La Bible en ses Traditions

Matthieu 27,14.28–29.39

Byz S TR Nes
V

14 ...

14 Et il ne lui répondit pas à un seul mot,

si bien que le gouverneur s'étonna à l'extrême.

28 ...

28 et l’ayant déshabillé l’enveloppèrent d’une chlamyde écarlate.

27–31 Mc 15,16-20 ; Jn 19,2-3 28 Pourpre écarlate Jr 10,9

29 ...

29 Et tressant une couronne avec des épines, ils la posèrent sur sa tête

et un roseau dans sa [main] droite

et faisant des génuflexions devant lui, ils se moquaient de lui disant :

— Salut roi des Juifs !

29s Dérision Ps 22,7-8 ; 69,11-12 ; 109,25 ; Is 50,6 ; Mt 27,11

39 ... 

39 Et ceux qui passaient le blasphémaient

en remuant la tête 

39–44 Mc 15,29-32 ; Lc 23,35-37 39 Humiliation Ps 22,7 ; 109,25 ; Si 12,18 ; Jr 18,16 ; Lm 2,15

Propositions de lecture

Contexte

Littérature péritestamentaire

39.41.43

L'humilité du Seigneur, notre modèle

Clément met sur les lèvres du Christ les paroles du Ps 21 citées en Mt :

  • Clément de Rome  Ep. 16,15-16 ''Et lui-même dit encore: 'Quant à moi, je suis un ver de terre [...] tous ceux qui m'ont vu se sont raillés de moi, ils ont ironisé des lèvres, ils ont secoué la tête: Il a espéré dans le Seigneur, que le Seigneur le délivre, qu'il le sauve, puisqu'il tient à lui'. Vous voyez, bien-aimés, quel est le modèle qui nous a été donné ! Si le Seigneur s'est ainsi humilié, que devons-nous faire, nous qui sommes venus par lui sous le joug de sa grâce ?''

Réception

Tradition chrétienne

29 une couronne avec des épines

 Désignation prophétique de la couronne d'épines

Les épines de la couronne font allusion aux 'épines' de la parabole du Semeur :

  • Clément d'Alexandrie  Paed. 2,8,73 ''... c'est être inconséquent, après avoir appris comment le Seigneur a été couronné d'épines, que de nous railler de la vénérable passion du Seigneur [...] En effet, c'est nous que la couronne du Seigneur désignait prophétiquement, nous qui étions autrefois stériles (cf. Mt 13,7). [...] Or, Jésus ils l'ont couronnés lorsqu'il était élevé [sur la croix].''

27–31 TEXTE  Dans les évangiles, c'est lors de la comparution de Jésus devant le Sanhédrin que ces mauvais traitements sont infligés à Jésus par les Juifs. Les soldats de Pilate en feront autant et plus sur ses ordres :

  • Ac. Pil. B 10,1 "Une fois cette sentence prononcée par Pilate, les Juifs se mirent à frapper Jésus, les uns avec des bâtons, d'autres avec les mains, d'autres avec les pieds ; d'autres encore lui crachaient au visage."

2.26.29.34

  • Méliton de Sardes  Pascha 79,575 ''Car, ayant donné et le fouet à son corps et les épines à sa tête (cf. Mt 27,26.29; Jn 19,2), tu lias encore ses bonnes mains (cf. Mt 27,2) qui te formèrent à partir de la terre, et tu abreuvas de fiel (cf. Mt 27,34) sa bonne bouche, celle qui t'avait nourri de la vie, et tu mis à mort le Seigneur le jour de la Grande Fête.''

14 Argument prophétique Le Ps 21 est cité en entier dans le Dialogue (Dial. 98), et est commenté dans la suite cf. Dial. 99ss. Justin attache à ce psaume un grande importance, il est pour lui une pièce maîtresse dans l'argumentation prophétique. Il a donné le premier commentaire suivi qui nous soit parvenu de ce psaume. 

La citation qui suit montre que les mots du verset 16e 'ma langue s'est collée à mon larynx' sont une prophétie du silence de Jésus devant Pilate :

  • Justin le Martyr  Dial.  102,5 "L'expression : 'Comme un tesson de terre cuite s'est desséchée ... ma langue s'est collée à mon larynx', était encore semblablement une annonce des choses qui selon la volonté du Père devaient s'accomplir par lui [le Christ]. Car la puissance de son verbe vigoureux... s'interrompit ... tandis qu’il se taisait et ne voulait rien répondre à rien devant Pilate, comme il apparaît dans les Mémoires de ses apôtres."
  • → Justin le Martyr  Dial. 103,9 " Le verset : 'comme un tesson de terre cuite s'est desséché ma force, et ma langue s'est collée à mon larynx', comme j'ai déjà dit, était l’annonce à l’avance de son silence, car il ne répondait rien du tout... "

26,59–63 ; 27,11–14.17s.28s.39 Jésus se taisait ... Le silence majestueux de Jésus 

La magnanimité de Jésus 

La majesté du silence de Jésus atteste sa grandeur d'âme. Plus loin durant sa passion, sous la cruauté des bourreaux, il montrera une fermeté et une douceur telles qui surpassent toute virtuosité stoïcienne.

  • Origène  Cels.  Préface 1-2  ''Notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, victime d'un faux témoignage, se taisait, accusé, il ne répondait rien, bien persuadé que toute sa vie et ses actions parmi les Juifs surpassaient toute voix réfutant le faux témoignage et toutes paroles répondant aux accusations. [...] Or Jésus, victime d'un faux témoignage, se taisait : il suffit à présent de citer l'attestation de Matthieu, car celle de Marc est équivalente. Voici le texte de Matthieu : Le grand prêtre et le sanhédrin cherchaient un faux témoignage contre Jésus afin de le faire mourir et ils n'en trouvèrent pas, bien que beaucoup de faux témoins s'étaient présentés. Finalement il s'en présenta deux qui dirent : Cet homme a dit : Je peux détruire le temple de Dieu et le rebâtir en trois jours. (Mt 26,59-61). Le grand prètre se leva et lui dit : Tu ne réponds rien ? Qu'est-ce que ces gens témoignent contre toi ? Mais Jésus se taisait (Mt 26,62-63a). En outre, accusé, il ne répondait pas, car il est écrit : Jésus fut amené en présence du gouverneur. Celui-ci l'interrogea : Es-tu le roi des Juifs ? Jésus lui répliqua : Tu le dis. Mais quand il était accusé par les grands prêtres et les anciens, il ne répondait rien. Alors Pilate lui dit : N'entends-tu pas tout ce qu'ils allèguent contre toi ? Mais il ne lui répondit sur aucun point, à l'extrême étonnement du gouverneur (Mt 27,11-14). Quel sujet d'étonnement en effet, même pour des gens moyennement doués : l'accusé, victime du faux témoignage, pouvait se défendre, prouver qu'aucune charge ne l'atteignait, faire un long panégyrique de sa propre vie et de ses miracles, manifestement venus de Dieu, pour frayer au juge la voie d'une sentence favorable : bien loin de le faire, il n'eut que mépris et noble dédain pour ses accusateurs. Et que le juge, à la moindre défense, eût sur-le-champ libéré Jésus, c'est ce que montrent soit la parole qu'on rapporte de lui : Lequel des deux voulez-vous que je vous relâche : Barabbas ou Jésus qu'on appelle Christ ?, soit ce qu'ajoute l'Écriture : Il savait qu'on l'avait livré par jalousie (Mt 27,17s). Or Jésus ne cesse d'être en butte aux faux témoignages, et il n'est pas d'instant, vu la malice qui règne chez les hommes, où il ne soit accusé. Et lui, aujourd'hui encore, se tait devant ces attaques et ne répond point de sa propre voix ; mais il a sa défense dans la vie de ses véritables disciples, témoignage éclatant des faits réels, victorieux de toute calomnie, et il réfute et renverse les faux témoignages et les accusations.'' 
  • Origène  Cels.  7, 55  ''Après la liste de ces grands hommes, il [Celse] ajoute : Qu'est-ce que votre Dieu a dit de pareil dans son supplice ? On peut lui répondre : son silence au milieu des coups et des nombreux outrages (cf. Mt 26,63) manifeste plus de fermeté et de patience que toutes les paroles dites par les Grecs soumis à la torture [...] Même insulté et revêtu de la robe pourpre, la couronne d'épines autour de la tête et à la main le roseau en guise de sceptre (cf. Mt 27,14.28s.39), il garda une extrême douceur sans une parole vulgaire ou indignée contre les auteurs capables de ce forfait.''

39–43  Argument prophétique Dans ce passage de 1 Apol., Justin fait parler 'l'Esprit prophétique à propos du Christ' :

  • Justin le Martyr 1 Apol. 38,6-8 "Et de même, lorsqu'il dit : Ils ont grimacé des lèvres, ils ont hoché la tête, en disant : Qu’il se sauve lui-même !, vous pouvez apprendre que toutes ces choses sont arrivées au Christ par les Juifs. Car tandis qu’il était crucifié, ils remuaient les lèvres et hochaient la tête (cf. Mt 27,39): Toi qui as éveillé des morts, sauve-toi toi-même ! (cf. Mt 27,42)"

Dans la suite de son commentaire du Ps 21 qui décrit toute l'économie du salut, Justin poursuit sa démonstration du lien entre l'Écriture et le Christ :

  • Justin le Martyr Dial. 101,3 "Car ceux qui le regardaient crucifié, et hochaient chacun la tête, et remuaient les lèvres et, reniflant des narines de l’un à l’autre, ils disaient pour ironiser — ce qui est écrit aussi dans les Mémoires des apôtres — : 'Il se disait fils de Dieu, qu’il descende et marche ; que Dieu le sauve'!"
  • Tatien  Ev. Conc. "Il a vivifié celui-ci, et il ne peut se vivifier lui-même... Il en a délivré d’autres, et il ne peut se délivrer lui-même (cf. Mt 27,42)."
  • Ac. Pil. 10,5 "Mais les Juifs qui se tenaient [là] et voyaient, se riaient de lui et disaient : Si vraiment tu disais que tu es fils de Dieu, descends de la croix, et aussitôt, pour que nous croyions en toi (cf. Mt 27,42s) ! D’autres disaient, en se riant : Il en a sauvé d’autres, il en a guéri d’autres... et il ne peut se guérir lui-même (cf. Mt 27,41) !"

28 la couronne d'épines. Chlamydem coccineam.

11e siècle : 

  • Fin 11e s. : France, Poitiers (86), Saint-Hilaire, peintures murales, Saint Martin : "Chlamydem (rouge)"

29 Flagellation Ave rex Judeorum. : inscriptions médiévales.

12e siècle :

  • Vers 1180 : Allemagne, Berlin, Kunstgewerbemuseum, reliquaire en forme de coupole : "Ave rex" DI 35, n°18, 25.

13e siècle : 

  • Fin 13e s. : Autriche, Vorarlberg, Bregenz, abbaye cistercienne de Mehrerau, calice de l'abbaye de Wettingen, titulus de la croix : "Ave" CIMAH 3, n° 58, 184-185.

15e siècle : 

  •  Vers 1425 : Allemagne, Osnabrück, Musée diocésain, croix : "plectentes coronam de spinis imposuerunt" DI 26, n°35, 44.

33–56 Crucifixion. Vita crucis ligno : inscriptions médiévales.

12e siècle :

  • Italie, Monreale (Sicile), cathédrale, transept : - Jhesus ductus ad crucis pasionem - Crucifixio Jesu Christi  - Descensio corporis Christi -Corpus Christi ponitur in sepulcro -Resurectio Christi" Demus 1970, 162.
  • Mi 12e: Le Puy, cathédrale, porte Saint-Gilles : "Vita crucis ligno patitur discrimina mortis" CIFM 18, 114.

1–66 La mort de Jésus. Clamans voce magna : inscriptions médiévales.

15e siècle : 

  • Vers 1400 : Allemagne, Lüneburg, Kloster Ebstorf, vitrail : "jhesus pendens in cruce tradidit spiritum" DI 76, n° 27, 87.
  • Vers 1425 : Allemagne, Osnabrück, cathédrale, croix : "clamans voce magna emisit spiritum"  DI 26, n° 36, 45.
  • 4e quart du 15e s. :  Allemagne, Hanovre Musée Auguste Kostner, antependium : "Jhesus clamans voce magna emisit spiritum" DI 76, n° 62, 142.

Contexte

Littérature péritestamentaire

27–31 Parallèle dans l'Évangile de Pierre La livraison du Seigneur par Hérode ne suit pas l'ordre chronologique des évangiles canoniques.

Réception

Arts visuels

26–31 Christ à la colonne

20e s.

George Desvallières (1861-1950), Christ à la colonne (huile sur toile, 1910), 161 x 149 cm

Musée d’Orsay, Paris © RMN Martine Beck→

Au Salon d’automne 1910, Desvallières expose le Christ à la colonne, image puissante de sa foi retrouvée, à côté de La Grèce (CR 1319), fleuron de sa peinture allégorique. Il choisit de présenter ces deux toiles ensemble, un peu à la manière d’un premier testament. L’inspiration du Christ à la colonne lui est venue pendant un voyage en Espagne, au printemps 1910, au cours duquel il réalise une petite étude aquarellée (CR 1335), au dos d’une carte postale de l’église Saint-Jean de Ségovie. L’artiste voyage avec Marguerite et Richard, René Prinet, son épouse, Jeanne, et André Saglio. Ensemble, ils visitent la cathédrale de Ségovie, dans laquelle George remarque sans doute le Cristo Yacente, le Christ gisant (1631-1636), de Gregorio Fernández (1576-1636) ; dans la sacristie de la cathédrale de Burgos, il est probablement aussi frappé par le Christ à la colonne (vers 1525) de Diego Siloé (1495-1563), autre sculpture polychrome du corps de Jésus, recouvert des stigmates de la flagellation. Cette iconographie doloriste et réaliste des artistes espagnols l’inspire sur-le-champ ; il compose le petit dessin coloré pour cette future œuvre magistrale. Le Christ de la passion, le corps lacéré de traits de sang, la tête inclinée sous sa couronne d’épines, porte toute la souffrance du monde pour lequel il a donné sa vie et à qui les hommes pécheurs demandent pardon : sur le fond noir, à droite, l’artiste a écrit en capitales « Seigneur ayez pitié de nous ». Une corde épaisse retient le supplicié à une colonne lumineuse qui annonce, avec l’auréole placée au-dessus de lui, la résurrection du Fils de Dieu. Cette vision est offerte au Salon d’automne 1910, année consacrée aux arts décoratifs.

  • Louis Vauxcelles remarque immédiatement ce « Christ flagellé, pathétique comme un Christ de primitif espagnol » (L’Art décoratif, octobre 1910, p. 170). D’autres y voient toujours l’admiration de son auteur pour les maîtres italiens.
  • Dans une lettre à Frantz Jourdain, Henry Marcel, l’administrateur de la Bibliothèque nationale et futur directeur des Musées nationaux, écrit : « Ce magnifique “Christ à la colonne”, qui évoque les plus belles images de la Renaissance italienne, et où Mantegna et Signorelli reconnaîtraient l’âpreté incisive, le grand caractère de leurs créations. »
  • Les critiques soulignent la ferveur du peintre converti : « C’est la création d’un esprit qui s’est mis réellement en présence de son sujet, l’a traité avec une entière conviction, comme une scène vraie et vécue, d’une actualité éternelle. » (Hamel)
  • Après la guerre et le retour de son ami du front d’Alsace, Maurice Denis écrit : « Les œuvres de Desvallières qu’on voit aux Salons, le Christ à la colonne, le Bon Larron, le Drapeau du Sacré- Cœur, ne sont pas seulement de pathétiques images et de fervents actes de foi, mais encore d’admirables pages décoratives, composées, charpentées, solidement écrites. » (1919, p. 163) Il s’est porté acquéreur de la toile, pour la plus grande joie de Desvallières : « Comment vous remercier, cher ami, de cet achat ! Je suis très sincèrement touché à l’idée de voir ce Christ chez vous » (25 juin 1919). En novembre, tous deux s’engagent dans la grande aventure des Ateliers d’art sacré… (Cf. T. I., p. 114-133)
  • En 1937, Raymond Escholier rappelle que, si le peintre a célébré la Vierge et le Christ, « c’est surtout vers 1910 que la Grâce le touche et le marque au front pour rénover l’art chrétien », avec « le chef-d’œuvre, le Christ à la colonne, véhément ex-voto qui évoque Morales et Valdés Leal ».

Deux ans plus tard, dans son importante Histoire de l’art religieux, Maurice Denis situe Desvallières dans le courant « romantique, celui qui s’apparente au baroque, au Greco, à la piété espagnole. Il est impossible de ne pas y rattacher l’oeuvre immense de George Desvallières, le représentant génial du lyrisme et du mysticisme d’après-guerre, l’un des plus grands noms de l’art d’aujourd’hui. Il avait peint un “Christ à la colonne”, un “Sacré-Cœur” pathétique comme un Grünewald […] » (p. 298), écrit-il, rapprochant, à raison, les deux œuvres dans lesquelles le peintre représente Celui qu’il aimait nommer « Notre-Seigneur-Jésus-Christ ». Une image de dévotion paraîtra, intitulée « Le Christ à la colonne (Georges [sic] Desvallières) », sous la photographie sépia, éditée, comme celle du Sacré-Cœur, par L’Art catholique. Plusieurs répliques seront par la suite commandées au peintre, dont deux sont répertoriées au catalogue, celle de Louis Meley (CR 1713), en 1922, et celle d’Eugène Chevalier (CR 2428), en 1939.

28 Christ dépouillé de ses vêtements

20e s.

George Desvallières (1861-1950), Christ dépouillé de ses vêtements  (huile et essence sur papier marouflé,ca. 1926), 64,8 x 37 cm

collection particulière, Paris © P. Henriot→

D’abord exposé à Genève, le tableau est remarqué au Salon d’art religieux de janvier 1927 comme un « magnifique morceau où se retrouve la tradition de Gustave Moreau dans un torse d’une impeccable plastique, d’une noblesse de ligne, d’un modelé admirables » (Ladoué). Devant la croix sur la droite, un terrible bourreau dévoile le Fils de Dieu.

Dans son livre, Le Christ dans l’art français, Paul Doncœur reproduit l’œuvre et commente : « Il y a encore trop d’intention dans le beau « Christ dépouillé » de G. Desvallières si tragique. Le corps étiré, bridé, dénudé est aussi vrai que celui de la crèche, corps comme les nôtres, vrai corps d’homme, mais tant marqué de souffrance. Tout le reste n’existe plus ; cet étirement de verticales, qu’importe leur objet ? La seule chose qui demeure en nos yeux, c’est le corps offert ; « Prenez et mangez car ceci est mon corps livré pour vous. » L’artiste n’est plus que l’ami et il ne voit que l’Ami. Ainsi nous-mêmes, oubliant tout ce qui d’abord nous occupait, ne pensons-nous plus qu’à l’amour qui consomme son offrande. » (Doncœur) L’artiste traita cette scène plus tragiquement dans la 10e station de ses chemins de croix de Wittenheim (CR 2075) et du Saint-Esprit (CR 2334).

1–66 Ecce homo

19e s.

Antonio Ciseri (1821-1891), Ecce homo, (huile sur toile, 1860-1880), 292 x 380 cm

Galleria dell'Arte Moderna, Palazzo Pitti, Florence, © Domaine public→, Jn 19, Mt 27

Le peintre néoclassique représente dans une œuvre presque grandeur nature ce passage de l'Évangile. L'angle est original : nous sommes dans le palais de Pilate. Au premier plan, à droite, la femme de Pilate se détourne tristement : elle a tenté d'empêcher cela en racontant à son mari le rêve qu'elle a eu au sujet de Jésus, mais en vain. Les lignes de fuite, bien que discrètes parce que liées aux architectures de l'arrière plan, attirent le regard vers le point signifiant toute l'intensité dramatique du moment : l'espace situé entre le corps de Jésus et la main de Pilate, cette main qui livre, et qui prétend se laver du crime.

27–50 Instruments de la Passion

Art populaire du 18e s.

Art populaire, Croix avec la lance et l'éponge à l'extrémité de la branche d'hysope (18e s.), reliquaire à papiers roulés, France

© Photo : Trésors de ferveur→

Art populaire, Crucifix entouré des instruments de la Passion (début 18e s.), 33,7 x 24,4 x 1,5 cm, Clarisses de Chambéry

© Photo : Trésors de ferveur→

Musique

35–45 Were you there (when they crucified my Lord)

20e s.

Johnny Cash (1932-2003), Were You There (When They Crucified My Lord) 

© Licence YouTube standard→

Composition

Johnny Cash propose avec ce titre une reprise d'un negro spiritual, chant religieux entonné par les esclaves noirs lors du travail dans les plantations de champs de coton dans le sud des États-Unis.

Paroles

Were you there when they crucified my Lord ? (Were you there ?) / Were you there when they crucified my Lord ? / O sometimes it causes me to tremble ! tremble ! tremble ! Were you there when they crucified my Lord ? —— Were you there when they nail'd him to the cross ? (Were you there ?) / Were you there when they nail'd him to the cross ? / O sometimes it causes me to tremble ! tremble ! tremble ! / Were you there when they nail'd him to the cross ? —— Were you there when they pierced him in the side ? (Were you there ?) / Were you there when they pierced him in the side ? O sometimes it causes me to tremble ! tremble ! tremble ! / Were you there when they pierced him in the side ? —— Were you there when the sun refused to shine ? (Were you there ?) / Were you there when the sun refused to shine ? / O sometimes it causes me to tremble ! tremble ! tremble ! / Were you there when the sun refused to shine ?

Traduction

Étais-tu là quand ils ont crucifié mon Dieu ? (Mt 27,35 // Mc 15,24 // Lc 23,33 // Jn 19,18) (Étais-tu là ?) / Étais-tu là quand ils ont crucifié mon Dieu ? / Oh, parfois cela me fait trembler, trembler, trembler ! / Étais-tu là quand ils ont crucifié mon Dieu ? —— Étais-tu là quand ils l'ont cloué à la croix ? / (Étais-tu là ?) Étais-tu là quand ils l'ont cloué à la croix ? / Oh, parfois cela me fait trembler, trembler, trembler ! / Étais-tu là quand ils l'ont cloué à la croix ? —— Étais-tu là quand ils ont transpercé son flanc ? (Jn 19,34) (Étais-tu là ?) / Étais-tu là quand ils ont transpercé son flanc ? / Oh, parfois cela me fait trembler, trembler, trembler ! / Étais-tu là quand ils ont transpercé son flanc ? —— Étais-tu là quand le soleil n'a pas voulu briller ? (Mt 27,45 // Mc 15,33 // Lc 23,44) / Étais-tu là quand le soleil n'a pas voulu briller ? / Oh, parfois cela me fait trembler, trembler, trembler ! / Étais-tu là quand le soleil n'a pas voulu briller ?

Liturgie

26–35 Protège Seigneur

« Protege Domine »

Traditionnel, Offertoire - Protege Domine

Chœur des moines de l’abbaye Sainte-Madeleine du Barroux

© Abbaye du Barroux→, Jn 19,17s Lc 23,26.33 Mc 15,21-24 Mt 27,26-35

Offertoire chanté pour la fête de l'Exaltation de la Sainte Croix le 14 septembre.

Arts visuels

35–56 Les acteurs de la crucifixion dans les représentations visuelles

Moyen Âge

Le nombre de personnages présents autour du Christ en croix (→Histoire de la représentation visuelle de la croix et du crucifié) est relativement restreint et limité : le Crucifié est souvent entouré des deux larrons, en présence ou non de la Vierge et de saint Jean, parfois d’une foule (plus ou moins nombreuse) aux pieds de la croix. Entre composition narrative, symbolique et méditative, la production est donc remarquablement abondante et diversifiée.

Personnages « historiques »
  • la Vierge, saint Jean : Duccio di Buoninsegna (1305-1308, Windsor) ; Maître de Santa Chiara (1315-1330, Paris) ; Bernardo Daddi (1325-1340, New York) ; Ugolino di Nerio (1330-1335, Madrid) ; Jacobello Alberegno (1360-1390, Venise) : Mariotto di Nardo (1395-1400, Avignon) ;

Duccio di Buoninsegna (1255-1319), Triptyque : crucifixion et autres scènes, (tempera sur panneau, 1302-1308), 44,9 x 31,4 cm

Collection royale du Royaume-Uni

Domaine public © Wikimedia commons→, Lc 23 ; Mt 27 ; Jn 19 ; Mc 15

Maître de Santa Chiara (1315-1330, Paris) :

Maître de Santa Chiara (actif entre 1290 et 1330), Le Calvaire, (huile et or sur bois, ca. 1330), 27 x 18 cm

Musée du Louvre, Paris

CC © Wikimedia commons→, Lc 23 ; Mt 27 ; Jn 19 ; Mc 15

Ugolino di Nerio (1330-1335, Madrid) :

Ugolino di Nerio (1280-1330), Crucifixion avec la Vierge et saint Jean l'évangéliste, (tempera sur panneau, 1330-1335), 135 x 90 cm

Musée national Thyssen-Bornemisza, Madrid, Esapgne

Domaine public © Wikimedia commons→, Lc 23 ; Mt 27 ; Jn 19 ; Mc 15

Simone Martini (1284-1344), Polyptyque Orsini : Crucifixion, (tempera sur panneau, 14e s.), 24,4 x 15,5 cm

Musée royal des Beaux-Arts d'Anvers, Belgique

Domaine public © Wikimedia commons→, Lc 23 ; Mt 27 ; Jn 19 ; Mc 15

  • le centurion qui se convertit devant la mort du Christ (souvent, dans l’iconographie, identifié au porte-lance) ;
  • les soldats (entre autres ceux jouant aux dés la tunique) ;
  • des spectateurs plus anonymes, représentant des témoins du moment, voire une véritable foule : Giovanni Pisano (1302-1310, Pise) ; Giotto (1305-1306, Padoue et 1330, Berlin et Strasbourg) ; Duccio di Buoninsegna (1308-1311, Sienne) ; Maître de Monteoliveto (1315, New York) ; Simone Martini (1330-1340, Anvers) ; Pietro Lorenzetti (1340-1344, New York) ; Bartolomeo Bulgarini (14e s., Paris) ; Andrea de Florence (1365-1368, Florence) ; Jacopo di Cione (1368-1370, Londres) ; Jean de Beaumetz (1390, Paris et Cleveland) ; Agnolo Gaddi (1390-1396, Florence) ; Mariotto di Nardo (1395-1400, Avignon).

Jacopo di Cione (1325-1399), Crucifixion, (1369-1370), 154 x 138,5 cm

National Gallery, Londres, Domaine public © Wikimedia commons→, Lc 23 ; Mt 27 ; Jn 19 ; Mc 15

Pietro Lorenzetti (1340-1344, New York) :

Pietro Lorenzetti (actif entre 1320 et 1344), Crucifixion, (détrempe et feuille d'or sur bois, ca. 1340), 41,9 x 31,8 cm

Metropolitan Museum of Art, New York, domaine public→, Lc 23 ; Mt 27 ; Jn 19 ; Mc 15

Personnages « historiques » mais venus du passé ou du futur

Pietro Cavallini (1240-1330), Crucifixion, (fresque, ca. 1308)

San Domenico Maggiore, Naples, Italie

Domaine public © Wikimedia commons→, Lc 23 ; Mt 27 ; Jn 19 ; Mc 15

  • ; Giotto (1310, Assise) ; Puccio Capanna (1330, Raleigh et 1344, Assise) ; Bernardo Daddi (1338-1340, Berlin et 1350, Limerick) ; Francesco di Vanuccio (1356-1389, Paris) ; Jacobello Alberegno (1360-1390, Venise) ; Fra Angelico (1441-1442, Florence) ;

Puccio Capanna (14e s.), Crucifixion, (fresque, ca. 1344)

Sacro Convento, basilique Saint-François d'Assise, Italie

Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19

Jacobello Alberegno (1360-1390, Venise) :

Jacobello Alberegno (1367-?), Triptyque, (tempera sur panneau, 1360-1390), 45 x 56 cm

Gallerie dell'Accademia, Venise

Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19

  • à partir de la fin du Moyen Âge, les commanditaires ou donateurs de l’œuvre se faisant représenter en prière au pied de la croix, parfois la famille entière quand il s’agit de laïcs : Francesco di Vanuccio (1380, Berlin) ; Giovanni di Paolo (1455, Canberra).

Giovanni di Paolo (1403-1482), Crucifixion avec le donateur Jacopo di Bartolomeo, (tempera sur panneau, ca. 1455), 114,5 x 88,5 cm

National Gallery of Australia, Australie, Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19

Personnages allégoriques
  • L’Église (recueillant le sang christique) et la Synagogue (se détournant) : on les trouve ailleurs dans l’iconographie, mais leur place principale est d’encadrer la Crucifixion.

→Histoire de la représentation visuelle de la croix et du crucifié Crucifixions allégoriques

Motifs symboliques
  • Le soleil et la lune ;
  • le rideau du Temple qui se déchire ;
  • Adam rappelé au pied de la croix par son crâne seul, ou couché dans son tombeau, ou en en ressuscitant : Maître de Santa Chiara (1315-1330, Paris) ; Jacobello Alberegno (1360-1390, Venise) ;
  • Dieu le Père venant recueillir l’âme du Fils ;
  • l’ange venant recueillir l’âme du bon larron ;
  • le démon venant prendre l’âme du mauvais larron ;
  • les anges recueillant dans un calice le sang du Christ qui jaillit ostensiblement du côté (le plus souvent droit) : Giotto (1305-1306, Padoue) ; Puccio Capanna (1330, Raleigh) ; Lorenzo Monaco (1405-1410, Florence) ;

Lorenzo Monaco (ca. 1370-ca. 1425), Crucifixion, (tempera et or sur panneau, 1405-1410), 50 x 27 cm

Galleria dell'Accademia, Florence, Italie

Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19

  • le symbole typologique du pélican (intégré dans une représentation de la Crucifixion) ;
  • le symbole typologique du lion ressuscitant les lionceaux ;
  • le Christ en croix entouré des →Arma Christi (Instruments de la Passion) (un motif que l'on retrouve notamment dans les compositions de Messe de saint Grégoire) ;
  • le lion et la licorne du Ps 22,21 : Psautier de Stuttgart, fol. 27 (cf. Heck et Cordonnier 2011, 413).

L'iconographie ad minima se retrouve aussi en enluminure, vitrail, sculpture et sur des objets liturgiques ou des ornements sacerdotaux en émail, ivoire, orfèvrerie ou broderie (plaques de reliure, coffrets, tabernacles, autels portatifs, mitres, croix épiscopales, etc.).

À l'aube de l'époque moderne

Différents types s’affirment.

Scènes historiées

dans de grandes compositions narratives :

  • Jacopo Bellini (15e s., Paris) ; Conrad von Soest (1404-1414, Bad Wildungen) ; Jean Malouel (1416, Paris) ; Jan van Eyck (1430, New York) ; Fra Angelico (1420, New York et 1441-1442, Florence) ; Dirk Bouts (1455, Grenade) ; Jean Fouquet (15e s., Chantilly et 1455, Loches) ; Andrea Mantegna (1456-1459, Paris) ; Piero della Francesca (1460, New York) ; Hans Pleydenwurff (1460, Munich) ; Donatello (1465, Florence) ; Hans Memling (1465, Chantilly et Budapest, et 1491, Lübeck) ; Hugo van der Goes (1465-1468, Gand) ; Giovanni Boccati (1470, Venise) ; Stoss Veit (1477-1489, Cracovie) ; Bartolomé Bermejo (1480, Daroca) ; Francesco Francia (1485, Bologne) ; Galeazzo Mondella dit Moderno (1490, Paris) ; Benvenuto di Giovanni (1491, Washington) ; Rueland Frueauf le Jeune (1496, Neuburg).

Conrad von Soest (1360-?), Retable de Bad Wildungen, (tempera sur bois, 1403), 152 x 188 cm

église paroissiale Saint Nikolaus, Bad Wildungen, Hesse, Allemagne

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Jean Fouquet (15e s., Chantilly) :

Jean Fouquet (1420-?), Crucifixion, (enluminure sur parchemin, ca. 1452-1460), 16,5 x 12 cm

Musée Condé, Chantilly, Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19

Andrea Mantegna (1456-1459, Paris) :

Andrea Mantegna (1431-1506), Crucifixion, (tempera et huile sur panneau, 1457-1460), 76 cm x 96 cm

retable pour le maître-autel de l'église San Zeno, Vérone, Italie, Musée du Louvre, Paris

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Piero della Francesca (1460, New York) :

Piero della Francesca (?-1492), Polyptyque de saint Augustin : Crucifixion, (tempera sur panneau, ca. 1460), 37 x 41 cm

Frick Collection, New York, Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19

Hans Pleydenwurff (1460, Munich) :

Hans Pleydenwurff (1420-1472), Crucifixion, (huile sur panneau, ca. 1470), 192 x 181 cm

Alte Pinakothek, Munich, Allemagne, Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19

  • Jan Provost (1500, Bruges) ; Lucas Cranach (1500-1503, Vienne et 1538, Boston) ; Jérôme Bosch (1500-1504, Venise) ; Andrea Solario (1503, Paris) ; Giovanni-Antonio Bazzi dit Il Sodoma (1510-1515, Sienne) ; Hans Baldung Grien (1512, Berlin) ; Antonio Campi (16e s., Paris) ; Gaudenzio Ferrari (1513, Varallo) ; Albrecht Altdorfer (1520, Budapest) ; Jörg Breu (1524, Budapest) ; Jean I Pénicaud (1530, Paris) ; Bernard van Orley (1534, Bruges) ; Jean II Pénicaud (1540, Paris) ; Pedro de Campana (1550, Paris) ; Maarten van Heemskerck (1543, Gand et 1545-1550, Saint Pétersbourg) ; Jacopo Tintoretto dit Le Tintoret (1565 et 1568, Venise et 1550-1570, Munich) ; Paolo Caliari dit Véronèse (1580-1582, Venise et 1582, Paris) ; Frans Francken (1585, Séville) ; Pieter I Brueghel (1594, Munich) ; Giovanni Battista Ricci (16e Rome) ; etc.
  • Pieter II Brueghel (1617, Budapest) ; Peter Paul Rubens (1619-1620, Anvers) ; Rembrandt Harmenszoon van Rijn dit Rembrandt (ca. 1633, Munich) ; Giovanni Lanfranco (1637-1639, Naples) ; Nicolas Poussin (1645, Hartford) ; Karel Dujardin (1661) ; 
  • Giandomenico Tiepolo (ca. 1745, Saint Louis) ; etc.
Vierge Marie et saint Jean

Parfois accompagnés des saintes femmes ou de figures de sainteté de l’ordre commanditaire de l’œuvre :

  • Lorenzo Monaco (1400-1405, New York) ; Lorenzo Ghiberti (1404-1424, Florence) ; Conrad Witz (15e s., Berlin) ; Jan de Beer (15e s., Paris) ; Masaccio (1426, Naples) ; Giovanni di Paolo (1430-1435, Altenburg) ; Stéphane Lochner (1435, Nuremberg) ; Fra Angelico (1438-1450, Florence et 1440-1450, Cambridge et Paris) ; Donatello (1440, Paris) ; Rogier van der Weyden (1440, Berlin, 1445, Vienne et 1460, Escurial, Philadelphia et Bruxelles) ; Andrea del Castagno (1440-1441 et 1455, Florence et 1450, Londres) ; Piero della Francesca (1445-1462, Sansepolcro) ; Giovanni Bellini (1455, Venise) ; Francesco Botticini (1440-1460, Londres) ; Antonello da Messina (1450-1455, Bucarest et 1475, Anvers et Londres) ; Paolo Uccello (1460-1465, Madrid) ; Hugo van der Goes (1470, Venise) ; Francesco del Cossa (1473-1474, Washington) ; Jérôme Bosch (1480-1485, Bruxelles) ; Fernando Gallego (1480, Madrid) ; Pietro Vannucci dit Le Pérugin (1481-1485, Washington, 1493-1496, Lyon et 1503-1506, Sienne) ; Carlo Crivelli (1490-1495, Milan) ; Sandro Botticelli (1497, Cambridge) ; Gérard David (1495-1500, New York et 1515, Berlin).

Piero della Francesca (1445-1462, Sansepolcro) :

Piero della Francesca (?-1492), Polyptyque de la miséricorde : Crucifixion, (tempera et huile sur panneau, ca. 1460), 81 x 57 cm

pinacle du polyptyque de la Miséricorde, Museo civico, Sansepolcro, Italie

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  • Jan Provost (1500, Bruges et New York) ; Colin Nouailher (16e s., Écouen) ; Raffaello Sanzio dit Raphaël (1502-1503, Londres) ; Lucas Cranach (1503, Munich, 1515-1520, Colmar et 1536, Washington) ; Marco Palmezzano (1505, Avignon) ; Matthias Grünewald (1501-1505, Bâle et Washington, 1505, Londres, 1510-1515, Colmar et 1523-1524, Karlsruhe) ; Albrecht Altdorfer (1512, Kassel et 1526, Berlin) ; Bramantino (1515, Milan) ; Hans Geller (1515-1520, Paris) ; Adrien Isenbrant (1518-1535, Hambourg) ; Quentin Massys (1520, Anvers) ; Joos van Cleve (1520, New York et 1525, Boston) ; Cornelis Engebrechtsz (1525-1527, New York) ; Simon Bening (1525-1530, Los Angeles) ; Bernardino Luini (1530, Saint Pétersbourg) ; Léonard Limosin (1557, Écouen) ; Tiziano Vecellio dit Le Titien (1558, Ancône) ; Christophe Schwarz (1560-1580, Munich) ; Paolo Caliari dit Véronèse (1580, Venise) ; Otto van Veen (fin 16e début 17e s., Neubourg) ; Federico Barocci (1590-1595, Urbin) ; etc.

Jan Provost (1462-1525/1529), Crucifixion, (huile sur panneau de chêne, ca. 1501-1505), 116,6 x 171,1 cm

musée Groeninge, Bruges

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Jésus seul...

Entouré ou non des larrons, il apparaît régulièrement dans une solitude totale :

  • Andrea Di Bartolo (1415, Washington) ; Fra Carnevale (1450, Urbin) ; Vincenzo Foppa (1456, Bergame) ; Pedro Berruguete (1493-1499, Ségovie) ;

Fra Carnevale (1420-1484), Crucifixion, (tempera et huile sur bois, ca. 1450), 103 x 67 cm

Galleria Nazionale delle Marche, Urbino, Italie

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  • Giovanni Bellini (1501-1503, collection privée) ; Tiziano Vecellio dit Le Titien (1555, Escurial).

Après le concile de Trente, les représentations du Christ seul se multiplient, qu'il soit encore vivant ou déjà mort :

  • Dominikos Theotokopulos dit Le Greco (1585-1590, Amsterdam et ca. 1600, Cincinnati) ; Peter Paul Rubens (1612, Munich) ; Antoon Van Dyck (1622, Venise) ; Francisco de Zurbaran (1627, Chicago et 1627-1629, Séville) ; Rembrandt Harmenszoon Van Rijn dit Rembrandt (1631, Le Mas d’Agenais) ; Diego Rodriguez de Silva y Vélazquez dit Vélazquez (1632, Madrid) ; Guido Reni (1637, Rome) ; Jan Boeckhorst (1640, Anvers) ; Alonso Cano (1640, Saint Pétersbourg) ; Jusepe de Ribera (1643, Vittoria) ; Bartolomé Esteban Murillo (ca. 1650-1660, New York et 1675-1680, Madrid) ; Philippe de Champaigne (1655, Grenoble) ; Pierre Puget (1680, Paris) ;

Peter Paul Rubens (1620, Anvers)

Peter Paul Rubens (1577-1640), Le Christ crucifié, (huile sur toile, 1610-1611), 219 x 122 cm

musée royal des Beaux-Arts d'Anvers, Belgique

Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19

Francisco de Zurbaran (1627, Chicago ) :

Francisco de Zurbarán (1598-1664), Le Christ en croix, (huile sur toile, 1627)

The Art Institute of Chicago, États-Unis © Wikicommons→

Rembrandt (1631, Le Mas d’Agenais) :

Rembrandt Harmenszoon Van Rijn dit Rembrandt (1606-1669), Christ en croix, (huile sur toile montée sur panneau, 1631), 99,9 x 72,6 cm

église de Saint-Vincent, Le Mas-d'Agenais, France

Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19 

Diego Vélazquez (ca. 1632, Lyon) :

Diego Vélazquez (1599-1660), Christ crucifié, (huile sur toile, ca. 1632), 248 x 169 cm

Musée du Prado, Madrid

Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19 

  • Louis de Silvestre (1734, Dresde) ; Francisco De Goya (1780, Madrid) ; Jacques-Louis David (1782, Mâcon) ;

Jacques-Louis David (1748-1825), Christ en croix, (huile sur toile, 1782), 276 x 188 cm

église Saint-Vincent, Mâcon, France, Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19 

  • Eugène Delacroix (ca. 1837, Yale, 1847, Francfort, ca. 1853, Ottawa) ; Thomas Eakins (1880, Philadelphie) ; Nikolaï Gay (1892, Paris) ; Odilon Redon (1897, coll. priv. et 1910, Paris) ; etc.

Thomas Eakins (1844-1916), Crucifixion, (huile sur toile, 1880), 243,8 x 137,2 cm

Philadelphia Museum of Art, États-Unis

Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19 

Une tendance à toujours plus de réalisme se fait jour, à mesure que l'exégèse se veut plus historique. 

Aimé Morot (1850–1913), Martyre de Jésus de Nazareth, (huile sur toile, 1883),

Musée des Beaux-Arts, Nancy (France)

Domaine public→ © (photo Marc Baronnet)  CC BY-SA 3.0 

... ou isolé

La formule qui ne présente qu’un nombre restreint de personnages et permet, par son cadrage resserré, d’insister davantage sur la figure souffrante du Christ, qu'il soit encore vivant ou déjà mort :

  • Annibale Carracci (1583, Bologne) ; Dominikos Theotokópulos dit Le Greco (1580, Paris, 1588, Athènes et 1596-1600, Madrid) ; Santi di Tito (1593, Florence) ;

Santi di Tito (1536-1603), La Vision de saint Thomas d'Aquin, (huile sur panneau de bois, 1593), 362 x 233 cm

basilique San Marco, Florence

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  • Abraham van Diepenbeeck (17e s., Paris) ; Gaspard de Crayer (17e s., Lille) ; Abraham Janssens (17e s., Valenciennes) ; Bartolomeo Cesi (17e s., Ajaccio) ; Michel Dorigny (17e s., Paris) ; Laurent de la Hyre (17e s., Saint-Denis) ; Quentin Varin (1612, Beauvais) ; Antoon van Dyck (1615-1630, Paris) ; Jacob Jordaens (1620, Rennes) ; Peter Paul Rubens (1620, Anvers) ; Simon Vouet (1622, Gênes, 1620-1630, Paris et 1636, Lyon) ; Guido Reni (1624, Nothumberland) ; Hendrick ter Brugghen (1625, New York) ; Diego Vélasquez (1632, Madrid) ; Nicolas Tournier (1635, Paris et 1637, Rome) ; Eustache le Sueur (1643, Londres) ; Giulio Carpioni (1648, Venise) ; Francisco de Zurbarán (1660, Madrid).

Abraham van Diepenbeeck (17e s., Paris)

Abraham van Diepenbeeck (1596-1675), La Crucifixion, (huile sur panneau, 1630-1675), 62 x 44,5 cm

collection privée

Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19 

Simon Vouet (1636, Lyon)

Simon Voüet (1590-1649), Crucifixion, (huile sur toile, 1636), 216 × 146 cm

Musée des Beaux-Arts de Lyon

Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19 

  • Franz Christoph Janneck (1730) ; Pierre Subleyras (1744, Milan) ; Pompeo Batoni (1762, Boston) ; Francisco de Goya (1780, Madrid) ; etc.
Scènes non scripturaires

La peinture peut se faire méditative. Le peintre Charles Le Brun considère qu’en représentant la foule qui assistait à la crucifixion « les peintres satisferaient mal la piété des personnes contemplatives, parce que tant de divers objets interrompraient leur méditation et leur ferveur » :

  • Charles Le Brun Le Christ en croix adoré ou secouru par les anges (17e s., Paris).

Charles Le Brun (1619-1690), Crucifixion, (huile sur panneau, 1637), 52 x 41 cm

Musée des Beaux-Arts Pouchkine, Moscou, Russie, Domaine public © Wikimedia commons→, Mt 27 ; Mc 15 ; Lc 23 ; Jn 19 

Depuis le 19e s.

Aux côtés des représentations du Christ seul (cf. supra), on retrouve également les grandes formules des siècles précédents.

Vierge Marie et saint Jean

Plus ou moins identifiables, ils sont parfois maintenus dans des scènes de source plus explicitement johannique :

  • 19e s. : Eugène Delacroix (1835, Vannes, 1850, Paris et 1853, Londres) ; Hippolyte Flandrin (1839-1853, Paris) ; Gustave Moreau ; Pierre-Paul Prud'hon (1822) ; Henry Siddons Mowbray ; Odilon Redon (1897, coll. priv. et 1904, Birmingham) ;
  • 20e s. : Max Ernst (1913, Cologne) ; Salvador Dali (1954, New York) ; Otto Dix (1960) ; Jacques Villon (1960) ; Albert Gleizes (1928, 1935) ; Giacomo Manzù ; Henri Matisse ; Pablo Picasso (1930) ; Georges-Henri Rouault (1939) ; Bernard Buffet (1951).

Autres exemples : Arts visuels Mt 27,55s.

Grande narration...

La formule narrative représentant la foule ou insérant la scène dans une vaste histoire du salut fut parfois adoptée :

  • Eugène Delacroix (1846, Baltimore) ; Gustave Moreau (ca. 1870) ; James Ensor ; 

Eugène Delacroix (1798-1863), Crucifixion, (huile sur toile, 1846), 80 x 64,2 cm

Walters Art Museum, Baltimore, États-Unis

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  • Max Klinger (1890, Leipzig) présente le Christ ainsi que les deux larrons entièrement nus ;
  • Edvard Munch Golgotha (1900, Oslo) Suggéré sans aucun détail, le crucifié est presque un « blanc » sur la toile, qui détaille en premier plan le premier rang d’une foule compacte massée auprès de la croix. À gauche, un vieil homme chenu semble commenter, un clown blanc et un masque cruels semblent se moquer, les femmes pleurent avec réserve ; en plein milieu un homme chauve et distingué fixe le spectateur de ses yeux grands ouverts ;

Edvard Munch (1863-1944), Golgotha, (huile sur toile, 1900), 80 x 120 cm

Munch Museum, Oslo, Norvège

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  • Marc Chagall La crucifixion blanche (1935, Chicago) Le crucifix est dressé au cœur d’un village de Russes blancs en Pologne ; autour de la croix du supplicié, dont le perizonium est un châle de prière juif, l’avancée des soldats allemands sur la droite résulte partout en scènes de pillage impliquant le rouleau de la Tora, pleurs mêlés de désillusions, fuite et exil. Le crucifix est au centre des événements politiques qui menacent les symboles les plus sacrés du judaïsme ;
... ou solitude

La tendance à centrer les représentations sur la figure du crucifié, dans un isolement parfois total, développée naturellement par les sculpteurs, mais également par certains peintres est prolongée par les artistes de l’époque contemporaine, qui reflètent l’évolution de la christologie (Mt 27,46b).

  • Arcabas, Craigie Aitchison, Francis Bacon, Pierre Burgallo, Gérard Titus-Carmel, Macha Chmakoff, Salvador Dali, Max Ernst, Eric Gill, Pierre Moignard, Pablo Picasso, Paul Robert, Antonio Saura, Egon Schiele, Graham Sutherland, Franz von Stuck, etc.
Iconographies plus insolites ou originales
  • Paul Gauguin (1889, Buffalo) Les saintes femmes sont des bretonnes ;

Henri Eugène Paul Gauguin (1848-1903), Le Christ jaune, (huile sur toile, 1889), Crucifixion, 92,1 × 73 cm

Pont-Aven, Albright-Knox Art Gallery, Buffalo (U.S.A.)

domaine public © Wikicommons→

Catalogues raisonnés W.327: Georges Wildenstein, Gauguin : I. Catalogue, 1964. S.151: Gabriele Mandel Sugana (1972) L'opera completa di Gauguin, Milan: Rizzoli, no. 151. Trois femmes à genoux au pied d'un calvaire breton, pourraient être une simple halte de trois paysannes du début du 20e s. Mais il pourrait s'agit aussi d'une évocation de la crucifixion elle-même, avec les saintes femmes et Marie au pied de la croix. Un petit personnage, en arrière plan du tableau, escalade un mur pour s'éloigner de la croix. C'est peut-être Judas, mais c'est peut-être bien Pierre, aussi, et tout homme, pécheur, qui regarde la croix.

  • Francis Picabia (1924-1925, Paris) La Vierge Marie et saint Jean sont remplacés par André Breton et Louis Aragon ;
  • Renato Guttuso Crocifissione (1942, Rome) Trois femmes dont l'une nue (Marie-Madeleine) s'agitent au pied de la croix ; de même deux soldats (nus également) : l'un tenant un bâton (Longin ?), l'autre le porte-éponge et deux dés.
  • Giacomo Manzù (1942-1957, Paris) Adam et Ève implorent le Christ en croix ;
  • Salvador Dalí Christ de saint Jean de la Croix (1951, Glasgow) Dans une perspective plongeante impressionnante, un Christ aux cheveux courts, non blessé, presque accolé à la croix, regarde vers le bas où des matelots accostent dans une baie impassible ;
  • Paul Delvaux (1951-1952, Bruxelles et 1954, Ixelles) Trois squelettes sont crucifiés au-dessus d'une foule d'autres et de soldats en armure. Sur un tableau du même genre (1957), seul le Christ a encore la peau sur les os, crucifié au milieu d'une foule de squelettes très nombreuse ;
  • Francis Bacon Trois études de figures au pied d'une crucifixion (1944, Londres), Trois études pour une crucifixion (1962, New York) et Crucifixion (1965, Munich) Triptyques terrifiants présentant des figures déformées sur fond orange-rouge : dans le 1er, on ne voit pas le crucifié mais trois figures animales ; dans le 2e, des figures charnues se contorsionnent, le panneau de droite présentant une carcasse de viande pendant à l'envers ; elle se retrouve sur le panneau central de la 3e.

Autres exemples : Arts visuels Mt 27,55s.

Liturgie

21–52 Le voile du Temple fut déchiré

« Velum templi scissum est » Répons

Traditionnel, Ténèbres du Golgotha - 1° Nocturne: Répons " velum templi", (cd, 2005)

Dom Jean Claire, Choeur Des Moines de L'Abbaye De Solesme, Ténèbres, Abbaye de Solesmes

© Abbaye de Solesmes→, Mt 27,21-52

Contexte

Repères historiques et géographiques

26,1–27,66 Les lieux de la Passion

Parcours de Jésus durant sa Passion, (numérique, Jérusalem : 2022)

M.R. Fournier © BEST AISBL, Mt 26-27 ; Mc 14-15 ; Lc 22-23 ; Jn 18-19

Le lieu du →prétoire, tribunal de Ponce Pilate, est incertain. Deux sites sont possibles : la forteresse Antonia et le Palais d'Hérode le Grand. La tradition situe le prétoire à l'Antonia mais les archéologues, aujourd'hui, le placent plutôt dans le palais d'Hérode le Grand.

Bibliographie
  • Dominique-Marie Cabaret, La topographie de la Jérusalem antique (Cahiers de la Revue Biblique 98), Peeters : 2020.
Toponymie

Esplanade du Temple, Ophel, ville haute, ville basse, palais d’Hérode le Grand, mont Sion, Cénacle, palais hasmonéen, palais de Caïphe, Golgotha, forteresse Antonia, porte dorée, jardin de Gethsémani, mont des Oliviers, colline de Bézétha, théâtre, vallée du Cédron, vallée du Tyropéon, vallée de la Géhenne, via Dolorosa.

27,32–28,10 Le Saint-Sépulcre

La basilique du Saint-Sépulcre à travers les siècles, (numérique, Jérusalem : 2022)

M.R. Fournier © BEST AISBL, Mt 27,32-28,10 ; Mc 15,22-16,9 ; Lc 23,33-24,12 ; Jn 19,17-20,17