lui, gloire et puissance dans les siècles des siècles Amen. 

St Jean Chrysostome, Homélie de Pâques, trad. M. Jeannin , Bar-le-Duc : Guérin, 1864.

Propositions de lecture

1–20 La fête de Pâques depuis l'Eglise d'Orient Comment la Résurrection du Christ est-elle annoncée ? Quels sont les mots choisis ? Quel regard porte l'église d'Orient sur la fête de Pâques ?

La Résurrection s'annonce avec des mots

L'ange de Pâques dit aux femmes d'aller dire qu'Il est ressuscité comme il l'avait dit et comme il vient de le dire, lui, l'ange.

La résurrection se rencontre d'abord dans une heureuse, une incroyable annonce placée par Dieu dans la bouche de ses témoins. L'un d'eux a si bien proclamé l'annonce qu'on l'a appelé « la Bouche d'Or », en grec : Chrysostome. Jean Chrysostome a été l'archevêque de Constantinople — aujourd'hui Istanbul au IVe siècle.

Pâques, c'est aussi ta fête !

Voilà l’homélie que saint Jean Chrysostome écrivit pour le jour de Pâques. Dans les rites orientaux, elle est proclamée durant les Matines de Pâques, sous le doux nom de Hieratikon Tradition chrétienne Mt 28,1–20.

Liturgie

1–20 Représentations du Ressuscité

ICÔNE : Art byzantin

15e s.

Andreï Roublev, La descente aux Enfers ou Descente aux Limbes (tempera sur tilleul, 1408-1410)

Galerie Tretiakov, Moscou (Russie)

© Domaine public→

Une très vieille homélie anonyme de la vigile de Pâques (pseudo-Épiphane, Homélie pour le Samedi Saint, cité selon Hans Urs von Balthasar, Dieu et l’homme d’aujourd’hui, 1956) décrit cette descente du Christ aux enfers :

« Adam, en tant que premier père et premier créé de tous les hommes, et en tant que premier mortel, lui qui avait été tenu captif plus profondément que tous les autres, et avec le plus grand soin, il entendit le premier le bruit des pas du Seigneur, qui venait vers les prisonniers. Et il reconnut la voix de celui qui cheminait dans la prison, et, s’adressant à tous ceux qui étaient enchaînés avec lui depuis le commencement du monde, il parla : — J’entends les pas de quelqu’un qui vient vers nous ! Et pendant qu’il parlait, le Seigneur entra, tenant les armes victorieuses de la croix. […] Et lui ayant saisi la main, il lui dit : — Tiens-toi debout, toi qui dormais, lève-toi d’entre les morts, et le Christ t’illuminera. Je suis ton Dieu et, à cause de toi, je suis devenu ton Fils. Lèves-toi, toi qui dormais car je ne t’ai pas créé pour que tu séjournes ici enchaîné dans l’enfer. Surgis d’entre les morts, je suis la Vie des morts. Lève-toi, toi l’œuvre de mes mains, toi, mon effigie, qui a été faite à mon image […] Regarde sur mon visage les crachats que j’ai reçus pour toi, afin de te replacer dans l’antique paradis. Regarde sur mes joues la trace des soufflets que j’ai subis pour rétablir en mon image ta beauté détruite. Regarde mes mains qui ont été solidement clouées au bois, à cause de toi, qui autrefois a mal étendu tes mains vers le bois. […] Lève-toi et partons d’ici, de la mort à la vie, des ténèbres à la lumière éternelle. Levez-vous et partons d’ici et allons de la douleur à la joie, des chaînes à la liberté, de la captivité aux délices du paradis, de la terre au ciel. Mon Père céleste attend la brebis perdue, un trône de chérubin est prêt, les porteurs sont debout et attendent, la salle des noces est préparée. Les trésors de tout bien sont ouverts, le royaume des cieux qui existait avant tout les siècles vous attend. »

PARALITURGIE occidentale. Chemin de croix contemporain : une quinzième station !

Pour retrouver une spiritualité moins doloriste, plus authentiquement pascale, de nombreux artistes occidentaux ne s'arrêtent pas à la mise au tombeau de Jésus et ajoutent des stations à la dévotion si populaire du →chemin de croix.

Jerzy Duda-Gracz (1941-2004), 15 — Jésus ressuscité !, (huile sur toile, 2000-2001), 185 x 117 cm

Chemin de croix ex voto de l'artiste, narthex, galerie haute du sanctuaire de l'icône miraculeuse, Sanctuaire de Czestochowa, Jasna Gora (Pologne)

© D.R. Jerzy Duda-Gracz Estate→ ; photo : J.-M. N. , Mt 28,1-20 ; Mc 16,1-8 ; Lc 24,1-11 ; Jn 20,1.11-18

Et voici la station de la Résurrection : Jésus est vivant ! Il est vivant au milieu de cette constellation, de cet univers. De haut en bas, d’un vêtement blanc, de la gloire de cette blancheur ineffable, il bénit la Pologne, tout le peuple. Le Christ s’incorpore au corps de la nation ; de cette force et de ce regard, de cette intensité et de cette puissance. Mais l’artiste va encore poursuivre le commentaire. Et là, il va dépasser les stations traditionnelles d’un chemin de croix. (J.-M. N.)

Contexte

Repères historiques et géographiques

27,32–28,10 Le Saint-Sépulcre

La basilique du Saint-Sépulcre à travers les siècles, (numérique, Jérusalem : 2022)

M.R. Fournier © BEST AISBL, Mt 27,32-28,10 ; Mc 15,22-16,9 ; Lc 23,33-24,12 ; Jn 19,17-20,17

Propositions de lecture

1–10 La fête de Pâques vue d'Orient : message divin, calme et volupté

La newsletter

Comment la Résurrection du Christ est-elle annoncée ? Quels sont les mots choisis ? Quel regard porte l'Église d'Orient sur la fête de Pâques ?

Le canon de la Résurrection à mille voix

Pour se plonger au cœur de la fête de Pâques, nous vous proposons une petite pépite : une compilation du chant « Le Christ est ressuscité » de la tradition orthodoxe en 16 langues (arabes, russe, français mais aussi coréen ou japonais). Enregistré çà et là avec les moyens du bord, des voix fluettes de l’Afrique aux profondes basses russes, il y en a pour tous les goûts.

Traditionnel, Tropaire de Pâques 1

Hymne chrétien orthodoxe parmi les plus connus et le plus beaux, il est chanté lors de la Fête des Fêtes - la Sainte Pâque, c'est-à-dire la Résurrection de notre Seigneur Jésus-Christ, le tropaire est ici chanté par différents chœurs dans différentes mélodies et dans différentes langues : slavon, espagnol, arabe, grec, anglais, araméen, japonais, vieux slavon, lugandien, français, coréen, estonien, latin, turc, hongrois, ethiopien, serbe, polonais, macédonien, biélorusse, géorgien, roumain, albanais, allemand, chinois, hongrois.

À noter : les chrétiens orthodoxes célébrent la Résurrection une semaine après les catholiques et les protestants. Une histoire de calendriers julien ou grégorien — on vous passe les détails pour cette fois !

La fête de Pâques célébrée à l'orientale

Anne Pierrette Marie dite Irma Martin (1814-1876), Les saintes femmes au tombeau, (huile sur toile, 1843), (73 cm x 92 cm), collection privée © Domaine public

La Résurrection s'annonce avec des mots

Résumons : d'aller dire qu'Il est ressuscité comme il l'avait dit et comme il vient de le dire, lui, l'ange ... La résurrection se rencontre d'abord dans une heureuse, une incroyable annonce placée par Dieu dans la bouche de ses témoins.

L'un d'eux a si bien proclamé l'annonce qu'on l'a appelé « la Bouche d'Or », en grec : Chrysostome. Jean Chrysostome a été l'archevêque d’une ville qui au 4e s. portait le nom de Constantinople — et qui aujourd'hui s’appelle Istanbul.

Basilique Sainte-Sophie de Constantinople, Istanbul (Turquie)

La basilique Sainte-Sophie de Constantinople, construite entre 532 et 548, transformée en mosquée après la prise de la ville par les Ottomans en 1453, et devenue musée de l'Aya Sofya depuis 1934.

Pâques, c'est aussi ta fête !

Voilà l’homélie qu’il écrivit pour le jour de Pâques. Dans les rites orientaux, elle est proclamée durant les Matines de Pâques, sous le doux nom de Hieratikon :

  • Jean Chrysostome, Hieratikon « Que tout homme pieux et ami de Dieu jouisse de cette belle et lumineuse solennité.

Celui qui a travaillé depuis la première heure, qu'il reçoive aujourd'hui le juste salaire !

Celui qui est venu après la troisième heure, qu'il célèbre la fête dans l'action de grâce !

Celui qui est arrivé après la sixième heure, qu'il n'ait aucun doute, il ne sera pas lésé.

Si quelqu'un a tardé jusqu'à la neuvième heure, qu'il approche sans hésiter !

S'il a traîné jusqu'à la onzième heure, qu'il n'ait pas honte de sa lenteur,

car le Maître est généreux,

il reçoit le dernier comme le premier,

il accorde le repos à l'ouvrier de la onzième heure comme à celui de la première.

Il fait miséricorde à celui-là, et comble celui-ci.

Il donne à l'un, il fait grâce à l'autre.

Il accueille les œuvres, il apprécie le jugement ; il honore l'action et loue l'intention.

Aussi, entrez tous dans la joie de notre Seigneur ! »

Je suis trop contente !

Le mot de la fin
  • Jean Chrysostome, Homélie de Pâques « Premiers et derniers, recevez le salaire !

Riches et pauvres, chantez en chœur tous ensemble !

Les vigilants comme les nonchalants, honorez ce jour !

Vous qui avez jeûné, et vous qui ne l'avez point fait, réjouissez-vous aujourd'hui !

La table est prête, mangez-en tous ! Le veau gras est servi, que nul ne s'en retourne à jeun !

Jouissez tous du banquet de la foi !Que nul ne déplore sa pauvreté car le Royaume est apparu pour tous.

Que nul ne se lamente sur ses fautes, car le pardon s'est levé du tombeau.

Que nul ne craigne la mort, car la mort du Sauveur nous a libérés.

Il a détruit la mort, celui qu'elle avait étreint.

Il a dépouillé l'enfer, celui qui est descendu aux enfers.

Il l'a rempli d'amertume, pour avoir goûté de sa chair.

Isaïe l'avait prédit en disant :

— L'enfer fut rempli d'amertume lorsqu'il t'a rencontré

rempli d'amertume, car il a été joué

bouleversé, car il fut mis à mort ; bouleversé, car il fut anéanti.

Consterné, car il saisit un corps et trouva un Dieu.

Il prit de la terre et rencontra le ciel.

Il saisit ce qu'il voyait, et tomba sur celui qu'il ne voyait pas.

Ô mort, où est ton aiguillon ?

Enfer, où est ta victoire ?

Le Christ est ressuscité et tu as été terrassé.

Le Christ est ressuscité et les anges sont dans la joie.

Le Christ est ressuscité et voici que règne la vie.

Le Christ est ressuscité, et plus un mort au tombeau,

car le Christ est ressuscité des morts, prémices de ceux qui se sont endormis.

A lui, gloire et puissance dans les siècles des siècles Amen. »

(trad. M. Jeannin, Bar-le-Duc : Guérin, 1864)