La Bible en ses Traditions

Genèse 28,0 ; 18,1–22,24

M G V
S Sam

YHWH

GDieu

VOr, le Seigneur lui apparut aux chênes

Gprès du chêne

Vdans la vallée de Mambré

alors qu'il était assis à l’entrée de la

Vsa tente, au fort de l'ardeur du jour

Gà midi.

...

Et il leva

G V, ayant élevé les yeux, et il regarda et voici,

G il regarda et voici,

Vlui apparurent trois hommes M Gse tenaient debout en face de lui

Gau dessus de lui.

Aussitôt vus

VEt les ayant vu, il courut à leur rencontre de l’entrée de la tente

et se prosterna à terre

...

et il dit :

— Seigneur, si Gpar hasard j’ai trouvé grâce à tes yeux

Gdevant toi, ne passe pasM, je te prie, outre ton serviteur.

...

Permettez qu’on apporte

GQu’on apporte

VMais je vous apporterai un petit peu d’eau pour vous laver les

G, qu'ils vous lavent les

V, lavez vos pieds et reposez-vous sous cet 

Vl'arbre

...

je vais prendre

Vplacerai un morceau de pain,  vous fortifierez votre cœur

Gvous mangerez

Vfortifiez votre cœur

et vous continuerez votre chemin

Vpasserez outre

car c’est pour cela que vous êtes passé devant

G Vavez fait un détour vers votre serviteur. 

Ils dirent : — Fais comme tu as dit.

...

Abraham se hâta vers la tente auprès de Sara et G Vlui dit : 

— Fais vite, Vmélange trois sᵉ'îm

Gmesures

Vsata de fleur de farine, M Gpétris et fais des gâteaux

G Vpains cuits sous la cendre !

...

Puis Abraham

VQuant à lui, il courut vers le gros bétail

Vy prit un veau tendre et bon

Vtrès tendre et excellent,

il le donna au serviteur

Và un enfant qui se hâta de l’apprêter

Vle cuire.

...

Il prit aussi du beurre et du lait avec le veau qu’on avait apprêté

Vcuit et il le servit

Vplaça devant eux.

Il

VQuant à lui, il se tenait près d’eux sous l’arbreV.

M Get ils mangèrent.  

...

VEt ayant mangé, ils lui dirent :

— Où est Sara, ta femme ?

Il

VLui répondit : — Là,

VVoici, elle est dans la tente.

...

10 Et il Vlui dit :

Je reviendrai

VDe retour, je viendrai chez toi à cette époque même

Get en cette saison Vtous deux en vie,

et voici, un fils sera né à Sara, ta femme

Velle aura un fils, Sara, ta femme !

Sarra entendait ces paroles à l'entrée de la tente

GSarra entendit ces paroles à la porte de la tente, elle se trouvait derrière lui

VÀ ces mots, Sara se mit à rire derrière l'entrée de la tente.

10 ...

M G
S Sam
V

11 Or Abraham et Sarra étaient vieux, avancés en jours

et Sarra n'avait plus ce qui arrive d'ordinaire aux femmes.

11 ...

11 Or, ils étaient tous deux vieux et fort avancés en âge

ce qu'ont les femmes avaient laissé d'arriver à Sara.

12 Sarra rit en elle-même, en se disant :

Vieille comme je suis, connaîtrais-je encore le plaisir ? Et

GCela ne m'est pas encore arrivé jusqu'à présent, et mon seigneur est Mbien vieux !

12 ...

12 Elle rit donc en secret, disant :

— À présent que j'ai vieilli et que mon seigneur est un petit vieux, je m'adonnerai à la volupté !

M G V
S Sam

13 YHWH

G VLe Seigneur

Or, le Seigneur dit à Abraham :

— Pourquoi Sara a-t-elle ri, disant : — Est-ce que vraiment j’aurais un enfant

Vje vais enfanter, moi la vieille ?

G? Mais moi j'ai bien vieilli !

13 ...

14 Y a-t-il rien qui soit étonnant de la part de YHWH

Vdifficile à Dieu

Gimpossible à Dieu ?

Au temps fixé

VComme promis

GÀ cette époque, je reviendrai 

Vm'en retournerai à toi

à cette M Vmême saison, Vtous deux en vie, et Sara aura un fils.

14 ...

15 Sara nia, disant : — Je n’ai pas ri ! car elle eut peur

Vétait saisie d'une crainte terrible.

Mais il lui dit

VQuant au Seigneur : — Non,

GNon,

VCe n'est pas ainsi, dit-il, et tu as ri !

15 ...

16 VAlors donc que les hommes se levèrent

Vs'étaient levé de là, pour partir et se tournèrent du côté de

Vils dirigèrent leurs yeux contre

G de là et baissèrent les yeux sur le visage de Sodome Get Gomorrhe

et Abraham allait avec eux pour les accompagner

Vmarchait, les emmenant.

16 ...

17 Alors YHWH

G VEt le Seigneur dit :

Cacherai-je

V Pourrai-je cacherG, moi, à Abraham Gmon serviteur ce que je vais faire ?

V je vais entreprendre

Gmoi, je fais ?

17 ...

18 Valors qu'Abraham va devenir

Gdeviendra une nation grande et Vtrès résistante

Gnombreuse

et Vque toutes les nations de la terre seront bénies en lui.

Vdevront être bénies en lui ? 

18 ...

M V
G
S Sam

19 je l’ai choisi, en effet, afin

VJe sais en effet ce qu’il ordonne

Vva prescrire à ses fils et à sa maison après lui V:

de garder la voie de YHWH

Vqu'ils gardent la voie du Seigneur en pratiquant

Vet qu'ils rendent justice et jugement

et qu'ainsi YHWH accomplisse

Vque le Seigneur fasse venir en faveur d’Abraham les promesses qu’il lui a faites

Vtout ce dont il lui a parlé.

19 Car je sais qu'il ordonnera à ses fils et à sa maison après lui,

et ils garderont les voies du Seigneur, en jugeant et en décidant,

de sorte que le Seigneur accomplisse en faveur d'Abraham tout ce qu'il lui a dit.

19 ...

M G V
S Sam

20 Et YHWH

G VAinsi le Seigneur dit :

— Le cri de Sodome

Vdes Sodomites et de Gomorrhe a grandi

G Vs'est multiplié

et leur péché est très grave

Vleur péché s'est aggravé à l'excès

Gleurs fautes sont très grandes.

20 ...

21 Je descendrai M Gdonc et je verrai s'ils ont agi entièrement selon le cri qui est venu jusqu’à moi

et sinon, je le saurai.

21 ...

22 Les hommes

M GEt ils se détournèrent de là et s’en allèrent vers SodomeG V.

et

G VQuant à AbrahamG V, il se tenait Mencore devant YHWH

G Vle Seigneur.

22 ...

23 Abraham s’approcha et

VEt s'approchant il

GEt s'étant approché, Abraham dit :

— Est-ce que tu détruiras

Vperdras Maussi le juste avec l'impieGet le juste sera-t-il comme l'impie ?

23 ...

24 Peut-être y a-t-il

VS'il y a eu

GS'il y a cinquante justes au milieu de

G Vdans la cité, détruiras-tu aussi

Vpériront-ils en même temps

Gles détruiras-tu

M Vet n'épargneras-tu pas Gtout ce lieu à cause des cinquante justes qui s'y trouvent

Vs'ils y ont été

Gs'ils y sont ?

24 ...

M V
G
S Sam

25 Loin de toi de faire cette chose et de tuer

Vd'occire le juste avec l'impie M!

Et il en sera du juste comme de

Vet que le juste soit comme l'impie !

Loin

VCela n'est pas de toi ! Le juge de

VToi qui juges toute la terre, ne rendra-t-il pas

Vtu ne rendras nullement jugement ?

25 En aucune manière tu n'agiras ainsi, en tuant le juste avec l'impie,

et le juste sera comme l'impie.

Jamais ! Le juge de toute la terre ne rendra-t-il pas justice ?

25 ...

M G V
S Sam

26 Et YHWH

G Vle Seigneur Vlui dit :

— Si je trouve à Sodome

Vchez les Sodomites cinquante justes au milieu de

Gdans la ville

j'épargnerai

Vje remettrai à  tout le lieu à cause d’eux.

26 ...

27 Et Abraham répondit et

VEn réponse, Abraham dit :

Voici, je te prie, que j'ai osé

GMaintenant j'ai commencé à

VParce qu'une fois, j'ai commencé à parler au

Và mon Seigneur, moi qui

Valors que je suis poussière

Gterre et cendre :

27 ...

28 peut-être manquera-t-il cinq des cinquante justes.

G Vet s'il y a eu cinq justes en moins des cinquante ?  

Détruiras

VEffaceras-tu à cause de cinq toute

Vla totalité de la ville ?

Et il dit : — Non, je

M VJe ne la détruirai

Vn'effacerai pas, si j’en trouve ici quarante-cinq.

28 ...

29 Il continua encore de lui parler et dit

Vlui parla à nouveau :

Peut-être s'y trouveront quarante.

VOr, si on en trouve quarante, que feras-tu ?

GMais si on y en trouve quarante ?

Et il

VIl dit : — Je ne le ferai

VJe ne frapperai

GNon, je ne la détruirai pas à cause des quarante.

29 ...

30 M GEt il dit :Je te prie, que le Seigneur ne se mette pas en colère 

GNe fais pas cela, Seigneur,

VJe te demande, dit-il, ne t'indignes pas, Seigneur, si je parle :  

peut-être s’en trouvera-t-il

G Vet si on en a trouvé ici trente ?

Et il dit

Vrépondit : — Je ne le ferai

GNon, je ne la détruirai pas, si j’en trouve ici trente.

30 ...

31 M GEt il dit :Voici que j'ai osé parler au

VParce qu'une fois, dit-il, j'ai commencé à parler à mon

GPuisque je peux parler au Seigneur :

peut-être s’en trouvera-t-il

Gmais on y en trouve

Vet si on en a trouvé ici vingt ?

Et il dit : — Je ne la détruirai

GNon, je ne la détruirai

VJe ne tuerai pas à cause des vingt.

31 ...

32 M GEt il dit : — Je te prie, que le Seigneur ne se mette pas en colère

GNe fais pas cela, Seigneur,

VJe te supplie, dit-il, ne te mets pas en colère, Seigneur, et je ne parlerai qu'une seule

G Vsi je parle encore une fois !

peut-être s’en trouvera-t-il

Vet si on en a trouvé ici

Gmais si on y en trouve dix?

Et il

VIl dit : — Je ne la détruirai

Vl'effacerai pas à cause des dix.

32 ...

33 Et YHWH

G VLe Seigneur s’en alla, après avoir achevé

Vcessé de parler à Abraham

et Abraham

Vlui retourna en son lieu.

33 ...

19,1 Les deux anges arrivèrent à Sodome le soir

M Get Lot était

Vétant assis à la porte de Sodome

Vaux portes de la cité.

Et Lot vit et

GEt lorsqu'il les eut vus, il

VEt les ayant vus, il se leva pour aller

Vet alla au-devant d’eux

et il se prosterna visage contre

Vincliné à terre

...

19,2 et il dit :

Voici, mes seigneurs

VJe vous en supplie, seigneurs ! Faites le détour

VDescendez chez

Vdans la maison de votre serviteur pour y passer la nuit

Get passez-y la nuit

Vet demeurez-y :

lavez-vous les pieds, vous vous lèverez de bon matin et

Vet demain vous poursuivrez votre route

Vpartirez sur votre voie

Ils répondirent : — Non

VEn aucun cas, nous passerons la nuit

Vdemeurerons sur la place.

...

19,3 Mais Lot leur fit tant d'instances

VIl les poussa fermement  qu'ils vinrent chez lui

Get ils firent un détour chez lui

Và faire un détour chez lui

et entrèrent dans sa maison. Il

Vet après leur entrée dans sa maison, il leur fit un festin

et

Get leur

Vil cuisit des azymes et ils mangèrent.

...

19,4 Ils n’étaient pas encore couchés que

VOr, avant qu'ils n'allassent au lit  

les hommes de la citéM G, les hommes de Sodome, entourèrent

Vassiégèrent la maison

des adolescents jusqu’aux vieillards

Vde l'enfant jusqu'au vieillard, tout le peuple jusqu'au dernier

G Ven même temps.

...

19,5 Ils

VEt ils appelèrent Lot et lui dirent :

— Où sont les hommes qui sont entrés

Vont pénétré chez toi cette

Vde nuit ?

Fais-les sortir vers nous,

VAmène-les ici, que nous les connaissions

Gayons des rapports avec eux.

...

19,6 Lot sortit

V, sorti vers euxM Gà l’entrée de la maison et ferma

V, fermant la porte derrière lui

Vson dos, dit : 

...

M G
S Sam
V

19,7 Et il dit : — Je vous prie

GEn aucun cas, mes frères, ne faites Mpas le mal !

...

— Non, je vous le demande, mes frères, ne faites pas ce mal !

M G V
S Sam

19,8 Voici, j'ai

GJ'ai

VJe possède deux filles qui n’ont pas Vencore connu d’homme

je vous les amènerai et vous leur ferez ce

Gusez d'elles selon vous en abuserez selon

Vvous en abuserez selon qu'il vous plaira

Mais ne faites

GSeulement ne faites

Vpourvu que vous ne fassiez rien Ø

Gd'injuste

Vde mal à ces hommes car c'est pour cela qu'

G Vparce qu' ils sont venus

Ventrés à l'ombre de mon toit

Gmes poutres.

...

19,9 Ils répondirent

VMais eux dirent : — Ôte

VRetire-toi de là !

Et ajoutèrent : —

G

VEt à nouveau : —Cet individu est venu comme étranger et il fait le juge !

VTu es entré, dirent-ils, comme étranger [parmi nous], est-ce pour juger ?

GTu es venu seul, vivre comme étranger [parmi nous] : est-ce aussi pour rendre un jugement ?

Maintenant, nous

VNous ferons

Gferons donc

Vt'infligerons donc G Và toi-même  pis qu’à eux !

Et ils repoussaient avec violence

Vfaisaient fortement violence à Gl'homme, LotG, 

et s’avancèrent pour

Vdéjà on était près de briser la porte

Vles portes.

...

19,10 Et voici, les hommes étendirent la main et

MEt voici que les hommes étendirent les mains et

GMais après avoir étendu les mains, les hommes firent rentrer Lot vers eux M Gdans la maison et fermèrent la porte.

10 ...

19,11 Et ils frappèrent de cécité les hommes

Vceux qui étaient à l’entrée

Vaux portes

Gla porte de la maison, du plus petit jusqu'au plus grand

et ceux-ci se fatiguèrent inutilement à chercher

Ven sorte qu'ils ne pouvaient trouver

Get ils s'épuisèrent en cherchant la porte.

11 ...

19,12 Et les hommes

VOr, ils dirent à Lot :

— Qui as-tu M Gencore ici Ven ta possession ? Gendres, fils et

G Vou filles

  et qui que ce soit que tu aies en ville, fais-les sortir de cet endroit.

V tous ceux que tu as, emmène-les hors de cette ville.

G ou qui que ce soit que tu aies dans la ville, fais-les sortir de cet endroit.

12 ...

19,13 Car Gnous, nous allons détruire

Veffacerons ce lieu

car grand est

Ven ce qu'il a crû,  le cri [contre] eux Gest monté devant YHWH

G Vle Seigneur

et YHWH

Get il

Vqui nous a envoyés pour le détruire

Vles perdre.

13 ...

19,14 Lot sortit et

V, ainsi sorti, parla à ses gendres, qui avaient pris

Vreçu ses filles, et leur dit

Met dit :

— Levez-vous M, leur dit-il, sortez de ce lieu

car YHWH

G Vparce que le Seigneur va détruire la

Veffacera cette cité. Mais aux yeux de ses gendres il parut plaisanter

VEt il leur sembla parler pour plaisanter.

14 ...

19,15 Dès le point du jour

VAlors au matin, les anges pressèrent Lot, disant :

— Lève-toi, prends ta femme et tes deux filles qui sont ici

G Vles deux filles que tu possèdes Get pars

afin que tu ne périsses pas Vpareillement dans le châtiment

Vdans le crime

Gavec les iniquités de la cité.

15 ...

19,16 Comme il tardait, ces hommes

VMalgré ses feintes, ils

GEt ils furent troublés, et ces hommes les attrapèrent par les mains, lui

Vattrapèrent sa main, et Vla main de sa femme et Vde ses deux filles

car

Vdu fait que YHWH

G Vle Seigneur voulait l’épargner Mils l’emmenèrent et le mirent hors de la ville.

16 ...

19,17 et il l'emmenèrent et le plaçèrent hors de la cité.

Met voici, lorsqu’ils les eurent fait sortir dehors,

GEt il arriva, lorsqu'ils les eurent fait sortir,

il dit :

VLà, lui parla :

En [te] sauvant, sauve ton âme !

GEn [te] sauvant, sauve ton âme !

VSauve ton âme ! Ne regarde pas derrière toi

Vdans ton dos

et ne t’arrête

Vne reste nulle part dans la plaine

Vrégion alentour

Vmais sauve-toi vers

Vdans la montagne, de peur d'être balayé

Vde périr aussi en même temps

Gd'être pris avec [les autres].

17 ...

19,18 VEt Lot leur dit :

Non, de grâce,

G VJe te demande, Vmon Seigneur !

18 ...

19,19 Voici,

GPuisque

VParce que ton serviteur a trouvé grâce

Gpitié à tes yeux

G Vdevant toi

et G Vque tu as magnifié ta miséricorde

Ggrandement la justice que tu exerces envers moi

Vm'as faite 

en me conservant la vie

G Vsauvant mon âme

et je ne peux

V[parce] que je ne peux

Gque moi je ne ne pourrai pas me sauver vers

Vdans la montagne, sans risquer que ne m'atteigne la destruction

G Vle mal et que je ne périsse

Vmeure

19 ...

19,20 M GVois, cette ville

Vcité est assez proche  s'y

G Vque je puisse m’y réfugier, et elle est négligeable : ah, que je m’y sauve,

Vpetite, et j'y serai sauvé.

Gelle qui est petite, j'y serai sauvé.

N’est-elle pas négligeable

Vmodeste

Gpetite ? Et que je vive !

Gque vive mon âme !

V mon âme vivra !

20 ...

19,21 Il

VEt il lui dit :

— Voici, je soutiens ta personne

Gj'admire ta personne

Vj'ai recueilli tes prières aussi en cette affaire

Vcela

de ne pas renverser la ville dont tu parles.

Ven faveur de laquelle tu as parlé.

21 ...

19,22 Hâte-toi de t’y sauver, car je ne puis

Vparce que je ne pourrai  rien faire que tu n’y sois arrivé.

G Ventré.

C’est pourquoi on

Gil appela cette ville du nom de « Çoar

VSégor ».

22 ...

19,23 Le soleil se leva

G Vsortit sur la terre et Lot entra à Çoar

VSégor.

23 ...

19,24 Alors, YHWH

G Vle Seigneur fit pleuvoir sur Sodome et Gomorrhe du soufre et du feu d’auprès 

de YHWH

G Vdu Seigneur, du ciel.

24 ...

M V
G S Sam

19,25 Il détruisit

Vrenversa ces villes

Vcités et toute la Plaine

Vrégion alentour

et tous les

Vla totalité des habitants des villes et les

Vl'ensemble des plantes de la terre.

25 ...

M G V
S Sam

19,26 La

VSa femmeM Gde Lot regarda en arrière

V, regardant derrière elle,  et devint une colonne

V fut changée en statue de sel.

26 ...

19,27 VQuant à Abraham se leva de bon matin et se rendit

V, se levant au matin  là où il s’était tenu à la face de YHWH.

Vauparavant avec le Seigneur

Gdevant le Seigneur

27 ...

19,28 Il regarda, face à

Gtourna son regard face à

Vporta son regard sur Sodome et Gomorrhe

et à tout le territoire de la plaine

Vsur la totalité de la terre de cette région

Gface à le pays environnant

et voici, montait la fumée

Vil vit de la braise monter

Gil vit : voici, une flamme montait de la terre comme fumée de fournaise.

28 ...

19,29 Lorsque

VAlors qu'en effet Dieu détruisit

Vrenversait les villes

Vcités de la plaine

Vde cette région

Gdu voisinage

il se rappela Abraham et fit échapper

Vdélivra Lot à la dévastation

Vdu renversement

Gdu milieu de la destruction lorsqu’il dévasta les villes où Lot habitait.

Glorsque le seigneur dévasta les villes où Lot habitait.

Vdes villes où il avait habité.

29 ...

M G V
Sam S

19,30 VEt Lot monta de Çoar

VSégor et s'établit

Vdemeura dans la montagne

Get ses deux filles Vaussi avec lui car il craignait

Vavait craint de demeurer à Çoar

VSégor

et il demeura dans une caverne, lui et ses deux fillesG avec lui.

30 ...

M G V
S Sam

19,31 L'

VEt l’aînée dit à la plus jeune

Vcadette

— Notre père est vieux et il n’y a pas d'homme

Gil n'y a personne

Vnul homme n’est demeuré sur terre

Gdans le pays

pour venir vers

Vqui puisse entrer chez

Gqui viendra vers nous selon les mœurs de toute

Vla totalité de la terre.

31 ...

19,32 Viens, faisons boire à notre père

Venivrons-le avec  du vin et couchons

Vdormons avec lui Gque nous conservions de notre père une descendance !

Gfaisons sortir de notre père une semence !

Vque nous puissions conserver de notre père une semence !

32 ...

19,33 Elles firent donc

Vdonnèrent ainsi à boire à leur père du vin cette nuit-là

et l’aînée entra et dormit

Galla vers lui et coucha avec son père

et il

Vmais lui ne s’aperçut ni quand elle

V[sa] fille se coucha ni quand elle se leva.

33 ...

19,34 Le lendemain

VLe lendemain encore

GVint le lendemain, l’aînée dit à la plus jeune

Vcadette :

— Voici, j’ai couché la nuit dernière

Vdormi hier 

Gcouché hier  avec mon

Gnotre père

faisons-lui boire du vin

Vdonnons-lui à boire du vin encore cette nuit

et va coucher

Vtu dormiras avec lui afin que nous conservions

G, faisons sortir

V, que nous sauvions de notre père une descendance

G Vune semence.

34 ...

19,35 Et elles firent boire

Vdonnèrent cette nuit-là encore à leur père du vin

et la Vfille cadette se leva et alla coucher

dormit

Ventra et dormit avec lui

Gson père

et il ne s’aperçut

Vne s'aperçut pas plus  ni quand elle se coucha

Vs'était couchée ni quand elle se leva

Vs'était levée.

35 ...

19,36 Les deux filles de Lot devinrent enceintes

Vconçurent donc de leur père.

36 ...

19,37 L’aînée mit au monde

Venfanta un fils  qu'elle nomma

Vet l'appela du nom de Mô'āv

GMôab qui veut dire : « de mon père »

VMoab

c’est le père des Moabites [qui existent] jusqu’à aujourd'hui.

37 ...

19,38 La cadette enfanta aussi un fils qu’elle nomma

Vet elle l'appela du nom 

Ben-‘Ammî

GAmman, « fils de ma race »

Vd'Ammon, c'est-à-dire : « fils de mon peuple » 

c’est le père des fils d’Ammon

GAmmanites 

VAmmanites [qui existent] jusqu’à aujoud'hui.

38 ...

20,1 Abraham partit de là pour la terre du sud

Vaustrale

il s’établit

Vhabita entre Cadès et Shur

VSur.

Et il séjourna à Gᵉrār.

GGerara.

VGérara.

...

20,2 VEt Abraham disait

Vdit de Sara, sa femme : — C’est ma sœurM V.

Gcar il craignait de dire : — C'est ma soeur, de crainte que les hommes de la cité ne le tuassent à cause d'elle. 

’Abîmélék

G VAbimélec, roi de Gérar

VGérara, envoya Vdonc la prendreM G Sara.

...

20,3 Mais

VOr, Dieu vint à Abimélek

VAbimélec dans un songe de

Gson sommeil pendant la nuit et lui dit :

— Voici, tu mourras à cause de la femme que tu as prise car elle a un mari.

...

20,4 Or,

VQuant à Abimélek

VAbimélecV, il ne s’était pas approché d’elle

G Vl'avait pas touchée

Vet il répondit

Vdit : — Seigneur, est-ce que même une nation juste, tu la feras mourir

Vest-ce que tu tueras une nation ignorante et juste

Gdétruiras-tu une nation ignorante et juste ?

...

20,5 Lui-même ne m’a-t-il pas dit : — C’est ma sœur

et elle-même Gm'a dit : — C’est mon frère ?

C’est le cœur intègre

Gle cœur pur

Vdans la simplicité de mon cœur et les mains pures

Gles mains justes

Vla pureté de mes mains que j’ai agi ainsi

Vj’ai fait cela.

...

20,6 VEt Dieu lui dit M Gen songe :

— Moi aussi, je sais que c’est avec un cœur intègre

Vsimple que tu as agi.

Vl'as fait.

Aussi moi je t'ai

M Vt'ai-je gardé de pécher contre moiM G.

C’est pourquoi

Vet je n’ai pas permis que tu la touches.

...

20,7 Maintenant rends la femme de cet homme

G Vdonc, rends la femme à son mari

car 

Vparce qu'il est prophète :

V, et il priera pour toi et tu vivras.

Si

VOr, si tu ne la rends pas

Vn'as pas voulu la rendre, sache que tu mourras certainement,

Vde mort, toi et tout ce qui est tien !

...

20,8 VEt aussitôt, Abimélek se leva au matin,

VAbimélec se levant de nuit appela tous ses serviteurs

et rapporta toutes ces choses

Vprononça la totalité de ces paroles à leurs oreilles

et tous les

Mces hommes furent pris d'une forte crainte.

...

20,9 Puis

VOr, Abimélek appela aussi Abraham et lui dit :

— Que nous as-tu fait ? En quoi avons-nous péché contre toi

que tu aies amené sur moi et sur mon royaume un si grand péché ?

Tu m'

Vnous as fait ce qui ne se fait pas.

Vque tu n'aurais pas dû faire. 

...

20,10 Abimélek dit encore à Abraham

VEt réclamant de nouveau il dit : — Qu'avais-tu en vue pour faire cela ?

10 ...

20,11 Abraham répondit :

— J'ai eu ces pensées, disant en moi-même

G— C'est en effet ce que je m'étais dit  : — Il n’y a sans doute pas de crainte de Dieu en ce lieu

et l’on me tuera à cause de ma femme.

11 ...

20,12 Et d’ailleurs, elle est vraiment ma sœur 

fille de mon père, et non fille de ma mère, et elle est devenue ma femme

Vje l'ai prise pour femme.

12 ...

20,13 Lorsque Dieu me fit errer loin

GEt cela arriva quand Dieu me fit sortir

VOr, après que Dieu m'a emmené de la maison de mon père, je G Vlui dis Mà Sara :

— Voici la miséricorde que tu me feras

G— Tu me feras cette justice :

en tout lieu où nous arriverons

Ventrerons, dis de moi : — C’est mon frère

Vtu diras que je suis ton frère.

13 ...

20,14 Alors Abimélek

VAbimélec prit mille didrachmes :

M V des brebis

Gmoutons et des bœufs,

Gveaux, des serviteurs et des servantes et [les] donna à Abraham 

et il lui rendit Sara, sa femme.

14 ...

20,15 Abimelech

VEt il dit :

Voici, mon pays

VLa terre est devant toi

vous : habite où il te plaira

Vt'aura plu.

15 ...

M G
S Sam
V

20,16 Et il dit à Sara : — Je

GVois, je 

je donne mille pièces d’argent

Gdidrachmes à ton frère :

cela Mte sera un voile sur les yeux

Gpour l'honneur de ta personne

pour tous ceux

Get de toutes celles qui sont avec toi

et pour tous te voilà justifiée

Gdis toute la vérité  !

16 ...

16 Quant à Sara, il lui dit :

— Voici, j'ai donné mille [pièces] d’argent à ton frère :

cela te sera un voile sur les yeux

pour tous ceux qui sont avec toi et en tout lieu où tu auras continué

et souviens-toi que tu as été recouvrée.

M G V
S Sam

20,17 Abraham intercéda auprès de Dieu et

VOr, par la prière d'Abraham,

GAbraham adressa une prière à Dieu et Dieu guérit Abimélek

VAbimélec, sa femme et ses servantes, et elles enfantèrent.

17 ...

20,18 Car YHWH

Gle Seigneur

VDieu avait M Gétroitement fermé Gde l'extérieurtout sein

Vtoute vulve de la maison d’Abimélek

VAbimélec

à cause de Sara, la femme d’Abraham.

18 ...

21,1  YHWH

GLe Seigneur

VOr, le Seigneur visita Sara comme il avait dit

Vpromis, YHWH fit pour Sara comme il avait promis.

Vet il accomplit les paroles qu'il avait dites.

Get le Seigneur fit pour Sara selon ce qu'il avait dit.

...

21,2 Sara conçut et enfanta M Gà Abraham un fils dans sa vieillesse

au temps fixé que Dieu lui avait marqué.

V que Dieu lui avait prédit.

G fixé, comme le lui avait dit le Seigneur.

...

21,3 VEt Abraham donna son nom au

Vappela son filsM G qui lui était né, que Sara lui avait enfanté : 

Vengendré, du nom d'Yiçḥāq

GIsaak

VIsaac.

...

21,4 Et Abraham circoncit Isaac son fils âgé de huit jours comme Dieu lui avait ordonné.

Vle circoncit le huitième jour comme Dieu lui avait prescrit

...

M G
S Sam
V

21,5 Et Abraham était âgé de cent ans à la naissance d’Isaac son fils.

...

ayant alors cent ans. 

Ce fut de fait à cet âge de son père que naquit Isaac.

M G V
S Sam

21,6 Et Sara dit : — Dieu m’a donné de quoi

Vfait rire

quiconque l’apprendra rira à mon sujet !

G Vavec moi !

...

21,7 Elle ajouta

VEt elle dit de nouveau :

— Qui eût dit à Abraham : — Sara allaitera des enfants ?

Gannoncera à Abraham que Sara allaitera un enfant ? 

Vcroirait, à entendre Abraham, que Sara allaiterait un fils 

et pourtant, j’ai bien donné un fils à sa vieillesse !

GCar j'ai enfanté un fils dans ma vieillesse.

Vqu'elle aurait enfanté de lui, déjà vieillard ?

...

21,8 L’enfant grandit Valors et fut sevré

et Abraham fit un grand

Vimportant festin

le jour où fut sevré Isaac.

Goù fut sevré Isaac son fils.

Vde son sevrage.

...

M G
V
S Sam

21,9 Mais Sara vit le fils d’Agar l’Égyptienne, qu’elle avait

Gcelui qui fut enfanté à Abraham rire.

Gjouer avec Isaac son fils.

Et Sara, ayant vu le fils d’Agar, l’Égyptienne, jouer

dit à Abraham :

...

21,10 et elle dit à Abraham :

— Chasse cette servante et son fils 

car le fils de cette servante n'héritera pas avec mon fils Mavec Isaac.

10 — Chasse cette servante et son fils 

car le fils de la servante ne sera pas héritier avec mon fils, Isaac.

10 ...

M G V
S Sam

21,11  Cette parole déplut beaucoup 

VAbraham reçut cela durement 

GCette parole parut extrêmement dure aux yeux d’Abraham, à cause de

G Vau sujet de son fils.

11 ...

21,12 Mais Dieu dit à Abraham

VEt Dieu lui dit :

— Que cela ne déplaise pas à tes yeux

Vce ne te semble rude 

Gces paroles ne soient pas dures à tes yeux  à cause de

Gau sujet de

Vpour l’enfant et M Gde ta servante !

Quoi que te dise

VTout ce que t'aura dit Sara, écoute-la

G V sa voix

car 

Vparce qu'en Isaac te sera appelée une descendance

Vsemence !

12 ...

21,13 Et

VMais du fils de la

Gcette servante aussi, je ferai une G Vgrande nation

car 

Vparce qu'il est ta descendance

Vsemence.

13 ...

21,14 VAinsi, Abraham se leva au matin

prit

Vet prenant du pain et une outre d’eau, les donna à Agar les plaçant

Vmit sur son épaule

et

Vet lui remit l’enfant, et il la renvoya.

Elle s’en alla et

VEt elle, s’en étant allé,  s’égara

Gcommençait à errer

Verrait dans le désert de Bᵉ’ēr Šāva‘.

Gprès du puits du serment.

V de Bersabée.

14 ...

21,15 Quand

GMais

VEt alors que l'eau M Gqui était dans l’outre fut

Vétait épuisée

Get elle jeta l’enfant sous l'un des arbrisseaux

Vl'un des arbres qui étaient là

Gun résineux

15 ...

21,16 et s’en alla et s’assit face à lui

Và l'opposé, au plus loin

à 

Vd'une portée d’arc

car elle disait : — Je ne veux pas voir

VJe ne verrai pas

GNon, que je ne voie pas mourir [mon] enfant !

Elle s’assit donc

VEt s'asseyant en faceM G à lui, elle éleva la voix et pleura.

G et l'enfant cria et pleura. 

16 ...

21,17 VOr, Dieu entendit la voix de l’enfant Gqui venait de l'endroit où il était

et l’ange de Dieu appela Agar du ciel et dit

V, disant :

Qu'as-tu

GQu'y a-t-il

VQue fais-tu [là] Agar ? Ne crains pas

car Dieu a écouté la voix de l’enfant dans le

G Vdu lieu où il est.

17 ...

21,18 Lève-toi, relève l’enfant, prends-le

V et tiens-le

G, saisis-le par la main

car

Vparce que je ferai de lui une grande nation.

18 ...

21,19 Et Dieu lui ouvrit les yeux

et elle vit

V, voyant un puits d’eauG vivealla

Vs'en alla remplir l’outre M Gd’eau et fit

Vdonna à boire Và l’enfant.

19 ...

21,20 Dieu

VEt il fut avec l’enfant

et il grandit, s'établit 

Vqui crût et s'attarda au désertV, et devint tireur à l'arc.

Garcher.

Vun jeune sagittaire.

20 ...

21,21 Il s'établit

Vs'établit dans le désert de Pā’rān

G VPharan

et sa mère prit

Vreçut pour lui une femme de la terre d’Égypte.

21 ...

21,22 À cette même époque, Abimélek

VAbimélec avec Pîkōl

GOchozath, son témoin de mariage, et Phikol

VFicol, chef de son armée, parla ainsi

Vdit à Abraham :

— Dieu est avec toi en tout

Vdans la totalité de  ce que tu fais.

22 ...

21,23 Jure-moi donc ici et maintenant

G maintenant

V par Dieu que tu ne me tromperas pas, ni ma progéniture, ni mes descendants :

Gblesseras pas, ni ma descendance ni nom nom,

Vnuiras pas, et ni à ma postérité, ni à ma souche

comme j'ai été bienveillant envers toi

Gmais que selon la justice que j'ai exercée envers toi

Vmais que selon la miséricorde que j'ai eue pour toi

tu seras bienveillant envers moi et envers cette terre où tu séjournes en étranger.

Gtu [nous] traiteras moi et cette terre où tu es demeuré en étranger.

Vtu en feras [de même] pour moi et cette terre vers laquelle tu t'es tourné en étranger.

23 ...

21,24 Et Abraham dit : — Je le jure !

G VJe jurerai… 

24 ...

21,25 Mais Abraham fit des reproches

VEt il éclata contre  Abimélek

VAbimélec

à cause d’un

Gdes  puits d’eau qu'avaient saisis

Vsoustraits de force les serviteurs d’Abimélek.

Vses serviteurs.

25 ...

21,26 Abimélek

VAbimélech Glui répondit :

— J’ignore qui a fait cela

Vcette chose

Vmais toi-même, tu ne m’en as pas informé

Vme l'as pas indiqué et moi, je n’en entends parler qu’

Vn’en ai pas entendu parler avant aujourd’hui.

26 ...

21,27 Et

VAinsi, Abraham prit des brebis

Gmoutons et des bœufs

Gveaux et les donna à Abimélek

VAbimélec

et ils firent tous deux alliance

Vscellèrent tous deux une alliance.

27 ...

21,28 Abraham mit

Vfit mettre sept jeunes agnelles du troupeau à part

28 ...

21,29 et Abimélek

VAbimélec dit à Abraham

Vlui dit :

Qu’est-ce que

VQue leur veut-on, à ces sept agnelles Gparmi ces moutons  que tu as mises

Vfait mettre à part ?

29 ...

21,30 Il répondit : — Tu accepteras

GEt Abraham dit : — Tu recevras

VMais lui : — Tu recevras, dit-il, de ma main M Gces sept agnelles

que ce soit pour moi un témoignage que j’

V, puisque c'est moi qui ai creusé ce puits.

30 ...

21,31 C’est pourquoi on appela ce lieu « Bᵉ’ēr Šāva »

Gil appela ce lieu « Puits-du-serment »

Von appela ce lieu « Bersabée »

parce que c’est là qu’ils prêtèrent serment tous les deux.

V là, l'un et l'autre jurèrent. 

31 ...

21,32 Ils firent donc alliance

VEt ils s'engagèrent comme alliés à Bersabee

G Vau Puits-du-serment.

Après quoi, Abimélek se leva avec Pikol, chef de son armée, et ils retournèrent vers la terre des Philistins.

GAprès quoi, Abimélek se leva avec Ochozath, son témoin de mariage, et Pikol, chef de son armée, et ils retournèrent vers la terre des Philistins.

V.

32 ...

21,33 VOr, Abimélec se leva avec Ficol, chef de sa troupe, et ils retournèrent vers la terre des Palestiniens.

VQuant à AbrahamV, il planta un tamaris à Bersabée

Garoura au Puits-du-serment

Vbois à Bersabée

et il invoqua là le nom de YHWH

G Vdu Seigneur Dieu de perpétuité.

G Véternel.

33 ...

21,34 Et Abraham séjourna longtemps en étranger dans

V de nombreux jours il fut colon de la terre des Philistins.

34 ...

M G S Sam
V

22,1 Et il arriva après ces choses

que Dieu éprouva Abraham et lui dit :

— Abraham ! GAbraham ! Et il dit : — Me voici.

Après que cela se fut passé

Dieu éprouva Abraham et lui dit :

— Abraham ! Lui répondit : — Me voici.

M G V S Sam

22,2 M G S SamEt [Dieu] V Slui dit : — Lève ton fils, ton unique

Gbien-aimé, que tu aimes

Vchéris, Isaac 

et va-t’en au pays de Moriyya

Gau pays élevé

Vvers la terre de la Vision et offre-le là en holocauste

Gapanage total 

sur une des montagnes que je te dirai.

Vmontrerai.

22,3 Et

VAlors Abraham se leva de bon matin,

G, s'étant levé de bon matin,

V, se levant de nuit,

S devança le matin, sella

Vbâta son âne

et prit deux de ses jeunes hommes avec lui 

Get prit avec lui deux de ses jeunes hommes

Vemmenant avec lui deux jeunes hommes et Isaac, son fils

il fendit

Vet ayant fendu le bois de

Vpour l'holocauste

et il se leva et

Vil s'en alla au lieu que Dieu lui avait dit.

Vprescrit.

22,4 V SOr, le troisième jour, Abraham leva les yeux et

Vles yeux levés, il vit le lieu de loin

22,5 et Abraham

V S dit à ses jeunes hommes

Vjeunes serviteurs

Restez

GAsseyez-vous

VAttendez ici avec

Sprès de l’âne

moi et l’enfant nous irons

Vallant jusque-là, M G S Samet  après nous être prosterné, nous

M G S Samnous nous prosternerons et retournerons à vous.

22,6 Et Abraham

VIl prit Vaussi le bois de l’holocauste et le plaça sur Isaac, son filsV.

et il prit dans sa main

Get il prit avec sa main

VQuant à lui, il portait dans ses mains le feu et le couteau

G Vglaive.

Et ils s’en allèrent

Valors qu'ils continuaient tous deux ensembleM G S Sam.

22,7 M G S SamEt Isaac dit à M G S SamAbraham son père M G S Samet dit : — M V SamMon père ! Et il dit : — Me voici, mon

GEt il dit : — Qu'y-a-t-il,

VMais lui répondit : — Que veux-tu, fils ?

Et il dit :

SEt il lui dit :

V — VoiciV, dit-il, le feu et le bois : où est l'agneau pour

Gla brebis pour

Vla victime de

Sl'agneau de l'holocauste ?

22,8 M G SamEt Abraham dit : — Dieu se pourvoira de l’agneau pour

Samd'un agneau pour 

Gd'une brebis pour

Vde la victime de

Sde l'agneau de l’holocauste, M V S Sammon fils. Et ils allèrent tous deux

VIls continuaient donc ensemble.

22,9 M V S SamEt ils vinrent au lieu que Dieu lui avait dit

Vprésenté

et Abraham

Vil y construisit l’

G Vun autel et disposa

Gmit le bois G Vau-dessus

et lia

Vet ayant lié Isaac, son fils

et le mit

Vil le plaça sur l'autel au-dessus du Vtas de bois.

22,10 Et Abraham

Vil étendit la main et prit le couteau

Vse saisit du glaive pour égorger son

Vimmoler [son] fils.

10 Qui aime son fils plus que moi Mt 10,37
M G S Sam
V

22,11 Et l’ange de YHWH cria vers lui des cieux

Gdu Seigneur l'appela du ciel

Sde Dieu l'appela des cieux et dit :

— Abraham ! Abraham !

Et il dit : — Me voici.

11 Et voici, l’ange du Seigneur cria du ciel, disant :

— Abraham ! Abraham !

Et il répondit : — Me voici.

M G V S Sam

22,12 Et il Vlui dit : — N'étends pas ta main vers le jeune homme

Samsur le jeune homme

G V Ssur l'enfant et ne lui fais rienV.

car maintenant

VMaintenant je sais que tu crains Dieu

Vle Seigneur et que tu n'as pas épargné ton fils, ton unique

G bien-aimé

V unique à cause de moi.

M G S Sam
V

22,13 Et Abraham

Sil leva les yeux et vit et voici un bélier M Samderrière [lui], retenu dans un buisson

Gune plante, un sabek, par ses

Gles cornes

et Abraham alla et prit le bélier et l’offrit en holocauste à la place de

Gd'Isaac son fils.

13 Abraham leva les yeux et vit dans [son] dos un bélier entravé par les cornes entre les ronces. 

Le prenant, il l’offrit en holocauste à la place de son fils.

M G V S Sam

22,14 Et Abraham appela

Vdonna à ce lieu du

Vle nom de « YHWH verra »

G« le Seigneur a vu »

V« le Seigneur voit »

S« le Seigneur verra »

 comme il est dit 

Gen sorte qu'ils disent 

Vdont on dit jusqu'

Sen sorte qu'il est dit aujourd’hui : — En la

Scette montagne de YHWH il sera vu.

Gle Seigneur a été vu.

V Sle Seigneur verra.

22,15 Et

VOr, l’ange de YHWH

G V Sdu Seigneur appela Abraham une seconde fois des cieux

Gdu ciel

Vdu ciel, disant :

22,16 et il dit :

Gen disant :

V — Je l’ai juré par moi-même, déclare YHWH

G V Sdit le Seigneur

parce que tu as fait cette chose et que tu n'as pas épargné ton fils, ton unique

G bien-aimé

V unique G S Samà cause de moi

22,17 M G S Samcertainement je te bénirai et M G S Samcertainement je multiplierai ta semence comme les étoiles des cieux

G Vdu ciel et comme le sable qui est au bord

Vsur le rivage de la mer

et ta semence possédera la porte de ses ennemis.

Vgagnera les portes de ses ennemis.

Ghéritera les villes des adversaires.

Shéritera les terres de ses ennemis. 

22,18 Et en ta semence seront bénies toutes les nations

Stous les peuples de la terre

parce que tu as écouté

G Vobéi à ma voix.

22,19 M G S SamEt Abraham retourna vers ses jeunes hommes

Vjeunes serviteurs

et ils se levèrent et allèrent

Vs'en allèrent ensemble à Bersabée

Gau puits du serment et Abraham habita à Bersabée.

GAbraham habita au puits du serment.

Vil y habita. 

22,20 Et il arriva,

VAinsi, après ces événements, M S Samqu'on annonça à Abraham en disant : — Voici que

Sen lui disant : — Voici que

Vque Milka

VMelcha aussi a enfanté

Vavait engendré des fils à Nachor

VNahor, ton

Vson frère.

22,21 ‘Ôç

GÔx

VHus, son premier-né, et Bûz

GBaux

VBuz, son frère

Qᵉmû'ēl

SQmû'yl

GKamouêl

VCamuël, père d’Aram

G Vdes Syriens

22,22 Keśed

GChasad

VCased et Ḥăzô

G VAzau

Pildāš

GPhaldas

VPheldas et Îdᵉlāp

GIedlaph

VJedlaph et Bᵉtû'ēl.

Set Btû'yl.

Get Bathouêl.

V

22,23 et Bétuel

VBathuel enfanta Ribᵉqâ

S enfanta Ribᵉqa

G enfanta Rebekka

V, de qui est née Rébecca. Ce sont les huit fils que Milka

VMelcha enfanta

Vengendra à Nahor

VNahor, frère d’Abraham.

22,24 Et

VQuant à sa concubine, nommée

Vdu nom de Roma

GReêma, Velle enfanta M G S Samelle aussi, Ṭebaḥ

GTabek

VTabée, Gaḥam

GGaam

VGaom, Taḥaš

GTochos

VThaas et Ma‘ăkāh

SMa‘ăka

GMôcha

VMaaca.

Texte

Genres littéraires

22,16ss Oracle prophétique Au cœur du récit, le serment divin relève du genre littéraire de l’oracle prophétique, comme le souligne l’expression nᵉʼūm yhwh.

Réception

Tradition chrétienne

22,9b l'autel La croix L’Épître de Barnabé relie clairement le sacrifice du Christ sur l’autel de la Croix avec l’autel du sacrifice d’Isaac :

  • Barn. 7,3 « parce qu’il [= le Seigneur] devait offrir lui-même, pour nos péchés, le vase de l’Esprit en sacrifice, afin que la préfiguration (manifestée) en Isaac offert sur l’autel fût accomplie ».

Texte

Vocabulaire

22,3b jeunes hommes Sens C'est-à-dire « serviteurs ». Tradition juive Gn 22,3b

Texte biblique

22,12b et que tu n’as pas épargné Raison Le « et » peut avoir ici un sens explicatif (c’est-à-dire).

Grammaire

22,12b et que tu n’as pas épargné Raison Le « et » peut avoir ici un sens explicatif (« c’est-à-dire »).

22,18a seront bénies Modalité La forme hébraïque wᵉhitbārăkû peut avoir un sens réfléchi ou réciproque.

Procédés littéraires

22,13s Narration : dénouement Abraham accomplit bien l’ordre divin, mais au second sens : sur la montagne il offre un holocauste en présence d’Isaac. Il nomme ensuite le lieu, interprétant ce qu’il y a vécu : « Dieu voit ».

22,15–18 Narration : transformation finale Le narrateur complète le dénouement : Dieu a également été vu d’Abraham, qui reçoit la confirmation de l’abondante bénédiction divine, avant de rentrer à Beersheva, apparemment sans Isaac, fils désormais à distance de son père.

Contexte

Milieux de vie

22,2b holocauste Type de sacrifice où la victime est entièrement consumée sur l’autel (pour le rituel sacerdotal, voir Lv 1). Il correspond à une offrande totale à Dieu. Comparaison des versions Gn 22,2b

Texte

Critique textuelle

22,1 (S) Intertitre Avant le début de la péricope, le Codex Ambrosianus lit « L'épreuve d'Abraham » (nsywnh d’brhm).

Vocabulaire

22,19b Beersheva Étymologie Plusieurs interprétations existent pour le toponyme Beersheva (Repères historiques et géographiques Gn 22,19b) :

Réception

Tradition juive

22,3b jeunes hommes Identification

Intertextualité biblique

22,11–18 Parallèle avec Hagar et Ismaël En Gn 21,15-19, confrontée à la mort imminente de son fils, Hagar est elle aussi témoin de l’intervention du messager divin qui est source de salut pour son fils et elle.

Littérature péritestamentaire

22,1b Dieu éprouva Abraham À l'instigation de Mastéma Jub. 17,15-18,12 reprend le récit biblique d’assez près, mais la mise à l’épreuve d’Abraham résulte d’un défi lancé à Dieu par le prince Mastéma — le diable. Comme dans le livre de Job, Mastéma prétend qu’Abraham préfère son fils à Dieu ; si celui-ci lui demande sa vie en holocauste, on verra bien les limites de sa fidélité apparente. L’enjeu du récit est clairement campé : il s’agit bien de faire la preuve de la fidélité sans faille du patriarche et de l’amour sans partage qu’il porte à son Seigneur.

Tradition juive

22,10 Coopération d'Isaac Dans Tg. Neof. et Tg. Ps.-J., le récit insiste dès lors non seulement sur la foi d’Abraham, mais aussi sur la disponibilité volontaire d’Isaac qui demande à être lié pour éviter qu’en se débattant, il se cogne et ne devienne une victime indigne de Dieu.

22,12

Texte anti-sacrificiel

Sacrifice réel

  • Selon Yal. 1,107, le sacrifice d’Isaac est monté en « parfum d’apaisement » ; il a donc été réel, même si le sang n’est pas indiqué. « À la place de son fils » (v.13b) peut se comprendre « après ».

Tradition chrétienne

22,2c sur une des montagnes Montée spirituelle Pour Origène, l’ascension de la montagne par Abraham symbolise le pèlerinage spirituel continu du croyant vers le ciel :

  • Origène Hom. Gen. 8,3 « [Abraham] est donc envoyé “dans la région élevée” ; mais, à un patriarche qui va accomplir pour le Seigneur une si grande action, il ne suffit pas d’une région élevée ; ordre lui est donné de gravir encore la montagne, c’est-à-dire, soulevé par la foi, de délaisser les choses terrestres et monter vers celles d’en haut. »

22,4 le troisième jour

Le sceau baptismal

Clément d’Alexandrie relie cette expression au sacrement du baptême :

  • Clément d’Alexandrie Strom. 5,73,2 « Les trois jours pourraient être aussi le signe du sceau baptismal, par lequel on croit à celui qui est réellement Dieu. »

Topos biblique

Origène, pour sa part, parle en termes plus larges et applique l’expression à toutes sortes de mystères divins en général :

  • Origène Hom. Gen. 8,4 « Le troisième jour est en tout temps particulièrement propice aux mystères : lorsque le peuple fut sorti d’Égypte, c’est le troisième jour qu’il offre un sacrifice à Dieu et le troisième jour qu’il se purifie ; la résurrection du Seigneur a lieu le troisième jour. »

22,10a Disposition d'Abraham Cyrille d’Alexandrie explique l’attitude d’Abraham dans le moment crucial du récit et souligne son entière confiance en Dieu :

  • Cyrille d’Alexandrie Glaph. Gen. 3 « Abraham était dans de telles dispositions, et son esprit était si prêt, qu’il ne tint pas compte de son amour pour son fils et n’hésita pas à le sacrifier. Et ce qu’il y a de plus admirable, c’est qu’il ne cessa pas d’espérer qu’en ce même fils il deviendrait le père d’une multitude de nations ; car il savait que Dieu ne peut mentir. Il conduisit donc son fils au sacrifice, ne doutant pas de la vérité des promesses, s’en remettant à Dieu de la manière dont celui-ci tiendrait son serment. »

22,12a ne lui fais rien Révélation du dessein divin À ce moment de l’intrigue, les intentions de Dieu sont révélées et Pierre Chrysologue commente :

  • Pierre Chrysologue Serm. 1 « La droite du père fut arrêtée, le glaive du père fut détourné, car Dieu ne cherchait pas la mort du fils mais éprouvait la charité du père : il n’attendait pas le sang du fils, alors que toute la victime consistait dans l’amour du père. »

22,13a un bélier retenu dans un buisson Le Christ couronné d'épines Isaac n’est pas le seul type préfigurant le Christ, pour Augustin il en est de même du bélier :

  • Augustin d’Hippone Civ. 16,32,1 « Enfin, parce qu’Isaac ne devait pas être immolé, après que son père fut empêché de le frapper, qui était donc ce bélier dont l’immolation acheva le sacrifice par l’effusion d’un sang symbolique ? Il était retenu par les cornes dans un buisson quand Abraham le vit. Que figurait-il donc, sinon Jésus couronné par les épines des Juifs avant d’être immolé. »

Théologie

22,17s Promesse de postérité et de bénédiction Ce passage est une étape importante dans l’accomplissement de la promesse d’une descendance, qui domine les récits patriarcaux. Isaac est pleinement rendu à son père et désormais celui-ci a l’assurance d’un futur heureux pour la postérité d’Isaac. Plus largement, toutes les nations de la terre deviennent les bénéficiaires de la bénédiction divine accordée à Abraham. C’est pourquoi les effets de l’obéissance d’Abraham transcendent les frontières limitées d’Israël et revêtent une signification universelle, qui sera reprise par les auteurs de l’AT :

  • CEC 1819 « L’espérance chrétienne reprend et accomplit l’espérance du peuple élu qui trouve son origine et son modèle dans l’espérance d’Abraham comblé en Isaac des promesses de Dieu et purifié par l’épreuve du sacrifice (cf. Gn 17,4-8 ; 22,1-18). "Espérant contre toute espérance, il crut et devint ainsi père d’une multitude de peuples" (Rm 4,18). »

Texte

Procédés littéraires

22,14 YHWH verra + YHWH il serra vu — Jeu de mots Le jeu sur deux formes du verbe « voir » (actif et passif) dans la nomination du lieu au v.14 met en évidence l’essentiel de ce qui s’est passé : une rencontre, un échange de regard entre Abraham et le Seigneur.

Contexte

Textes anciens

22,1–19 Caractérisation individuelle des personnages : nouveauté dans le cadre des littératures antiques Le fameux livre d’Erich Auerbach, Mimesis (1946), s’ouvre sur une comparaison de la scène de reconnaissance d’Ulysse (Homère Od. chant 19) avec l’épisode de la Genèse qui nous occupe :

  • Le texte d’Homère offre une description détaillée, centrée sur les circonstances externes du récit, où tous les événements occupent un premier plan et le caractère des personnages semble prédéterminé.
  • Inversement, le style de Gn 22, avare de circonstances, laisse dans l’ombre de nombreux éléments psychologiques qui permettent de deviner un arrière-plan, une épaisseur temporelle des actants. Tout favorise l’émergence de sens symboliques ajoutés au sens littéral des événements racontés dans le récit de Gn 22. Ces caractères entraînent la nécessité d’interpréter, ce qu’ont fait de nombreuses œuvres littéraires, picturales et musicales. Littérature Gn 22,1–19

Texte

Procédés littéraires

22,16a.19b je l'ai juré + à Beersheva — Jeu de mots Après le serment de Dieu (v.16a nišba‘tî), l’insistance sur le nom du lieu où Abraham va demeurer (v.19b bᵉ’ēr šāba‘ ; cf. G « puits du serment ») souligne un jeu de mots. Vocabulaire Gn 22,19b

Réception

Tradition chrétienne

22,1–19 Typologie Dès l’Épître de Barnabé, la tradition ancienne a lu dans ce récit une illustration de l’obéissance d’Abraham et de sa puissance prophétique, mais aussi et surtout l’anticipation de la Passion du Christ préfigurée par le sacrifice d’Isaac. Les Pères de l’Église concentrent leur attention sur différents aspects de la réalité théologique préfigurés par les types que sont Abraham et Isaac.

Abraham

Irénée souligne deux qualités importantes d’Abraham.

  • D’abord, il fut un homme de foi : Irénée de Lyon Haer. 4,5,5 « Par le Verbe, Abraham avait été instruit sur Dieu, et il crut en lui : aussi cela lui fut-il imputé à justice par le Seigneur, car c’est la foi en Dieu qui justifie l’homme. »
  • En second lieu, Abraham fut un prophète et vit dans le sacrifice de son fils le sacrifice à venir du Fils de Dieu : Irénée de Lyon Epid. 44 « Et comme Abraham était prophète, il voyait ce qui devait arriver dans l’avenir, à savoir que, revêtu de la forme humaine, le Fils de Dieu, dans un premier temps, s’entretiendrait avec les hommes. »

Le parallèle entre Abraham et Dieu est un thème bien développé par Éphrem :

  • Éphrem le Syrien Comm. Gen. 7,9-13 « En ce sens que Abraham a donné tout son amour à Dieu à travers son fils, Dieu a donné tout son amour à travers son premier-né. Et parce que Abraham a souffert, pour l’amour de Dieu, pendant qu’il sacrifiait son fils, Dieu a supporté les transgressions de la tribu d’Abraham pour l’amour d’Abraham. »

Isaac

  • Clément d'Alexandrie Paed. 1,5,23,1-2 « Isaac […] est le type du Seigneur : enfant en tant que fils — puisqu’il était le fils d’Abraham comme le Christ est le fils de Dieu — victime comme le Seigneur. Mais il ne fut pas consumé, comme le fut le Seigneur. Isaac se borna à porter le bois du sacrifice, comme le Seigneur celui de la croix. […] Non seulement, donc, [Isaac] réservait comme c’est naturel le premier rang de la souffrance au Logos, mais de plus, en n’étant pas immolé, il désigne symboliquement la divinité du Seigneur. »

→L’agonie de Jésus et la ligature d’Isaac

Texte

Grammaire

22,3a s’étant levé (G) Usage aspectuel du participe Suivant les préférences de la syntaxe grecque, G remplace souvent par un participe le temps narratif de certains verbes de M : v.3-5.9.13.19.

Procédés littéraires

22,1b que Dieu éprouva Abraham Incise entre la protase temporelle et l’apodose qui commence au v.2.

Vocabulaire

22,12b épargné ... pour son profit (lexique économique) Le verbe hébreu ḥśk a le sens économique de mettre de côté pour soi.

22,12a N'étends pas ta main Connotation agressive Litt. « N'envoie pas ta main ». L’expression peut servir à décrire une agression.

Procédés littéraires

22,1–19 Structuration du texte : répétitions et refrains La série prendre—aller—voir—holocauste se répète à plusieurs reprises dans le récit : dès le v.2, c’est l’ordre donné par Dieu à Abraham (en lisant Moriyya comme « vision »), programme ensuite réalisé, ce que souligne la répétition des mots (cinq fois chacun après le v.2).

Avec le refrain « ils allèrent… ensemble » aux v.6.8.19, les dix occurrences du mot « fils » et des noms divins (cinq fois « Seigneur » et cinq fois « Dieu ») et les deux appels semblables aux v.2.11 (avec un écho au v.15), ces répétitions contribuent à l’unité du texte et servent de repères pour sa structuration.

Contexte

Repères historiques et géographiques

22,19b Beersheva Identification Le lieu est un endroit bien identifié, au nord du désert de Juda, et bien connu des traditions patriarcales (Gn 21,14-33 ; 26,23.33 ; 28,10 ; 46,1.5). Vocabulaire Gn 22,19b

Réception

Tradition juive

22,13a cornes Immobilisation en vue de conversion

  • Yal. 1,101 : Israël est toujours dans le péché, mais grâce aux cornes, comme le bélier, il est embrouillé, immobilisé, puis sauvé et présenté à Dieu (jeu de mots sur « corne de salut » ; cf. Ps 18,3 ; Lc 1,69).

Mystique

22,2c.14b une des montagnes + la montagne — Lieu de révélation La montagne est un lieu privilégié pour la rencontre de Dieu : mont Moriyya, mont Sinaï, mont du Temple, mont de la Tentation, mont de la Transfiguration, Golgotha, mont de l’Ascension. La tradition carmélitaine voit dans l’ascension au mont Carmel un symbole de la vie spirituelle, mais non exclusif :

  • Jean de la Croix Subida 3,42,5-6 : Parmi les « lieux propres à la dévotion » figurent « ceux dont Dieu a fait choix pour y être invoqué et servi. Tel est le mont Sinaï, où il donna la loi à Moïse (Ex 24,12) ; le lieu qu’il désigna lui-même à Abraham pour y sacrifier son fils (Gn 22,2) […]. Pour quel motif Dieu fit-il choix de ces lieux, de préférence à d’autres, pour y recevoir des louanges ? Lui seul le sait. Ce dont nous devons être persuadés, c’est qu’il agit ainsi pour notre avantage et parce qu’il veut exaucer là nos prières, comme partout où nous l’implorons avec foi. »

Psychologie

22,1–19

Un épisode aussi présent que refoulé

L'épisode hante la réflexion des fondateurs de la psychologie des profondeurs au point d'y être refoulé, ou théorisé sans être nommé.

  • Freud Totem : Dans l'analyse des fondements du monothéisme, l'accent porte sur la figure du fils sacrifiant son père, en lien avec sa conception du complexe d'Œdipe (bien que la légende grecque commence avec l'attentat de Laïus contre la vie de son fils). L'exemple d'Abraham et Isaac aurait pu apporter de sérieux correctifs à cette thèse centrale mais dans sa réflexion sur le judaïsme, Freud ne s'y attache guère : il se concentre sur Moïse (Freud Moses). Abraham demeure un angle mort dans la réflexion freudienne.
  • Jung Sacrifice : Le sacrifice est une pulsion venue de l'inconscient, ce qui rend l'acte de sacrifier psychologiquement impossible : l'ego ne peut pas décider de faire un sacrifice. Quand un acte de sacrifice a lieu, c'est le symptôme de processus de transformation en cours dans l'inconscient, mais dont les contenus et les sujets restent inconnus. En tant que tel, du fait qu'on ne peut faire dériver l'inconscient de la sphère du conscient, le sacrifice échappe donc à une intelligibilité maîtrisée par l'ego (dimension de mystère). Le cœur du sacrifice, consiste pour le conscient à remettre ses pouvoirs et ses possessions à l'inconscient. Le sacrifice est ainsi un symbole de la thérapie : tandis que le moi conscient ou ego ne peut/veut pas s'y soumettre, elle a lieu, et permet au Moi transcendantal (avec sa composante inconsciente) d'imposer à l'ego le renoncement à ses prétentions, au nom d'une autorité plus grande qui permet à ce Moi de grandir. Tout progrès du Moi requiert que l'ego se sacrifie à quelque chose de plus grand que lui. Ne peut-on pas lire en filigrane une interprétation allégorique du sacrifice d'Abraham ? 

Cf. Spitzer Anais N., « Abraham and Isaac », dans Adams Leeming David, Wood Madden Kathryn, Marlan Stanton (éd.), Encyclopedia of Psychology and Religion: L-Z (Springer Reference), London : Springer, 2010, 1-3.

Exploration de la complexité de la relation entre parents et enfants

De nombreux auteurs contemporains font appel aux sciences humaines pour relire le récit de la ligature d’Isaac. En voici quelques exemples :

  • Marie Balmary (1986) lit le passage en fonction de son expérience psychanalytique clinique. Elle partage avec Rachi (Tradition juive Gn 22,2b) la conviction que Dieu ne veut pas le sacrifice d’Isaac. Il veut seulement que le fils d’Abraham soit « élevé » sur la montagne en sacrifice symbolique. Abraham ne comprend pas la demande divine par impossibilité de considérer Isaac comme une personne individuelle : inconsciemment il refuserait que son fils pût un jour lui ravir sa place et vivre pour lui-même. Pour lui, sacrifier son fils signifie tuer Isaac. Dieu vient libérer Abraham de cette limite psychologique en lui montrant la possibilité d’un sacrifice de substitution : le bélier mâle, symbole de la paternité d’Abraham. C’est sa paternité mal comprise qui doit être sacrifiée, pour qu’Isaac devienne un homme adulte et libre.
  • Poussant plus loin la rêverie anthropologique, Jo Cheryl Exum (1985) développe à la manière féministe une ligne d’interprétation présente dans Tanḥ. (Par. Uayira 23). Elle s’interroge sur l’absence de Sara : la matriarche a perdu son fils chéri au profit de son père, et sa propre mort a peut-être bien été causée par ce qui est arrivé à Isaac au mont Moriyya.
  • De même pour Phyllis Trible (1991), le récit serait gros d’une rhétorique divine visant à guérir les parents de toute possessivité idolâtrique vis-à-vis de leurs enfants. Abraham et Sara ainsi libérés inviteraient le lecteur moderne à s’approprier le récit en toute liberté, rendant à Dieu la place d’honneur dans l’effort interprétatif.

Texte

Critique textuelle

22,6 (S) Omission Le Codex Ambrosianus (7a1), probablement par haplographie de « et il prit », a seulement cette leçon brève : « Et il prit dans sa main le feu et le couteau et ils s'en allèrent tous deux ensemble ».

Procédés littéraires

22,17b possédera la porte Lexème métaphorique militaire L'expression désigne une victoire, la porte étant le point stratégique essentiel d’une ville (Comparaison des versions Gn 22,17b). Le verbe « posséder » peut être traduit également « hériter », sens qui atténue la connotation guerrière, l’expression signifiant alors « recevoir une place stratégique au cœur de l’ennemi ».

Réception

Intertextualité biblique

22,18a en ta semence seront bénies toutes les nations de la terre Accomplissement néotestamentaire : l'adoption des gentils Phrase citée en Ac 3,25 et Ga 3,8-9 à propos de l’ouverture aux nations de l’alliance avec Abraham.

Tradition chrétienne

22,14a le Seigneur voit (V) spirituellement Origène continue son exégèse spirituelle de Gn 22 et explique que la dernière partie du récit contient, en même temps, la clé de sa propre compréhension : 

  • Origène Hom. Gen. 8,10 « La voie de l’intelligence spirituelle est manifestement ouverte. Car tous ces actes aboutissent à la vision. Et de fait il est dit que “le Seigneur voit”. Mais la vision que le Seigneur voit est spirituelle, pour que toi aussi tu envisages spirituellement les choses de l’Écriture. »

Propositions de lecture

22,1–19 Le « sacrifice d'Abraham » et la « ligature d'Isaac »

Réception traditionnelle

Sens cultuel

Les principales traditions d’interprétation juives et chrétiennes de ce récit y lisent un enseignement sur le sacrifice et sur le culte. Les Écritures elles-mêmes identifient le mont Moriyya avec le mont du Temple à Jérusalem, enrichissant ainsi la résonance historique et théologique de ce lieu et du culte qui y est rendu et le légitimant par sa continuité avec la justice d’Abraham.

Importance pour les trois monothéismes

Dans les trois traditions, le récit est le support de célébrations liturgiques importantes (Liturgie Gn 22,1–19 ; Islam Gn 22,1–19 : Rite).

Sens moral et anthropologique

Lu isolément, le récit souligne l’obéissance d’Abraham qui accepte de sacrifier son fils. Dans le contexte du cycle d’Abraham, c’est sa foi qui est mise en relief, puisqu’il a reçu la promesse d’une vaste postérité malgré la stérilité de Sara : Dieu est plus grand que tout obstacle. En référence à la prohibition biblique des sacrifices d’enfants (Intertextualité biblique Gn 22,10 ; Tradition juive Gn 22,12) et à l’obligation de racheter le premier-né, le récit devient une pédagogie divine montrant qu’au-delà de toute loi, les droits de Dieu restent absolus, même au regard des liens familiaux (Théologie Gn 22,1–19). Plus généralement, il rappelle le fait que le père n’est pas propriétaire de ses enfants : dès Gn 2,24, l’homme sait qu’il doit quitter son père et sa mère pour s’attacher à sa femme.

Même s’ils sont éloignés des lectures théocentriques, les modernes continuent de lire ce récit, dont ils explorent les dimensions anthropologiques et morales (Littérature Gn 22,1–19). Époque contemporaine : preuve que l’histoire d’Abraham et d’Isaac parle à toutes les époques, comme en témoigne sa très riche réception artistique, dont on ne peut donner ici qu’un aperçu : Arts visuels Gn 22,1–19 ; Musique Gn 22,1–19.

Structure

Le texte est composé de deux séquences :

V.1-14

Les v.1-14 présentent un récit très unifié grâce à une structure concentrique (Procédés littéraires Gn 22,1–19) et à la répétition régulière d’une même séquence de termes (prendre, aller, voir, holocauste) qui, au v.2, précise le programme donné à Abraham par Dieu, un programme effectivement réalisé au v.13, quand il offre en holocauste le bélier qu’il a trouvé. Il présente trois sections :

  • La première (v.1-5) et la troisième (v.11-14) comportent chacune trois segments parallèles (appel dialogué et ordre divin ; actions d’Abraham ; parole d’Abraham sur le « lieu »).
  • Le centre (v.6-10) est disposé en trois segments séparés par le refrain « et ils (s’en) allèrent tous deux ensemble » laissant au cœur le bref dialogue entre le père et son fils.
V.15-19

L’oracle final des v.15-19 (Genres littéraires Gn 22,16ss) est inattendu au plan narratif, mais il est bien chevillé au récit. Il a une structure concentrique autour de la bénédiction solennelle (v.17-18a) encadrée par sa motivation (v.16b et v.18b).

Hypothèses sur l’histoire du texte

Les commentateurs identifient d’ordinaire la narration des v.1-14.19 comme un récit de fondation d’un sanctuaire (voir la pointe au v.14), réutilisé par la suite à condamner les sacrifices humains en Israël. Dans son contexte actuel, il souligne clairement la foi d’Abraham.

Les v.15-18 auraient été ajoutés au récit pour renforcer l’unité de l’ensemble du cycle d’Abraham au moyen de la thématique de la bénédiction (Gn 12,2-3 ; 14,19-20 ; 17,16.20 ; 18,18 ; 24,1.27.31.48.60).

Intertextualité biblique

22,1–19 Abraham, type du croyant

Dans l'AT

Si 44,20 insiste sur la fidélité d’Abraham dans l’épreuve. Selon Sg 10,5 la Sagesse le « conserva sans reproche devant Dieu et le garda fort contre sa tendresse pour son enfant ».

Dans le NT

Le NT souligne de même la foi sans faille du patriarche : pour He 11,17-19, c’est la foi au Dieu dont la puissance donne la vie aux morts : « Par la foi, Abraham, mis à l’épreuve, a offert Isaac, et c’est son fils unique qu’il offrait en sacrifice, lui qui était le dépositaire des promesses, lui à qui il avait été dit : C’est par Isaac que tu auras une postérité. Dieu, pensait-il, est capable même de ressusciter les morts ; c’est pour cela qu’il recouvra son fils, et ce fut un symbole ». Pour Jc 2,21, Abraham est le modèle de la foi corroborée par les œuvres.

Tradition juive

22,1a ces choses = une querelle entre Ismaël et Isaac Gen. Rab. 55,4 et Tg. Ps.-J. expliquent la demande divine par une dispute entre Ismaël et Isaac. Le premier se dit plus juste car il a volontairement accepté la circoncision à l’âge de 13 ans, alors qu’Isaac, circoncis à 8 jours, aurait peut-être refusé de l’être s’il avait eu l’âge de raison. Et Isaac de répondre : « Voici qu’à ce jour j’ai trente-sept ans, et si le Saint, béni soit-Il, me demandait tous mes membres, je ne (les lui) refuserais pas. » Dieu le prend au mot et adresse alors à Abraham sa requête. Islam Gn 22,1–19

22,1b Dieu éprouva Abraham

Épreuve des justes

  • Gen. Rab. 45,2 « Rabbi Yonathan dit : "Un potier ne teste jamais des cruches défectueuses, il ne pourrait les tapoter une seule fois sans les briser. Que teste-t-il donc ? Des cruches de qualité, il peut les frapper sans les briser. De même, le Saint, béni soit-Il, n’éprouve pas les scélérats mais les justes […]." Rabbi Yossé bar Hanina dit : "Quand un linier est sûr de la qualité de son lin, [il sait que] plus il le bat plus le lin se bonifie, plus il le frappe plus il devient luisant." »

Comme Job

Selon Rachi Comm. Tora, l’ordre divin s'est fait puisque Satan avait dénoncé Abraham pour n’avoir jamais offert de sacrifice.

Liturgie

22,1–19 Usages de la péricope

Dans la liturgie synagogale

On lit Gn 22 comme parasha le second jour de la fête de Rosh Hashana (le Nouvel An juif, au début de l’automne), qui annonce le jugement de Dieu et appelle au repentir. On y prie en ces termes :

  • « Notre Père et Dieu de nos pères, accorde-nous un souvenir favorable, et du haut des cieux aie pour nous des pensées de salut et de miséricorde. Souviens-toi, en notre faveur, ô Éternel, notre Dieu, de l’alliance et du serment que tu as jurés à notre père Abraham sur le mont Moriyya. Considère la scène de l’Aqéda, alors qu’Abraham lia son fils Isaac sur l’autel, étouffant sa tendresse pour faire la volonté d’un cœur sincère. Puisse de même ta miséricorde étouffer ton courroux envers nous et que, par ton immense bonté, ta colère s’éloigne de ton peuple, de ta ville et de ton héritage ! Souviens-toi aujourd’hui du sacrifice d’Isaac, en faveur de sa postérité. Loué sois-tu, Éternel, qui te souviens de l’Alliance. »

Dans le rite séfardite, outre l'usage précédent, 

  • une paraphrase versifiée de ce texte, intitulée Gnet changnaré ratson dans la translittération séfardite, se chante le matin du premier jour de la fête ; 
  • la péricope est en outre récitée quotidiennement dans l'office du matin au début de la prière publique.

Dans la liturgie latine : typologie christologique

On lit la ligature d'Isaac durant la liturgie de la résurrection le samedi saint, au moins depuis l'an 1570. Depuis 1951, date du rétablissement de la vigile pascale, l’Aqéda est la deuxième d’une série de sept lectures de l’AT (Gn 1,1-2,2 ; 22,1-13.15-18 ; Ex 14,15-15,1a ; Is 54,5-14 ; 55,1-11 ; Ba 3,9-15.32-4,4 ; Ez 36,16-17a.18-28). Celles-ci représentent les interventions de Dieu dans l’histoire depuis la création, culminant dans les lectures de la célébration eucharistique : l’épître (Rm 6,3b-11, sur le baptême dans la mort et la résurrection du Christ) et l’évangile (un récit synoptique sur la découverte du tombeau vide et l'annonce de la résurrection).

Théologie

22,1b Dieu éprouva Abraham Pédagogie divine Souvent dans la Bible, Dieu met à l’épreuve les hommes qu’il aime :

  • Le premier couple humain a été mis à l’épreuve et a échoué (Gn 2-3).
  • Israël tout au long de son histoire fut souvent soumis au jugement, en particulier lors de son exode à travers le désert vers la Terre promise (Ex 16).
  • Job a dû faire face à la perte de sa famille et de ses propriétés avant de tout regagner plus tard quand il réussit l’épreuve (Jb 1-2 ; 42).

Ainsi Dieu n’hésite pas à éprouver l’obéissance de son peuple et la crainte qu’il lui doit. Si Abraham n’avait pas réussi l’épreuve, il n’aurait pas joué son rôle exemplaire dans l’histoire du salut. Théologie Gn 22,17s

Islam

22,1–19

Récit

Le Coran évoque le sacrifice d’Abraham, en poursuivant la ligne d’interprétation midrashique selon laquelle Abraham n’a pas bien compris l’ordre de Dieu (Tradition juive Gn 22,2b). C’est en songe qu’Abraham se voit immoler son fils :

  • Coran sour. 37,102-109 « Quand l’enfant eut atteint [l’âge] d’aller avec son père, celui-ci dit : ― Mon cher fils ! en vérité, je me vois en songe, en train de t’immoler ! Considère ce que tu en penses ! — Mon cher père, répondit-il, fais ce qui t’est ordonné ! Tu me trouveras, s’il plaît à Allah, parmi les Constants. Or quand ils eurent prononcé le salâm et qu’il eut placé l’enfant front contre terre, Nous lui criâmes : ― Abraham ! tu as cru en ton rêve ! En vérité, c’est là l’épreuve évidente ! Nous le libérâmes contre un sacrifice solennel et Nous le perpétuâmes parmi les Modernes. Salut sur Abraham ! »

On ne précise pas quel est le fils dont il est question (Tradition juive Gn 22,2a) : Isaac, Ismaël et Jacob (fils d’Isaac) sont souvent mentionnés dans des récits. Tabari Jāmi‘ al-bayān (à la fin du 9e s.) penchait pour Isaac, mais les traditions populaires ont fini par choisir Ismaël, fils premier-né d’Abraham et vénéré comme l’ancêtre des Arabes. 

Rite

L’islam célèbre le sacrifice d’Abraham avec la fête de l’Aïd al-Adha (« la fête du mouton ») ou Aïd el-Kebir (« la grande fête ») qui clôture le pèlerinage à La Mecque, le dixième jour du dhû al-hijja (dernier mois lunaire du calendrier musulman). À La Mecque même, et partout dans le monde, on immole un animal en souvenir du geste de soumission d’Abraham, lors de l’épisode du « non-sacrifice » du fils. La bête immolée est ensuite consommée par les membres de la famille et les amis. Une part est réservée pour le partage avec les plus défavorisés. Cette fête clôt le cycle annuel des fêtes de l’Islam.

Littérature

22,1–19 Les auteurs littéraires exploitent le pathos du récit : chaque époque a su y puiser. En voici quelques exemples parmi les plus célèbres.

Moyen Âge

La ligature d’Isaac revient souvent dans les mystères du Moyen Âge, autant en français qu’en anglais. Ils supposent la typologie d’Isaac comme figure du sacrifice de Jésus sur la Croix et dans l’Eucharistie et s’intéressent surtout au fils, avec l’accent sur ses sentiments et sur son obéissance envers son père jusqu’à la mort.

Renaissance

Théodore de Bèze, disciple de Calvin, écrivit son drame Abraham sacrifiant (1550) sous la forme d’un mystère. Abraham y fait figure tragique, profondément émotive et hésitante, pour savoir s’il doit suivre l’ordre de Dieu ou préserver la vie de son fils bien-aimé. Finalement, l’acte de foi prévaut. La tragédie de de Bèze, qui met l’accent sur la foi d’Abraham au détriment d’une interprétation christologique de la personne d’Isaac, compare le catholicisme au protestantisme, et promeut ce dernier.

Le poète catholique anglais Richard Crashaw (ca. 1613-1649) revient à la typologie antérieure : Isaac et le bélier préfigurent le Christ dans l’Eucharistie (Lauda Sion Salvatorem, str. 12).

Époque moderne

La perplexité d’Abraham est traitée dans la littérature moderne anglaise de plusieurs façons : comique par Henry Fielding dans Joseph Andrews (1742) ; ironique par William Blake dans The Book of Urizen (1794) ; tragique par Thomas Hardy dans Tess of the d’Urbervilles (1891).

Époque contemporaine

Symbole de la destinée juive
  • Halpern Leivick (1888–1962), poète de langue yiddish, commente en 1956 un souvenir d’enfance et réinterprète l’Aqéda à travers le prisme de la Shoa : « Lorsque j’étais enfant, mon Rebbe me racontait l’histoire du sacrifice d’Isaac — Rebbe, disais-je angoissé, et si l’Ange était arrivé en retard ? — Sache, mon fils, répliquait le Rebbe, que l’Ange n’arrive jamais en retard ». Leivick ajoute : « Aujourd’hui nous savons que six millions de fois l’Ange est arrivé en retard » (rapporté par André Neher, Dans tes portes, Jérusalem, Paris : Michel, 1972).
Interprétations « anthropologiques »

De nombreux auteurs contemporains font appel aux sciences humaines pour relire le récit de la ligature d’Isaac : Psychologie Gn 22,1–19.

Philosophie

22,1–19 Abraham « chevalier de la foi », ou : L’articulation de la foi à l’éthique

  • Kierkegaard Frygt  (1843), insiste sur le rôle de la foi dans une relation entre une personne et Dieu. Il est convaincu que le christianisme contemporain a troqué une foi vivante contre une vertu éthique conventionnelle, et a ainsi perdu ce qui est au coeur de la Bonne Nouvelle. Il souligne l’antithèse entre foi et éthique : en sacrifiant Isaac dans la crainte et le tremblement, Abraham transcende les limites de l’éthique et devient un « chevalier de la foi ». Dieu a une autorité supérieure, alors que l’existence et la pensée humaines sont toujours limitées, contrairement à la philosophie de Hegel. L’homme est ainsi invité à mettre au centre de sa vie la foi et la révélation.

Texte

Vocabulaire

22,2b Moriyya Sens incertain Outre une dérivation du verbe r’h « voir » (Comparaison des versions Gn 22,2b), est également possible une dérivation des racines yr’ « craindre » ou yrh « enseigner ». Tradition juive Gn 22,2b

Grammaire

22,3c.6a.7c.9bd le bois Litt. « les bois », au pluriel Dans toutes les versions le mot est au pluriel, ce qui ne peut pas être rendu en français.

Procédés littéraires

22,2b offre-le là en holocauste (M) Narration : suspense En M, l’insertion de l’adverbe de lieu coupe en deux l’expression consacrée « offrir en holocauste » (utilisée aux v.2b.13b) et autorise une double lecture.

Ambiguïté de l'ordre donné

L'ordre portant sur le don de Dieu au patriarche est ambivalent. Abraham est invité :

  • soit à faire monter Isaac en holocauste (seul sens possible dans G),
  • soit à le faire monter sur la montagne (« là ») pour offrir avec lui un holocauste.

Caractérisation d'Abraham : non seulement obéissant, mais intelligent ?

L’ordre donné par Dieu à Abraham est une mise à l’épreuve, mais le premier intéressé l’ignore. La question est de savoir en quel sens Abraham comprendra cet ordre ambigu. Cela reste indécis jusqu’au v.9 où, en l’absence de bête, Abraham s’apprête à immoler Isaac.

Contexte

Repères historiques et géographiques

22,2b Moriyya Localisation ? Dans le cadre du cycle d’Abraham et de Gn, le lieu n’est pas situable.

À Jérusalem

Le mont Moriyya a été identifié avec le mont du Temple de Jérusalem (2Ch 3,1), identification suivie par les traditions juives et chrétiennes (et aussi dans l’Islam). Pour certains commentateurs musulmans, l’actuelle coupole du Dôme du Rocher à Jérusalem s’élèverait à l’endroit où Abraham prépara l’autel du sacrifice. Après La Mecque et Médine, c’est le troisième lieu saint des musulmans. Pour les juifs et les musulmans, ce lieu est véritablement sacré. Pour les chrétiens, il représente une étape de pèlerinage.

En Samarie

Les Samaritains situent l'épisode du sacrifice d'Isaac sur le mont Garizim (Repères historiques et géographiques Dt 27,12).

Réception

Comparaison des versions

22,2b de Moriyya : M Sam S | V : de la Vision | G : élevé — Jeu de mots

  • α′, σ′ et V comprennent à partir du verbe r’h « voir » (α′ : tên kataphanê « qui est visible/claire » ; σ′ : tês optasias ; V: (terram) visionis). Jérôme Quaest. Gen. (CCSL 72,26) témoigne également d’une ancienne interprétation juive de ce mot au sens factitif comme « ce qui éclaire et brille » (inluminans interpretatur et lucens) en lien avec la tradition qui plaçait le Temple sur ce mont. Au v.14 M, Sam, S et V jouent sur le verbe « voir » à deux formes pour expliquer le nom du lieu. Repères historiques et géographiques Gn 22,2b
  • G : tên hupsêlên. Au v.14 G a de même deux fois le verbe « voir », mais sans que cela produise le jeu de mots explicatif du toponyme.

22,2b holocauste : M | G : apanage total Pour M : ‘ōlâ « holocauste » (litt. « montée »), G préfère ici, à holokautôma ou holokautôsis (« holocauste »), un mot plus rare, holokarpôsis « apanage total », qui oriente davantage vers celui qui reçoit et jouit du bien donné que vers le sort de la victime. Milieux de vie Gn 22,2b

Intertextualité biblique

22,2s.16ss Liens familiaux En Gn 12,1-4, Abraham est appelé à quitter son père en vue de recevoir la bénédiction divine, et répond positivement à l’appel du Seigneur : plusieurs rappels verbaux assurent le lien aux v.2-3 et v.16-18.

22,2b offre-le là en holocauste Motif : le détachement par rapport aux enfants En Gn 21, sur invitation de Dieu, Abraham laisse aller Ismaël son premier-né (Gn 21,12-14). Ailleurs, en Gn, plusieurs pères doivent ainsi laisser aller leurs fils vers leur destin propre, selon la parole de Gn 2,24 : « l’homme quittera son père et sa mère » (p. ex. Gn 28,1-4 ; 37,12-14 ; 43,1-14 ; et aussi Gn 24,54-59 ; 31,43-32,1 ; 38,11.26 ; 48,5-6). L’attitude d’Abraham est exemplaire pour le chrétien : « Qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi » (Mt 10,37).

22,4 Le troisième jour Topos

Tradition juive

22,2b Moriyya

Étymologie

  • Gen. Rab. 45,7 « Rabbi Hiya Rabba et Rabbi Yannaï. L’un dit: [“Moria, c’est le lieu] d’où l’enseignement jaillit vers le monde." L’autre dit : "C’est le lieu d’où la crainte jaillit vers le monde." […] L’un dit : "C’est le lieu d’où la lumière jaillit vers le monde." »

À Jérusalem

  • Tg. Ps.-J. lit « du culte » (au lieu de « de Moriyya »), ce qui désigne le Temple de Jérusalem.

Tradition chrétienne

22,2b ton fils ton bien-aimé, que tu aimes (G) Aggravation de la demande Origène attire l’attention sur l’immense difficulté de la demande divine qui renforce encore la solidité de la foi d’Abraham :

  • Origène Hom. Gen. 8,2 « Comme s’il ne lui avait pas suffi, en effet, de dire “fils”, il ajoute “bien aimé”. Soit ! Pourquoi ajouter encore : “Celui que tu chéris” ? Tu vois, l’épreuve est lourde : les expressions de tendresse et d’affection plusieurs fois répétées ravivent les sentiments paternels. […] Et voilà trois fois plus de supplices pour le père ! »

22,3c.6a.7c.9bd bois

Invitation à porter sa croix

Irénée invite tous les croyants à suivre le Christ portant le bois de la croix avec la foi d’Abraham, de la même façon qu'Isaac a porté le bois :

  • Irénée de Lyon Haer. 4,5,4 « C’est à juste titre enfin que nous, qui avons la même foi qu’Abraham, prenant notre croix comme Isaac prit le bois, nous suivons ce même Verbe. »

Typologie christologique

Origène suit l’interprétation d’Irénée, mais il introduit le thème de la résurrection :

  • Origène Hom. Gen. 6,6 « Ce fut à propos d’Isaac que la foi en la résurrection se manifesta pour la première fois. Abraham savait qu’il figurait d’avance l’image de la vérité à venir, il savait que le Christ naîtrait de sa descendance pour être offert en victime et ressusciter le troisième jour, pour le salut du monde entier […]. Isaac porte lui-même le bois de l’holocauste : c’est là une figure du Christ qui porta lui-même sa croix. »

22,5b Restez ici Prophétie Jean Chrysostome parle ici de la mission prophétique d’Abraham :

  • Jean Chrysostome Hom. Gen. 47 « Il dit aux serviteurs : “Attendez ici. Moi et l’enfant nous irons jusque là-bas, et après avoir adoré nous reviendrons vers vous.” Sachant que son sacrifice était nouveau et inouï, il le cachait aux serviteurs. Il ignorait que ses paroles se réaliseraient en vérité et il prophétisa, mais sans le savoir. »

Texte

Vocabulaire

22,10 égorger : M | V : immoler — Verbes techniques rituels

  • šḥṭ en héb. désigne l’abattage de la victime dans le cadre d’un holocauste ;
  • immolari en latin signifie d'abord « saupoudrer la tête d'une victime de sacrifice de farine sacrée », préalable dans la religion romaine à tout sacrifice animal sanglant.  

22,9c lia Hapax héb. Le verbe hébreu ‘āqad est un hapax qui a donné son nom rabbinique à la péricope (Aqéda).

Procédés littéraires

22,6–10 Narration : ralentissement du tempo Le narrateur décrit de plus en plus minutieusement ce qui se passe, retardant le moment attendu et augmentant d’autant la tension :

  • le dialogue très elliptique entre père et fils (v.6-8) souligne de manière dramatique le choix auquel Abraham est confronté ;
  • ensuite (v.9-10), le narrateur fait sentir la réticence d’Abraham dans la description détaillée des gestes de son obéissance.

Réception

Comparaison des versions

22,6b couteau : M Sam S | G V : glaive

  • M Sam : m’klt (couteau de boucherie ou de cuisine) ; S : skyn’ ;
  • G : tên machairan (un glaive court) ;
  • V : gladium.

Intertextualité biblique

22,6a le bois + sur Isaac — Typologie Isaac chargé du bois préfigure Jn 19,17, où Jésus « porte lui-même sa croix », à la différence des synoptiques où c’est Simon de Cyrène qui en est chargé (Mc 15,21 //).

22,10 Sacrifice d’enfants ? Il est question de sacrifices d’enfants en Jg 11,29-40 (fille de Jephté) ; 2R 3,27 ; 16,3 ; 17,17 ; 21,6 ; Ez 20,26.31 ; Mi 6,7. La Bible les condamne à de nombreuses reprises (Lv 18,21 ; 20,2-5 ; Dt 12,31 ; 18,10 ; Jr 7,31 ; 19,5 ; 32,35 ; Ez 16,20-21 ; 23,39). En Ex 13,2.11-15, il est question de la sanctification des premiers-nés des humains et du bétail : ils appartiennent au Seigneur, à qui on les offrira en mémoire de la mort des premiers-nés de l’Égypte. Tous les fils des Israélites sont cependant rachetés par la consécration des fils de Lévi à Dieu (Nb 3,41.44-51).

Tradition chrétienne

22,8a Dieu se pourvoira Prophétie Le thème des pouvoirs prophétiques d’Abraham (Tradition chrétienne Gn 22,5b) est de retour ici :

  • Jean Chrysostome Hom. Gen. 47 « “Dieu pourvoira lui-même à la brebis, mon fils.” Cette fois encore, Abraham prophétisa sans le savoir. […] Maintenant, reçois ton fils racheté par ton obéissance ; et vont s’accomplir tes paroles “Après avoir adoré nous reviendrons” et “Dieu pourvoira à la victime”. […] Or tout cela était figure de la croix. […] Comment l’a-t-il vu, si longtemps à l’avance ? En figure, en ombre. Car, de même qu’un bélier fut immolé pour Isaac, ainsi l’Agneau spirituel fut immolé pour le monde. Il fallait que la vérité fût unique, d’avance écrite et signifiée par l’ombre. Vois donc : de part et d’autre, un fils unique ; de part et d’autre, un bien-aimé […]. L’un est offert en holocauste par son père, l’autre est livré par son Père : “Il n’a pas épargné son propre Fils, il l’a livré pour nous tous” (Rm 8,32). »

Texte

Critique textuelle

22,13b retenu (G) Variante grecque Deux anciens traducteurs anonymes (ho hebraios kai ho suros) rendent le participe de M : ne’ĕḥāz (« retenu ») par kremamenos (« suspendu » ; au lieu de G : katechomenos « retenu »), ce qui facilite la typologie de la croix.

Réception

Comparaison des versions

22,13a derrière : M Sam | G V S : un

  • M Sam : ’ḥr ;
  • G, V et S lisent le mot hébreu ’ḥd « un », graphiquement semblable.

22,13a un buisson : M Sam S | G : une plante, un sabek | V : des ronces

  • G, θ′ et ho suros ne traduisent pas l’hébreu sᵉbak, mais le transcrivent simplement (avec d’autres voyelles : sabek). G et θ′ hasardent une interprétation en ajoutant « une plante » avant, juxtaposant ainsi deux termes équivalents.
  • Rattachant sans doute le mot à śᵉbākâ « filet » (avec sin initial), σ′ traduit diktuôᵢ (« filet, réseau de mailles ») et α′ : suchneôni (« masse drue et compacte », d’où « buisson, broussailles serrées »).
  • V : vepres.

Théologie

22,12b tu crains Dieu La crainte de Dieu est l’une des notions les plus importantes de la théologie de l’AT. C’est non seulement comme l’origine d’une expérience religieuse, mais aussi le terme décrivant la nature même de la religion. Cette crainte caractérise le véritable croyant, dans une juste relation avec Dieu. Puisque Dieu est un mysterium tremendum et fascinans, les croyants éprouvent envers lui, à la fois la crainte et la fascination. La crainte a pour origine la reconnaissance de la majesté de Dieu, Être éternel et suprême, tout-puissant et transcendant : Dieu est le tout autre. En même temps, l’homme qui croit se sent irrésistiblement attiré vers lui. C’est pourquoi la crainte de Dieu (yir’at yhwh) associe ces deux attitudes apparemment contradictoires.

La crainte de Dieu est parfois provoquée par la seule présence divine (p. ex. Gn 28,17 ; Ex 3,6). Ici la crainte d’Abraham se manifeste à travers son obéissance inconditionnelle à un ordre divin.

Texte

Grammaire

22,17a certainement Renforcement Les verbes hébreux conjugués sont renforcés par un infinitif pour insister sur le verbe ou renforcer la nuance induite par la forme employée, p. ex. ici, « je veux te bénir et je veux multiplier ».

Réception

Comparaison des versions

22,17b la porte : M | G : les villes G lit tas poleis au lieu de tas pulas (« les portes »). Les targums ont de même tous « les villes ». Les « portes » en sont une métonymie : généralement les armées d'invasion opèrent par concentration, tandis que les défenseurs sont dispersés dans chaque localité ; lorsque les portes sont prises, la conquête de toute la ville peut être considérée comme acquise.

Intertextualité biblique

22,16b tu n’as pas épargné ton fils ton unique Le don du Père céleste Rm 8,32 rapproche de l’attitude d’Abraham le don par Dieu de son Fils unique ; l’usage en G du verbe pheidomai va en ce sens. Voir aussi Jn 3,16 sur le don que Dieu fait de son Fils au monde.

Tradition chrétienne

22,17s Promesse de postérité et de bénédiction Quand le récit s’approche de sa fin, Dieu révèle à Abraham les conséquences de grandes portées de cette extraordinaire obéissance. Non seulement Abraham deviendra le père de nombreux descendants, mais sa descendance comprendra tous ceux qui croient en Jésus-Christ et sont rachetés par sa passion et sa résurrection :

  • Origène Hom. Gen. 9,1 « Si Abraham avait été seulement le père du peuple qu’il engendra dans la chair, il aurait suffi d’une seule promesse. Mais pour montrer qu’il devait être d’abord le père des circoncis de chair, il reçoit au temps de sa propre circoncision une promesse concernant le peuple de la circoncision ; puis, comme il devait être aussi le père de ceux qui “appartiennent à la foi” et obtiennent l’héritage par la passion du Christ, il reçoit, au temps de la passion d’Isaac, une promesse concernant le peuple sauvé par la passion et la résurrection du Christ. »

Tradition juive

22,2a ton fils ton unique, que tu aimes Indentification progressive

  • Gen. Rab. 45,7 « Le Saint, béni soit-Il, dit à Abraham : “Prends de grâce”, je t’en prie, “ton fils”. — "Lequel ?" dit Abraham, "j’en ai deux." — “Ton unique.” — "L’un est unique pour sa mère et l’autre aussi", répondit Abraham. — “Que tu aimes.” — "Les entrailles distinguent-elles ?" — “Isaac”, finit-il par dire le Saint, béni soit-Il. Et pourquoi ne le lui dévoila-t-il pas d’emblée ? Afin de donner à [Isaac] plus de prix aux yeux [de son père] » (cf. Rachi Comm. Tora). Islam Gn 22,1–19

22,2b offre-le là en holocauste

Avec dignité

  • Rachi Comm. Tora « Il ne lui dit pas “immole-le” parce que le Saint, béni soit-Il, ne désirait pas qu’il l’immole, mais il lui dit de le faire monter sur la montagne pour le préparer comme un holocauste. »

Isaac, sacrifice ou sacrificateur ?

  • Rabbi Levi Ben Gershom (1288-1344), Miqra’ot Gedolotad loc. « Cette parole, il est possible de la comprendre [comme exigeant] qu’il le sacrifie et en fasse un holocauste, ou [comme demandant] qu’il le fasse monter là pour faire monter un holocauste afin qu’Isaac soit éduqué dans le service du Nom, qu’Il soit exalté. Et le Nom, qu’Il soit exalté, le mit à l’épreuve : serait-il pénible à ses yeux de faire quoi que ce soit que le Nom lui commande, jusqu’à ce que, alors, il comprenne cette parole autrement que ce qu’il avait d’abord compris, à savoir qu’il avait à faire monter là un autre holocauste et non pas à sacrifier son fils ? » (cité par Wénin André, Isaac ou l’épreuve d’Abraham. Approche narrative de Genèse 22 [Le livre et le rouleau 8], Bruxelles : Lessius, 1999, 38).

Musique

18,1–33 Méditations sur le mystère de la Sainte Trinité

20e s.

Olivier Messiaen (1908-1992), Méditations sur le Mystère de la Sainte Trinité - Méditation I, 1969

Orgue : Olivier Latry

© License YouTube Standard, Gn 18,1-33

Composition

La visite des trois anges qu'Abraham salue comme un seul est une des traces précoces du mystère de la Sainte Trinité dans les Écritures. Olivier Messiaen intitule cette première partie de la Méditation « Père des étoiles », en référence à la promesse à Abraham d'une descendance plus nombreuse que les étoiles.

Théologie

22,1–19

THÉODICÉE Immoralité des patriarches ?

Dans ce récit, non seulement Abraham est mis à l’épreuve, mais notre foi aussi. Avec cet épisode, Thomas d’Aquin Sum. theol. IIa-IIae 104,4,2 met en série scandaleuse plusieurs « ordres de Dieu contraires à la vertu. C’est ainsi qu’il commanda […] aux Juifs de dérober les biens des Égyptiens (Ex 11,2) ce qui est contraire à la justice ; et au prophète Osée (Os 1,2) d’épouser une femme adultère, ce qui est contraire à la chasteté ». Il répond ainsi :

  • Thomas d’Aquin Sum. theol. IIa-IIae 104,4 ad 2 « Dieu ne peut rien prescrire de contraire à la vertu, puisque la vertu et la rectitude de la volonté humaine consistent avant tout dans la conformité à la volonté de Dieu et l’obéissance à ses ordres, encore que ses ordres puissent contredire parfois la pratique ordinaire de telle ou telle vertu. Ainsi l’ordre donné à Abraham n’alla pas contre la justice, puisque Dieu est l’auteur de la vie et de la mort ; pas plus que l’ordre donné aux Hébreux de dérober les biens des Égyptiens, puisque tout appartient à Dieu qui le donne à qui bon lui semble. Pareillement, l’ordre donné à Osée d’épouser une adultère n’était pas contraire à la chasteté, puisque Dieu est l’ordinateur de la génération humaine, et que les relations réglées par lui ne peuvent être que légitimes. »
  • L’idée est déjà présente chez Augustin d’Hippone Quaest. Hept. 7,36 « Dieu certainement a établi des lois légitimes, mais ces lois, c’est aux hommes qu’il les a imposées, et non à lui. Tout ce qu’il a prescrit en dehors de cet ordre commun, n'a pas rendu prévaricateurs ceux qui l’ont exécuté, mais ils ont été pieux et soumis : ainsi Abraham immolant son fils. »

THÉODICÉE Justice de Dieu

Abraham reçoit le fils de la promesse mais est aussi appelé à le rendre à Dieu, selon une stratégie divine fréquente dans l’AT. La mère de Moïse doit donner son fils à la fille de Pharaon (Ex 2,1-10) ; le fils d’Anne, Samuel, est consacré au sanctuaire de Silo (1S 1) ; l’enfant de David et Bethsabée meurt (2S 12). Dieu est celui d’où vient tout don parfait, mais qui du coup, a toute autorité pour le réclamer : « Le Seigneur a donné, le Seigneur a repris : que le nom du Seigneur soit béni ! » (Jb 1,21).

  • Thomas d’Aquin Sum. theol. Ia-IIae 94,5 ad 1 « Tous les hommes, tant coupables qu’innocents, meurent de mort naturelle. Cette mort est voulue par la puissance divine […] selon 1S 2,6 : "C’est Dieu qui fait mourir et qui fait vivre." C’est pourquoi la mort peut être infligée sans aucune injustice par ordre de Dieu, à n’importe quel homme, coupable ou innocent. »

Mais cette justice trouve son accomplissement dans le mystère pascal survenu en Christ :

  • Irénée de Lyon Haer. 4,5,4 « Car, en Abraham, l’homme avait appris par avance et s’était accoutumé à suivre le Verbe de Dieu : Abraham suivit en effet dans sa foi le commandement du Verbe de Dieu, cédant avec empressement son fils unique et bien-aimé en sacrifice à Dieu, afin que Dieu aussi consentît, en faveur de toute sa postérité, à livrer son Fils bien-aimé et unique en sacrifice pour notre rédemption. »

THÉOLOGIE SPIRITUELLE Pédagogie divine

Malgré les apparences, Dieu n’est pas contradictoire. Il est au contraire très conséquent dans sa pédagogie vis-à-vis d’Abraham. Il l’amène, peu à peu, mais sans l’y forcer, à une obéissance qui émane de sa liberté intérieure. Celle-ci consiste à écouter la voix de Dieu, plutôt que de vouloir « épargner » le don en le gardant pour soi. Cette liberté accorde l’homme avec Dieu et avec sa bénédiction surabondante. C’est alors que l’alliance s’accomplit, comme le souligne le commentaire du nom Moriyya, qui suggère l’échange de regards entre Dieu et Abraham (cf. Ex 24,10-11).

CHRISTOLOGIE

Dieu demande à Abraham le sacrifice de son fils Isaac, comme une préfiguration du sacrifice qu’il ferait lui-même de son propre fils, Jésus, en faveur des enfants d’Abraham. Ce qu’il n’a finalement pas demandé à Abraham, Dieu l’a fait pour l’Église. Abraham prophétise donc (Tradition chrétienne Gn 22,8a), lorsqu’il répond à la question d’Isaac en affirmant que Dieu pourvoira au sacrifice : il donne non seulement le bélier au mont Moriyya, mais aussi son fils au mont Golgotha. →L’agonie de Jésus et la ligature d’Isaac 

Usage dans la controverse sur le traitement réservé aux Indiens d’Amérique

Au 16e s., l’évêque Bartolomé de Las Casas cite Gn 22,1-19 dans la controverse qui l’oppose à Juan Ginés de Sepulveda. Ce dernier considérait légitime la conquête de l’Amérique et l’asservissement des Indiens, qu’il tenait pour barbares en raison des sacrifices humains pratiqués dans leur religion. Dans le débat mené à Valladolid contre les thèses de ce théologien et bien qu’il tînt lui aussi pour une erreur les sacrifices humains, Las Casas défendit les actions des Indiens en raison de leur ignorance invincible :

  • Bartolomé de Las Casas Apología f. 154-161 « Dans les limites de la lumière de la raison naturelle, là où la loi humaine ou divine n’est plus en vigueur, et, ajouterions-nous, là où manquent la grâce et la doctrine, les personnes doivent immoler des victimes humaines au vrai Dieu ou au Dieu tenu pour véritable » étant donné que le bien le plus précieux est celui de « la vie humaine ».

Les arguments bibliques utilisés par Las Casas sont celui du sacrifice (manqué) d’Isaac et celui du sacrifice (réalisé) de la fille de Jephté (Jg 11,29-40) :

  • Bartolomé de Las Casas Tratados de 1552 f. 49-51 « Pourquoi Dieu a-t-il demandé à Abraham qu’il lui sacrifiât son fils ? Au-delà du grand mystère qu’il a voulu signifier, et la preuve d’obéissance qu’il a voulu demander à son serviteur, c’était aussi pour nous faire comprendre que tout ce qui existe lui est dû, et que, si à la fin il ne permit pas qu’il fût sacrifié, ce fut par une marque de son infinie bonté et par compassion envers Isaac. Ce motif apparaît dans le cas de Jephté, lequel sacrifia sa fille pour accomplir le vœu qu’il avait prononcé. Jephté en vint à réaliser cette action quoique sans faire preuve de discernement, car il avait vu que Dieu avait demandé un sacrifice semblable à Abraham. »

Tradition chrétienne

22,9c lia Isaac La crucifixion

  • Dans le contexte liturgique de Pâques, Méliton de Sardes Pascha 69 écrit dans une célèbre homélie : « C’est [le Christ] qui est la Pâque de notre salut. C’est lui qui supporta beaucoup en un grand nombre : c’est lui qui fut en Abel tué, en Isaac lié. »

Neuf cents ans plus tard, ce thème est repris par Rupert de Deutz :

  • Rupert de Deutz Trin. In Gen. 6,32 « Le Christ est immolé, et cependant il demeure impassible et vivant, de même qu’Isaac fut immolé, mais que le glaive ne l’atteignit pas. »

Tradition juive

22,13a bélier Réalité protoctiste Cet animal est mentionné avec les dix choses créées par Dieu dès l’aube du monde.

  • m. ’Abot 5,6 « Dix choses furent créées à la veille du sabbat [de la création], au crépuscule. Ce sont : (1) l’ouverture de la terre [qui engloutit Corah et son camp, Nb 16,32], (2) l'ouverture du puits [qui abreuva les enfants d’Israël dans le désert, Nb 21,16-18], (3) la bouche de l’ânesse [de Balaam, Nb 22,28-30], (4) l’arc-en-ciel [Gn 9,13], (5) la manne, (6) le bâton [de Moïse], (7) le chamir [pierre, ou ver, qui servit à tailler la pierre sans utiliser de métal lors de la construction du Temple], (8) les lettres [de l'alphabet] ; (9) l'écriture ; (10) les tables [gravées avec les commandements]. Quelques-uns ajoutent : les mauvais esprits, la tombe de Moïse et le bélier d’Abraham notre père. D’autres ajoutent encore : que les premières tenailles [de l'homme] furent confectionnées à l'aide des tenailles créées [par Dieu à ce moment]. »

La « Prière de Joseph », apocryphe cité par Origène, fait également d'Abraham et d'Isaac des entités protoctistes :

  • Origène Comm. Jo. 2,25 (2§189, sur Jn 1,6) : « [...] je [= Jacob] suis un ange de Dieu et un esprit primordial ; Abraham et Isaac ont été créés avant toutes choses ; [...] je suis le premier-né de tout vivant, vivifié par Dieu. »

Contexte

Repères historiques et géographiques

18,1–16 Localisation des chênes de Mambré

Chênes de Mambré, (numérique, Jérusalem : 2022)

M.R. Fournier © BEST AISBL, Gn 18,1-16

Toponymie

Gomorrhe, Hébron, Bersabée, Béthel, Sichem, Salem, désert de Çin, désert de Shur, Négeb.

Réception

Tradition chrétienne

18,1–8 Interprétations typologiques  de l'Hospitalité d'Abraham

Typologie trinitaire

Saint Ambroise expose la typologie de l’hospitalité d’Abraham dans le panégyrique de son frère Satyre ; pour l’évêque de Milan, c’est bien une figure du Dieu Trine qu’a vue le patriarche,Trinitatem in typo vidit, ce que confirment à la fois les trois mesures de farine et le veau unique qu’il leur offre :

  • Ambroise de Milan Exc. II ; trad. Pdf 84), 96 « Abraham, prêt à recevoir ses hôtes (cf. Gn 18,1-8), croyant en Dieu, plein d’ardeur pour son mystère, tout disposé à son devoir, a vu la Trinité en figure ; il a enrichi l’hospitalité par la piété ; il en a accueilli trois,mais en a adoré un. Tout en sauvegardant la distinction des personnes, il les appelait un seul Seigneur ; offrant aux trois l’honneur d’un présent, il marquait en même temps l’unité de puissance. Ce n’était pas la doctrine mais la grâce qui parlait en lui et sa foi, qu’il n’avait pas reçue comme un enseignement, était meilleure que la nôtre,nous qui en recevons l’enseignement. Personne n’avait encore altéré l’image de la vérité ; c’est pourquoi il voittrois personnes et vénère l’unité. Il prend trois mesures de fleur de farine ; il immole un seul veau, croyant qu’il suffit d’un seul sacrifice mais qu’il faut rendre un culte aux trois personnes : une seule offrande et la faveur de trois personnes » (PL 16 [1845]/ 1342CD).

Dans son De Abraham, Ambroise s’est moins étendu sur la figure, s’appliquant principalement à tirer la leçon morale de l’hospitalité d’Abraham, et renvoyant pour le reste à son ouvrage précédent. Il souligne tout de même en quelque mots que les trois hommes sont une manifestation de la Sainte Trinité.

  • Ambroise de Milan Abr. I, V, 33.37  « Il leva les yeux et voici que trois hommes se tenaient debout à côté de lui. À leur vue, il courut à leur rencontre (Gn 18,2). Vois d’abord le mystère de la foi. Dieu lui est apparu et il a vu trois personnes. Celui à qui Dieu manifeste sa splendeur voit la Trinité, il ne reçoit pas le Père sans le Fils, il ne professe pas le Fils sans l’Esprit Saint. Cela a été développé ailleurs » (PL 14 [1845]/435A-B ; 436D-437A ; trad. Pdf 74).

Dans ses Allégories, saint Isidore rappelle cette interprétation traditionnelle de l’apparition mystérieuse de trois « anges » à Abraham au chêne de Mambré :

  • Isidore de Séville, Allegoriæ 21 (104A) « Les trois Anges venant à la rencontre d’Abraham (Gn 18,2) évoquent l’action divine de la Trinité dansl’histoire. »

Typologie christologique : la Transfiguration

Cependant, dans ses Questions sur l’Ancien Testament, probablement d'une dizaine d’années postérieures aux Allegories, l’évêque de Séville s’en tient à une interprétation strictement christologique : comme lors dela Transfiguration, les trois hommes que vit Abraham étaient une figure du Christ accompagné de Moïse et d’Élie. Et, s’appuyant sur le témoignage de Jésus dans l’Évangile (Jn 8,6, il ajoute qu’Abraham a connu la réalité de cette figure :

  • Isidore de Séville, Quæst. in Vet.Test., in Gen., cap. XIV, 5-6 « En ces trois hommes qui vinrent à Abraham, se trouvait préfiguré l’avènement du Seigneur Jésus-Christ ; il était accompagné de deux anges, en lesquels la plupart voient Moïse et Élie. Le premier, législateur de la loi ancienne, qui par cette même loi a indiqué l’avènement du Seigneur ; l’autre qui doit venir à la fin du monde, afin d’annoncer le second avènement du Christ et de prêcher son Évangile aux Juifs. C’est la raison pour laquelle,lorsque le Seigneur se fut transfiguré sur la montagne, Moïse et Élie furent tous deux vus avec lui par les apôtres(cf. Mt 8,2-3 ; Mc 9,3-4 ; Lc 9,29-31). [...] Quant au fait qu’Abraham, voyant trois personnes, en adora une seule : c’est qu’il montrait le Seigneur Sauveur, dont il attendait l’avènement, selon ce que le Seigneur lui-même dit dans l’Évangile : Abraham a cherché àvoir mon jour ; il l’a vu, et il s’est réjoui (Jn 8,56). C’est qu’en effet il a alors contemplé le mystère dusacrement à venir » (PL 83/ 243C-D). 

C'était la lecture des plus anciens Pères de l’Église. 

  • Tels Justin le Martyr, considérant que, dans la suite du récit, Lot parle au pluriel à deux des visiteurs célestes, tandis qu’Abraham continue à parler à celui qu’il appelle encore « Seigneur », dans sa prière d’intercession, ils comprennent la vision des trois hommes comme celle du Verbe de Dieu accompagné de deux anges. C’est l’origine de l’interprétation christologique de la scène de Mambré, selon laquelle Abraham aurait eu la révélation du mystère de l’Incarnation du Fils de Dieu (selon la parole mystérieuse de Jésus en Jn 8,56 : « Abraham a exulté dans l’espoir de voir mon Jour : il l’a vu et il a été transporté de joie »).

Typologie ecclésiologique 

Ambroise dans son De Abraham, remarque que les trois mesures de farine cuites par Sara sont un rappel de la même figure, Sara la stérile étant en ce cas elle-même une figure de l’Église, selon le texte d’Isaïe (Is 53,1) que saint Paul a lui-même appliqué à Agar (Ga 4,27), et qui fut inlassablement repris par les Pères de l’Église ; quant aux galettes « cuites sous la cendre », elles sont la figure du mystère de la foi :

  • Ambroise de Milan Abr. I, V, 38 « Pétris trois mesures de farine et cuis des galettes (Gn 18,6). En grec on les appelle evgkru,fia, c’est-à-direcachées sous la cendre, parce que tout mystère doit être caché, presque enseveli dans le silence de la foi : pour ne pasêtre divulgué à la légère à des oreilles profanes. […] Sara résume le mystère de la foi : en prenant trois mesures de lamême farine, elle est la figure de l’Église à qui il est dit : Réjouis-toi, stérile, toi qui n’enfantes pas : éclate en cris dejoie et d’allégresse, toi qui n’accouches pas (Is 53,1). Voici ce qui constitue la conviction intime de l’Église : elleaffirme la Trinité d’une même divinité, elle adore également et avec le même respect le Père, le Fils et le Saint-Espritqu’elle célèbre dans l’unité de leur majesté, tout en distinguant le caractère propre des personnes. Pétris ta piété enaffirmant ta foi de cette façon » (PL 14 [1845]/435A-B ; 436D-437A ; trad. Pdf 74).

Liturgie

18,1–8 ICONOGRAPHIE L'hospitalité d'Abraham, révélation trinitaire et christologique — ou : Comment écrire l'icône de l'Indescriptible ?  La « Philoxénie d’Abraham » ou  « Trinité de l’Ancien Testament » constitue une icône à part, dont les canons iconographiques, comme la théologie, ont mis des siècles à s’affirmer, pour culminer dans la déclaration du « Synode des cent chapitres » (1551, Moscou). Ce synode affirmait que l’interprétation christologique de l’icône dite de « la Trinité selon Théophane-le Grec » devait être abandonnée, tandis que celle de Roublev, proclamée « l’icône des icônes », devait être désormais le seul modèle admissible d'une icône de « la Trinité », lisant la Trinité du Nouveau Testament en esquisse typologique dans la théophanie de Mambré.

1 — Prodromes dans l'art byzantin : les mosaïstes du 5e s.

Anonyme, L'hospitalité d'Abraham, (mosaïque, ca. 432-440)

Nef centrale, mur gauche, Basilique de Santa Maria Maggiore, Rome © Wikicommons

C'est sans doute la plus ancienne représentation (avec celle de Ravenne) sur ce thème.
  • Le registre supérieur représente Gn 18,2 Abraham vit les trois hommes, « courut à leur rencontre de la porte de sa tente, et adoré jusqu'à la terre. » L'artiste s'efforce de faire comprendre au spectateur que les hommes qu'approche Abraham représentent la Trinité. Tous les trois ont des auréoles, toges et cheveux identiques. La figure centrale rayonne la lumière à l'intérieur d'une mandorle, et ses pieds ne touchent pas le sol. On a peut-être là un très ancien témoin de l’exégèse à la fois christologique et trinitaire de Gn 18,1-15 : Abraham a vu trois hommes, dont l’un figurait le Verbe, en gloire entre deux anges. 
  • Dans le registre inférieur, sur la gauche, Abraham a ordonné à Sarah de faire des pains pour les visiteurs. À droite, il leur apporte un veau rôti.
  • L'arrière-plan de la figure d'Abraham et de Sarah est relativement naturaliste, tandis que le fond derrière les visiteurs est d'or, soulignant encore que malgré ce que ses yeux lui montrent, Abraham voit Dieu lui-même.
Divers éléments donnent à la scène un cadre liturgique
  • Le veau de Gn 18,7, où Abraham « courut au troupeau et prit un veau tendre et parfait », rappelle celui de Lv 9,2, où Moïse dit à Aaron « prends du troupeau un veau comme offrande pour le péché et une chèvre comme un holocauste, chacun immaculé, et offre-le au Seigneur ».
  • La structure derrière Sarah est bien plus que la « tente » de Gn 18,1. La mosaïque la présente de façon à rappeler au spectateur à la fois une église chrétienne et le temple de Jérusalem. Comme le temple représenté dans l'arche absidiale de la basilique à quelques mètres, la structure a un toit de tuiles en forme de touffe et une paire de rideaux à l'arrière de la porte. Mais comme une église, il y a une croix dans le fronton.
  • Aux pieds des trois visiteurs, sous la table, se trouve le bassin d'eau qu'Abraham a fourni pour pouvoir se laver les pieds. (Cf. He 13,1)
Cette représentation peut être la source des deux types d’icônes intitulés plus tard « Trinité »

En effet, les deux scènes, l’une christologique, l’autre trinitaire, sont superposées :

  • la révélation, faite à Abraham, dans la plaine de Mambré, de l’incarnation future du Fils de Dieu (le personnage central tend la main vers l’offrande d’un veau sacrifié, si petit qu’on dirait l’agneau pascal) 
  • celle du mystère de Dieu Un et Trine (chacun des voyageurs est distinct dans ses gestes et, devant chacun d’eux, sur une table-autel, se trouve une galette d’offrande, préparée par Sara, en forme de triangle parfaitement isocèle).

2 — L’expression « Trinité » pour désigner « l’hospitalité d’Abraham »

semble apparaître, d'abord de façon implicite, dans les églises rupestres de Cappadoce, au 11e s.

  • En effet, à Karanlik Kilissé, les Anges que reçoivent Abraham et Sarah ont des nimbes crucifères.
  • À la même époque, la miniature d'un Psautier du British Museum (de 1066) porte, au-dessus de cette scène, l'inscription grecque : « La Sainte Trinité ».
  • Et dans une miniature du Psautier de la Bibliothèque du Patriarcat de Jérusalem, également du 11e s., les trois Anges sont séparés d'Abraham par toute la largeur du texte.
  • En Russie, la désignation de cette image par le nom de « Sainte Trinité » semble apparaître pour la première fois au au 13e s. sur un pectoral (Musée Historique de Moscou).

Pourtant, encore au au 16e s., en Grèce, voisinent les deux variantes du nom de l'icône : « l'Hospitalité d'Abraham » et « la Sainte Trinité ». Il est remarquable que les icônes de type christologique, aient gardé le titre de « Trinité ».

3 — La Trinité de Théophane le Grec (14s.)

Théophane le Grec (ca 1350 - ca 1410, maître de Roublev), La Trinité, (fresque, 1378), Hospitalité d'Abraham

Église de la Transfiguration-du-Sauveur-sur-Iline, Novgorod, Russie, in situ © Wikicommons

Le contenu de l’image est christologique

L’ange central est le Verbe de Dieu qui doit s’incarner dans la personne du Christ Jésus, lequel nous révélera le Père et nous enverra l’Esprit, après sa Résurrection, lors de la Pentecôte. C’est pourquoi il a les ailes si largement déployées, tandis que les deux autres anges ont les ailes rabattues. Il a plus d’importance que les deux anges qui l’encadrent ; il a un nimbe crucifère, lui seul, et il tient le rouleau des Écritures qu’il vient accomplir : la révélation faite à Abraham et Sara – personnage que l’on aperçoit dans la scène du bas, presque effacée, laquelle retraçait la préparation du veau sacrifié – (révélation) de la future incarnation rédemptrice de la seconde Personne de la Trinité et la promesse d’une descendance messianique.

Une « Trinité » interdite

Le titre de l’icône (la Trinité) pouvait dès lors faire croire à l’inégalité des trois Personnes divines, c’est pourquoi cette représentation fut finalement interdite lors du Concile des cent chapitres ; en effet, des hérésies trinitaires avaient surgi niant la divinité de telle ou telle personne divine.

4 — La célèbre Trinité d'Andreï Roublev (15e s.)

Andreï Roublev (1410-1427), Philoxénie ou Hospitalité d'Abraham, dite Trinité de l'Ancien Testament, (tempera sur panneau de bois, ca.1410-1427)

les trois anges sous le chêne de Mambré, 150 × 100 cm, Icône, Russie, Galerie Tretiakov - Moscou © Wikicommons

Trinité, vraiment ?

Il ne s’agit pas d’une icône de « la très sainte Trinité » en elle-même, évidemment impossible, puisque Dieu est pur Esprit, invisible, incirconscrit, « l’Au-delà de tout » (Grégoire de Nazianze). Ce mystère ayant une importance primordiale dans la foi chrétienne, réclame une particulière prudence dans la compréhension de son contenu théologique, à la base de son expression picturale. Il fallut des siècles et plusieurs conciles œcuméniques  pour fixer le dogme : le Dieu Un et Trine possède une unique nature en trois « Hypostases » ou Personnes distinctes. 

Les représentations iconographiques reflètent ce lent développement du dogme, face aux hérésies.  Il s’agit plutôt ici de l’interprétation trinitaire d’une théophanie mystérieuse où Dieu s’est fait connaître à Abraham et Sara, à Mambré, sous la forme d’une apparition subite de trois jeunes hommes, qu’Abraham a salués comme « un seul », du titre de « Seigneur » ; puis il leur a servi un repas, et « le Seigneur  » lui a promis un fils né de Sara. Abraham est « l’ami de Dieu » et donc finit par bien Le connaître (cf. Jn 15,15).

L'exégèse chrétienne lit dans la visite des trois voyageurs à Abraham une manifestation de la Sainte Trinité (cf.  Tradition chrétienne) — donnant un sens profond et presque ironique à la parole de Dieu en ce même récit : « Vais-je cacher à Abraham ce que je fais ? » (Gn 18,17).

Ainsi donc « les trois Anges ne représentent pas la Trinité au sens habituel de ce terme : ils permettent à l'esprit du croyant de prendre appui sur une image tirée de la Sainte Écriture pour arriver à la contemplation du mystère de la Trinité » (Georges DrobotIcône et Tradition n°3).

Le génie de Andreï Roublev, ou la mise au jour de la possibilité d'une icône du Dieu Trinitaire

Réalisation de style inégalable que fit Saint Andreï Roublev (1370-1430), moine moscovite du début du 15e s., à la demande de l’higoumène Nikon, proche disciple de saint Serge de Radonège, pour la cathédrale de la Trinité du monastère de la « Trinité-Saint-Serge ». Roublev fut très lié au mouvement spirituel dirigé par saint Serge de Radonège (1332-1392) qui insistait sur les valeurs de fraternité, de communion, d’unité et de concorde, ainsi que sur la « prière spirituelle » et contemplative. D’après le biographe de Serge, ce dernier fit bâtir l’église de la Trinité « afin que, par la contemplation de la sainte Trinité, l’odieuse division de ce monde fût vaincue. » Effectivement, à cette époque, l’icône de « la Trinité de l’Ancien Testament » répondait à un besoin dogmatique face aux hérésies comme celle des « bogomiles », des « cathares » ou des « strigolniki » qui n’admettaient pas l’égalité des personnes divines et prétendaient qu’à Mambré, Abraham avait offert l’hospitalité au Seigneur, accompagné de deux anges, mais non pas à trois envoyés figurant la Trinité sainte.  On raconte qu’ à ses jours de repos, l'humble moine A. Roublev restait assis pendant des heures en contemplation devant une icône de la « Trinité », et « comment cette lumière immatérielle et divine pénétra un jour son âme, le comblant de joie indicible, divine, car il voyait désormais ce qu'il devait peindre pour exprimer la connaissance de l'Être un et trine de Dieu ».

  • sa nature Une, et ses trois Hypostases distinctes seraient signifiées par les Trois envoyés célestes à la fois identiques par leur aspect ;
  • caractérisés par leurs relations mutuelles de communion (de circumincession), exprimée dans leur positions et leurs regards, dans un mouvement de circulation de vie et d’amour,et en même temps distincts, ceci étant signifié notamment par les couleurs différentes de leurs vêtements respectifs. Ce détail mérite d'être souligné contre la tendance de bien des imitateurs modernes de l'icône qui croient devoir souligner l'unité des trois Personnages en leur peignant des vêtements de même couleur, comme pour clarifier le propos, contre le sens de la différence maintenu par exemple par Basile de Césarée Lib. De Spiritu Sancto # 45, PG 32, col.149B ; Jean Damascène Fid. orth. 1,8 PG 94, col. 828-829). 
  • Le cadre resterait celui de Mambré mais réduit à un seul chêne, pouvant symboliser l’arbre de vie dont l’accès nous sera rouvert par l’arbre de la Croix ; la maison signifiant à la fois la tente d’Abraham et Sara et le symbole de la demeure ; le rocher serait symbolique aussi puisqu’il est un Nom de Dieu : Le Seigneur est le rocher, et ce symbole peut aussi s’appliquer à chaque Personne distincte, d’après l’Écriture.
  • Enfin, la coupe du salut (Cf. V-Ps 115 ) qui occupe la place centrale et serait de très grandes proportions, symbolisant, sous une évocation à peine ébauchée du veau tendre offert par Abraham, la coupe eucharistique qui rassemble dans l’unité les enfants de Dieu dispersés. La coupe serait offerte sur un autel, en forme de table ou de tombeau, qui présente sur sa face antérieure le loculus contenant les reliques des martyrs dans la liturgie chrétienne. La composition reflète le dogme : le cercle de la vie divine communiquée s’inscrit dans un octogone, figure du chiffre parfait. Les ailes coupées montrent le peu d’importance théologique de leur représentation, qui est tardive pour désigner les esprits angéliques.  
Unité du symbolisme pictural et du symbolisme verbal dans la liturgie
  • Georges Drobot Icône et Tradition n° 3 « Grâce à une solution graphiquement parfaite, le bienheureux iconographe nous présente comme une Unité constituée d'Hypostases différentes, ce que nous dit constamment l'Église dans ses doxologies : "Nous te rendons gloire, ô Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit...", [Dieu Un] et que la prononciation des paroles consécutives semble diviser. »

Arts visuels

22,1–18 L’Aqéda a une force dramatique qui se prête aisément à la représentation visuelle. La peinture occidentale n’a pas cessé de représenter la scène de la ligature (mais aussi les épisodes qui la précèdent : la marche, l’arrêt avec les serviteurs, …). Textes anciens Gn 22,1–19

Durant l’Antiquité

On trouve de nombreuses représentations juives et chrétiennes de l’Aqéda, qui éclairent l’interprétation du passage en question. Grégoire de Nysse Deit. (PG 46,572-573) et Augustin d'Hippone Faust. 22,73 témoignent de leur importance pour les fidèles.

L’art funéraire chrétien

offre les représentations les plus anciennes de la péricope : les Catacombes de Saint-Callixte et celles de Priscille à Rome (toutes deux du 3e s.). Les peintures des catacombes ne sont pas typologiques et soulignent toujours l’aspect de délivrance. Les représentations de l’Aqéda sur des sarcophages chrétiens introduisent des détails extrabibliques tels que la présence de quelques curieux ou de Sara. L’exemple le plus ancien est le Sarcophage de Sainte-Quitterie à Aire-sur-l’Adour (4e s.).

Le sacrifice d'Abraham et la guérison du Paralytique, (4e s.), Sarcophage de sainte Quitterie, Crypte de l'église de Sainte-Quitterie (Aire-sur-l'Adour), © CC BY-SA 4.0→

Le sacrifice d’Isaac des mosaïques de San Vitale et de Sant’Apollinare in Classe (basiliques de Ravenne, 6e s.) est représenté dans un contexte liturgique clairement relié à l’Eucharistie. Abraham est représenté à côté d’Abel et de Melchisédech. Le sacrifice de son fils préfigure le sacrifice parfait du Christ.

Les représentations juives

se trouvent principalement dans des synagogues. La plus ancienne est celle de Doura Europos (245 ap. J.-C.) où la scène est représentée sur le fronton de la niche centrale où se trouve l’armoire de la Tora, près d’une représentation du Temple, ce qui souligne le lien entre l’Aqéda, la Tora et le culte du Temple. La fresque de Doura Europos montre aussi la première image de la main de Dieu. Arts visuels Gn 11,27–25,11

L’Aqéda de la synagogue de Beit Alpha (ca. 520) représente Isaac comme un petit enfant sans défense, et donne la prééminence au rôle joué par le bélier dans l’histoire. Ces deux détails, Isaac représenté comme un enfant et le rôle important joué par le bélier, diffèrent de la tradition scripturaire et témoignent du développement de l’Aqéda dans la théologie juive.

 L'Akedah, (Mosaïque, 6e s.) Synagogue de Beit Alpha, © Domaine public→

Au Moyen Âge

Le sacrifice d’Abraham fait partie du programme iconographique de nombreux édifices sacrés. Par exemple, au pied-droit gauche du portail central de la cathédrale de Chartres (1205-1240), Abraham et Isaac (un peu comme un martyr et son attribut) regardent tous les deux dans la même direction, écoutant la parole de Dieu et contemplant le mystère accompli en Christ (de même le portail ouest de la cathédrale de Senlis et le chapiteau du cloitre de Moissac).

Parmi les œuvres de sculpteurs connus, remarquable est « Le sacrifice d’Isaac » de Donatello (ca. 1418, marbre, Museo dell’Opera del Duomo, Florence), présentant Abraham debout s’apprêtant à lever son couteau sur son fils à genoux qu’il tient par la tête serré contre lui. Un siècle plus tard, Le sacrifice d’Isaac par Alonso Berruguette (1526-1532, bois polychrome, Musée National des sculptures religieuses, Valladolid) reprendra la même composition, mais avec un mouvement quasi expressionniste : Abraham la tête renversée comme pour ne pas voir ce qu’il va faire, ou bien dans un instant de supplication criée vers Dieu, tient Isaac par les cheveux.

Alonso Berruguete , Le sacrifice d'Isaac, (Bois polychrome, 1526),  retable du monastère de Saint-Benoît - Valladolid, Museo Nacional de Escultura (Valladolid), © Domaine public→ 

L’histoire d’Abraham de Lorenzo Ghiberti (1425-1452, bas-relief en bronze doré, baptistère de Florence)  inscrit la scène dans son contexte narratif complet, depuis l’annonciation par les trois anges.

Sans parler des innombrables gravures sur bois, de nombreuses enluminures, tant chrétiennes que juives, représentent le sacrifice d’Abraham. Particulièrement remarquable est la double enluminure du Miroir de l’humaine salvation (France, milieu du 15e s., BNF, Manuscrits, français 188, f. 26 v°) mettant en regard Isaac portant le fagot derrière Abraham (l’épée à l’épaule et le feu à la main) et le Christ portant sa croix ; de même, un siècle plus tôt, une page des Très belles Heures de Notre-Dame de Jean de Berry (vers 1400, enluminure sur parchemin, Museo Civico d’Arte Antica, Palazzo Madama, Turin).

À la Renaissance

On peut signaler le très sculptural Sacrifice d’Isaac d’Andrea Mantegna (ca. 1490/1495, huile sur toile, Kunsthistorisches Museum, Vienne), qui présente un Isaac à la taille d’un enfant comparée à celle de son père, mais à la morphologie d’adulte.

À l’âge classique

Les plus grands peintres italiens ont exploité ce thème, en particulier Le Titien et Le TintoretLe Caravage traite au moins deux fois Le sacrifice d’Isaac, en 1601-1602 (huile sur toile, Galerie des Offices, Florence) puis en 1605 (huile sur toile, Piasecka-Johnson Collection, Princeton). Il y saisit le moment du sacrifice et de l’intervention de l’ange, et offre un jeu de lumières spectaculaire (contre-jour presque complet dans la toile de 1605), qui souligne le pathos de la scène et introduit le spectateur à l’intérieur du drame. L’artiste représente avec une grande maîtrise les émotions des trois personnages : un Abraham docile mais perplexe, un Isaac horrifié et un ange déterminé qui montre le bélier de son doigt. La douceur du bélier et le paysage paradisiaque du fond tranchent avec la tragédie personnelle d’Abraham.

Le Caravage, Le sacrifice d'Isaac, (1602)

Galerie des Offices, Florence, © Domaine public→ 

Le Caravage , Le Sacrifice d'Isaac, (1605),  Princeton, États-Unis © Domaine public→

Un siècle plus tard, l’Autrichien Franz Anton Maulbertsch (1724-1796), Le sacrifice d’Isaac (huile sur toile, Musée des beaux-arts, Budapest) a également recours à un jeu de lumière extrêmement contrasté, focalisant toute l’attention sur le corps nu immaculé d’Isaac, alors qu’un Abraham au visage déterminé brandit le couteau, difficilement retenu par l’ange.

Rembrandt, Le sacrifice d’Abraham (huile sur toile, 1635, Musée de l’Hermitage, Saint-Pétersbourg) et Laurent de la Hire, Abraham sacrifiant Isaac (huile sur toile, 1650, Musée Saint-Denis, Reims) insistent sur l’innocence d’Isaac, aveuglé par la main de son père et au corps blanc comme une hostie, tandis que l’arme tombe de la main d’Abraham interpellé par l’ange.

Rembrandt, Le Sacrifice d'Isaac, (1635), Musée de l'Ermitage - Saint Petersbourg,© Domaine public→ 

Au 19e siècle

William Blake, Abraham Preparing to Sacrifice Isaac (Genesis, XXII, 9-12) (ca. 1783, dessin à l’encre et aquarelle sur papier, Museum of Fine Arts, Boston), montre un Abraham entourant Isaac de bras protecteurs n’osant pas lever le couteau et levant craintivement les yeux vers le ciel comme s’il attendait vraiment confirmation, ou comme si l’ange venait de lui parler. Littérature Gn 22,1–19

Au 20e siècle

Marc Chagall a traité plusieurs fois le récit du sacrifice d’Abraham. Le sacrifice d’Isaac de 1960-1966 (huile sur toile, Musée national, Nice) donne par son style onirique un sens universel au sacrifice d’Isaac. Il introduit en arrière-plan une scène de la Shoa ainsi qu’une silhouette portant une croix, poursuivant ainsi la tradition iconographique qui relie l’Aqéda d’Isaac avec la crucifixion de Jésus (→L’agonie de Jésus et la ligature d’Isaac), tout en montrant également l’universalité de la douleur d’Abraham. Non seulement l’Église et la Synagogue trouvent dans l’Aqéda un symbole puissant des mystérieuses relations entre Dieu et les croyants, mais aussi chaque génération du genre humain peut s’identifier avec Abraham dans cette dramatique nécessité de choisir entre deux valeurs qui semblent irréconciliables. Chagall reprit le thème sur des vitraux de l’église Saint-Étienne de Mayence entre 1976 et 1981.

Parmi bien des reprises actualisantes du récit de la ligature d’Isaac, on peut citer :

  • George Segal, Sacrifice of Isaac (sculpture, 1979, Princeton University, Princeton), commandée par la Kent State University pour commémorer les quatre étudiants tués lors des manifestations contre la guerre au Vietnam le 4 mai 1970 ;
  • Albert J. Winn, Akedah (photo, 1995, Jewish Museum, New York) ; Isaac est représenté par un malade séro-positif).

Enfin, dans des genres plus populaires,

  • le péplum de John Huston, The Bible: In the Beginning (1966, avec George C. Scott, Ava Gardner et Peter O’Toole), se termine par le sacrifice d’Isaac : Abraham y remet en question la voix qui ordonne de sacrifier son fils, montrant son angoisse et même sa colère.

La bande dessinée elle-même s’est approprié le récit :

  • Le premier album de la série Testament de Douglas RushkoffAkedah (Vertigo Books, 2006), s’ouvre sur l’histoire d’Abraham et d’Isaac. Il interprète la demande divine comme une illusion dont Abraham est victime de la part du Moloch cananéen et illustre le changement dans la conception de Dieu qui commence avec ce récit. En parallèle actualisant, il raconte l’histoire d’Alan Stern qui sauve son fils Jake d’une armée au service d’un gouvernement tyrannique.